Un étal de marché

La fonction Achats : les priorités en 2016

Dossier : ExpressionsMagazine N°715 Mai 2016
Par François RENARD (77)
Par Olivier WAJNSZTOK

Le groupe X‑Achats et Agile­Buy­er ont col­laboré sur une étude menée auprès d’un pan­el de pro­fes­sion­nels des achats. Il s’ag­it d’une fonc­tion de plus en plus stratégiques dont les thèmes pri­or­i­taires pour 2016 sont la maîtrise de couts, la ges­tion des risques et l’innovation.

D’un proces­sus qua­si lim­ité à de l’administratif il y a quelques décen­nies, la fonc­tion achats est dev­enue un levi­er de rentabil­ité, surtout par les réduc­tions de coût.

Elle prend aujourd’hui de la hau­teur, se posi­tion­nant à un niveau stratégique où l’un des maîtres mots est l’innovation.

UNE FONCTION DE PLUS EN PLUS STRATÉGIQUE

Les objec­tifs d’amélioration de la matu­rité de la fonc­tion achats sont sou­vent assez clairs dans les entre­pris­es, mais la mise en place en est régulière­ment con­trar­iée par les con­traintes opéra­tionnelles et financières.

LE « MADE IN FRANCE » A DU MAL À S’IMPOSER

Malgré la promotion médiatique de ces dernières années, les achats made in France progressent lentement et ne s’élèvent qu’à 16 % en 2016. Fait étonnant, alors que cet objectif ne prend pas dans les entreprises, 70 % des acheteurs interrogés indiquent ne pas rencontrer de contraintes à acheter français, et seulement 12 % déclarent que cela revient trop cher.
L’achat tricolore, en dépit de ses nombreux avantages (proximité, qualité, flexibilité, normes), ne séduit toujours pas. En parallèle, 58 % des sondés déclarent qu’acheter dans les pays à bas coûts n’est pas un axe de travail, en dépit des objectifs de réduction des coûts.
En revanche, alors que les principales délocalisations ont déjà eu lieu dans les années 2000, il reste tout de même 28 % des sondés affirmant vouloir augmenter les achats dans les pays à bas coûts.

L’une des car­ac­téris­tiques de la crise en cours depuis 2008 est le manque de vis­i­bil­ité total sur les marchés. Les risques économiques et financiers sont colos­saux et imprévis­i­bles : sub­primes, dettes des pays, euro, crois­sance des pays émer­gents, etc.

Et la réac­tion des marchés financiers et de con­som­ma­tion est sou­vent disproportionnée.

Mal­gré les inten­tions de pro­grès à moyen terme, les entre­pris­es sont focal­isées sur leurs plans d’actions à court terme, la sauve­g­arde de la rentabil­ité étant sou­vent con­sid­érée comme le meilleur boucli­er pour encaiss­er les crises.

L’enquête menée est un bon baromètre pour com­pren­dre com­ment les entre­pris­es gèrent ces con­tra­dic­tions : il y a man­i­feste­ment un décalage entre les inten­tions et la réal­ité opérationnelle

PRIORITÉ À LA MAÎTRISE DES COÛTS

Les objec­tifs de réduc­tion de coûts des achats n’ont jamais été aus­si élevés. 82 % des sondés indiquent qu’il s’agit de l’objectif pre­mier en 2016, soit + 5 points par rap­port à 2015. Autre objec­tif en vogue, la réduc­tion du nom­bre de four­nisseurs : 57 % des répon­dants déclar­ent que cela fait par­tie de leurs objec­tifs en 2016. Ce chiffre est en aug­men­ta­tion depuis trois ans (+ 9 points depuis 2014).

La pres­sion accrue sur ces objec­tifs n’est pas sans con­séquence sur les rela­tions entre clients et four­nisseurs. 40 % des sondés esti­ment que leurs rela­tions se sont ten­dues au cours des trois dernières années, et la pre­mière cause évo­quée, à hau­teur de 65 %, est liée à l’augmentation des objec­tifs de réduc­tion de coûts fixés par les directions.

L’INNOVATION, UN SUJET FONDAMENTAL

Autre thème de l’étude : l’innovation dans les achats. Levi­er de com­péti­tiv­ité, l’innovation per­met aux entre­pris­es d’augmenter leurs parts de marché et de réduire leurs coûts, grâce à des avancées tech­nologiques en pro­duits, en organ­i­sa­tion et en processus.

“ Les objectifs de réduction de coûts des achats n’ont jamais été aussi élevés ”

Le tra­vail sur la recherche de l’innovation four­nisseurs est donc bien présent : 42 % des acheteurs sondés comptent des per­son­nes dédiées à l’innovation fournisseurs.

Autre levi­er d’innovation dans les achats : la dig­i­tal­i­sa­tion ou l’intégration des nou­velles tech­nolo­gies de l’information et de la com­mu­ni­ca­tion au proces­sus opéra­tionnel des entre­pris­es (gains de pro­duc­tiv­ité, réduc­tion des coûts).

Indis­pens­able à la mod­erni­sa­tion de la fonc­tion achats, le poten­tiel de dig­i­tal­i­sa­tion reste impor­tant : à ce jour seule­ment 32 % des sondés indiquent avoir une ou des per­son­nes dédiées à la trans­for­ma­tion dig­i­tale aux achats.

Enfin, les out­ils col­lab­o­rat­ifs au ser­vice des achats se dévelop­pent lente­ment : seule­ment 30 % des sondés en dis­posent pour un usage interne, et 22 % pour un usage externe.

LA GESTION DES RISQUES, SECONDE PRIORITÉ

Les objec­tifs de ges­tion des risques four­nisseurs revi­en­nent sur le devant des pri­or­ités (75 % des sondés, + 7 points par rap­port à 2015).

« Une difficulté à démontrer que les achats “verts” peuvent être source d’économies »

S’ils con­cer­nent prin­ci­pale­ment l’exécution du con­trat, l’étude s’est penchée sur un risque amont : le manque d’offres. Celui-ci entraîne un manque de mise en con­cur­rence, une dif­fi­culté à faire émerg­er l’innovation et, surtout, le risque de ne trou­ver aucun four­nisseur capa­ble d’exécuter le con­trat. 39 % des sondés dis­ent être con­fron­tés à ce problème.

DÉVELOPPEMENT DURABLE ET RSE

L’intégration des préoc­cu­pa­tions sociales (RSE, respon­s­abil­ité socié­tale des entre­pris­es) et envi­ron­nemen­tales (développe­ment durable) est en hausse aux achats. 54 % des sondés déclar­ent avoir des objec­tifs en 2016 (+ 9 points sur 2015).

Toute­fois, il sub­siste tou­jours une évi­dente dif­fi­culté à démon­tr­er que les achats « verts » peu­vent égale­ment être source d’économies : ils parais­sent surtout béné­fiques d’un point de vue com­mu­ni­ca­tion et mar­ket­ing, mais sou­vent plus coûteux.

LA PRISE EN COMPTE DES NORMES ET DE LA RÉGLEMENTATION

CHARTES ANTICORRUPTION

Point positif, 78 % des professionnels des achats ont signé une charte anticorruption, soit six points de plus qu’en 2014.
Si elles ne protègent pas de tout, leurs signatures contribuent à l’évolution des mentalités et des préjugés dont la profession fait souvent les frais.

L’étude s’est aus­si intéressée aux aspects nor­mat­ifs et au respect des régle­men­ta­tions dans les achats via deux sujets d’actualité : l’affaire Volk­swa­gen et la COP 21.

Après l’affaire Volk­swa­gen, les entre­pris­es n’ont pas encore pris de mesures, seuls 4 % des acheteurs ont été touchés tous secteurs con­fon­dus. L’incertitude pèse égale­ment sur les effets de la COP 21 : 45 % des sondés ne savent pas s’ils seront concernés.

Ces ques­tions ont été posées avant que les deux sujets ne ren­dent leurs ver­dicts, il sera intéres­sant d’analyser l’évolution des répons­es dans un an.

DÉLAIS DE PAIEMENT


Acheter moins, acheter mieux, acheter moins cher. © YAYOICHO / FOTOLIA.COM

L’objectif de respect des délais de paiement four­nisseurs est présent chez 65 % des sondés. Ce bond de 9 points par rap­port à 2015 peut s’expliquer par de nou­velles mesures pour lut­ter con­tre les retards de paiement, annon­cées par le min­istre de l’Économie, Emmanuel Macron.

MOINS, MIEUX ET MOINS CHER

En 2016, les départe­ments achats sont plus que jamais scrutés sur leur capac­ité à réduire les coûts d’achats. Cet objec­tif doit être suff­isam­ment maîtrisé car il peut avoir des con­séquences sur l’innovation et les rela­tions avec les fournisseurs.

Il en va de même pour les achats liés au développe­ment durable qui, au même titre que l’innovation, devi­en­nent de plus en plus des occa­sions de crois­sance pour les entreprises.

Réduire les coûts doit donc pass­er par la prise en compte du coût com­plet, répon­dant au trip­tyque « acheter moins, acheter mieux, acheter moins cher ».

Sourcing­Con­sult et Agile­Buy­er sont deux sociétés de con­seil en achats.

2 Commentaires

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Do-Khacrépondre
9 mai 2016 à 9 h 10 min

L’Al­liance pour l’In­no­va­tion Ouverte, pour les achats inno­vants
Bon­jour,

mer­ci pour la resti­tu­tion de cette étude.

Si l’on prend le point de vue des TPE/PME inno­vantes dans le numérique, on retien­dra que “42 % des acheteurs sondés comptent des per­son­nes dédiées à l’innovation four­nisseurs” et que “32% indiquent avoir une ou des per­son­nes dédiées à la trans­for­ma­tion dig­i­tale aux achats”.

Puisque l’on cite le Min­istre de l’é­conomie, on peut not­er l’in­ter­ven­tion prochaine d’Ax­elle Lemaire, Secré­taire d’é­tat auprès du min­istre de l’é­conomie, de l’in­dus­trie et du numérique, à la Mai­son des Poly­tech­ni­ciens le 13 juin pour partager les attentes de la Loi pour une République numérique et les per­spec­tives de Alliance pour l’In­no­va­tion Ouverte, un dis­posi­tif lancé par le gouvernement.

organ­isa­teur : X‑Open-Inno­va­tion
date : 13 juin
horaires : présen­ta­tion et échanges de 12h à 13h — déje­uner servi à 13h
lieu : Mai­son des Poly­tech­ni­ciens, 12 Rue de Poitiers, 75007 Paris

Infor­ma­tion et inscrip­tion : http://dejeuner-al.x‑open-innovation.eu

Tru Do-Khac
79, mem­bre du bureau X‑Open-Inno­va­tion

Tru Do-Khacrépondre
11 mai 2016 à 7 h 13 min

La pro­priété intel­lectuelle au coeur des achats innovants

Bonjour,

La pro­priété intel­lectuelle étant au cœur de l’in­no­va­tion, qu’elle soit clas­sique ou ouverte, vous êtes cor­diale­ment invités à con­sul­ter le dossier de févri­er 2012 de La Jaune et La Rouge : “Pro­priété intel­lectuelle — Défendre la création”. 

Bien cor­diale­ment Tru Dô-Khac 79, Prési­dent X‑Pro­priété-Intel­lectuelle

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