Projet ITER : Une coopération internationale unique

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°749 Novembre 2019
Par Sergio ORLANDI
Par Bertrand ROQUES

le pro­jet ITER est l’un des pro­jets les plus ambitieux au monde dans le domaine de l’énergie. Ren­con­tre avec Ser­gio Orlan­di, chief exec­u­tive engi­neer et Bertrand Roques, head of field engi­neer­ing instal­la­tion divi­sion, qui nous en dis­ent plus sur le con­texte autour de ce pro­jet et les ambi­tions de ce dernier.

Pouvez-vous nous rappeler le contexte autour du projet ITER ?

Le pro­jet ITER est une coopéra­tion sci­en­tifique inter­na­tionale unique qui engage 35 pays dans le domaine de la fusion nucléaire : les 28 pays de l’Union européenne et la Suisse, l’Inde, le Japon, la Corée, la Chine, la Sussie et les États-Unis. Ces 7 parte­naires, ont mis en com­mun leurs ressources pour réalis­er la con­struc­tion d’un réac­teur de recherche civ­il de fusion nucléaire à Cadarache, dans le départe­ment des Bouch­es-du-Rhône, en France. Les études de con­cep­tion de cette instal­la­tion ont démar­ré en 1988, suiv­ies par des phas­es d’études tech­niques de plus en plus pré­cis­es jusqu’à la val­i­da­tion de la con­cep­tion défini­tive par les mem­bres d’ITER en 2001.
L’accord ITER a été offi­cielle­ment signé le 21 novem­bre 2006 par les sept mem­bres d’ITER.

Quelles sont les ambitions du projet et quelles sont ces principales caractéristiques ?

L’objectif du pro­jet est avant tout de démon­tr­er la fais­abil­ité sci­en­tifique et tech­nologique de la pro­duc­tion d’énergie par fusion nucléaire. Pour cela, env­i­ron 3 000 per­son­nes se sont mobil­isées pour con­stru­ire la machine de fusion nucléaire par con­fine­ment mag­né­tique la plus puis­sante et la plus per­for­mante jamais conçue : le toka­mak ITER.

Nous souhaitons pou­voir pro­duire 500 MW de puis­sance ther­mique pen­dant une dizaine de min­utes pour une puis­sance injec­tée de 50 MW grâce à la fusion de noy­aux de deutéri­um et de tritium.

Ain­si, la machine vise à démon­tr­er le principe de pro­duire dix fois plus de puis­sance ther­mique à par­tir du proces­sus de fusion que celui util­isé pour chauf­fer le plas­ma, ce qui n’a pas encore été réal­isé dans un réac­teur de fusion. Dans ce cadre, pour men­er à bien notre mis­sion, des dis­posi­tifs de con­cep­tion unique sont mis en place. En effet, le pro­jet ITER se car­ac­térise par des com­posants remar­quables, notam­ment la cham­bre à vide, une struc­ture toroï­dale en aci­er, entière­ment soudée dont la masse avoi­sine celle de la Tour Eif­fel, et qui est l’un des élé­ments centraux.

La con­cep­tion des com­posants d’ITER prend ain­si en compte des con­traintes tech­nologiques très fortes. Les bobines supra­con­duc­tri­ces seront par­cou­rues par des courants de 75 kA qui généreront des champs mag­né­tiques pou­vant attein­dre 13 T, et l’énergie mag­né­tique asso­ciée équiv­au­dra à l’énergie ciné­tique d’un porte-avions lancé à 180 km/h.

En quoi le projet va-t-il révolutionner le domaine de l’énergie ?

ITER doit démon­tr­er que la fusion deutéri­um-tri­tium peut être util­isée comme source d’énergie à grande échelle, sûre et non émet­trice de CO2, pour pro­duire de l’électricité.
Par ailleurs, cette source d’énergie pérenne per­me­t­tra égale­ment de réduire con­sid­érable­ment la pro­duc­tion de déchets radioac­t­ifs : con­traire­ment à la fis­sion nucléaire util­isée dans les cen­trales actuelles, la fusion deutéri­um-tri­tium lim­ite la quan­tité et la durée de vie des déchets radioactifs.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Nous avons adop­té une stratégie par étapes avec un cal­en­dri­er établi en coor­di­na­tion avec les dif­férents membres :

  • Le pre­mier plas­ma : nous souhaitons avoir des plas­mas d’hydrogène à faible valeur de courant de plas­ma d’ici 2025 ;
  • La pré-fusion : la pro­duc­tion de plas­mas d’hydrogène ou d’hélium avec des valeurs de courant de plas­ma jusqu’à 15 MA
  • La fusion : il s’agit de l’objectif du pro­jet, à savoir, obtenir des plas­mas de deutéri­um et tri­tium qui auront la puis­sance de fusion max­i­male de 500 MW.

Le développe­ment de cette tech­nolo­gie excep­tion­nelle trou­ve égale­ment des appli­ca­tions dans le domaine spa­tial ou la recherche médicale.


À lire aus­si : Pas d’ITER sans numérique, par Bernard BIGOT, La Jaune et la Rouge N° 732.

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