Dominique Grésillon, directeur de l’École doctorale de l'X

Quoi de neuf, docteurs ?

Dossier : ExpressionsMagazine N°575 Mai 2002Par : Article publié dans X-Info, n° 126, avril 2002



Domi­nique Gré­sillon, direc­teur de l’École doc­to­rale, défend la recherche ins­ti­tu­tion­nelle publique (dont un pays ne peut pas se pas­ser) mais incite les étu­diants à élar­gir leur hori­zon au monde de l’entreprise, qu’ils connaissent pour le moment assez peu.
© X‑AUDIOVISUEL-PHILIPPE LAVIALLE

Depuis 1985, Poly­tech­nique est habi­li­tée à déli­vrer des diplômes de doc­to­rat. Aupa­ra­vant, il y avait, dans les labo­ra­toires de l’École, des étu­diants en thèse qui dépen­daient d’Orsay, de Paris VI, de Paris VII, etc. Depuis, l’École attire un nombre crois­sant de doc­to­rants qui s’inscrivent en thèse à l’X.

Ces doc­to­rants se sont trou­vés sous la res­pon­sa­bi­li­té d’un ser­vice qui s’est appe­lé “ études doc­to­rales ”, puis d’une direc­tion, “ la direc­tion du troi­sième cycle ”, qui s’intitule aujourd’hui “direc­tion de l’École doc­to­rale de l’X ”.

Pour l’année 2001–2002, 32 DEA existent sous la cotu­telle de l’X et d’une uni­ver­si­té ou grande école par­te­naire. 117 étu­diants sont ins­crits dans ces DEA et 281 sont en pre­mière, deuxième ou troi­sième année de thèse. Ces étu­diants sont, pour 40 % d’entre eux, d’anciens élèves ingé­nieurs de l’X et viennent, pour les autres, d’établissements dif­fé­rents. Quelles sont les oppor­tu­ni­tés qui s’ouvrent à eux une fois obte­nu leur diplôme de thèse ?

Post-doc or not post-doc ?

Domi­nique Gré­sillon, qui dirige l’École doc­to­rale, aborde la ques­tion du “ post-doc ”, ce com­plé­ment de for­ma­tion dans lequel s’engagent plu­sieurs d’entre eux : “ On sait que les jeunes doc­teurs qui se des­tinent à une car­rière dans la recherche publique doivent faire la preuve de leur qua­li­té non seule­ment par des publi­ca­tions mais aus­si par une mobi­li­té dans plu­sieurs ins­ti­tuts de recherche, si pos­sible internationaux.

C’est le but des stages “post-doc”. Cette phase de la car­rière est par­ti­cu­liè­re­ment riche, par l’expérience qu’elle donne au cher­cheur et par sa pro­duc­ti­vi­té. C’est sans doute l’une des phases où la pro­duc­ti­vi­té du cher­cheur est maximale.

Mais cette richesse a aus­si un coût. Les condi­tions finan­cières ou sta­tu­taires sont irré­gu­lières. C’est pour­quoi un cer­tain nombre de doc­teurs ne prennent pas cette voie et se voient offrir une situa­tion stable dès la thèse. ”

Anna Fontcuberta, présidente pendant l’année 2000 d’X’Doc
Anna Font­cu­ber­ta, pré­si­dente pen­dant l’année 2000 d’X’Doc, l’association des doc­to­rants de l’X, est aujourd’hui en post-doc à Cal­tech, aux États-Unis.
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L’École doc­to­rale a réa­li­sé une enquête sur la situa­tion des doc­teurs de l’X aus­si­tôt après leur sou­te­nance. Cette enquête a été menée auprès des 267 étu­diants ayant sou­te­nu leurs thèses de l’année sco­laire 1996–1997 à l’année sco­laire 1999–2000. L’analyse des réponses que les 34 d’entre eux ont bien vou­lu four­nir per­met de ran­ger ces doc­teurs de l’X dans deux grandes caté­go­ries : les 60 % qui ont eu une situa­tion sta­tu­taire stable au len­de­main de leur thèse et les 40% qui ont opté pour un stage post-doc ou assimilé.

Par­mi ceux figu­rant en situa­tion stable, cer­tains sont dans l’enseignement ou la recherche publique : l’approfondissement du post-doc n’est pas indis­pen­sable pour inté­grer ces emplois. Mais d’autres doivent la sta­bi­li­té de leur situa­tion à un emploi dans le monde de l’entreprise.

L’École doc­to­rale mène depuis plu­sieurs années une cam­pagne d’information sur ces débou­chés exis­tant dans le pri­vé. Il y a cinq ans, l’équipe de l’École doc­to­rale et Claude Weis­buch du labo PMC ont mis sur pied, avec plu­sieurs for­ma­teurs exté­rieurs, des ses­sions de pré­pa­ra­tion à l’insertion pro­fes­sion­nelle et d’initiation au monde de l’entreprise : les “ Doc­to­riales ”. Leur suc­cès va croissant.

Domi­nique Gré­sillon explique cette démarche : “L’idée com­mu­né­ment asso­ciée à l’industrie était peut-être autre­fois celle du tra­vail à la chaîne. Mais aujourd’hui les entre­prises qui marchent sont celles qui savent inno­ver. Les doc­to­rants ont donc un rôle déter­mi­nant à jouer dans la réus­site d’une éco­no­mie. Mais ils n’ont pas tou­jours conscience de ce poten­tiel. Depuis cinq ans, les Doc­to­riales les sen­si­bi­lisent à la valeur qu’ils peuvent appor­ter à un pro­jet d’équipe. Ils s’en rendent compte lors des acti­vi­tés qui y sont orga­ni­sées : visites d’entreprises, simu­la­tions de créa­tion de start-up, dis­cus­sions avec d’anciens doc­to­rants venus témoi­gner de leur expé­rience en entreprise.

En ce moment, les indus­triels, qui ont embau­ché un cer­tain nombre de doc­teurs pen­dant la période de crois­sance récente, s’aperçoivent que ces diplô­més sont très appréciables. ”

Est-ce à dire que le monde de la recherche publique est en train d’abdiquer en faveur du pri­vé ? “La recherche ins­ti­tu­tion­nelle publique, c’est une chance extra­or­di­naire de la France, répond Domi­nique Gré­sillon. Il faut encou­ra­ger les doc­to­rants qui veulent faire leur car­rière dans la recherche fondamentale.

Mais il y a des oppor­tu­ni­tés à sai­sir autre part. Je pense d’ailleurs qu’aucun cher­cheur, ni dans le public ni dans le pri­vé, ne peut faire son métier sans être concer­né par le reten­tis­se­ment éco­no­mique et social de son tra­vail : l’échéance est plus rapide dans l’industrie mais le CNRS ne mise pas sur les sec­teurs qui ne seront pas por­teurs dans les dizaines d’années qui viennent. ”

www.ecoledoctorale.polytechnique.fr

Sondage sur les docteurs de l'X (1996 - 2000)

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