Nexans, le leader français et mondial des systèmes du câblage

« Simplifier pour amplifier notre impact »

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°769 Novembre 2021
Par Christopher GUÉRIN

Réchauf­fe­ment cli­ma­tique, énergie décar­bonée, élec­tri­fi­ca­tion… sont autant de sujets qui mobilisent Nex­ans, le leader français et mon­di­al des sys­tèmes du câblage. Christo­pher Guérin, son directeur général, nous explique comme son entre­prise appréhende ces dif­férents enjeux afin notam­ment de con­tribuer active­ment au déploiement des énergie vertes et décar­bonées dans le monde.

Quels sont les cœurs de métiers et le positionnement de Nexans ?

Nex­ans est un leader mon­di­al dans les sys­tèmes de câblage. Nous con­nec­tons ain­si les pro­duc­tions éner­gies décar­bonées (fer­mes solaires, fer­mes éoli­ennes ter­restres ou marines, fer­mes hydrauliques, cen­trales nucléaires…) au réseau élec­trique, nous amenons via nos cables l’électricité tout au long afin que chaque citoyen puis­sent avoir accès à l’électricité.

Nous sommes aus­si un acteur incon­tourn­able des inter­con­nex­ions sous-marines entre pays. En effet, grâce à nos sys­tèmes de câblage, nous per­me­t­tons à des pays d’échanger leur pro­duc­tion d’énergie renouvelable. 

Dans le cadre du pro­jet NordLink, nous avons ain­si fourni le câble qui relie l’Allemagne à la Norvège. Ce câble de 700 km de long, dont 500 km en fond sous-marin, per­met à l’Allemagne d’envoyer vers la Norvège son excé­dent d’énergie verte provenant de ses fer­mes éoli­ennes ter­restres. La Norvège qui dis­pose d’une capac­ité de stock­age grâce à sa puis­sance hydroélec­trique peut ensuite ren­voy­er de l’énergie verte vers l’Allemagne au gré de ses besoins. 

Ces câbles mesurent entre 700 et 2 000 km et pèsent plus de 9 000 t, l’équivalent du poids de la Tour Eiffel ! 

En facil­i­tant le trans­fert et l’échange d’énergie verte entre les pays, nous con­tribuons directe­ment à la tran­si­tion énergé­tique. Sur les dix dernières années, plus 10 000 km de câbles ont été posés et on estime que sur les six prochaines années, notre secteur va pos­er 20 000 km de câbles supplémentaires.

En par­al­lèle, nous con­nec­tons égale­ment les fer­mes éoli­ennes en mer. Ces dernières aujourd’hui affichent des coûts plus com­péti­tifs que le nucléaire par mégawatt. Sur la prochaine décen­nie, plus de 200 gigawatts de puis­sance via des fer­mes éoli­ennes en mer, vont être déployés soit l’équivalent de 200 réac­teurs nucléaires. 

Nex­ans se posi­tionne d’ores et déjà comme un leader sur cette activ­ité. Actuelle­ment, nous sommes, par exem­ple, mobil­isés sur un pro­jet qui va ali­menter Man­hat­tan grâce à l’énergie pro­duite par des fer­mes éoli­ennes situées au large de Brook­lyn et de Long Island. 

Ce seg­ment con­naît une très forte accéléra­tion aux États-Unis sous l’impulsion du plan Biden Build Back Bet­ter. Et sur ce marché, Nex­ans a déjà plus de 60 % des parts de marché sur toute la côte est améri­caine, pour les sept prochaines années.

Votre plan stratégique pour la prochaine décennie s’articule autour d’une idée forte Electrify The Future. Pourquoi ce choix ? 

Nex­ans a vu le jour il y a 120 ans sous l’impulsion de l’invention de l’électricité et de fig­ures his­toriques comme Edi­son, West­ing­house, Tes­la et Ben­jamin Franck­lin qui ont con­tribué à la démoc­ra­ti­sa­tion de cette énergie. Pour trans­porter l’électricité, des câbles étaient néces­saires et Nex­ans a fait par­tie des pre­mières entre­pris­es au monde à en fabriquer.

Plus récem­ment au cours des 80 dernières années, Nex­ans s’est posi­tion­né en pure play­er de l’électrification avant d’adopter une stratégie général­iste visant à cou­vrir des marchés con­nex­es : auto­mo­bile, télé­com­mu­ni­ca­tion, robo­t­ique… Aujourd’hui, notre ambi­tion est de recen­tr­er notre activ­ité sur l’électrification, qui représente 60 % de notre chiffre d’affaires à l’heure actuelle, pour pass­er à 90 % d’ici 2024. 

Dans cette con­ti­nu­ité, nous avons ini­tié une réflex­ion qui nous a per­mis d’élaborer notre plan stratégique pour la prochaine décen­nie autour d’une idée forte : Elec­tri­fy The Future/Électrifier Le Futur. Pour Nex­ans, la prochaine étape est d’accompagner la tran­si­tion énergé­tique et la prochaine révo­lu­tion élec­trique dont les con­tours com­men­cent à se dessin­er. En effet, je suis per­son­nelle­ment con­va­in­cu que nous sommes au début d’une révo­lu­tion élec­trique qui aura l’ampleur de la révo­lu­tion indus­trielle qui a suivi la Sec­onde Guerre mon­di­ale, entre 1950 et 1980. Les infra­struc­tures, réseaux élec­triques et de télé­com­mu­ni­ca­tions qui ont été instal­lés durant cette péri­ode doivent aujourd’hui être entière­ment renou­velés afin de con­tin­uer à répon­dre à la demande crois­sante en élec­tric­ité, mais aus­si pour ini­ti­er la décabor­na­tion de la pro­duc­tion d’énergie.

Dans ce cadre, quelles sont vos ambitions ? Et pourquoi peut-on dire que vos objectifs sont en phase avec la volonté d’atteindre une neutralité carbone à horizon 2050 ?

Notre prin­ci­pal objec­tif est que Nex­ans soit recon­nu comme un leader et un pure play­er de l’électrification. Nous voulons pren­dre le con­tre-pied de cette approche qui a val­orisé la crois­sance au détri­ment de l’environnement au cours des dernières décen­nies. Dans cette logique, nous avons mis en place en interne un nou­veau mod­èle de ges­tion de la per­for­mance, « 3E – Envi­ron­nement, Engage­ment, Économique » qui s’articule autour de vingt critères qui ont voca­tion à éval­uer ces trois dimen­sions dans cha­cune de nos unités : ges­tion des déchets, maîtrise de la con­som­ma­tion énergé­tique, réduc­tion des émis­sions de CO2… 

Cette ini­tia­tive est plébisc­itée et soutenue par nos équipes. C’est une démarche vertueuse qui per­met de faire la jonc­tion entre l’économie, le social et l’environnement afin de trou­ver le juste équili­bre, dans nos proces­sus de déci­sions et notre pilotage de l’entreprise. Le man­age­ment d’hier est à bout de souf­fle, nous avons besoin de nou­veaux mod­èles de performance.

Au-delà du pilotage, cette tran­si­tion d’un posi­tion­nement général­iste à celui d’un pure play­er de l’électrification, est très bien résumée par notre rai­son d’être « Sim­pli­fi­er pour ampli­fi­er notre impact ». D’ailleurs, cela se traduit de manière con­crète dans nos choix stratégiques. Aujourd’hui, nous ne mis­ons plus sur la crois­sance volu­mique, mais sur la valeur, même si cela sig­ni­fie se désen­gager de cer­tains marchés 

Pour accompagner ces mutations profondes et essentielles, l’innovation est un levier clé. Quelle place occupe l’innovation chez Nexans et comment cela se traduit-il ?

L’innovation est la pierre angu­laire de notre nou­veau plan stratégique 2024. En opérant ce recen­trage sur l’électrification et en déploy­ant le mod­èle de ges­tion de la per­for­mance « 3E », nous voulons met­tre en place des solu­tions et des sys­tèmes vertueux et respectueux de l’environnement. Dans cette démarche, nous nous appuyons sur des parte­nar­i­ats majeurs pour accélér­er le développe­ment de ces solu­tions. Avec Microsoft, nous tra­vail­lons sur l’intelligence arti­fi­cielle. Avec Schnei­der Elec­tric, nous sommes mobil­isés sur les sujets d’industrie 4.0 et de ges­tion de l’énergie. Et pour tout ce qui tourne autour de la ges­tion des risques clients, nous col­laborons avec Bureau Ver­i­tas qui nous accom­pa­gne notam­ment sur la cer­ti­fi­ca­tion de nos instal­la­tions de câbles. Nous voulons égale­ment opti­miser notre propo­si­tion de valeur en met­tant à dis­po­si­tion de nos clients des solu­tions com­plètes et non plus unique­ment des com­posants. Nous dévelop­pons ain­si des câbles pré­con­nec­tés, des out­ils dig­i­taux de géolo­cal­i­sa­tion des risques pour prévenir l’obsolescence des réseaux élec­triques ou les black-out dans les villes… une entre­prise ne peut plus évoluer seule, elle doit se repos­er sur une approche écosystémique.

Et pour mener à bien l’ensemble de ces projets, quels sont les sujets et les enjeux qui vous mobilisent ? 

Aujourd’hui, notre prin­ci­pal enjeu est d’accompagner le développe­ment des éner­gies décar­bonées. Nous sommes aux prémices d’investissements mas­sifs dans le secteur des éner­gies décar­bonées qui lais­sent présager des cycles d’hyper-demandes, certes très posi­tifs pour l’économie, mais qui posent un risque de pénurie de matières pre­mières impor­tant. Prenons l’exemple du cuiv­re qui est le pre­mier con­duc­teur util­isé pour l’électricité. Il y a 20 ans, nous con­som­mions neuf mil­lions de tonnes de cuiv­re. Aujourd’hui, nous en util­isons 20 mil­lions de tonnes, et demain, à hori­zon 2035, il en fau­dra plus de 35 mil­lions de tonnes. Con­scient de cet enjeu, Nex­ans se posi­tionne d’ores et déjà comme un leader du recy­clage du cuiv­re, car nous savons que les réserves actuelles et futures ne suf­firont pas. Nous avons inté­gré cette réal­ité dans nos proces­sus. Aujourd’hui, nous recy­clons 30 % de nos déchets et réu­til­isons le cuiv­re pour la pro­duc­tion de nou­veaux câbles. Nous avons trans­for­mé ce frein en une oppor­tu­nité pour accélér­er le déploiement du recy­clage dans notre activité. 

Dans un monde où le réchauf­fe­ment cli­ma­tique est une réal­ité, la course à la décar­bon­a­tion et à la tran­si­tion énergé­tique s’accélère, notam­ment en Chine, en Europe et aux États-Unis. La France doit donc se mobilis­er pour ne pas être dépassée. Si les débats sont néces­saires, la France ne doit néan­moins pas être pris­on­nière de son idéolo­gie notam­ment autour du nucléaire ou de l’éolien. Plus que jamais, à l’heure actuelle, face à l’urgence cli­ma­tique, il faut aujourd’hui laiss­er place à l’action et miser mas­sive­ment sur l’énergie décarbonée. 

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