Les Achats, un levier d’amélioration de la performance des entreprises

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°756 Juin 2020
Par Richard CARON

Cab­i­net de Con­seil opéra­tionnel, Meotec fait la jonc­tion entre le Con­seil en Stratégie et le Con­seil en ingénierie avec un focus par­ti­c­uli­er sur la dimen­sion Sup­ply Chain. Richard Caron, Prési­dent Fon­da­teur de Meotec, nous explique plus en détail le cœur de méti­er de son cab­i­net, son posi­tion­nement et revient égale­ment sur son exper­tise dans le domaine des Achats.

Meotec se positionne comme un cabinet de Conseil opérationnel. Pouvez-vous nous expliciter ce positionnement ?

Fort de ma dou­ble expéri­ence dans le Con­seil en Stratégie et en Ingénierie, j’ai pu me ren­dre compte d’une dichotomie très mar­quée sur le marché. D’un côté, il y a les cab­i­nets de Con­seil en Stratégie qui se nour­ris­sent d’audit pour établir des pré­con­i­sa­tions stratégiques afin de répon­dre à des prob­lé­ma­tiques d’internationalisation, d’accélération du proces­sus d’innovation, de péné­tra­tion de marché… De l’autre côté, il y a les cab­i­nets de Con­seil en Ingénierie qui délèguent des ressources, louent des ingénieurs. 

Entre les deux, de façon Dar­wini­enne, il y a peu d’acteurs pour accom­pa­g­n­er les entre­pris­es dans la tra­duc­tion de ces pré­con­i­sa­tions stratégiques ou organ­i­sa­tion­nelles en plans d’actions opéra­tionnels et con­crets, c’est à dire la for­mal­i­sa­tion d’un Plan de Man­age­ment de Projet.

J’ai créé Meotec pour répon­dre à ce besoin. Nous sommes un cab­i­net de Con­seil qui inter­vient en ges­tion de pro­jets et en achats dans la décli­nai­son et la for­mal­i­sa­tion des tac­tiques à met­tre en œuvre pour obtenir les résul­tats atten­dus avec un dou­ble focus ; la per­for­mance opéra­tionnelle (effi­cac­ité, agilité, délais) d’une part et économique (plan­nings, bud­gets), d’autre part. 

Depuis quelques années, la capacité à se transformer est devenue un atout stratégique pour les entreprises. Qu’avez-vous pu observer à ce niveau ? Comment appréhendez-vous cette dimension ? 

Il faut plutôt par­ler d’une néces­sité. Aujourd’hui, les entre­pris­es doivent se trans­former autour de 3 axes :

  • Les marchés : la mon­di­al­i­sa­tion, l’avènement du e‑commerce dans le secteur du B2B et du B2C ont boulever­sé les marchés. Pen­dant très longtemps, les entre­pris­es se pen­saient pro­prié­taires de leurs marchés. Aujourd’hui, elles en sont dev­enues locataires avec un bail pré­caire ! Elles sont chal­lengées, dis­rup­tées et dis­parais­sent par­fois. Dans ce con­texte, elles doivent tou­jours avoir à portée de main un plan de con­ti­nu­ité d’activité et être en veille per­ma­nente pour innover et anticiper les grandes ten­dances macro-économiques, les nou­veaux modes de con­som­ma­tion ou les oppor­tu­nités de repo­si­tion­nement sur des marchés émergents ; 
  • Les organ­i­sa­tions : il est pri­mor­dial de pou­voir se réor­gan­is­er avec agilité et en faisant preuve de con­fi­ance. Nous pen­sons ain­si que la décen­tral­i­sa­tion des piliers du man­age­ment est une bonne chose. En effet, une entre­prise agile est la fédéra­tion de petites équipes, de com­man­dos dynamiques et soudés qui sont plus en capac­ité de répon­dre aux enjeux et besoins de notre époque que les « grands corps d’armées » ;
  • Les Hommes et les Femmes : alors qu’on se demande encore com­ment nous allons tra­vailler avec la généra­tion Y, la suiv­ante, la généra­tion Z arrive déjà sur le marché du tra­vail dans un con­texte qui pousse à la remise en ques­tion et casse les codes étab­lis. Les clefs de la col­lab­o­ra­tion et de la cohab­i­ta­tion entre ces dif­férentes généra­tions sont plus que jamais l’écoute, la capac­ité à don­ner du sens et la volon­té de val­oris­er les straté­gies « bot­tom-up ». Cette approche per­met d’agréger et d’engager les forces vives autour d’un objec­tif commun.

Vous avez développé une véritable expertise dans le domaine des Achats. Quelle est votre approche de ce domaine ? Comment accompagnez-vous vos clients à ce niveau ? 

La fonc­tion Achats s’articule autour de dif­férents leviers qui sont des vecteurs de per­for­mance économique et indus­trielle. Les entre­pris­es doivent acheter mieux, moins et moins cher, mais aus­si plus vite. Mieux en faisant preuve de plus de trans­parence, de pro­jec­tion, d’objectivité, de respon­s­abil­ité et de sol­i­dar­ité dans le choix de leurs four­nisseurs et de leurs sous-trai­tants. Un cab­i­net externe apporte cette objec­tiv­ité et garan­tit que les Achats ne sont pas sujet à des logiques d’entente, d’usage, de facil­ité ou de sur-spé­ci­fi­ca­tion. Cela demande de pou­voir refaire régulière­ment une analyse de la valeur, des sourc­ing alter­nat­ifs et de chal­lenger les déci­sions pris­es au ser­vice des objec­tifs. En par­al­lèle, elles doivent acheter moins pour s’inscrire dans une démarche RSE qui vise à réduire et éviter la sur­con­som­ma­tion, le gaspillage, les excé­dents dans les stocks… Il faut donc adopter un posi­tion­nement d’« acheteur trad­er » et mod­élis­er la saison­nal­ité pour déclencher les proces­sus Achats au bon moment, anticiper les inflex­ions de marché, coller à la stratégie de l’entreprise.

Enfin, elles doivent égale­ment acheter moins cher. Cela passe par la capac­ité à négoci­er, à co-con­stru­ire des straté­gies de parte­nar­i­at avec les four­nisseurs, à co-inve­stir et à se pro­jeter sur le long terme pour pré­par­er dès à présent les pro­duits ou les ser­vices dont l’entreprise aura besoin demain. 

Au cours des dernières années, de nou­veaux sujets ont aus­si émergé. Actuelle­ment, nous tra­vail­lons notam­ment sur :

Les achats dig­i­taux tels que l’achat de con­tenu : il s’agit d’une nou­velle famille d’achats pour laque­lle il n’existe pas encore de mod­èles économiques clairs ou de retours d’expérience. Nous tra­vail­lons ain­si sur la pro­fes­sion­nal­i­sa­tion de ces achats dig­i­taux (achat de vis­i­bil­ité, bande pas­sante, nom­bre de vues, clics…), ain­si que sur les mod­èles de fac­tura­tion et de coûts ; 

Les achats auprès des start-up : il y a, à ce niveau, une néces­sité d’adapter les mod­èles de col­lab­o­ra­tion et de con­trac­tu­al­i­sa­tion pour sim­pli­fi­er et ratio­nalis­er les procé­dures afin qu’ils ne devi­en­nent pas un obsta­cle à la créa­tion de valeur. 

Acteur reconnu de ce domaine, vous êtes aussi partenaire des Trophées Décision Achats. De quoi s’agit ?

C’est un évène­ment qui a pour objec­tif de val­oris­er la com­mu­nauté Achats dans son ensem­ble. Au cours des vingt dernières années, la fonc­tion s’est pro­fes­sion­nal­isée et elle est aujourd’hui un des plus gros leviers d’amélioration de la per­for­mance des entre­pris­es. En effet, cer­tains gros indus­triels du CAC40 achè­tent pour plus de 80 % de leur CA. Elle prend aus­si une plus grande impor­tance dans les comités de direc­tion des entre­pris­es, les comex. L’acheteur est devenu un Busi­ness Partner. 

Nous sommes parte­naires de ces trophées depuis 10 ans. C’est l’occasion de ren­con­tr­er les dif­férents acteurs de cet écosys­tème, de met­tre en avant de beaux par­cours, des ini­tia­tives, des actions respon­s­ables ou inno­vantes dans ce domaine. 

Enfin, nous avons été à l’origine du Prix Étu­di­ant Achats, qui récom­pense des travaux de recherch­es (mémoires, thès­es, rap­ports de stage…) qui font avancer la pro­fes­sion dans son ensemble. 

Le contexte actuel est marqué par la gestion de crise liée au Coronavirus. Quels sont les besoins et les enjeux des entreprises dans ce cadre ? 

La vul­néra­bil­ité de nos chaînes d’approvisionnement se révèle à nous avec bru­tal­ité. L’ampleur de notre dépen­dance à des pays loin­tains, des four­nisseurs de pro­duits ou ser­vices, des poli­tiques étrangères, nous asphyx­ie. Les iné­gal­ités sec­to­rielles n’ont jamais été aus­si cinglantes. Tan­dis que les secteurs du food, du e‑commerce ou des équipements médi­caux tour­nent à plein régime, les secteurs du tourisme, des trans­ports aériens, de la restau­ra­tion ou du retail enta­ment leur troisième mois sans chiffre d’affaires. Un par­a­digme schiz­o­phrène dans lequel cohab­itent extrêmes pénuries et arrêts de fab­ri­ca­tion, sur­me­nage et chô­mage partiel.

Dans ce con­texte, nous con­seil­lons les plus chanceux dans la sécuri­sa­tion de leurs fil­ières d’approvisionnement pour qu’ils puis­sent con­tin­uer à ven­dre et à aug­menter leur vol­ume d’activité. Pour cela, nous les accom­pa­gnons dans un tra­vail de re-sourc­ing des four­nisseurs en amont et des trans­porteurs en aval, de rené­go­ci­a­tion des ser­vice-lev­el agree­ments, de ges­tion d’appels d’offres.

Pour ceux qui voient leurs marchés his­toriques en perdi­tion, car leurs four­nisseurs ne pro­duisent plus, parce que leurs clients ne con­som­ment plus, nous tra­vail­lons sur du fast resourc­ing hors zone Asie, sur la trans­for­ma­tion du busi­ness mod­èle, la remise à plat des struc­tures de coût ; l’évolution des mod­èles de vente ou de dis­tri­b­u­tion, l’élaboration de plans de con­ti­nu­ité ou de reprise d’activité ; ou encore la dématéri­al­i­sa­tion et le red­i­men­sion­nement des infra­struc­tures infor­ma­tiques per­me­t­tant de déploy­er effi­cace­ment le télétravail… 

Quelles leçons devons-nous en tirer pour l’avenir ?

Quand l’environnement se grippe, le pre­mier réflexe est en général de remet­tre ses coûts sur la sel­l­ette. Il fau­dra néan­moins que la fonc­tion achats se réin­vente et dépasse la maîtrise des coûts pour con­cili­er créa­tion de valeur (prix, inno­va­tion, entre­prise éten­due) et respect des valeurs (relo­cal­i­sa­tion, sécu­rité, développe­ment durable, RSE, gouvernance).


En bref

  • Créa­tion en 2005
  • Une crois­sance exclu­sive­ment organique 
  • Un CA mul­ti­plié par 40 en 15 ans – de 1 mil­lion d’euros en 2005 à 40 mil­lions en 2020
  • 350 col­lab­o­ra­teurs
  • Des bureaux à Paris, Lyon, Lille, Brux­elles, Milan et bien­tôt Madrid
  • Plus de 3 000 mis­sions réalisées
  • Nom­iné 7 fois au Prix de l’Entrepreneur par Ernest & Young
  • Lau­réat, entre autres, de l’European Busi­ness Awards en 2018 et 2019, du CEO TODAY Award
  • Une entre­prise par­i­taire avec 52 % de femmes 

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