Le bal de l'école Polytechnique, au palais de la Légion d'Honneur.

Le Bal de l’X

Dossier : La Tradition et les Traditions de l'X des origines à nos joursMagazine N°331 Juin 1978Par : Paul LOGIÉ (21)
N° 331 Juin 1978
En 1876, le Comi­té de la Socié­té Ami­cale de Secours se pro­po­sa de régu­la­ri­ser et d’ac­croître les res­sources dont il dis­po­sait afin de mieux sou­la­ger les infor­tunes qui se présentaient.

En 1876, le Comi­té de la Socié­té Ami­cale de Secours se pro­po­sa de régu­la­ri­ser et d’ac­croître les res­sources dont il dis­po­sait afin de mieux sou­la­ger les infor­tunes qui se présentaient.

A la dixième assem­blée géné­rale, pré­si­dée le dimanche 17 décembre 1876 par Bec­que­rel, membre de l’Ins­ti­tut et pro­fes­seur au Muséum d’His­toire Natu­relle, le Comi­té annon­ça qu’un groupe de socié­taires pro­po­sait la créa­tion de res­sources sup­plé­men­taires annuelles au moyen de concerts dont l’or­ga­ni­sa­tion serait confiée à une com­mis­sion d’an­ciens élèves et d’é­lèves, le pla­ce­ment des billets d’en­trée devant être opé­ré par les cama­rades eux-mêmes dans le cercle intime de leurs familles et de leurs amis.

Le concert du 18 février 1877.

Le Comi­té approu­vé par l’as­sem­blée géné­rale, don­na son appui moral à cette ini­tia­tive due à Paul Boca (1858) qui avait deman­dé à Mme Erard, la veuve du fac­teur de pia­nos bien connu, de mettre à la dis­po­si­tion de l’É­cole la salle luxueuse qu’elle pos­sé­dait rue du Mail. Madame Erard eut la géné­ro­si­té de prendre à sa charge l’é­clai­rage et le ser­vice, tan­dis que des artistes par­mi les plus répu­tés appor­taient gra­cieu­se­ment leur concours.

Le concert qui eut lieu le 18 février 1877, rem­por­ta un suc­cès com­plet auprès d’une assis­tance nom­breuse et choi­sie : la Caisse de la socié­té béné­fi­cia d’une somme nette de 5 400 francs, ce qui per­mit d’ac­croître le nombre des secours distribués.

Mise en pré­sence de ce résul­tat, la 11e assem­blée géné­rale, réunie à l’am­phi­théâtre de Chi­mie le 23 décembre 1877, sous la pré­si­dence du séna­teur Krantz, ins­pec­teur géné­ral hono­raire des Ponts et Chaus­sées, Com­mis­saire géné­ral de l’Ex­po­si­tion Uni­ver­selle de 1878, déci­da de confier à la Com­mis­sion du concert l’or­ga­ni­sa­tion d’un second concert qui eut lieu avec le même suc­cès le 27 jan­vier 1878.

Tou­te­fois, il avait été dif­fi­cile de s’as­su­rer le concours d’ar­tistes en renom et les Cais­siers de la pro­mo­tion 1871, Bru­not et Girau­det sug­gé­rèrent au Comi­té de rem­pla­cer le concert par un bal.

Le bal de l’É­cole poly­tech­nique, au palais de la Légion d’Honneur.

La création du bal de l’X, le 22 février 1879.

Le Comi­té, pré­si­dé par Rey­naud depuis la démis­sion de Chasles élu pré­sident d’hon­neur, don­na son assen­ti­ment à cette pro­po­si­tion ; comme pour les concerts, toutes pré­cau­tions furent prises pour garan­tir un carac­tère d’in­ti­mi­té à la fête poly­tech­ni­cienne, afin qu’on ne la confon­dît pas avec les bals par sous­crip­tion qui avaient assez mau­vaise presse dans la socié­té parisienne.

Le pre­mier bal eut lieu le 22 février 1879 dans les salons du Minis­tère de la Guerre que le Géné­ral Gres­lay (1838) avait mis à la dis­po­si­tion de la com­mis­sion du Bal, pré­si­dée par Paul Boca ; son suc­cès fut consi­dé­rable, au point que la recette dépas­sa le double de ce qu’a­vait pro­duit cha­cun des concerts.

On déci­da de renou­ve­ler l’ex­pé­rience l’an­née sui­vante : la réus­site ne fit que s’am­pli­fier, le bal de l’X entrait dans les tra­di­tions de l’É­cole. Les géné­raux Farre et Cam­pe­non qui suc­cé­dèrent à Gres­lay au Minis­tère de la Guerre conti­nuèrent à mettre à la dis­po­si­tion de la Com­mis­sion de Bal leurs salons aux­quels on dut adjoindre des annexes construites sur les jar­dins de l’hô­tel du ministre.

En 1883 le bal n’eut plus lieu dans les salons du Minis­tère de la Guerre, mais le géné­ral Faid­herbe, grand chan­ce­lier de la Légion d’Hon­neur, offrit aux orga­ni­sa­teurs l’é­lé­gant palais du quai d’Or­say : l’emplacement était plus spa­cieux et ces riches salons étaient géné­ra­le­ment igno­rés de la socié­té parisienne.

Les frais d’ins­tal­la­tion furent consi­dé­rables car il fal­lut construire une char­pente pour trans­for­mer les cours en salles de danse, mais la fête dépas­sa en éclat toutes celles qui l’a­vaient pré­cé­dée. Le géné­ral Faid­herbe mon­tra la même géné­ro­si­té les années sui­vantes et, dans la séance du 27 jan­vier 1889, l’as­sem­blée géné­rale lui défé­ra la pré­si­dence d’hon­neur de la Société.

Après sa mort, c’est-à-dire à par­tir de 1890, les orga­ni­sa­teurs du bal uti­li­sèrent l’Hô­tel Conti­nen­tal. Les recettes nettes du bal conti­nuèrent à consti­tuer le tiers du mon­tant des secours : celles de 1893 attei­gnirent le chiffre record de 32 000 francs.

La veille du bal. le Bureau de la Socié­té se ren­dait, avec le géné­ral com­man­dant de l’É­cole, à l’E­ly­sée pour invi­ter le Pré­sident de la Répu­blique ; celui-ci accep­tait géné­ra­le­ment de rehaus­ser de sa pré­sence l’é­clat de la céré­mo­nie et ver­sait chaque année à la Com­mis­sion d’or­ga­ni­sa­tion une somme de cinq cents francs.

Le bal de 1905 fut orga­ni­sé au Nou­veau Théâtre : ce choix heur­ta cer­taines sus­cep­ti­bi­li­tés. On revint les années sui­vantes à l’Hô­tel Continental.

La socié­té Ami­cale de Secours avait sur­mon­té les dif­fi­cul­tés finan­cières résul­tant de la guerre, en ouvrant en 1915 une sous­crip­tion pour faire face à l’aug­men­ta­tion de ses charges et à la dimi­nu­tion de ses res­sources. Elle regret­tait cepen­dant que le mal­heur des temps ne lui per­mit plus de comp­ter sur les res­sources impor­tantes que lui pro­cu­raient les bals.

Le Groupe Pari­sien déci­da pour­tant d’or­ga­ni­ser, le 16 mai 1920, une soi­rée dan­sante qui rap­por­ta une somme de 50 000 francs, ver­sée aus­si­tôt dans la caisse de la Socié­té Ami­cale : il y avait eu la même affluence qu’au­tre­fois à l’Hô­tel Conti­nen­tal. Le béné­fice fut un peu moindre à la reprise des bals, en 1921.

Pour aug­men­ter les recettes, on envoya d’of­fice deux billets à tous les poly­tech­ni­ciens de la région pari­sienne, en les priant de les ren­voyer s’ils ne s’en ser­vaient pas. Le pro­duit des fêtes annuelles per­met­tait de majo­rer de 25 % le mon­tant des secours. Cepen­dant le bal de 1924 accu­sa une dimi­nu­tion des recettes.

Tout s’a­mé­lio­ra lors­qu’on eut fait appel à Jacques Rou­ché, direc­teur de l’A­ca­dé­mie Natio­nale de Musique et de Danse, membre de l’A­ca­dé­mie des Beaux-Arts, qui consen­tait à offrir le cadre mer­veilleux de l’O­pé­ra aux orga­ni­sa­teurs du bal. La recette pas­sa de 30 000 francs en 1924 à 110 000 francs en 1925, ce qui repré­sen­tait 40 % du mon­tant des secours ; elle était de 205 000 francs en 1928, année où Jacques Rou­ché pré­si­da la 57e assem­blée géné­rale de la socié­té Ami­cale de Secours, et le nombre des assis­tants s’é­le­vait à 6 623.

Le Bal de l’X conti­nue à être chaque année une occa­sion de réunion et de bien­fai­sance. Il a lieu presque tou­jours à l’O­pé­ra et en géné­ral en Novembre. Tou­te­fois, un essai a été ten­té en Juin 1958 avec beau­coup de bon­heur, de tenir cette réunion dans l’O­ran­ge­rie du Palais de Ver­sailles, avec concert dans ia cha­pelle du Palais et sou­per dans la gale­rie des Batailles ; un autre, en 1970, au Palais de Chaillot, avec un concert don­né par le célèbre pia­niste Arthur Rubinstein.

L’an­née sui­vante, les Poly­tech­ni­ciens revinrent à l’O­pé­ra, et le Pré­sident de la Répu­blique, accom­pa­gné de Madame Georges Pom­pi­dou, hono­ra cette mani­fes­ta­tion de sa pré­sence. La tra­di­tion s’est main­te­nant éta­blie de pré­sen­ter, au cours du bal, un spec­tacle de bal­lets exé­cu­té par la troupe de l’Opéra.

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