Robert Schumann : Symphonie no 4, Concerto pour piano, Orchestrations des Études Symphoniques et de Carnaval

Robert Schumann : Symphonie no 4, Concerto pour piano, Orchestrations des Études Symphoniques et de Carnaval

Dossier : Arts, lettres et sciencesMagazine N°758 Octobre 2020
Par Marc DARMON (83)

Orchestre du Gewand­haus de Leipzig, Ric­car­do Chail­ly, Martha Arg­erich, piano

1 DVD ou 1 Blu-ray EuroArts

Robert Schumann : Symphonie no 4, Concerto pour piano, Orchestrations des Études Symphoniques et de Carnaval
Robert Schu­mann : Sym­phonie no 4, Con­cer­to pour piano, Orches­tra­tions des Études Sym­phoniques et de Carnaval

Un mag­nifique DVD, notam­ment grâce au magi­cien Chail­ly qui tran­scende l’orchestre de Schu­mann. Ric­car­do Chail­ly dirige ces con­certs en 2006 avec l’Orchestre du Gewand­haus de Leipzig, un des tout pre­miers orchestres au monde, dans la ville de Schu­mann, où beau­coup de ses œuvres ont été composées.

On a l’habitude de sous-éval­uer, voire de dén­i­gr­er l’œuvre sym­phonique de Schu­mann. Il faut recon­naître que le roman­tique Schu­mann (comme Schu­bert avant lui) s’est surtout mag­nifique­ment illus­tré dans les œuvres pour le piano, les lieder et la musique de cham­bre. Com­pos­er des sym­phonies après Beethoven était impres­sion­nant, il est vrai. On a égale­ment reproché à ces sym­phonies une orches­tra­tion mal­adroite. Mahler s’est même sen­ti obligé de les réorchestr­er (très réussi).

Une première partie de haute tenue

En pre­mière par­tie, après une sym­phonie n° 4 ten­due et impres­sion­nante, nous avons un pro­gramme de raretés, très intéres­santes : deux morceaux tirés des Études sym­phoniques pour piano, tran­scrites par un jeune Tchaïkovs­ki, et qua­tre du chef‑d’œuvre pianis­tique Car­naval, orchestrés par Mau­rice Rav­el pour le danseur Nijin­s­ki. Notons que, alors qu’on joue plus sou­vent les Tableaux d’une expo­si­tion de Mous­sorgs­ki dans sa ver­sion orchestrée par Rav­el que dans son orig­i­nal pour piano, on ne joue jamais l’orchestration que Rav­el a ten­tée du Car­naval de Schu­mann, prob­a­ble­ment parce qu’il n’a pas orchestré tout le cycle. 

Pour l’amour de Clara

En sec­onde par­tie, le Con­cer­to en la mineur, à la fois un des con­cer­tos les plus impor­tants du réper­toire et une œuvre clé de l’œuvre de Schu­mann. Le com­pos­i­teur le com­mença en 1840, l’année où son amour pour Clara Wieck put enfin se réalis­er, l’année où il com­posa nom­bre d’œuvres clés, dont de nom­breuses pièces pour piano et cycles de lieder. Ce con­cer­to est en trois mou­ve­ments, comme ceux de Mozart et Beethoven. Mais le mou­ve­ment médi­an n’est pas un mou­ve­ment lent. C’est en fait un scher­zo dont la par­tie cen­trale est un andan­ti­no. Il com­porte donc les qua­tre temps d’une sym­phonie, si bien qu’on peut con­sid­ér­er qu’il s’agit aus­si des pre­miers pas de Schu­mann dans l’univers symphonique.

Comme bon nom­bre de ses meilleures œuvres, le con­cer­to de Schu­mann est un hom­mage per­ma­nent à Clara et à son amour pour elle. Le thème ini­tial est même la tran­scrip­tion en nota­tion ger­manique de son nom. Clara, désor­mais Clara Schu­mann, créa le con­cer­to en 1845 et l’interpréta tout au long de sa vie, plus de trente ans après la mort de son mari. Si Clara Schu­mann est, selon de nom­breux témoins de l’époque, la plus grande femme pianiste du XIXe siè­cle, Martha Arg­erich est con­sid­érée par beau­coup comme la plus impor­tante femme pianiste actuelle. Il n’est pas éton­nant qu’elle adore le con­cer­to de Clara, et qu’elle y excelle.

Martha Argerich au sommet

C’est une grande per­for­mance de la pianiste et la direc­tion de Chail­ly est pré­cise et raf­finée, ce qui n’est pas tou­jours le cas pour des accom­pa­g­ne­ments de con­cer­to. Il est aus­si par­faite­ment enreg­istré (cela rend jus­tice au son chaleureux de l’orchestre et au touch­er d’Argerich) et filmé. L’image mon­tre de façon per­ti­nente et très réussie les instru­ments (superbes bois !) et le clavier. Elle ne cache rien non plus de ce qui rend la pianiste excep­tion­nelle, notam­ment son jeu con­tinû­ment sur le fil du rasoir, jouant à l’extrême bout des touch­es pour aug­menter la puis­sance, au point qu’on a peur pour elle qu’elle manque cer­taines notes, ce qui n’arrive naturelle­ment jamais.

En bis, le morceau d’introduction des Scènes d’enfants vient clô­tur­er un con­cert extra­or­di­naire où se côtoient de façon incroy­able trois des ouvrages pour piano prin­ci­paux de Schu­mann, sa sym­phonie la plus célèbre et son con­cer­to emblé­ma­tique pour Clara. 

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