En accord avec soi-même, en skis

L’accompagnement des X par les X

Dossier : RH et révolution digitaleMagazine N°727 Septembre 2017
Par Jacques DEFAUCHEUX (72)

L’AX, en parte­nar­i­at avec l’É­cole, étend son offre de men­tor­ing aux élèves ingénieurs. Les élèves en sec­onde année pour­ront être accom­pa­g­nés par un men­tor, pour se pré­par­er à entr­er dans la vie active, en com­mençant une pre­mière réflex­ion pro­fes­sion­nelle sur les choix d’ori­en­ta­tion en troisième et qua­trième années. 

En cette ren­trée 2017, l’AX pro­pose d’étendre ce pro­gramme aux élèves ingénieurs, en parte­nar­i­at avec l’École et le ser­vice SOIE (Stages, Ori­en­ta­tion, Inser­tion pro­fes­sion­nelle, rela­tions Entre­pris­es). Tout élève en sec­onde année et adhérent à l’AX pour­ra deman­der à être accom­pa­g­né par un men­tor, qu’il ren­con­tr­era régulière­ment pen­dant un an. 

“ Comment se projeter dans une activité future qui fasse sens ? ”

La con­sti­tu­tion des binômes (ou trinômes selon le nom­bre de men­tors disponibles) sera effec­tuée selon les préférences des élèves et le pro­fil des men­tors, en visant une cer­taine prox­im­ité entre généra­tions (une pro­mo­tion N sera ain­si men­torée par des anciens proches de la pro­mo­tion N‑10).

Ce pro­gramme de men­tor­ing com­mencera dès le début 2018 avec la pro­mo­tion 2016. Les X 2006 (voire 2005 ou un peu au-delà) dis­posant d’une expéri­ence pro­fes­sion­nelle con­fir­mée peu­vent dès main­tenant se porter can­di­dats en suiv­ant les instruc­tions sur le site du Ser­vice car­rières de l’AX. Une ini­ti­a­tion à leur rôle du men­tor sera assurée lors d’un ate­lier en soirée ani­mé par des pro­fes­sion­nels de l’accompagnement.

REPÈRES

Ami de confiance d’Ulysse, Mentor fut chargé par celui-ci de l’éducation de son fils Télémaque lors de son absence pendant la guerre de Troie et de la gestion de son domaine.
Le mentoring est la mise en place d’un programme d’accompagnement basé sur le transfert d’expertise, le partage de savoir-être et de savoir-faire.

PRÉPARER SON ENTRÉE DANS LA VIE ACTIVE

L’élève ingénieur qui entre en sec­onde année doit effectuer ses pre­miers choix d’orientation : stage en entre­prise ou dans l ’Admin­is­tra­tion, pro­jet académique d’approfondissement, spé­cial­i­sa­tion de la troisième année (au début de laque­lle il devra choisir sa qua­trième année). 

LA PSYCHOLOGIE POSITIVE

La psychologie positive « étudie ce qui donne un sens à la vie », selon son fondateur, le psychologue américain Martin E. P. Seligman. C’est l’étude des forces, du fonctionnement optimal et des déterminants du bien-être.
Dans l’entreprise, cette méthode consiste notamment à développer les capacités de chaque salarié, à reconnaître la valeur de leur travail, et non à réduire les difficultés auxquelles ils sont confrontés.
Voir « Les 24 forces de caractère de l’être humain » sur http://psychologie-positive. blogspot.fr

Ces choix struc­turants pour l’avenir de l’élève doivent se faire en lien avec une pre­mière réflex­ion pro­fes­sion­nelle. Un nou­veau ter­rain de réflex­ion et d’action s’ouvre aux élèves : pass­er d’un enseigne­ment sci­en­tifique de haut niveau aux réal­ités impar­faites de la vie en entreprise. 

De plus, il n’est pas tou­jours facile pour un poly­tech­ni­cien de choisir une ori­en­ta­tion plutôt qu’une autre, tant l’École est réputée pour la richesse de sa for­ma­tion général­iste et la diver­sité de ses débouchés. 

C’est alors que le men­tor vient aider l’élève à pré­par­er son entrée dans la vie active. Il doit con­va­in­cre l’élève qu’un choix per­ti­nent d’activité pro­fes­sion­nelle va con­di­tion­ner son épanouisse­ment et sa réus­site. Com­ment peut-il se pro­jeter dans une activ­ité future qui fasse sens pour lui et où il puisse don­ner le meilleur de lui-même ? 

Com­ment peut-il se pré­par­er à un poste où son car­ac­tère, ses tal­ents, son expéri­ence lui per­me­t­tront d’apporter des résul­tats posi­tifs à son employeur et ain­si de con­duire une car­rière heureuse ? 

Notre men­tor­ing fait appel à l’entraide au sein de la com­mu­nauté poly­tech­ni­ci­enne, dont la richesse est d’abord la var­iété et la qual­ité des expéri­ences pro­fes­sion­nelles. Cet arti­cle sug­gère quelques pistes utiles au nou­veau men­tor, s’il n’a pas eu l’opportunité de jouer un rôle sem­blable aupar­a­vant. Il ne pré­tend pas cou­vrir l’ensemble des méth­odes aux­quelles peut recourir un men­tor plus expérimenté. 

ANALYSER LES MOMENTS MARQUANTS DE SON PASSÉ


Repér­er et racon­ter les moments où on est en accord avec soi-même. © NETZER JOHANNES / FOTOLIA.COM

La répéti­tion des ren­con­tres crée un cli­mat de con­fi­ance qui per­met d’explorer ensem­ble le passé du men­toré, ses goûts, ses préférences péd­a­gogiques, ses attentes et ses apti­tudes. Le men­tor invite l’élève à repér­er et racon­ter les moments où il s’est sen­ti en accord avec lui-même : événe­ments mar­quants, réal­i­sa­tions probantes, pro­jets périscolaires. 

Vus de près, ces moments révè­lent ce qui peut ren­dre heureux le men­toré. Plaisir et per­for­mance étant liés, c’est aus­si ce qui le fait réus­sir pro­fes­sion­nelle­ment. Par­mi les moments mar­quants, on peut aus­si retenir ceux qui ont été vécus dif­fi­cile­ment au début, avant d’être trans­for­més en con­quêtes en révélant ain­si des forces. 

On peut sug­gér­er au men­toré de rédi­ger des petites his­toires où il racon­te ce qui s’est passé, en quoi ce moment était posi­tif, quelle a été sa con­tri­bu­tion (action, atti­tude, con­duite), ce qu’il a ressen­ti (émo­tions) ou pen­sé spontanément. 

Enfin, le men­toré peut réfléchir à l’enseignement qu’il doit tir­er de cette expéri­ence pour l’avenir. Ces réc­its peu­vent être extraits de dif­férents domaines de vie, où le men­toré s’est trou­vé asso­cié à un pro­jet ou une activ­ité qui lui ont demandé des efforts soutenus pen­dant un cer­tain temps. Dans le domaine privé, on peut penser à un pro­jet famil­ial, ami­cal ou sportif. 

Pour un jeune élève, on peut aus­si penser à plusieurs sit­u­a­tions vécues en stage, pen­dant un job d’été ou dans une asso­ci­a­tion. Il faut essay­er de pro­duire plusieurs his­toires afin de met­tre en valeur les types de rela­tions où le men­toré se sent bien (chef de pro­jet, mem­bre d’une équipe, exé­cu­tant, four­nisseur ou util­isa­teur d’un ser­vice ou d’un pro­duit, ami…). 

Cette jux­ta­po­si­tion des sit­u­a­tions per­met d’identifier les car­ac­téris­tiques rela­tion­nelles du mentoré. 

IDENTIFIER SES POINTS FORTS

Nous nous épanouis­sons lorsque nous pou­vons exprimer nos capac­ités per­son­nelles. Nous sommes alors heureux, per­for­mants et agréables avec notre entourage. La sat­is­fac­tion est d’autant plus forte, que nous pou­vons utilis­er plusieurs capac­ités et vivre ain­si une cer­taine harmonie. 

“ Le mentor aide à discerner un potentiel d’épanouissement ”

Or le men­tor aide son men­toré à dis­cern­er son poten­tiel d’épanouissement en cher­chant quel type de force a été utile au men­toré dans ses moments heureux. Pour un poly­tech­ni­cien, on pense d’abord aux capac­ités intel­lectuelles. Elles sont divers­es : créa­tiv­ité ou ingéniosité, ouver­ture d’esprit, capac­ité d’analyse, soif d’apprendre, sagesse. 

Mais d’autres qual­ités per­me­t­tent aus­si de s’épanouir au tra­vail. On peut ain­si met­tre en valeur les traits mar­quants de son car­ac­tère comme le courage et la volon­té, la per­sévérance, l’authenticité, l’enthousiasme et l’énergie.

Notre rela­tion avec les autres, notre souci de nos col­lègues, notre générosité, notre intel­li­gence sociale sont égale­ment des points impor­tants à pass­er en revue. Le sens de l’éthique per­met une vie sociale har­monieuse au sein de l’entreprise. On peut donc s’interroger sur notre sens de l’esprit d’équipe, de l’équité, sur notre apti­tude à la prise de responsabilité. 

De même, dans la ges­tion des con­flits, sait-on faire appel à un esprit de mod­éra­tion, de tolérance, d’humilité, de pru­dence, de maîtrise de soi et de sang-froid, qui pro­tège des réac­tions exces­sives ? Enfin, on peut analyser notre apti­tude à pren­dre de la hauteur. 

Savoir recon­naître ce qui est beau et ce qu’on doit aux autres, avoir un regard opti­miste sur le futur, user d’humour, avoir une vision du sens en lien avec ses croy­ances sont autant de car­ac­téris­tiques d’une per­son­nal­ité inspi­rante à met­tre en évidence. 

RECHERCHER SES MOTIVATIONS

Rares sont les occa­sions où l’on peut dis­cuter de ses moti­va­tions. Le men­tor­ing per­met d’en par­ler franche­ment. On peut clar­i­fi­er les valeurs du men­toré en analysant ce qui l’a motivé dans ses moments heureux : goût de l’argent et l’ambition, désir de recon­nais­sance sociale, atti­rance pour le pouvoir… 

“ Le contact physique en dit parfois long sur le métier visé ”

Il faut accepter ces moti­va­tions légitimes, tout en les rel­a­tivisant. Le men­tor aide son men­toré à for­malis­er ses moti­va­tions, valeurs ou croy­ances, pour lesquelles il est prêt à s’engager : le culte de la qual­ité, du tra­vail bien fait, de la com­pé­tence, le développe­ment durable, l’entrepreneuriat…

Il y a enfin des moti­va­tions rel­a­tives au bien-être. Ce ne sont pas de grandes caus­es, mais on a besoin qu’elles soient satisfaites. 

CONSTRUIRE UNE PREMIÈRE IDENTITÉ PROFESSIONNELLE

Une fois iden­ti­fiées les car­ac­téris­tiques du men­toré (forces, moti­va­tions, fac­teurs de bien-être), on essaiera de les syn­thé­tis­er en une phrase, une sorte de devise qui indi­quera com­ment le men­toré souhaite être util­isé au tra­vail, notam­ment le rôle qu’il veut jouer dans l’environnement de son choix. 

Travailler en équipe à l'École polytechnique
On peut s’interroger sur notre sens de l’esprit d’équipe.
© ÉCOLE POLYTECHNIQUE — J. BARANDE

C’est un exer­ci­ce dif­fi­cile pour le men­toré, sans doute réti­cent à se voir ain­si résumé. Le men­tor se met à la place des inter­locu­teurs et doit aider le men­toré à con­denser sa présentation. 

Cette syn­thèse ne con­stitue pas un pro­jet, mais elle per­met d’orienter la recherche du men­toré dans les direc­tions qui lui con­vi­en­nent, d’une façon ouverte sans s’interdire des possibilités. 

CHOISIR SON SECTEUR PROFESSIONNEL

Une fois avancé ce tra­vail sur lui-même, le men­toré peut sol­liciter divers entre­tiens réseau par­mi les anciens poly­tech­ni­ciens pour pré­cis­er les idées qu’il se fait sur les métiers ou secteurs qui l’attirent. Le men­tor l’encourage à provo­quer ces ren­con­tres et à ouvrir son explo­ration sans se disperser. 

Ces entre­tiens se passent le plus sou­vent sur le lieu de tra­vail du cama­rade sol­lic­ité. Le con­tact physique en dit par­fois long sur le méti­er visé. Est-ce que l’on aime cet envi­ron­nement, est-ce que l’on peut s’entendre durable­ment avec de telles personnes ? 

Lors de ces entre­tiens, le men­toré doit pos­er des ques­tions pour se posi­tion­ner par rap­port à ce méti­er : ses forces ou faib­less­es, les oppor­tu­nités ou risques pour sa car­rière à l’avenir.

LE RÔLE ESSENTIEL DU MENTORING

L’École prévoit de met­tre en place tout un dis­posi­tif d’aide à l’orientation pro­fes­sion­nelle des élèves, en com­mençant par ceux de la fil­ière ingénieur. Le men­tor­ing a un rôle essen­tiel dans ce dispositif. 

On pour­rait con­cevoir que les élèves con­duisent eux-mêmes leur réflex­ion en s’appuyant sur des out­ils per­for­mants (doc­u­ments ou logi­ciels). Ce serait mécon­naître les résis­tances qui s’opposent sou­vent à l’orientation : dis­trac­tion, imma­tu­rité, timid­ité, repli sur soi… 

L’écoute active du men­tor peut détecter ces résis­tances et aider à les sur­mon­ter. Il con­vien­dra de recueil­lir en 2018 le retour d’expérience des pre­miers men­tors, en par­ti­c­uli­er sur la valeur qu’ils appor­tent et sur le béné­fice qu’ils en tirent pour eux-mêmes.

Poster un commentaire