Les grands ensembles

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°675 Mai 2012Par : Pierre Merlin (57)Rédacteur : Madeleine JULLIEN, Conservatrice générale des bibliothèquesEditeur : Paris – 2010 – La Documentation française, direction de l’information légale et administrative – 29, quai Voltaire, 75007 Paris.

On parle aujourd’hui des cités ou des quar­tiers sen­sibles. Ils ont été construits pen­dant les trente glo­rieuses et on les appe­lait alors les grands ensembles. Ils consti­tuaient la prin­ci­pale réponse à la crise du loge­ment de l’après-guerre. Pour la pre­mière fois, l’État inves­tis­sait mas­si­ve­ment dans le loge­ment social. Les archi­tectes pré­ten­daient mettre en oeuvre la charte d’Athènes (ins­pi­rée par Le Corbusier).

Couverture du livre : Les Grands EnsemblesLes pre­miers habi­tants y ont trou­vé un loge­ment cor­res­pon­dant à la taille de leur famille et doté de tout le confort sani­taire, ce qui n’était le cas que de 2% des loge­ments fran­çais au sor­tir de la guerre. Dès les années 1960, on a fus­ti­gé la mono­to­nie de l’architecture, l’absence d’emplois, de com­merces et d’équipements à proxi­mi­té, etc. À par­tir de 1978, la réforme du finan­ce­ment du loge­ment inci­ta les ménages à reve­nus moyens à acqué­rir une mai­son indi­vi­duelle en péri­phé­rie des villes. Ils furent rem­pla­cés par des familles plus pauvres, sou­vent d’origine étran­gère (on était à l’époque de la résorp­tion des bidon­villes et du regrou­pe­ment familial).On connaît la suite : pau­pé­ri­sa­tion, chô­mage, mon­tée du racisme, sen­ti­ment d’exclusion, tra­fics, vio­lence, émeutes.

Depuis les années 1970, les gou­ver­ne­ments ont mul­ti­plié les plans, tan­tôt pour amé­lio­rer le cadre bâti, tan­tôt pour aider à créer des emplois. Ces plans, dont le der­nier ava­tar est le pro­gramme natio­nal de réno­va­tion urbaine, n’ont pas été inutiles. Ils ont ralen­ti la spi­rale néga­tive, mais sans l’interrompre.

Le livre de Pierre Mer­lin replace ces quar­tiers en dif­fi­cul­té dans la longue durée. Ils sont nés d’un mou­ve­ment d’idée (le mou­ve­ment moderne) né entre les deux guerres, qui a ral­lié tous les acteurs après la guerre. Après la satis­fac­tion des débuts, ils ont subi une longue des­cente aux enfers. La crise des grands ensembles ne serait que le reflet exa­cer­bé de la crise actuelle de la socié­té fran­çaise. Une solu­tion est-elle pos­sible ? Il fau­dra beau­coup d’argent, beau­coup de temps (au moins une géné­ra­tion) et sur­tout beau­coup de volon­té collective.

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