LA BANQUE : Processus d’investissement : du benchmark à la gestion de conviction

Dossier : La BanqueMagazine N°613 Mars 2006Par : José Garcia LOPEZ

Depuis quelques mois, nous pas­sons d’une ges­tion bench­markée, qui cherche à obtenir une évo­lu­tion des valeurs équiv­a­lente à celle d’indices de référence (CAC 40, Eurofirst 80, SP 500…) à une ges­tion de con­vic­tion, ori­en­tée vers une per­for­mance absolue, libérée de la dic­tature des bench­marks”, explique Dominique Macé, directeur de la ges­tion insti­tu­tion­nelle de la banque Barclays.

Depuis quelques mois, nous pas­sons d’une ges­tion bench­markée, qui cherche à obtenir une évo­lu­tion des valeurs équiv­a­lente à celle d’indices de référence (CAC 40, Eurofirst 80, SP 500…) à une ges­tion de con­vic­tion, ori­en­tée vers une per­for­mance absolue, libérée de la dic­tature des bench­marks”, explique Dominique Macé, directeur de la ges­tion insti­tu­tion­nelle de la banque Barclays.

Jusqu’à présent, les marges de liber­té par rap­port à ces indices, les track­ing-errors, étaient très faibles. Résul­tat : les OPCVM actions de la banque réal­i­saient des per­for­mances moyennes. L’am­bi­tion de l’étab­lisse­ment, à savoir dou­bler ses act­ifs et attein­dre dix mil­liards d’eu­ros en porte­feuille d’i­ci à 2010, sup­pose aus­si qu’il mod­i­fie son proces­sus d’in­vestisse­ment. Aujour­d’hui, ce dernier repose sur une répar­ti­tion thé­ma­tique des act­ifs. Une dizaine de thèmes d’in­vestisse­ment ont été sélec­tion­nés par les équipes de la banque pour les six à douze mois à venir.

Une dizaine de thèmes

À eux seuls, les deux pre­miers thèmes de la liste (“Reprise de l’in­vestisse­ment” et “Alle­magne”) représen­tent entre 30 % et 40 % des porte­feuilles gérés par notre étab­lisse­ment. “Nous sommes con­va­in­cus qu’il est néces­saire de financer et dévelop­per les capac­ités de pro­duc­tion dans des secteurs tels que l’élec­tric­ité ou le raf­fi­nage, con­fie M. Macé. Les prob­a­bil­ités que des valeurs comme Alsthom, Siemens ou Tech­nip surper­for­ment sont très fortes.

L’Alle­magne a été choisie en rai­son de ses réformes entre­pris­es afin d’amélior­er sa com­péti­tiv­ité. “En 2006, les résul­tats des sociétés alle­man­des, restruc­turées plus tar­di­ve­ment que leurs voisines, devraient pro­gress­er plus que la moyenne européenne.

Vient ensuite en bonne place le thème des “fusions-acqui­si­tions” et des rap­proche­ments, favorisés par le retour à la prof­itabil­ité des entre­pris­es et le niveau des taux d’intérêt.

Autre créneau, le vieil­lisse­ment de la pop­u­la­tion qui se traduit par l’aug­men­ta­tion de la demande de pro­duits de san­té, soins, loisirs ou épargne.

L’idée du “nou­veau con­som­ma­teur” cor­re­spond, quant à elle, aux mod­i­fi­ca­tions des styles de con­som­ma­tion. “Des phénomènes comme l’I­pod d’Ap­ple, le busi­ness mod­el d’e­Bay, l’émer­gence de Skype, l’of­fre triple play de Free, les inter­ac­tions entre télé­phone mobile, musique et vidéo chez Viven­di Uni­ver­sal nous intéressent beau­coup. Dans le domaine du prêt-à-porter, Zara ou H & M ont aus­si des mod­èles économiques réus­sis qui s’ap­puient sur une rota­tion rapi­de des col­lec­tions.

Dernier exem­ple de thé­ma­tique : les béné­fi­ci­aires de la mon­di­al­i­sa­tion. L’ap­pari­tion de nou­velles class­es rich­es dans les pays émer­gents comme la Chine ou l’Inde prof­ite ain­si à des valeurs comme LVMH, Porsche ou les ban­ques de ges­tion de fortune…

Gestion structurée

Pour gér­er suiv­ant des con­vic­tions, le flair ne suf­fit pas. La méthode obéit à une cer­taine rigueur et à des proces­sus déci­sion­nels d’in­vestisse­ment con­traig­nants. Struc­turée, la ges­tion de con­vic­tion repose sur un con­trôle des risques impor­tant. On est loin ici d’une stratégie fluc­tu­ante ou d’une “ges­tion girou­ette”. La banque éla­bore ain­si une matrice lui per­me­t­tant d’at­tribuer un niveau de risques financiers à cha­cune de ses valeurs. Le taux util­isé pour cal­culer l’ac­tu­al­i­sa­tion des cash-flows, le dis­count­ed cash-flows, varie en fonc­tion du risque de la société. Ce type de ges­tion prend égale­ment en compte les aléas liés à des fac­teurs envi­ron­nemen­taux, juridiques ou à la gou­ver­nance d’en­tre­prise. Un sys­tème qui n’empêche pas d’in­ve­stir sur des valeurs risquées dont la val­ori­sa­tion est jugée suff­isam­ment attrac­tive : “Air Liq­uide représente une bonne classe de risque. Miche­lin et Casi­no, du fait de leur struc­ture juridique en com­man­dite, sont pénal­isés dans notre mod­èle. Leur classe de risque est donc plus élevée.

Les con­vic­tions des gérants sont aus­si étayées par des vis­ites d’en­tre­pris­es. Le respon­s­able de la ges­tion évite d’in­ve­stir dans un domaine qu’il ne com­prend pas. Il souligne l’im­por­tance de con­naître au mieux les affaires dans lesquelles il investit : “Nous analysons la com­po­si­tion de cer­tains con­seils d’ad­min­is­tra­tion pour y décel­er des per­son­nal­ités indépen­dantes ou au con­traire trop de con­san­guinité.”

Ni growth, ni value

De fait, avec la ges­tion thé­ma­tique, le pari ne porte pas sur un secteur mais sur la réal­i­sa­tion d’une antic­i­pa­tion macroé­conomique. Con­clu­sion, si cette vision s’avère juste, le risque est moin­dre. “À titre d’ex­em­ple, les prob­a­bil­ités de se tromper sur les per­spec­tives de l’élec­tric­ité en Europe dans les années à venir sont faibles” souligne Dominique Macé.

Dès l’in­stant où une société analysée cor­re­spond aux thèmes, elle peut être inté­grée au porte­feuille. Le ges­tion­naire n’a pas à choisir entre l’ap­proche growth, qui priv­ilégie les valeurs de crois­sance, ou la méthode val­ue, qui recherche des valeurs décotées au poten­tiel de val­ori­sa­tion jugé attrac­t­if. “Même si, dans le con­texte actuel de crois­sance économique mon­di­ale, affirme Dominique Macé, nous mis­ons plus sur les effets posi­tifs de la reprise pour les entre­pris­es que sur des valeurs sous-cotées.

Si le choix des valeurs est essen­tiel, en con­séquence la ten­dance des marchés compte moins : “La ges­tion de con­vic­tion per­met de nous isol­er des ten­dances aléa­toires, des taux très bas et des primes de risque très élevées”, souligne-t-il. Enfin, la ges­tion peut aus­si se déclin­er dans les straté­gies d’in­vestisse­ment sur les marchés obligataires.

Autant d’atouts qui nous ont incités à adopter ce style de ges­tion et de se lancer, grâce à elle, dans une stratégie de con­quête de capitaux.

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