Le temps des hélices

Dossier : Trafic aérienMagazine N°535 Mai 1998
Par Claude BECHET

Les habitués des voy­ages aériens que sont les respon­s­ables de notre indus­trie (et, par voie de con­séquence, la plu­part des ingénieurs) n’ont pas man­qué de con­stater, avec sans doute un peu d’é­ton­nement, qu’au cours de leurs déplace­ments, ils étaient sou­vent trans­portés à bord d’ap­pareils à hélices, cette tech­nolo­gie pour­tant promise autre­fois à une dis­pari­tion rapi­de par la révo­lu­tion du ” jet “.

La rai­son de cette évo­lu­tion tient au fait que ces appareils équipés de tur­bo­propulseurs de nou­velle généra­tion n’ont rien à envi­er aux appareils à réac­tion aus­si bien en ce qui con­cerne leur struc­ture, leurs sys­tèmes et leur équipement élec­tron­ique, qu’ils sont cer­ti­fiés selon les mêmes normes et répon­dent aux mêmes exi­gences de sécu­rité et qu’ils présen­tent en même temps des avan­tages con­sid­érables en ter­mes de coût d’ex­ploita­tion, de sim­plic­ité de mise en œuvre et de respect de l’environnement.

Il n’est pas inutile de rap­pel­er briève­ment l’his­torique de la struc­ture des réseaux du trans­port aérien et de l’évo­lu­tion des appareils. L’ère indus­trielle du trans­port aérien a débuté avec le ” boom ” économique de l’après-guerre, essen­tielle­ment basé sur les réseaux moyens et longs-cour­ri­ers, les lignes régionales étant qua­si inex­is­tantes. Les avions étaient équipés de moteurs à pis­tons et d’hélices sou­vent dérivés d’ap­pareils mil­i­taires dévelop­pés pen­dant ou avant la guerre.

Vers le milieu des années 50 apparurent les pre­miers jets com­mer­ci­aux. Ceux-ci appor­taient au pas­sager une diminu­tion de près de la moitié du temps de vol sur les étapes longues ain­si qu’un con­fort cer­tain lié à la réduc­tion du bruit et des vibrations.

Aux com­pag­nies, ces avions per­me­t­taient, par leur vitesse, une pro­duc­tiv­ité bien meilleure. La sécu­rité était améliorée essen­tielle­ment par le gain énorme de fia­bil­ité des réac­teurs par rap­port aux moteurs à pis­tons (ce qui dimin­u­ait en con­séquence les coûts de main­te­nance) et le car­ac­tère moins dan­gereux du kérosène util­isé com­paré à l’essence.

Au total, et mal­gré une con­som­ma­tion impor­tante d’un car­bu­rant (bon marché à l’époque), le jet s’est vite révélé imbat­table économique­ment pour les capac­ités supérieures à 80 places et les étapes moyennes et longues car­ac­térisant l’essen­tiel du réseau d’alors.

Les tur­bo­propulseurs sont apparus à la même époque et béné­fi­ci­aient de cer­tains avan­tages des jets, notam­ment la fia­bil­ité du moteur et la sécu­rité du car­bu­rant util­isé (on oublie sou­vent qu’il y a beau­coup plus de simil­i­tude entre un réac­teur et un tur­bo­propulseur qu’en­tre ce dernier et un moteur à pis­tons). Au béné­fice du tur­bo­propulseur, une con­som­ma­tion bien plus faible et des per­for­mances de décol­lage améliorées.

Son prin­ci­pal défaut, une vitesse inférieure, se révéla décisif et tous les tur­bo­propulseurs con­cur­rents directs des jets eurent une exis­tence com­mer­ciale mar­ginale (Elec­tra, Van­guard…). Les seuls tur­bo­propulseurs qui survécurent avaient une capac­ité inférieure à 50 sièges, et étaient bien adap­tés au marché des liaisons cour­tes à faible traf­ic, sou­vent dans des pays man­quant d’in­fra­struc­ture ou à la géo­gra­phie dif­fi­cile, liaisons typ­ique­ment assurées jusque-là par des Dou­glas DC3.

L’ex­em­ple type de ces tur­bo­propulseurs est le Fokker 27, conçu à la fin des années 50 et qui, en plus de vingt ans de com­mer­cial­i­sa­tion, prof­i­tant de l’émer­gence du trans­port région­al, s’est ven­du dans ses dif­férentes ver­sions à plus de 750 exem­plaires. Son con­cur­rent direct, l’AVRO 748 bri­tan­nique, a suivi une car­rière par­al­lèle et un suc­cès com­mer­cial très hon­or­able avec plus de 350 appareils ven­dus durant la même péri­ode. Dans la caté­gorie des petits avions de moins de 20 places, cer­tains, comme le Twin Otter cana­di­en, furent des suc­cès mondiaux.

On con­state donc que le marché des tur­bo­propulseurs com­mer­ci­aux n’a jamais dis­paru mais que la faib­lesse rel­a­tive de ce marché (moins de 1 200 machines de 40 à 50 sièges en presque vingt-cinq ans, c’est peu com­paré aux mil­liers de jets de tous types ven­dus pen­dant la même péri­ode) a dis­suadé les con­struc­teurs de lancer de nou­veaux pro­grammes dans cette gamme d’ap­pareils jusqu’à la fin des années 70. Les quelques ten­ta­tives (Nord 262 français, Shorts 330 et 360 bri­tan­niques, Dash 7 cana­di­en) sont restées des semi-échecs commerciaux.

Durant la même péri­ode, on assis­tait du côté des jets à une pro­liféra­tion de nou­veaux mod­èles, les vénérables Comet, 707 et Car­avelle étant rapi­de­ment sur­passés par des appareils plus gros, plus économes et plus mod­ernes, la tech­nolo­gie avançant à pas de géant dans tous les domaines : aéro­dy­namique, moteurs, struc­tures et sys­tèmes. Cette évo­lu­tion était dic­tée par un marché en crois­sance soutenue, dont l’os­sa­t­ure restait un réseau de grandes lignes moyen ou long-cour­ri­er, le trans­port région­al pro­pre­ment dit (dis­tances de moins de 500 km et faible traf­ic) restant marginal.

C’est ain­si que, s’il existe un monde d’évo­lu­tions tech­nologiques entre un Air­bus A340 et un Boe­ing 707 de la pre­mière généra­tion, les dif­férences entre un Fokker 27 livré au début des années 60 et vingt ans après sont beau­coup plus restreintes.
Les mod­erni­sa­tions exis­tent mais sont essen­tielle­ment “cos­mé­tiques” amélio­rant le bruit et l’aspect de l’amé­nage­ment intérieur par exem­ple. Mais le moteur, l’hélice, la struc­ture et les sys­tèmes restent fon­da­men­tale­ment identiques.

Les années 70 vont con­naître deux véri­ta­bles séismes ébran­lant l’ensem­ble du trans­port aérien mondial.

Le pre­mier fut le choc pétroli­er, con­duisant en quelques années au quadru­ple­ment du prix du pét­role et aggra­vant en con­séquence le poids du car­bu­rant dans le coût d’ex­ploita­tion total des avions.

Le sec­ond fut aux États-Unis la poli­tique de déré­gle­men­ta­tion com­mencée en 1978 et dont les derniers soubre­sauts, quinze ans après, se font encore sen­tir, sans par­ler de l’ef­fet d’en­traîne­ment de cette poli­tique dans les autres pays, notam­ment au sein de la CEE.

Ces deux chocs vont, aux États-Unis qui sont comme cha­cun sait le plus gros marché du trans­port aérien, boule­vers­er la struc­ture de cette indus­trie et con­duire au développe­ment accéléré du trans­port régional.

Avant la déré­gle­men­ta­tion, l’at­tri­bu­tion d’une ligne à une grande com­pag­nie était décidée par un organ­isme fédéral, le CAB (Civ­il Aero­nau­tic Board) et assor­tie d’un cer­tain nom­bre de con­traintes sur les tar­ifs lim­i­tant ain­si la con­cur­rence, et bien sou­vent de l’oblig­a­tion pour la com­pag­nie d’as­sur­er une ligne sec­ondaire non rentable.

La plu­part du temps, les com­pag­nies rem­plis­saient cette oblig­a­tion avec les avions disponibles dans leur flotte, essen­tielle­ment des petits jets tels que les 737 ou les DC9, mal adap­tés parce que trop gros et trop gour­mands en car­bu­rant pour de telles lignes. Avec un prix du kérosène propul­sé à plus d’un dol­lar par gal­lon, cette sit­u­a­tion deve­nait inten­able. La déré­gle­men­ta­tion abolis­sait toutes ces con­traintes au prof­it de la loi du marché et de la con­cur­rence libre entre les compagnies.

La pre­mière réac­tion des grandes com­pag­nies fut d’a­ban­don­ner les lignes sec­ondaires non renta­bles pour se bat­tre sur les liaisons prin­ci­pales, libérant ain­si un marché impor­tant aux com­pag­nies “com­muters”, typ­ique­ment équipées de tur­bo­propulseurs bien adap­tés à ce type de lignes.

La sec­onde réac­tion de l’ensem­ble des trans­porteurs aériens fut ensuite d’en­tamer une véri­ta­ble guerre des tar­ifs qui eut deux con­séquences majeures :

  • la dis­pari­tion par fail­lite ou par rachat d’un grand nom­bre de com­pag­nies par­mi les plus faibles,
  • une crois­sance soutenue du traf­ic par la baisse des prix, crois­sance béné­fi­ciant aux grandes com­pag­nies (6 % par an de crois­sance du traf­ic domes­tique ces dernières années) mais plus encore aux com­pag­nies régionales avec plus de 12 % de crois­sance moyenne depuis la déré­gle­men­ta­tion, et une part de marché qui atteint main­tenant 10 % du traf­ic total.

C’est ain­si que l’on vit fleurir pas moins de 7 pro­jets d’avions ” com­muters ” au début des années 80, dans la gamme des 30 à 70 sièges, tous ces pro­jets voy­ant effec­tive­ment le jour avec une pro­duc­tion en série.
Bien des experts prédi­s­aient à l’époque la dis­pari­tion de cer­tains de ces pro­jets, du fait de l’ex­cès de con­cur­rence généré par cette avalanche de mod­èles. Or aujour­d’hui ces avions sont tous com­mer­cial­isés avec des réus­sites vari­ables mais quelque­fois spec­tac­u­laires, deux d’en­tre eux (l’A­TR 42 fran­co-ital­ien et le DH8 cana­di­en) ayant même don­né nais­sance à des ver­sions agrandies pour répon­dre à la demande du marché, ver­sions qui ont été mis­es en ser­vice dès 1989.
Dans le même temps, deux motoristes majeurs (Gen­er­al Elec­tric aux États-Unis et Pratt & Whit­ney au Cana­da) dévelop­paient des tur­bo­propulseurs de nou­velle tech­nolo­gie capa­bles de propulser ces nou­veaux avions.

C’est ain­si que, depuis 1978, les com­pag­nies régionales améri­caines ont vu leur traf­ic mul­ti­plié par plus de 3 en ce qui con­cerne le nom­bre de pas­sagers trans­portés et par 4 en nom­bre de pas­sagers par kilomètre.

Bien enten­du une telle évo­lu­tion, assez facile­ment prévis­i­ble par les plan­i­fi­ca­teurs économiques, avait été anticipée par les con­struc­teurs aéro­nau­tiques aux­quels elle ouvrait un marché promet­teur dans le domaine des appareils régionaux, sans par­ler du marché de rem­place­ment des tur­bo­propulseurs d’an­ci­enne tech­nolo­gie vieillissants.

Les raisons de la supéri­or­ité de la for­mule tur­bo­propulseur pour le trans­port région­al n’ont pas changé depuis les années 50, et sont d’or­dre économique et technique.

Ayant comblé son retard tech­nologique sur le jet et offrant aujour­d’hui une large gamme d’ap­pareils mod­ernes, le tur­bo­propulseur est assuré aujour­d’hui de con­stituer, surtout dans les pays les moins bien équipés, la base de développe­ment du trans­port aérien région­al jusqu’à la fin du siè­cle et au-delà.

La technique des turbopropulseurs

Ces moteurs sont apparus à la même époque que les réac­teurs, ce qui n’est pas éton­nant lorsque sont mis­es en évi­dence les simil­i­tudes de ces deux types de machine.

Con­traire­ment aux moteurs à pis­tons, ce sont des machines pure­ment rota­tives (sans mou­ve­ment alter­natif) ce qui présente de très nom­breux avan­tages dans les domaines de la fia­bil­ité, de l’usure et des vibra­tions. De plus, l’ab­sence de mou­ve­ment alter­natif per­met des vitesses de rota­tions beau­coup plus élevées et cor­réla­tive­ment une puis­sance spé­ci­fique (ou rap­port puis­sance sur poids) bien meilleure, ce qui est la clé de l’ef­fi­cac­ité en aéronautique.

Enfin, de taille très inférieure au moteur à pis­tons pour une puis­sance don­née et néces­si­tant beau­coup moins d’air de refroidisse­ment, le tur­bo­propulseur peut être logé dans une nacelle de dimen­sions réduites amélio­rant la traînée aéro­dy­namique et le ren­de­ment de l’hélice.

Dans le cas d’un tur­bo­propulseur, la qua­si-total­ité de l’én­ergie pro­duite par un ” généra­teur de gaz ” est récupérée par des étages sup­plé­men­taires de tur­bine qui entraî­nent, par l’in­ter­mé­di­aire d’un réduc­teur, une hélice.

La grande effi­cac­ité énergé­tique du tur­bo­propulseur découle de ce principe.

La poussée utile du réac­teur provient de l’ac­céléra­tion à grande vitesse d’une petite quan­tité d’air. Celle du tur­bo­propulseur provient de la petite accéléra­tion imprimée par l’hélice à une grande quan­tité d’air. Les principes de la physique enseignent que ce dernier mode de propul­sion est très net­te­ment plus économique en énergie que le précédent.

En revanche, l’hélice elle-même est lim­itée vers les hautes vitesses par des prob­lèmes spé­ci­fiques que ne con­nais­sent pas les réacteurs.

Les pro­grès très impor­tants obtenus depuis plus de vingt ans de développe­ment des réac­teurs (matéri­aux, aéro­dy­namique interne, mécanique, élec­tron­ique…) furent inté­grés par les motoristes dans la nou­velle généra­tion des tur­bo­propulseurs. La com­para­i­son d’un des ces moteurs, le PW 120 de Pratt & Whit­ney Cana­da (qui équipe notam­ment l’A­TR 42 fran­co-ital­ien et le DH8 cana­di­en) avec le vénérable Dart mon­té sur les Fokker 27 et AVRO 748 et dont les pre­miers mod­èles remon­tent à 1945, est élo­quente. Pour une même gamme de puis­sance, le nou­veau moteur est plus léger de plus de 30 % et con­somme 12 % de moins à puis­sance don­née. Sa régu­la­tion est plus évoluée et lui per­met notam­ment de con­duire l’avion au sol à des régimes réduits beau­coup plus silencieux.

Depuis les pre­miers réac­teurs, les motoristes ont bien enten­du essayé d’en amélior­er la con­som­ma­tion en s’in­spi­rant du principe du tur­bo­propulseur. C’est ain­si qu’ils inven­tèrent le ” tur­bo­fan ” ou réac­teur à dou­ble flux, dans lequel des tur­bines sup­plé­men­taires récupèrent une par­tie de l’én­ergie des gaz pour entraîn­er un ” fan “, qui est en fait une hélice carénée.
L’amélio­ra­tion obtenue fut con­sid­érable mais mal­gré ces pro­grès, à même niveau de tech­nolo­gie, le tur­bo­propulseur reste la méthode de propul­sion la plus économique en car­bu­rant pour un avion.

L’hélice a égale­ment prof­ité des avancées technologiques.

L’a­lu­mini­um mas­sif des pales a été rem­placé en grande par­tie ou totale­ment par des matéri­aux com­pos­ites. Ceci, com­biné à des pro­fils aéro­dy­namique­ment plus per­for­mants, per­me­t­tant des pales moins larges, a réduit con­sid­érable­ment le poids de ces dernières. En con­séquence, les charges cen­trifuges sur le moyeu ont été dimin­uées et celui-ci a pu être allégé.

Au total, la nou­velle hélice, toutes choses égales par ailleurs, est plus légère que l’an­ci­enne d’en­v­i­ron 40 %, induit donc moins de vibra­tions et est plus facile à équili­br­er. Opti­misée pour des vitesses de rota­tion plus lentes, elle génère égale­ment moins de bruit aus­si bien à l’ex­térieur que dans la cabine.

L’aéro­dy­namique est bien évidem­ment un autre domaine fon­da­men­tal de la tech­nique aéronautique.

Les avancées dans ce domaine, pour­tant bien réelles, sont moins per­cep­ti­bles pour le pas­sager. Il faut dire que les pro­grès majeurs des deux dernières décen­nies touchent surtout au domaine transsonique fréquen­té par les jets.

Mal­gré une allure plus mod­erne, les nou­veaux tur­bo­propulseurs utilisent essen­tielle­ment des pro­fils sim­i­laires à leurs prédécesseurs. Les tech­niques de cal­cul numérique ont per­mis de mieux cern­er les efforts aéro­dy­namiques et, en dimen­sion­nant l’avion plus pré­cisé­ment, d’al­léger la structure.

Les choix tech­niques pour la struc­ture des avions tur­bo­propulseurs mod­ernes reflè­tent la volon­té d’of­frir une grande longévité opéra­tionnelle et des coûts d’en­tre­tien faibles, avec une util­i­sa­tion très éten­due des matéri­aux com­pos­ites, leur appli­ca­tion entraî­nant un gain de charge marchande et une économie de car­bu­rant, la dis­pari­tion des phénomènes de cor­ro­sion et une très bonne résis­tance en fatigue.

On peut enfin ajouter qu’en ter­mes de “dessin enveloppe”, il n’y a pas de règle absolue. Les solu­tions choisies par les dif­férents con­struc­teurs font appel à des tech­niques sou­vent dis­sem­blables comme par exemple :

  • la voil­ure haute ou basse,
  • les trains d’at­ter­ris­sage prin­ci­paux sous fuse­lage ou sous nacelles moteurs,
  • la sec­tion du fuse­lage bilobe, cylin­drique ou autre,
  • la dis­tance entre moteurs et fuse­lage, etc. Cha­cune de ces tech­niques a bien évidem­ment ses avan­tages et ses incon­vénients et a ses pro­pres effets sur des paramètres tels que con­fort, per­for­mance ou maintenance.


Une large part des aspects tech­niques des tur­bo­propulseurs de nou­velle généra­tion doit être con­sacrée aux prin­ci­paux sys­tèmes dont ils sont dotés. Les con­struc­teurs ont pour tâche d’in­té­gr­er, dans une cel­lule définie sur la base des con­cepts généraux struc­turaux ci-dessus évo­qués, un ensem­ble de sys­tèmes néces­saires à une util­i­sa­tion effi­cace et sûre de l’avion tant au point de vue pilotage et main­te­nance que con­fort des pas­sagers. Les avions de nou­velle tech­nolo­gie doivent attein­dre des objec­tifs, sou­vent ambitieux, de robustesse, de fia­bil­ité et de con­fort. Bien sûr, ces objec­tifs doivent tenir compte aus­si de con­sid­éra­tions économiques liées à une exploita­tion rationnelle de l’avion.

Sur les tur­bo­propulseurs de nou­velle tech­nolo­gie tout a été fait pour assur­er non seule­ment un grand con­fort aux pas­sagers mais aus­si pour réduire les charges de tra­vail des pilotes qui sont appelés d’ailleurs sur ce genre d’ap­pareils à réalis­er une série sou­vent impor­tante de vols de courte durée. Ain­si sur cer­tains tur­bo­propulseurs, le cock­pit a été défi­ni suiv­ant les mêmes règles de clarté, d’ac­ces­si­bil­ité et de sim­plic­ité que sur des gros por­teurs. Un exem­ple, la tech­nique du bou­ton pous­soir et le principe du tout éteint : l’u­til­i­sa­tion de l’in­ter­rup­teur d’an­tan et de son voy­ant asso­cié est rem­placée par un sim­ple bou­ton pous­soir qui a trois fonc­tions (alarme, com­mande de l’équipement asso­cié et indi­ca­tion d’é­tat de celui-ci). On peut réduire la descrip­tion de son fonc­tion­nement à ” tout est éteint donc tout va bien “. D’où sim­plic­ité d’emploi et com­préhen­sion claire.

Si la rus­tic­ité est sou­vent de mise sur les com­muters mod­ernes, au moins un groupe de sys­tèmes ne répond pas à cette règle, c’est l’avion­ique. Les expéri­ences acquis­es dans ce domaine font qu’il est aujour­d’hui absol­u­ment néces­saire, afin de béné­fici­er d’un niveau supérieur de fia­bil­ité mais aus­si de qual­ité d’in­for­ma­tion, d’u­tilis­er les dernières tech­nolo­gies. On peut citer entre autres les tubes cathodiques ou “EFIS” qui rem­pla­cent sys­té­ma­tique­ment les anciens instru­ments élec­tro­mag­né­tiques du passé et qui sont de véri­ta­bles écrans de “télévi­sion” sur lesquels appa­rais­sent toutes les infor­ma­tions de base, plus d’autres qui jusqu’à main­tenant ne fig­u­raient pas.

Les tur­bo­propulseurs comme les jets doivent vol­er en toutes con­di­tions. Pour cou­vrir les cas extrêmes comme les vols en con­di­tions givrantes, ces appareils sont équipés d’un sys­tème de dégivrage pneu­ma­tique pro­tégeant les par­ties les plus exposées de l’avion à savoir les bor­ds d’at­taque de la voil­ure et de l’empennage. Ain­si la glace qui se forme sur ces bor­ds d’at­taque est péri­odique­ment brisée par le gon­flage de mate­las dégivreurs en caoutchouc. Un autre sys­tème de pro­tec­tion est l’an­ti-givrage élec­trique, util­isé entre autres pour les hélices et les pare-brise.

Enfin, les sys­tèmes de vol automa­tiques per­me­t­tent aujour­d’hui d’as­sur­er un con­fort total aux pas­sagers même en con­di­tion de vol en tur­bu­lences. De plus, sur les tur­bo­propulseurs de nou­velle généra­tion des atter­ris­sages à min­i­ma réduit peu­vent être réal­isés. Ceci per­met entre autres d’as­sur­er des vols avec une grande régularité.

Cer­tains con­struc­teurs vont jusqu’à ajouter un sys­tème automa­tique de détec­tion qui informe les pilotes de for­ma­tion de glace. Il s’ag­it là d’un sys­tème de recon­nais­sance des con­di­tions givrantes qui assiste le pilote dans son tra­vail. Un tel sys­tème représente un fac­teur sup­plé­men­taire de sécu­rité, en per­me­t­tant à l’équipage d’ap­pli­quer sans délais les procé­dures adaptées.

Enfin, le dernier point de cette présen­ta­tion de quelques sys­tèmes est celui des sources aux­il­i­aires d’én­ergie. Sur cer­tains types d’ap­pareil, il est instal­lé (sou­vent en option) un “APU”(Auxiliary pow­er unit). Il s’ag­it en fait d’un véri­ta­ble petit moteur, la plu­part du temps util­is­able unique­ment au sol. L’in­con­vénient majeur d’un tel sys­tème est l’aug­men­ta­tion de masse que cela entraîne. Par con­tre, sur cer­tains appareils, en option et par­fois même en série, on trou­ve aujour­d’hui un frein d’hélice mon­té sur un moteur et qui per­met d’avoir tous les avan­tages de “l’A­PU” à un coût min­i­mal et pour quelques kilo­grammes seulement.

Robustesse, sim­plic­ité, fia­bil­ité, acces­si­bil­ité, voici les prin­ci­paux critères de déf­i­ni­tion des sys­tèmes d’un tur­bo­propulseur de nou­velle technologie.

Le confort des turbopropulseurs

Que ce soit celui d’une voiture ou celui d’un avion, le pas­sager de nos jours est très sen­si­ble à la notion de con­fort et est devenu de plus en plus exigeant en la matière.

L’an­cien con­cept selon lequel le niveau de con­fort doit être, en règle générale, pro­por­tion­nel à la durée du par­cours est désor­mais révolu. Les moyennes et petites étapes sont de nos jours con­sid­érées comme une suite logique des longs par­cours et les usagers des moyens de trans­port apprécieraient mal d’être achem­inés d’un point à un autre dans des con­di­tions de con­fort suc­ces­sives trop dif­férentes les unes des autres.

Le con­fort n’est évidem­ment pas le seul paramètre d’ap­pré­ci­a­tion de la qual­ité d’un ser­vice ou d’un pro­duit, mais cette ques­tion a pris une impor­tance telle qu’il est indis­pens­able d’es­say­er d’en com­pren­dre les raisons et donc d’analyser ses pro­pres composantes.

Il est intéres­sant de men­tion­ner que la notion de con­fort est suff­isam­ment vaste pour y dis­tinguer des aspects directs et indi­rects. La sat­is­fac­tion d’un pas­sager, en effet, n’est pas seule­ment faite de per­cep­tions ou sen­sa­tions directes recueil­lies pen­dant la durée de son tra­jet mais aus­si faite d’im­pres­sions plus générales qu’il aura pu ressen­tir depuis son embar­que­ment à l’aéro­port de départ jusqu’à son arrivée à l’aéro­port de destination.

Avant de dévelop­per plus longue­ment les dif­férents aspects du con­fort direct pen­dant le temps de vol, exam­inons com­ment les pas­sagers peu­vent éprou­ver une sen­sa­tion de con­fort avant, pen­dant et en fin de vol.

D’abord la notion de temps min­i­mum passé en escale. L’ex­ploita­tion des tur­bo­propulseurs a réduit sen­si­ble­ment la durée des escales. Leur taille per­met en effet de faire le trans­bor­de­ment com­plet des pas­sagers et des bagages, le net­toy­age cab­ine et toi­lettes, le charge­ment gal­ley et le rem­plis­sage éventuel de car­bu­rant dans des temps plus courts par com­para­i­son à ceux des jets ; pour le pas­sager, glob­ale­ment, cela se traduit par une sen­sa­tion d’ef­fi­cac­ité assim­i­l­able à une notion de confort.

Ensuite la notion de vitesse. Les tur­bo­propulseurs de nou­velle généra­tion sont dotés de groupe propulseurs per­me­t­tant d’at­tein­dre des vitesses de croisière suff­isam­ment élevées, approchant les 600 km/h. Sur des étapes de moyenne ou courte dis­tance le pas­sager aura donc une impres­sion favor­able à cet égard sans éprou­ver de tran­si­tion mar­quée vis-à-vis des jets.

Enfin les risques de ne pas pou­voir attein­dre un aéro­port de des­ti­na­tion, et les déroute­ments en découlant, du fait de con­di­tions météorologiques défa­vor­ables sont main­tenant du même ordre que pour les jets.

À l’im­age de ceux-ci, les tur­bo­propulseurs mod­ernes sont dotés d’équipements de nav­i­ga­tion et d’aide au pilotage per­for­mants au delà des besoins régle­men­taires stricts tels que les sys­tèmes d’ap­proche per­me­t­tant l’at­ter­ris­sage par très faible vis­i­bil­ité. Le pas­sager appréciera sans nul doute la flex­i­bil­ité et la fia­bil­ité opéra­tionnelle ain­si assurées par les tur­bo­propulseurs de nou­velle génération.

Par­mi les élé­ments les plus sig­ni­fi­cat­ifs, ayant trait à la per­cep­tion directe du con­fort pen­dant le temps de vol pro­pre­ment dit, ceux qui appa­rais­sent comme impor­tants à soulign­er sont ceux qui pré­cisé­ment ont creusé l’é­cart entre les avions d’an­ci­enne et de nou­velle tech­nolo­gie, les com­muters de nou­velle généra­tion se situ­ant à la pointe de ces évolutions.

Confort et espace

Le développe­ment rapi­de des réseaux aus­si bien que le niveau de com­péti­tion de plus en plus élevé ont con­duit les com­pag­nies les plus impor­tantes, à dévelop­per les activ­ités et la qual­ité du trans­port région­al, de manière à assur­er la péné­tra­tion de l’ensem­ble du marché tout en répon­dant à la demande de la clien­tèle. La réponse à cette néces­sité est fournie par la mise à dis­po­si­tion de tur­bo­propulseurs de nou­velle génération.

Aujour­d’hui les nou­veaux avions à tur­bo­propulseurs con­stituent le meilleur lien avec les jets pour le trans­port région­al, leur niveau de con­fort est com­pa­ra­ble en tous points et par­fois même supérieur à celui des jets.

L’e­space intérieur disponible en cab­ine est généreux et agréable au regard. Dans cet espace, les tur­bo­propulseurs mod­ernes offrent :

  • des sièges per­me­t­tant un repos com­plet des pas­sagers pour les étapes les plus longues. Des sièges de nou­velle tech­nolo­gie et fort bien dess­inés équipent main­tenant les com­muters mod­ernes. Ils assurent au pas­sager le meilleur con­fort pos­si­ble pen­dant toute la durée du vol ;
  • une sec­tion cab­ine à larges dimen­sions. Ceci per­met d’in­staller des vol­umes de stock­age de bagages à main impor­tants tout au long de la cab­ine, avec un couloir cen­tral de largeur com­pa­ra­ble à celui des jets pour des déplace­ments aisés des pas­sagers et du per­son­nel de bord. Les com­muters de nou­velle tech­nolo­gie offrent dans leur majorité des sur­faces régulières planes, tant au niveau du sol qu’à celui du pla­fond amélio­rant ain­si l’aspect et évi­tant cer­taines dis­con­ti­nu­ités de vol­umes des boîtes à bagages ;
  • une implan­ta­tion gal­ley per­son­nal­isée per­me­t­tant la pré­pa­ra­tion et le ser­vice de bois­sons et repas chauds ou froids.


On a vu plus haut que le temps min­i­mum passé en escale était un élé­ment de con­fort perçu par le pas­sager. Le con­cept ” une porte une fonc­tion ” suiv­ant lequel sont défi­nis la plu­part des com­muters mod­ernes per­met de réalis­er cet objec­tif par charge­ment simul­tané des soutes à bagages et des galleys.

Confort et bien-être

En ter­mes de tem­péra­ture et de pres­suri­sa­tion, les tur­bo­propulseurs mod­ernes offrent aux pas­sagers les meilleures con­di­tions de bien-être pen­dant le vol et au sol.

Ceux-ci dis­posent à cet effet d’une ambiance cab­ine régulée en tem­péra­ture et pres­sion rel­a­tive tout à fait com­pa­ra­ble à celle des jets. Ils peu­vent utilis­er égale­ment des aéra­teurs indi­vidu­els pour adap­ta­tion à leur convenance.

Enfin, afin de per­me­t­tre une totale autonomie en escale, cer­tains tur­bo­propulseurs de nou­velle généra­tion sont pourvus d’un sys­tème frein d’hélice per­me­t­tant en toute sécu­rité d’u­tilis­er l’un des moteurs tour­nant au sol pour pro­duire de l’air con­di­tion­né en cab­ine. C’est le cas par exem­ple des ATR 42 et 72 et du CN 235. Ce dis­posi­tif tout en offrant aux pas­sagers un con­fort com­pa­ra­ble à celui d’un “APU” con­stitue un avan­tage économique cer­tain pour la com­pag­nie utilisatrice.

Confort et silence

Le bruit extérieur et intérieur des com­muters mod­ernes est aujour­d’hui devenu une don­née fon­da­men­tale d’un point de vue tech­nique et commercial.

La notion de bruit extérieur est essen­tielle­ment liée à des exi­gences régle­men­taires dont le niveau de sévérité s’est accru au cours des deux dernières décen­nies. Glob­ale­ment, on peut dire que l’ensem­ble des tur­bo­propulseurs mod­ernes répon­dent, dans le cadre de leur cer­ti­fi­ca­tion, à l’ensem­ble des critères de lim­i­ta­tion de bruit au décol­lage, à l’at­ter­ris­sage et latérale­ment, ceci avec plus ou moins de marge suiv­ant le type d’appareil.

Bien que le bruit extérieur n’ait apparem­ment peu ou pas de rela­tion avec le con­fort du pas­sager situé en cab­ine, il n’est pas sans impor­tance car, tel avion peu bruyant pour­ra être autorisé à opér­er sur cer­tains aéro­ports tan­dis que tel autre, moins silen­cieux, ne pour­ra pas béné­fici­er d’une telle autori­sa­tion. Ceci tient au fait que cer­taines autorités locales ou groupes d’in­flu­ence dans les envi­ron­nements aéro­por­tu­aires ont mis en appli­ca­tion des lim­ites allant au- delà des normes générale­ment applic­a­bles. Ceci est par­ti­c­ulière­ment le cas en Amérique du Nord. On peut aus­si ajouter que ces lim­ites du bruit sont sou­vent plus con­traig­nantes pour les opéra­tions de nuit.

Dans ce domaine aus­si la déf­i­ni­tion des com­muters mod­ernes a été grande­ment influ­encée par la mau­vaise image lais­sée par les avions d’an­ci­enne tech­nolo­gie, aus­si tout un éven­tail de tech­niques spé­ci­fiques a été mis en œuvre dans le but de réduire dans les plus larges pro­por­tions pos­si­bles le bruit interne et les vibra­tions perçus par les passagers.

On devine par là même l’in­térêt opéra­tionnel et com­mer­cial asso­cié au meilleur com­pro­mis pos­si­ble bruit/performance. La com­pag­nie util­isatrice amélior­era ses résul­tats et le pas­sager trou­vera un attrait sup­plé­men­taire dû à la flex­i­bil­ité opéra­tionnelle que tel type de com­muter représen­tera à ses yeux.

Les niveaux de bruit et de vibra­tions à l’in­térieur de la cab­ine intéressent directe­ment le con­fort des pas­sagers. Ceci est d’au­tant plus vrai que les tur­bo­propulseurs sont fréquem­ment util­isés dans le pro­longe­ment de lignes desservies par des jets, et que les pas­sagers admet­traient dif­fi­cile­ment de voy­ager dans une cab­ine plus bruyante que celle qu’ils vien­nent de quitter.

Par­mi ces techniques :

  • l’u­til­i­sa­tion de l’in­for­ma­tique pour l’analyse des modes vibratoires,
  • la syn­chro­ni­sa­tion de la rota­tion des hélices,
  • l’emploi de sup­ports sou­ples pour la fix­a­tion d’équipements et amé­nage­ments divers en cabine,
  • la véri­fi­ca­tion pré­cise de l’équili­brage des hélices installées,
  • le fil­trage des vibra­tions induites par les moteurs,
  • l’u­til­i­sa­tion d’ab­sorbeurs dynamiques de vibra­tions sur la structure,
  • l’iso­la­tion phonique de cer­tains systèmes.


Tous ces efforts ont porté leurs fruits puisqu’il est établi que le niveau moyen de bruit intérieur des tur­bo­propulseurs mod­ernes est inférieur à celui des jets.

Ce qui précède indique claire­ment la ten­dance du marché qui de nos jours pousse à ren­dre iden­tiques les niveaux de con­fort des avions com­muters de petite capac­ité et des jets de plus grande capacité.

Le tur­bo­propulseur de nou­velle tech­nolo­gie est là pour démon­tr­er que ceci est pos­si­ble et déjà réalisé.

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