Serge RAFFET en grand uniforme de l'École polytechnique promotion 1950

Serge RAFFET (50), la passion d’entreprendre

Dossier : TrajectoiresMagazine N°733 Mars 2018Par : Hubert JACQUET (64)

Serge Raf­fet est né le 31 août 1930. Quand il a eu deux ans, son père, émi­gré polo­nais illet­tré, a quit­té sa mère et a dis­pa­ru, jusque, par une invrai­sem­blable coïn­ci­dence, il le retrouve 32 ans plus tard. 

Sa mère était employée de bureau, vivait dans une pièce sans eau cou­rante à Bel­le­ville et l’a pla­cé chez un couple d’ouvriers à la cam­pagne. En 1939, Serge revient vivre avec sa mère. 

En 1942, ils fuient en zone libre et manquent d’être arrê­tés à Lan­gon, juste avant la ligne de démarcation. 

Serge n’est plus retour­né à l’école jusqu’à la Libé­ra­tion : deux ans d’école buis­son­nière, de lec­ture, d’études qui lui ont per­mis d’apprendre plus vite tout seul, de sau­ter la 5e puis la 4e après un tri­mestre dans chaque et de pas­ser le pre­mier bac à 16 ans à la fin de la seconde ! 

L’X OU RIEN

Pour lui, l’X était une obli­ga­tion : il n’avait pas les moyens d’être étu­diant, à part des bourses pour payer l’internat à Saint-Louis en hypo et en taupe. Il pan­toufle à la sor­tie et pour payer, tra­vaille le jour dans un bureau d’études et fait des tra­duc­tions le soir. 

Six mois après, il part pour faire de la pros­pec­tion pétro­lière dans le Saha­ra, par­ti­cipe à la décou­verte du gise­ment de fer de Tin­douf. Recru­té par un autre employeur, il est envoyé pour un mois au Bré­sil pour étu­dier le sous-sol de l’entrée de la baie de Rio pour un pro­jet de tunnel. 

Sur son conseil, ils ont construit un pont à la place. Il trouve d’autres contrats et finit par pro­po­ser à son client bré­si­lien de créer une filiale à Rio. 

Ce pro­jet n’intéresse per­sonne et Serge crée sa propre socié­té de géo­phy­sique avec une cau­tion ban­caire d’Edmond de Roth­schild qui pas­sait là par hasard. Les débuts sont dif­fi­ciles, puis les com­mandes affluent. Serge revend la socié­té trois ans après, sa pre­mière épouse vou­lant ren­trer en France. 

EXPÉRIENCES EN TOUS GENRES

De retour à Paris, Serge s’essaye à la publi­ci­té, au cour­tage des matières pre­mières, à la vente d’usines clés en main de revê­te­ments plas­tiques et de papier hygié­nique, puis se voit confier des mis­sions très diverses en Afrique. 

Entre-temps, répon­dant à la demande d’un ami qui cher­chait à s’occuper, il fonde à Paris une socié­té de ser­vices lin­guis­tiques, Tra­du­tec, qui a fêté récem­ment son cin­quan­te­naire. Comme Tra­du­tec mar­chait bien, il crée une, puis deux socié­tés concur­rentes à Paris qui ont per­mis de tri­pler le chiffre d’affaires.

AVENTURES AMÉRICAINES

En 1968, Serge va à New York pour une courte semaine et ren­contre une jeune Amé­ri­caine qui lui a don­né envie d’y retourner. 

Il crée une autre socié­té de ser­vices lin­guis­tiques inno­cem­ment bap­ti­sée Trans­la­tion Com­pa­ny of Ame­ri­ca, Inc. Au Cana­da, il crée la Trans­la­tion Com­pa­ny of Cana­da à Toron­to et la Com­pa­gnie nord-amé­ri­caine de tra­duc­tion Ltée à Montréal. 

Dans la fou­lée, deux fran­chises, à San Fran­cis­co et Mil­wau­kee. Au bout de quelques années, ces socié­tés sont revendues. 

DE LA TRADUCTION AU CONSEIL

Ces socié­tés de tra­duc­tion pré­sen­taient un inté­rêt inat­ten­du. Leurs clients leur confiaient des docu­ments de la plus haute confi­den­tia­li­té. Curieux de nature, Serge en lit beau­coup, ce qui lui a don­né une connais­sance intime en pro­fon­deur du milieu des affaires de plu­sieurs pays dont les États-Unis. 

Quand il quitte la tra­duc­tion en 1980, il est appe­lé comme consul­tant pour s’occuper d’entreprises étran­gères en dif­fi­cul­té en Amé­rique. Puis l’Afrique l’a rat­tra­pé et il s’est trou­vé impli­qué pen­dant de nom­breuses années dans le finan­ce­ment puis l’administration d’un port miné­ra­lier en Afrique Noire. 

UNE VIE « PASSIONNANTE ET UTILE »

Cette cita­tion de Serge Raf­fet pour conclure : « J’entends dire que l’École poly­tech­nique est réser­vée à l’élite bour­geoise : je ne suis pas le seul, de loin, à avoir prou­vé le contraire. 

Il faut vou­loir, le reste est une affaire de tra­vail avec quand même un peu de talent et d’intelligence et conduit à des vies pas­sion­nantes et utiles. »

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