Un acteur de la résolution plus humain, plus technique, plus réactif

Dossier : Vie des entreprises | Magazine N°808 Octobre 2025
Par Frédéric MORIEZ
Par Delphine CAUMES
Par Serge LE ROI

Dans un univers où les risques industriels se multiplient et se transforment, la gestion des sinistres devient un enjeu stratégique. Rencontre croisée avec Delphine Caumes (Directrice Générale), Serge Le Roi (Directeur Commercial) et Frédéric Moriez (Président) de la société EQUAD RCC, acteur clé de l’expertise en assurance, pour décrypter ce métier peu connu mais dont le rôle est central.

Pouvez-vous présenter EQUAD RCC et votre positionnement sur le marché ?

Serge Le Roi : EQUAD RCC est l’une des deux principales entités du groupe EUFEX, que nous formons avec NAUDET. Nous sommes un acteur indépendant de l’expertise après sinistre, dédié exclusivement au marché de l’expertise des sinistres entreprises. Notre spécificité, c’est d’intervenir uniquement après un sinistre, parfois au cœur du sinistre en gestion de crise. Cela nous distingue clairement des assureurs et des courtiers. Avec 52 bureaux répartis sur tout le territoire et près de 600 collaborateurs, nous visons à être opérationnels en moins d’une heure sur le lieu d’un sinistre. Nous opérons également à l’international avec notre réseau européen et notre département WorldWide Services qui s’appuie sur un réseau européen et des correspondants internationaux.

Quels types de sinistres gérez-vous ?

Delphine Caumes : Nous fournissons des prestations de conseil et d’expertise pour apporter des solutions de règlement consécutivement à la survenance de sinistres. Nous couvrons trois grands domaines : la construction, la responsabilité civile et les dommages aux biens. Cela peut aller d’un effondrement de chantier à une pollution industrielle ou un défaut technique sur un équipement. Nous intervenons majoritairement pour la partie mise en cause, c’est-à-dire l’entreprise dont la responsabilité est recherchée. Dans ce cadre, notre rôle est de comprendre techniquement ce qui s’est passé, mais aussi de défendre l’exposition de la responsabilité de notre client.

Quel est votre rôle exact lors d’un sinistre ?

Serge Le Roi : Nous arrivons juste après l’événement. Le premier réflexe de l’assureur ou de l’entreprise est souvent de faire appel à nous. Nous analysons les causes, nous chiffrons les dommages, instruisons le dossier et nous proposons des solutions de gestion du sinistre. Nous sommes en quelque sorte un tiers de confiance. Le plus important, c’est la gestion proactive des délais de règlement : il ne faut jamais laisser un sinistre sans réponse rapide. Cela peut coûter très cher en réputation.

Comment se construit une expertise dans la durée ?

Frédéric Moriez : C’est d’abord une affaire de capital humain. Chez EQUAD RCC, beaucoup de nos collaborateurs ont 10, 15, parfois 30 ans d’expérience. C’est cette continuité, cette mémoire professionnelle, qui fait notre force. Ensuite, il y a la capacité à documenter, structurer, capitaliser. Chaque sinistre devient une leçon. Enfin, nous avons une culture forte d’indépendance capitalistique et d’esprit ce qui renforce notre crédibilité auprès des entreprises et des assureurs.

Quelle est la part de pédagogie dans votre métier ?

Delphine Caumes : Elle est essentielle. Un sinistre, c’est toujours une situation de tension, de doute, parfois de colère. Il faut accompagner les clients, leur expliquer les mécanismes, les règles du jeu assurantielles, les étapes à venir. On ne peut pas faire ce métier si on ne sait pas créer un climat de confiance. Et cette pédagogie, elle s’adresse aussi aux assureurs, qui ne connaissent pas toujours les spécificités techniques d’un secteur industriel donné. C’est pourquoi nous avons développé tout un ensemble de spécialités à la fois techniques et financières.

Quelles sont vos priorités de développement dans les années à venir ?

Serge Le Roi : Nous renforçons activement nos expertises de spécialité – qu’il s’agisse de cyber-risques, d’infrastructures critiques ou d’énergies nouvelles – dans un environnement où la maîtrise technique est plus que jamais stratégique. Pour soutenir cette dynamique, nous investissons dans la formation continue de nos équipes, dans les outils numériques avancés et la structuration intelligente de la donnée. Ces évolutions s’accompagnent d’un élargissement de notre empreinte internationale, afin d’accompagner nos clients dans leurs implantations transfrontalières.

Dans ce contexte, nous nous attachons à attirer des profils scientifiques de haut niveau, capables de conjuguer rigueur analytique, esprit de décision et agilité terrain. Le métier d’expert post-sinistre est encore méconnu, mais il offre à ceux qui s’y engagent – notamment les ingénieurs formés à la résolution de problèmes complexes – un terrain d’expression intellectuelle et humaine particulièrement stimulant. 

Quelle est votre valeur ajoutée pour les grands groupes ?

Delphine Caumes : Nous sommes l’interface entre l’assureur, très juridique, et le client, très technique. Nous comprenons les deux mondes et nous savons les faire dialoguer. Souvent, un directeur technique d’entreprise n’a ni le temps ni les codes pour gérer un sinistre. Nous apportons ce savoir-faire. 

Frédéric Moriez : Nous sommes un facteur de stabilité dans la relation entre l’entreprise, son courtier et son assureur.  Nous incarnons une continuité relationnelle qui est précieuse en cas de sinistre car le règlement de sinistre, quelle qu’en soit la nature, participe à la pérennité de l’entreprise et plus largement à la stabilité de la société.

Comment se coordonnent vos équipes sur le terrain ?

Serge Le Roi : Nous avons une organisation en strates, monitorées au plan local, régional, national et international. Cela nous permet de couvrir toutes les typologies de sinistre sur l’ensemble du territoire efficacement. Chaque bureau est autonome mais connecté à une chaîne de compétences centralisées et des ERP de gestion communs. C’est essentiel pour assurer à la fois proximité, réactivité et cohérence technique.

Assistez-vous à une évolution des typologies de risques ?

Frédéric Moriez : Absolument. Le dérèglement climatique change profondément la nature des sinistres mais aussi la définition des réparations. On voit apparaître des problématiques liées à la sécheresse, à l’inondation, aux effets géotechniques. Nous devons nous adapter vite, pour être en mesure d’apporter des réponses aux événements de grande ampleur, tout en maintenant un haut niveau de spécialisation sur chaque dossier. Parallèlement, les évolutions environnementales et également technologiques redéfinissent le paysage du risque et des sinistres : l’intelligence artificielle, la connectivité généralisée, les systèmes automatisés et les menaces cyber génèrent des sinistres d’un genre nouveau, souvent invisibles, parfois systémiques. Ces mutations exigent une vigilance constante et une capacité d’adaptation à un monde en perpétuelle transformation.

Quels sont vos outils de veille pour anticiper les nouveaux risques ?

Delphine Caumes : Notre veille repose sur les cas que nous traitons et les signaux faibles que nous observons. Nous ne faisons pas de prévention au sens strict, mais nous préparons nos experts à intervenir sur de nouvelles configurations. L’essor de la mobilité électrique, par exemple, nous pousse à étudier les risques associés aux batteries, aux bornes, aux nouveaux usages.

De la même manière, l’émergence de technologies comme l’intelligence artificielle, la robotique ou les systèmes interconnectés exige une attention continue. Nous analysons les incidents naissants, croisons les données issues du terrain avec celles des réseaux professionnels, académiques et assurantiels, afin de former nos équipes à des sinistres encore inédits, mais de plus en plus probables.    

Quels sont les défis en matière de conformité et de réglementation ?

Serge Le Roi : Nous devons concilier plusieurs cadres : le droit des assurances, les obligations environnementales, les normes techniques. L’un de nos rôles est de traduire cela dans une solution de règlement solide sur les plans juridique, financier et opérationnel. Cela suppose beaucoup de pédagogie et de rigueur.

Quel rôle peut jouer un expert dans la transition écologique ?

Frédéric Moriez : Il est central. La transition écologique bouleverse la définition des travaux réparatoires. Une reconstruction après sinistre est l’occasion d’intégrer des standards plus vertueux. Nous accompagnons les entreprises, les maîtres d’ouvrage et les assureurs pour faire évoluer la logique de la simple réparation à l’identique. C’est un changement culturel, un enjeu social, indispensable si l’on veut aligner gestion des risques et durabilité.

Intervenez-vous aussi à l’international ?

Delphine Caumes : Oui, via notre cellule WorldWide. Nous avons des dossiers avec des dimensions transfrontalières, quand un sinistre implique un acteur étranger ou un site hors de France. Nous travaillons alors avec un réseau de partenaires et gérons les contraintes culturelles, linguistiques et réglementaires.

Serge Le Roi : Un sinistre, c’est un moment de vérité. Une entreprise peut soit s’enliser, soit en faire une occasion de gérer l’exposition de sa responsabilité, de ses compétences, ses engagements contractuels, réglementaires ou sociétaux. C’est là qu’intervient notre rôle : faire en sorte que l’entreprise sorte renforcée de l’épreuve en France et/ou à l’étranger, et que la résolution du sinistre transforme un risque en une opportunité.  

Equad RCC

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