politique IA et data des entreprises

Le Data Office : pilier de la politique IA et data des entreprises

Dossier : Vie des entreprisesMagazine N°775 Mai 2022
Par Filippo FOCACCI

Fondée en 2013, Deci­sion­Brain développe des solu­tions basées sur l’IA (intel­li­gence arti­fi­cielle) pour aider les entre­pris­es à opti­miser leur prise de déci­sion sur des prob­lé­ma­tiques très opéra­tionnelles. Son cofon­da­teur et CEO, Fil­ip­po Focac­ci nous en dit plus. Rencontre.

Aujourd’hui, nous entendons de plus en plus parler d’intelligence artificielle. Comment définissez-vous ce concept et cette technologie ? 

Le terme IA peut être util­isé de deux manières dif­férentes. Il peut ren­voy­er aux machines et aux algo­rithmes qui pensent et raison­nent comme les Hommes, voire mieux que l’humain. Il s’agit là d’une con­cep­tion pop­u­laire de l’IA, telle qu’elle est très sou­vent représen­tée dans les médias et les films. Toute­fois, nous en sommes encore très loin ! On retrou­ve aus­si une IA dite « prag­ma­tique » qui est basée sur les math­é­ma­tiques avancées. C’est cette IA qui est au cœur de l’activité de Deci­sion­Brain.

Notre cœur de méti­er est, en effet, de dévelop­per des solu­tions d’aide à la déci­sion basées sur l’IA pour per­me­t­tre aux entre­pris­es d’optimiser leurs opéra­tions indus­trielles. Nous util­isons l’IA prag­ma­tique, ses algo­rithmes sophis­tiqués, des don­nées et la puis­sance de cal­cul pour pou­voir résoudre des prob­lé­ma­tiques très spé­ci­fiques (trou­ver le meilleur ordon­nance­ment, itinéraire, plan …) et trou­ver rapi­de­ment la solu­tion la plus per­ti­nente par­mi des mil­liards de possibilités.

L’idée n’est bien évidem­ment pas de rem­plac­er l’humain mais d’augmenter sa capac­ité à pren­dre la bonne déci­sion en met­tant à sa dis­po­si­tion des recom­man­da­tions basées sur des analy­ses com­plex­es et des élé­ments quan­ti­tat­ifs. Notre action cou­vre ain­si un large éven­tail d’algorithmes et de tech­niques allant du Deep Learn­ing à l’apprentissage automa­tique, en pas­sant par l’optimisation math­é­ma­tique ou encore la sim­u­la­tion… C’est en cap­i­tal­isant sur l’ensemble de ces tech­niques que Deci­sion­Brain est en mesure de créer des solu­tions inno­vantes et per­son­nal­isées qui per­me­t­tent à nos clients d’améliorer leur pro­duc­tiv­ité, leur effi­cac­ité et leur réac­tiv­ité opérationnelles.

Quelles sont les problématiques que vous abordez avec vos solutions ?

Chez Deci­sion­Brain, nous avons fait le choix de nous focalis­er sur les opéra­tions indus­trielles que nous décli­nons avec plusieurs niveaux de décisions :

  • Stratégique : quels sont les investisse­ments à prévoir pour accroître la capac­ité de pro­duc­tion ? quelles sont les com­pé­tences à acquérir ou à dévelop­per en interne ?
  • Tac­tique : com­ment organ­is­er la pro­duc­tion pour pou­voir répon­dre à la demande prévue cette année ? com­ment plan­i­fi­er la main­te­nance des machines sur les cinq prochaines années ?
  • Opéra­tionnel : quel est le meilleur ordon­nance­ment ou itinéraire ? com­ment réa­gir en temps réel à une panne ou à l’absence d’une ressource humaine ?

Con­crète­ment, nous aidons nos clients à mieux con­trôler et pilot­er leur activ­ité en fonc­tion de leurs indi­ca­teurs clés de per­for­mance (KPI). Au tra­vers de la mise en œuvre de nos solu­tions d’IA, nous les accom­pa­gnons dans leur prise de déci­sion afin qu’ils atteignent leurs objec­tifs business.

Prenons un exem­ple d’optimisation de ressources humaines au niveau opéra­tionnel : en cas d’absence de plusieurs tech­ni­ciens, nos solu­tions vont leur per­me­t­tre de mesur­er l’impact de cette sit­u­a­tion sur la pro­duc­tion, à revoir le plan­ning, redéfinir la dis­tri­b­u­tion des tâch­es, déter­min­er s’il est néces­saire de faire appel à des ressources extérieures.

En pour­suiv­ant cet exem­ple sur un niveau tac­tique, cela leur per­met aus­si d’initier une réflex­ion sur la néces­sité de met­tre en place un pro­gramme de for­ma­tion pour dévelop­per les com­pé­tences de cer­tains col­lab­o­ra­teurs et la flex­i­bil­ité des équipes.

Au-delà, la puis­sance de l’IA asso­ciée à la disponi­bil­ité mas­sive de don­nées per­met aujourd’hui aux entre­pris­es de réin­ven­ter leur busi­ness et d’identifier de nou­velles prob­lé­ma­tiques qui méri­tent d’être traitées.

Aujourd’hui, il ne s’agit donc plus de résoudre un ensem­ble bien défi­ni de prob­lèmes en se dotant d’applications pack­agées (ERP, ges­tion de la main­te­nance…), mais de faire preuve de créativité.

Comment une entreprise peut-elle déterminer si elle doit opter pour une solution packagée ou plutôt se doter d’une solution sur-mesure et personnalisée comme celles que DecisionBrain conçoit et développe ? 

Si une entre­prise est con­fron­tée à une prob­lé­ma­tique stan­dard que beau­coup d’autres entre­pris­es ren­con­trent, je leur recom­man­derais de chercher d’abord une solu­tion pack­agée. D’ailleurs, aujourd’hui, ces solu­tions intè­grent générale­ment une tech­nolo­gie d’IA.

Pour faire son choix, l’enjeu pour une entre­prise est de claire­ment dis­tinguer les besoins com­muns de ceux qui relèvent de la spé­ci­ficité de l’entreprise, de son organ­i­sa­tion et de son activ­ité. Prenons l’exemple d’un cen­tre d’appels qui a des employés implan­tés dans dif­férentes géo­gra­phies et donc soumis à des règle­men­ta­tions dif­férentes. Une solu­tion pack­agée ne per­me­t­tra pas de cou­vrir de manière flex­i­ble et per­ti­nentes l’ensemble des con­traintes et exigences.

Con­scient de cette réal­ité, Deci­sion­Brain est en mesure de con­cili­er et d’apporter aux entre­pris­es le meilleur de ces deux approches. En effet, grâce à notre plate­forme de solu­tion d’optimisation DB Gene et ses mod­ules pré­con­stru­its (mod­èles d’IA spé­ci­fiques à chaque secteur, com­posants d’interface util­isa­teur…), nous pro­posons à nos clients des solu­tions per­son­nal­isées à un coût com­péti­tif, assez proche de celui d’une solu­tion packagée.

DB Gene, qui est le fruit d’importants investisse­ments en R&D en France, per­met de fournir 60 à 70 % des fonc­tion­nal­ités néces­saires aux solu­tions d’IA et d’atteindre 100 % avec une con­fig­u­ra­tion et per­son­nal­i­sa­tion. Cela garan­tit égale­ment un temps de mise en œuvre rel­a­tive­ment court. DB Gene est, en out­re, inté­grée à cer­tains pro­duits IBM et est aus­si util­isée par des lead­ers du marché tels qu’IBM, JLL, Toy­ota, Carhartt, le port de Hong Kong…

Enfin, en cap­i­tal­isant sur DB Gene, notre expéri­ence avérée dans l’optimisation, les math­é­ma­tiques avancées, l’architecture logi­cielle avancée et l’expérience indus­trielle, Deci­sion­Brain aide non seule­ment les entre­pris­es à relever leurs défis opéra­tionnels, mais égale­ment à les trans­former en véri­ta­ble avan­tage concurrentiel.

Pouvez-vous nous donner des cas d’applications concrets ?

Nous accom­pa­gnons nos clients sur dif­férents pro­jets opéra­tionnels : plan­i­fi­ca­tion et ordon­nance­ment de la pro­duc­tion, opti­mi­sa­tion du déploiement des ressources humaines ou de l’attribution des tâches… 

Plus par­ti­c­ulière­ment, nous avons con­stru­it pour la société de ser­vices bri­tan­nique Ser­co une solu­tion pour mieux con­trôler et opti­miser le sys­tème de vélos partagés de Lon­dres. Dans ce cadre, nous util­isons le Machine Learn­ing pour prédire le nom­bre de retrait et de resti­tu­tion de vélos dans chaque sta­tion tout au long de la journée à des inter­valles réguliers de 15 à 30 min­utes tout en prenant en compte divers fac­teurs : les con­di­tions météorologiques, les habi­tudes des con­som­ma­teurs… En s’appuyant sur ces pré­dic­tions, nos algo­rithmes d’optimisation sont en mesure de déter­min­er le nom­bre de vélos qui doit être mis à dis­po­si­tion dans chaque sta­tion et de plan­i­fi­er les déplace­ments opti­maux des vélos d’une sta­tion à une autre de jour comme de nuit. Depuis main­tenant 5 années, Ser­co utilise cette solu­tion quo­ti­di­en­nement avec une grande sat­is­fac­tion. Deci­sion­Brain a, par ailleurs, reçu un prix de l’Association française de recherche opéra­tionnelle et d’aide à la déci­sion pour cette solu­tion. Dans un autre exem­ple, avec Toy­ota, nous tra­vail­lons sur des prob­lé­ma­tiques indus­trielles. Nous avons ain­si conçu pour cet indus­triel du monde auto­mo­bile un sys­tème pour syn­chro­nis­er leur logis­tique en amont avec les chaînes d’assemblage. L’enjeu est de pou­voir achem­iner les pièces auto­mo­biles provenant de leurs four­nisseurs vers ces chaînes d’assemblage de manière la plus effi­cace pos­si­ble et dans une logique de just-in-time. Grâce à l’IA, nous avons pu réduire les coûts logis­tiques de 15 %, mais aus­si les émis­sions de CO2 d’environ 10 %. 

Comment vous projetez-vous sur le moyen et long terme ? Quelles sont vos ambitions ? 

Au cours des deux dernières années, les entre­pris­es ont été et sont tou­jours con­fron­tées à de nom­breux défis : crise san­i­taire, per­tur­ba­tions de la chaîne d’approvisionnement, hausse du prix des matières pre­mières, et main­tenant guerre en Ukraine… Celles qui s’en sor­tiront sont celles qui sauront s’adapter à cette réal­ité mou­vante qui évolue tou­jours plus vite. Cela néces­site une réac­tiv­ité avérée et une capac­ité à adapter les proces­sus et les sys­tèmes pour une prise de déci­sion effi­cace et per­ti­nente en temps réel. Notre ambi­tion est d’aider ces entre­pris­es à pilot­er leur busi­ness face à ces défis.

En par­al­lèle, à court terme, nous cher­chons à ren­forcer notre présence en France et à nous dévelop­per aux États-Unis, un de nos prin­ci­paux marchés cibles. Nous venons d’y créer une entité avec un représen­tant com­mer­cial et mon­tons une équipe tech­nique pour accom­pa­g­n­er nos clients américains.

Sur le plus long terme, nous pour­suiv­ons nos efforts pour démoc­ra­tis­er l’accès aux solu­tions d’IA sophis­tiquées afin de per­me­t­tre non seule­ment aux géants comme Toy­ota ou encore Ama­zon, mais aus­si aux ETI de béné­fici­er pleine­ment du poten­tiel de l’IA à un coût acces­si­ble. De notre côté, cela passe par des investisse­ments sig­ni­fi­cat­ifs en R&D, des parte­nar­i­ats avec la com­mu­nauté sci­en­tifique uni­ver­si­taire et la con­struc­tion d’un écosys­tème de parte­naires commerciaux.

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