TotalEnergies : le digital au service des renouvelables

TotalEnergies : le digital au service des renouvelables

Dossier : Vie des entreprises - Transformation numérique et intelligence artificielleMagazine N°805 Mai 2025
Par Victor MARTIN

En 2024, Tota­lE­ner­gies a célé­bré son cen­te­naire. His­to­ri­que­ment pré­sente dans les sec­teurs du pétrole et du gaz, la Com­pa­gnie opère depuis plu­sieurs années une diver­si­fi­ca­tion vers les éner­gies renou­ve­lables et les molé­cules bas car­bone. Pour accom­pa­gner cette tran­si­tion, Tota­lE­ner­gies mise sur des solu­tions digi­tales inno­vantes. Entre­tien avec Vic­tor Mar­tin, res­pon­sable de la pla­te­forme numé­rique au sein des équipes de recherche et déve­lop­pe­ment (R&D) de Tota­lE­ner­gies.

Pouvez-vous nous présenter votre parcours et votre rôle chez TotalEnergies ?

Je tra­vaille chez Tota­lE­ner­gies depuis plus de vingt ans. J’ai débu­té comme ingé­nieur géo­phy­si­cien en explo­ra­tion pétro­lière, puis j’ai occu­pé dif­fé­rentes fonc­tions tech­niques et busi­ness. Aujourd’hui, je coor­donne les équipes numé­riques de la R&D au sein de la branche d’ingénierie de Tota­lE­ner­gies, appe­lée One­Tech. Mon rôle consiste à pilo­ter les recherches et les déve­lop­pe­ments liés à la crois­sance du sec­teur élec­trique, en met­tant l’accent sur les don­nées et l’intelligence artificielle.

Comment s’intègre cette activité dans la stratégie globale de l’entreprise ?

Tota­lE­ner­gies a enga­gé une évo­lu­tion majeure de son mix éner­gé­tique avec l’ambition d’atteindre la neu­tra­li­té car­bone à l’horizon 2050, ensemble avec la socié­té. Elle met en œuvre une stra­té­gie de crois­sance équi­li­brée, repo­sant sur les hydro­car­bures et l’électricité, tout en rédui­sant for­te­ment ses émis­sions carbone.

“Le numérique au cœur de la stratégie de TotalEnergies pour un avenir énergétique durable.”

À court terme, nous visons 35 giga­watts de capa­ci­té ins­tal­lée en éner­gies renou­ve­lables d’ici fin 2025 et plus de 100 TWh de pro­duc­tion nette d’électricité à hori­zon 2030. Cette crois­sance repose sur l’optimisation des coûts et du déploie­ment des infra­struc­tures ain­si que sur une ges­tion opti­mi­sée de la pro­duc­tion et de la consom­ma­tion. Le numé­rique joue un rôle clé pour trou­ver des sites, opti­mi­ser leur concep­tion, anti­ci­per la demande et ajus­ter les res­sources en temps réel.

Quels sont les principaux projets sur lesquels vous travaillez actuellement ?

Chez Tota­lE­ner­gies, les grands usages indus­triels du digi­tal concernent, his­to­ri­que­ment, la main­te­nance pré­dic­tive et, plus récem­ment, la réduc­tion des émis­sions des ins­tal­la­tions et l’optimisation de leur consom­ma­tion éner­gé­tique. Dans le domaine de l’électricité, qui est plus nou­veau pour nous, nous déve­lop­pons aus­si des modèles de pré­vi­sion pour anti­ci­per au mieux la pro­duc­tion d’énergies renou­ve­lables, qui est inter­mit­tente. L’intelligence arti­fi­cielle joue ici un rôle clé dans l’estimation du poten­tiel éner­gé­tique des sites solaires et éoliens, afin de maxi­mi­ser leur ren­de­ment. Au-delà de la pré­dic­tion, nous étu­dions éga­le­ment des tech­niques avan­cées comme l’apprentissage par ren­for­ce­ment pour opti­mi­ser le pilo­tage des infra­struc­tures. Nous tra­vaillons sur ces pro­jets en inter­ac­tion avec notre Digi­tal Fac­to­ry, qui est en charge du déve­lop­pe­ment de solu­tions digi­tales au sein de la com­pa­gnie, notre rôle à la R&D étant d’explorer et qua­li­fier les nou­velles technologies.

Le solaire semble être un axe majeur de votre stratégie. Pourquoi ce choix ?

Tota­lE­ner­gies est un lea­der dans le déve­lop­pe­ment de pro­jets solaires dans le monde. Le solaire est aujourd’hui une source d’énergie renou­ve­lable très com­pé­ti­tive en termes de coûts, en par­ti­cu­lier pour les très grands pro­jets. Pour conti­nuer à inves­tir dans des zones où le fon­cier est limi­té, le digi­tal sert à iden­ti­fier des sur­faces adap­tées, comme les toi­tures, les par­kings ou les friches, à par­tir d’images satel­lites. De manière géné­rale, l’exploitation de ces images per­met aus­si de déter­mi­ner des carac­té­ris­tiques ter­rain (pente, albé­do) qui sont indis­pen­sables pour la concep­tion des fermes solaires. Nous explo­rons éga­le­ment l’agrivoltaïsme, qui per­met de com­bi­ner pro­duc­tion d’énergie renou­ve­lable et agri­cul­ture sur un même ter­rain. Mais nous pour­sui­vons aus­si nos inves­tis­se­ments dans l’éolien.

La com­pa­gnie a d’ailleurs récem­ment inau­gu­ré un pro­jet off­shore au large de Taï­wan et exploite plu­sieurs fermes éoliennes ter­restres en France et à l’étranger. Là encore, le digi­tal sert à mieux com­prendre les phé­no­mènes de tur­bu­lence au sein des fermes pour mieux pré­voir la pro­duc­tion d’énergie.

Quels sont les défis majeurs pour le développement du solaire ?

Le prin­ci­pal défi réside dans l’accès à des sur­faces exploi­tables sans entrer en concur­rence avec d’autres usages. Mais, au-delà, notre enjeu est de res­ti­tuer l’énergie solaire au moment où nos clients en ont le plus besoin. Pour y par­ve­nir, nous tra­vaillons sur des solu­tions de sto­ckage à grande échelle, com­bi­nant bat­te­ries indus­trielles et ges­tion de l’énergie via l’intelligence arti­fi­cielle. L’objectif est d’optimiser la charge et la décharge des bat­te­ries en fonc­tion de la pro­duc­tion et de la demande, afin d’assurer une ali­men­ta­tion élec­trique stable et conti­nue, ce que nous appe­lons « clean firm power ».

Mais encore…

En com­plé­ment des bat­te­ries, Tota­lE­ner­gies déve­loppe des cen­trales à gaz à cycle com­bi­né, qui sont des actifs flexibles, essen­tiels pour pal­lier l’intermittence des éner­gies renou­ve­lables et garan­tir à nos clients la four­ni­ture d’une élec­tri­ci­té fiable et stable, dis­po­nible en conti­nu. Nous sommes éga­le­ment enga­gés à four­nir des car­bu­rants bas car­bone, issus notam­ment de la bio­masse. Notre R&D s’efforce d’améliorer leur déploie­ment et leur com­pé­ti­ti­vi­té à grande échelle, et le digi­tal aide ici à opti­mi­ser les pro­cess de production.

Quels profils recrutez-vous pour accompagner cette transformation numérique ?

Tota­lE­ner­gies recherche des data scien­tists et des ingé­nieurs en simu­la­tion, très deman­dés sur le mar­ché. Notre pré­sence sur le pla­teau de Paris-Saclay nous per­met de recru­ter d’excellents talents issus des grandes écoles et uni­ver­si­tés de Paris-Saclay et de son éco­sys­tème. Nous accueillons éga­le­ment de nom­breux étu­diants en stage et en thèse, notam­ment dans les domaines de l’intelligence arti­fi­cielle et de l’optimisation éner­gé­tique. Nous sommes ain­si ravis d’accueillir régu­liè­re­ment des étu­diants des mas­ters en data science de l’École polytechnique.

TotalEnergies collabore-t-elle avec d’autres acteurs dans le domaine du digital et de l’IA ?

Effec­ti­ve­ment, Tota­lE­ner­gies est par­te­naire du clus­ter IA Hi ! Paris, qui regroupe l’Institut Poly­tech­nique de Paris et HEC. Cela nous per­met de col­la­bo­rer avec des cher­cheurs et des étu­diants sur des pro­jets liés à l’intelligence arti­fi­cielle appli­quée à l’énergie. Nous avons éga­le­ment un labo­ra­toire com­mun avec Thales et EDF, appe­lé Sin­clair, où nous explo­rons trois axes : l’explicabilité des modèles d’IA, l’apprentissage par ren­for­ce­ment et l’utilisation de l’IA pour accé­lé­rer les simu­la­tions com­plexes, telles que celles des fermes éoliennes et la ges­tion des réseaux électriques.

Quels sont les principaux enjeux pour l’avenir ?

Notre objec­tif est d’intégrer encore davan­tage le digi­tal dans nos pro­ces­sus pour amé­lio­rer notre effi­ca­ci­té, nos busi­ness et répondre aux défis de la tran­si­tion éner­gé­tique. Nous obser­vons déjà un chan­ge­ment pro­gres­sif de notre tra­vail à la R&D depuis l’arrivée de l’IA géné­ra­tive et démar­rons un pro­gramme dédié à son accé­lé­ra­tion. Les tech­no­lo­gies évo­luent rapi­de­ment : les pro­chaines années appor­te­ront de nom­breuses inno­va­tions en IA et per­met­tront de la faire conver­ger avec l’ingénierie et le desi­gn par simu­la­tion ain­si que le cal­cul scien­ti­fique, domaines dans les­quels Tota­lE­ner­gies pos­sède une solide expé­rience. Cela condui­ra pro­ba­ble­ment à de nou­velles solu­tions accé­lé­rant notre tra­vail d’ingénieur. On le voit, le digi­tal est à la fois un levier d’innovation et un moteur de trans­for­ma­tion en pro­fon­deur de nos métiers. Il nous pousse à repen­ser notre fonc­tion­ne­ment et nos inter­ac­tions, ouvrant une oppor­tu­ni­té for­mi­dable pour construire un ave­nir éner­gé­tique tou­jours plus durable et per­for­mant. 


TotalEnergies OneTech

One­Tech est une branche de Tota­lE­ner­gies créée en 2021, regrou­pant des ingé­nieurs, des tech­ni­ciens et des cher­cheurs répar­tis sur neuf sites en Europe. Cette enti­té cen­tra­lise les com­pé­tences tech­niques et scien­ti­fiques de la com­pa­gnie, cou­vrant toutes les formes d’énergie. Elle contri­bue concrè­te­ment aux acti­vi­tés d’ingénierie et de sup­port aux opé­ra­tions et à l’émergence de solu­tions inno­vantes dans les nou­velles énergies. 

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