Le Grand Uniforme aujourd’hui

Dossier : Nouvelles du PlatâlMagazine N°785 Mai 2023
Par Sofiane AÏSSANI (X21)

Aujourd’hui, un docu­ment fixe les spé­ci­fi­ca­tions tech­niques du Grand Uni­forme (GU), incluant ses dif­fé­rentes compo­santes et leurs pro­cé­dés de fabri­ca­tion. Ce cahier des charges est uti­li­sé par le fabri­cant pour pro­duire et livrer les uni­formes dans un délai ser­ré entre la prise de mesures des élèves à leur inkhôr­po­ra­tion et leur retour de stage mili­taire ou civil. Il peut chan­ger au fil des années : sa der­nière modi­fi­ca­tion en date remonte à la pro­mo­tion X20 pour laquelle la jupe a été rem­pla­cée par un pan­ta­lon dans l’uniforme fémi­nin. Dans le local que nous par­ta­geons au quo­ti­dien, je me suis entre­te­nu avec le Kes­sier mili de ma pro­mo­tion, Noah Amé­gna­glo (X21), afin de dis­cu­ter de la place de l’uniforme dans le pay­sage poly­tech­ni­cien actuel.

« Qu’est-ce que le Grand Uniforme représente pour toi ? »

« Je pense qu’il y a autant de réponses que de poly­tech­ni­ciens. Le GU, c’est le sym­bole par lequel nous sommes iden­ti­fiables par le monde exté­rieur. Mais, pour celui qui le porte, il est bien plus dif­fi­cile de défi­nir notre lien à lui. Il n’est plus un uni­forme mili­taire, puisque nos cama­rades inter­na­tio­naux le portent selon
les mêmes moda­li­tés que nous. Uni­forme répu­bli­cain donc, mais qui a héri­té des sym­boles de l’uniforme d’officier et qui en a gar­dé, en un sens, l’essence. Pour moi, c’est en rece­vant le GU que l’on devient réel­le­ment poly­tech­ni­cien. Comme un sym­bole, le “droit” de por­ter cet uni­forme n’arrive qu’au terme d’un cer­tain nombre d’étapes, puisque être poly­tech­ni­cien, ce n’est pas seule­ment avoir réus­si le concours d’entrée. Être poly­tech­ni­cien, c’est se pla­cer en héri­tier de cer­taines tra­di­tions et faire siennes cer­taines valeurs. Entre la recherche de l’excellence, le don de soi, le ser­vice à la Patrie, je suis per­sua­dé que rece­voir le GU, c’est por­ter haut ces prin­cipes qui nous unissent toutes et tous une fois que nous sommes pas­sés par l’École. »

Noah Amé­gna­glo (X21), le Kes­sier mili 

Une réception par étapes

Lorsque j’ai quit­té mon bureau de rédac­tion de l’iK pour aller me ren­sei­gner auprès du Ser­vice du maté­riel (Smat), qui gère notam­ment la com­mande et la remise des uni­formes, on m’a indi­qué que le choix du fabri­cant du GU relève d’une mise en concur­rence par des appels d’offres régu­liers confor­mé­ment à la régle­men­ta­tion des mar­chés publics. Le fabri­cant, et donc son maître tailleur éga­le­ment, peut ain­si chan­ger d’une année à l’autre en fonc­tion de la concur­rence. Ce qui demeure pour l’instant inchan­gé, c’est la chro­no­lo­gie de la per­cep­tion de l’uniforme : les élèves de la pro­mo­tion arri­vante reçoivent d’abord le GU sans bicorne ni tan­gente auprès du Smat, puis par­ti­cipent aux céré­mo­nies de remise des bicornes et de remise des tan­gentes orga­ni­sées par la Khômiss.

« Que penses-tu de la manière dont est remis le Grand Uniforme ? »

« La sym­bo­lique der­rière les “marches à l’uni­forme” pra­ti­quées dans les autres ­grandes écoles d’officier lors de la remise de l’uniforme méri­te­rait d’être réin­tro­duite. Soyons clairs, loin de moi l’idée d’un quel­conque mérite à por­ter le GU selon des per­for­mances phy­siques. […] En revanche, la notion d’introspection, de réflexion quant à son enga­ge­ment, d’intégration de valeurs com­munes, voi­là des étapes qui me semblent sapées par le fait que notre GU nous est remis sans céré­mo­nie au Smat. Bien sûr, la remise solen­nelle du bicorne et de la tan­gente sont des moments de rap­pel de ces valeurs. Mais la notion d’introspection com­mune préa­lable au pre­mier port du GU est selon moi man­quante. […] Ain­si, le GU a une double sym­bo­lique : pour le monde exté­rieur, il est le signe d’une excel­lence aca­dé­mique et d’une capa­ci­té à déci­der ; entre X, il est un signal de ral­lie­ment autour de valeurs com­munes qui nous sont chères, et le sym­bole visuel de notre appar­te­nance à une com­mu­nau­té trans­générationnelle empreinte d’un esprit de camaraderie. »

Noah Amé­gna­glo (X21), le Kes­sier mili

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