Saxol : une avancée majeure contre les neuropathies périphériques

Saxol : une avancée majeure contre les neuropathies périphériques

Dossier : Vie des entreprises - HealthtechMagazine N°804 Avril 2025
Par Philippe BORDEAU

Saxol repré­sente un espoir majeur pour les patients atteints de neu­ro­pa­thies péri­phé­riques. Elle s’inscrit dans une stra­té­gie scien­ti­fique et éco­no­mique rigou­reuse pour accé­lé­rer l’accès à son trai­te­ment révo­lu­tion­naire. Entre­tien avec Phi­lippe Bor­deau, diri­geant de Saxol.

Quels sont les principaux mécanismes des neuropathies périphériques ? 

Les neu­ro­pa­thies péri­phé­riques sont cau­sées par des lésions des nerfs situés en dehors du cer­veau et de la moelle épi­nière. Elles entraînent divers symp­tômes, notam­ment une fai­blesse mus­cu­laire, des engour­dis­se­ments et des dou­leurs, prin­ci­pa­le­ment dans les mains et les pieds. Elles peuvent éga­le­ment pro­vo­quer des troubles fonc­tion­nels, affec­tant la diges­tion, la mic­tion ou encore l’audition. Un point com­mun aux neu­ro­pa­thies péri­phé­riques est la baisse du NAD+, une molé­cule clé pour l’énergie cel­lu­laire, la répa­ra­tion de l’ADN et la sur­vie des neurones. 

En quoi les neuropathies périphériques affectent-elles le quotidien des patients ?

Les neu­ro­pa­thies péri­phé­riques (NP) touchent des mil­lions de per­sonnes et résultent de diverses causes comme le vieillis­se­ment, les mala­dies neu­ro­dé­gé­né­ra­tives, le dia­bète ou les trai­te­ments anti­can­cé­reux. Elles entraînent des pertes d’équilibre, des troubles moteurs, audi­tifs et sen­so­riels, des dou­leurs chro­niques et une hyper­sen­si­bi­li­té, impac­tant for­te­ment la qua­li­té de vie. Ces souf­frances, sou­vent insup­por­tables après une chi­mio­thé­ra­pie touchent plus de 70 % des patients et peuvent conduire à une dimi­nu­tion très impor­tante de la qua­li­té de vie et à des états dépres­sifs graves. Trou­ver une solu­tion est donc une urgence médi­cale et sociale.

Comment les neuropathies périphériques sont-elles actuellement prises en charge ?

Les trai­te­ments actuels sont uni­que­ment pal­lia­tifs et peu effi­caces. Les anal­gé­siques, anti­épi­lep­tiques et anti­dé­pres­seurs réduisent par­tiel­le­ment la dou­leur sans trai­ter la cause sous-jacente ni d’autres symp­tômes comme la perte de sen­si­bi­li­té ou d’audition. Leurs effets secon­daires (séda­tion, troubles gas­tro-intes­ti­naux, dépen­dance) limitent leur usage pro­lon­gé. Il n’existe pas à ce jour de trai­te­ment pal­lia­tif effi­cace dis­po­nible sur le marché.

L’émergence de thérapies préventives, comme celle proposée par Saxol représente-t-elle un espoir majeur ? 

Ces approches visent à inter­ve­nir dès les pre­miers stades du déve­lop­pe­ment des NP pour évi­ter leur appa­ri­tion. Contrai­re­ment aux trai­te­ments pal­lia­tifs, les thé­ra­pies pré­ven­tives s’attaquent aux méca­nismes bio­lo­giques à l’origine des dégâts ner­veux, comme la pré­ven­tion de l’apoptose neu­ro­nale et la sti­mu­la­tion de la régé­né­ra­tion nerveuse.

Parmi toutes ces méthodes, qu’est-ce qui vous différencie ?

Saxol est née de la décou­verte d’une famille de com­po­sés, les Car­baS par le Dr. Lau­rence Lafa­ne­chère, des com­po­sés neu­ro­pro­tec­teurs ini­tia­le­ment étu­diés pour limi­ter les effets secon­daires des chi­mio­thé­ra­pies. Leur poten­tiel contre les neu­ro­pa­thies péri­phé­riques a conduit, avec le sou­tien de SATT Link­sium, à la struc­tu­ra­tion de notre pro­jet, autour du Dr. Vic­tor Jua­rez Per­ez et moi-même. En novembre 2024, Saxol SAS est créée pour se posi­tion­ner comme un acteur clé dans la pré­ven­tion des neu­ro­pa­thies péri­phé­riques, en ciblant d’abord celles induites par les chimiothérapies.

Comment fonctionnent les composés neuroprotecteurs que vous développez et en quoi sont-ils une avancée majeure ?

Carba11, le com­po­sé lead, est un can­di­dat-médi­ca­ment inno­vant conçu pour pré­ve­nir les neu­ro­pa­thies péri­phé­riques. Il agit en réta­blis­sant les niveaux de NAD+, une source d’énergie essen­tielle aux neu­rones, sou­vent réduite dans ces mala­dies. En sti­mu­lant l’enzyme NAMPT, qui joue un rôle clé dans le pro­ces­sus de pro­duc­tion du NAD+, Carba1 aide à pro­té­ger les cel­lules ner­veuses. Contrai­re­ment aux trai­te­ments actuels qui ne font que sou­la­ger les symp­tômes, cette approche vise à empê­cher la dégé­né­res­cence neu­ro­nale. Son mode d’action unique en fait un trai­te­ment pion­nier dans ce domaine.

Comment l’équipe de Saxol va-t-elle prouver l’efficacité clinique de Carba1 ?

Selon le Centre inter­na­tio­nal de recherche sur le can­cer (CIRC) et l’OMS, envi­ron 17 mil­lions de nou­veaux cas de can­cer ont été recen­sés en 2018, un chiffre qui pour­rait atteindre 26 mil­lions d’ici 2040. Plus de 50 % des patients reçoivent une chi­mio­thé­ra­pie en pre­mière ou deuxième ligne, un trai­te­ment effi­cace contre les tumeurs, mais res­pon­sable de nom­breuses neu­ro­pa­thies péri­phé­riques. En fai­sant le choix des Neu­ro­pa­thies Péri­phé­riques Chi­mio-Induites (NPCI) comme pre­mière cible de nos études, nous fai­sons un choix stra­té­gique majeur pour la san­té des malades. 

Comment votre innovation pourrait-elle améliorer la tolérance et l’efficacité des chimiothérapies ?

Selon les tests in vitro et in vivo, Carba1 peut pré­ve­nir les effets secon­daires des chi­mio­thé­ra­pies. Chez l’animal, son admi­nis­tra­tion en même temps que le Pacli­taxel (un agent de chi­mio­thé­ra­pie) a per­mis une tolé­rance com­plète au trai­te­ment. Appli­qué à l’humain, Carba1 pour­rait être pris en pré­ven­tion, dès le début de la chi­mio­thé­ra­pie. Il évi­te­rait aux patients de souf­frir des effets secon­daires, leur per­met­trait de mieux sup­por­ter leur trai­te­ment et rédui­rait le besoin de dimi­nuer les doses de chi­mio­thé­ra­pie en cas d’intolérance. Après la cure, Carba1 limi­te­rait aus­si les séquelles, notam­ment les neu­ro­pa­thies péri­phé­riques. Idéa­le­ment, tous les patients sous chi­mio­thé­ra­pie devraient pou­voir en béné­fi­cier pour mieux tolé­rer leur trai­te­ment et évi­ter la « double peine » des effets secondaires.

Quels sont les prochains jalons pour SAXOL ? Quels défis rencontrez-vous en tant que start-up deeptech ?

Pour mener à bien ce pro­jet, l’entreprise a besoin de finan­ce­ments. Nous pré­voyons plu­sieurs levées de fonds pri­vés, en com­plé­ment de finan­ce­ments non dilu­tifs, comme le Cré­dit d’Impôt Recherche (CIR) et d’autres aides publiques. Le bud­get glo­bal du pro­gramme s’élève entre 17 et 20 M€, dont 12 à 14 M€ seront levés en plu­sieurs tours de finan­ce­ment. À court terme, une pre­mière levée de fonds de 2 M€ est en cours pour ini­tier le programme.

Pourquoi avez-vous opté pour une campagne de crowdfunding en complément de votre levée de fonds ? Comment le grand public peut-il contribuer ?

Nous avons choi­si une cam­pagne de finan­ce­ment par­ti­ci­pa­tif en com­plé­ment d’un inves­tis­seur amé­ri­cain, qui s’est déjà enga­gé à finan­cer 1 M€ au pre­mier tour et 2 M€ au second. Nous avons sélec­tion­né Capi­tal­Cell, une pla­te­forme spé­cia­li­sée en san­té, après avoir obte­nu un avis favo­rable de leur comi­té d’experts. À tra­vers cette cam­pagne, où nous pré­voyons de lever entre 500 k€ et 1 M€, nous sou­hai­tons per­mettre à toutes les per­sonnes sen­sibles aux enjeux de san­té publique de contri­buer à leur échelle, et de sou­te­nir ain­si l’innovation fran­çaise, tout en béné­fi­ciant d’avantages fis­caux2.

Après tout, bien que nous ne le sou­hai­tions à per­sonne nous sommes tous poten­tiel­le­ment uti­li­sa­teurs des Car­baS… et pour­rions aus­si être fiers d’avoir contri­bué à leur déve­lop­pe­ment. Nous fina­li­sons actuel­le­ment les docu­ments néces­saires avant le lan­ce­ment de la cam­pagne pri­vée, puis publique, pré­vue entre avril et mai. Plus d’informations seront dis­po­nibles sur notre page Lin­ke­dIn [https://fr.linkedin.com/company/saxol] et sur la pla­te­forme de CapitalCell). 


Saxol en quelques mots

Saxol est une équipe plu­ri­dis­ci­pli­naire de cher­cheurs, d’ingénieurs, scien­ti­fiques et d’entrepreneurs spé­cia­li­sés en sciences de la vie. Forte d’une exper­tise en déve­lop­pe­ment de médi­ca­ments inno­vants et en inter­ac­tions avec les agences du médi­ca­ment, elle béné­fi­cie du sou­tien d’un conseil scien­ti­fique et médi­cal inter­na­tio­nal de haut niveau, incluant des experts en onco­lo­gie et en neu­ro­lo­gie (Neu­ro­pa­thies Péri­phé­riques Chi­mioIn­duites, NPCI).


1 Carba1 est le com­po­sé Lead d’une série de com­po­sés qu’on appelle les CarbaS.

2 Saxol, deep­tech phar­ma, est une Jeune Entre­prise Inno­vante de rup­ture, JEIR. Les contri­buables domi­ci­liés fis­ca­le­ment en France qui effec­tuent des sous­crip­tions en numé­raire au capi­tal de Saxol peuvent béné­fi­cier d’une réduc­tion d’impôt pou­vant aller jusqu’à 50 % du mon­tant souscrit.

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