Livre : LE NÉGATIONNISME ÉCONOMIQUE de Pierre Cahuc et André Zylberberg

Le négationnisme économique

Dossier : Arts,Lettres et SciencesMagazine N°720 Décembre 2016Par : Pierre CAHUC et André ZYLBERBERGRédacteur : Hubert LÉVY-LAMBERT(53)Editeur : Flammarion – 2016 – 87, quai Panhard-et-Levassor, 75013 Paris. Tél. : 01 40 51 30 00.

Pierre Cahuc est pro­fesseur d’économie à l’X, ce qui vaut à son livre l’honneur d’être recen­sé dans La Jaune et la Rouge après avoir été encen­sé dans les plus grands journaux. 

Pierre Cahuc et son com­père André Zyl­ber­berg, écon­o­miste dis­tin­gué comme lui, pour­fend­ent tous les mythes véhiculés par des écon­o­mistes non paten­tés, qui ont le front de pub­li­er des arti­cles non validés par des revues à comité de lecture. 

Mais ils vont peut-être un peu trop loin en con­sid­érant un con­sen­sus d’économistes dis­tin­gués comme la loi et les prophètes et un man­i­feste d’économistes « atter­rés » comme bons à jeter avec l’eau du bain. 

Selon eux, cer­taines ques­tions sont défini­tive­ment clos­es, les débats sont tranchés et il ne faut pas per­dre de temps avec des impos­teurs et des dém­a­gogues qui ne sont pas d’accord avec le con­sen­sus, qu’ils qual­i­fient de néga­tion­nistes et dont ils ne seraient pas mal­heureux de voir les écrits pas­si­bles du Code pénal comme ceux des néga­tion­nistes de la Shoah ! 

L’économie n’est mal­heureuse­ment pas une sci­ence dure et les bons écon­o­mistes savent se mon­tr­er hum­bles devant les échecs patents de leurs théories, même faisant l’objet d’un consensus. 

C’est ain­si que, s’adressant apparem­ment à des demeurés qui n’ont jamais enten­du par­ler de la loi de l’offre et de la demande, nos amis con­sacrent plusieurs pages à expli­quer que la hausse du salaire min­i­mum peut favoris­er l’emploi ou le défa­voris­er suiv­ant le niveau des salaires et le con­texte. Tout dépend, dis­ent nos savants, « nor­mands » sur ce sujet comme sur beau­coup d’autres.

Dans un autre chapitre, nos com­pères tirent à boulets rouges sur le patronat, en la per­son­ne de Louis Gal­lois, Denis Ranque ou Jean-Louis Bef­fa accusés de vouloir favoris­er la com­péti­tiv­ité des entre­pris­es en prô­nant une baisse des charges jusqu’à 3,5 fois le SMIC alors que le sacro-saint con­sen­sus serait sans ambiguïté : « pour obtenir un max­i­mum de créa­tion d’emplois, les abaisse­ments de charges doivent être con­cen­trés au niveau du salaire minimum ». 

Péché impar­donnable, la Fab­rique de l’industrie a fait appel à un écon­o­miste indépen­dant, Gilles Kole­da, qui n’a pas pris soin de pub­li­er ses travaux dans des revues internationales. 

Ses con­clu­sions sont-elles fauss­es pour autant ? Nos amis se refusent même à les cri­ti­quer car ce serait entr­er dans son jeu. 

Et si l’indépendant avait rai­son con­tre le con­sen­sus ? En infor­ma­tique, on utilise l’acronyme « gigo » qui sig­ni­fie garbage in garbage out pour car­ac­téris­er les pro­grammes math­é­ma­tique­ment exacts qui arrivent à des con­clu­sions fauss­es sim­ple­ment parce qu’ils sont par­tis d’hypothèses fausses. 

Le lecteur avisé aura remar­qué que le con­sen­sus cherche à favoris­er la créa­tion d’emplois alors que l’indépendant cherche à favoris­er la com­péti­tiv­ité des entre­pris­es. Objec­tifs dif­férents con­duisant naturelle­ment à des moyens différents.

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