« L’IA sur mesure est une révolution silencieuse pour les entreprises non tech »

« L’IA sur mesure est une révolution silencieuse pour les entreprises non tech »

Dossier : Vie des entreprises - Transformation numérique et intelligence artificielleMagazine N°805 Mai 2025
Par Marc SANSELME (X12)

Fon­da­teur de Sco­peo, Marc San­selme (X12) s’est don­né une mis­sion : rendre l’intelligence arti­fi­cielle acces­sible aux PME, ETI et struc­tures indus­trielles, loin de l’univers des start-up tech­nos. Avec sa pla­te­forme AI Tai­lor, il pro­pose des « Com­pa­nions IA » entiè­re­ment per­son­na­li­sables, capables de s’intégrer aux pro­ces­sus métier exis­tants sans les bou­le­ver­ser. Ren­contre avec un entre­pre­neur lucide et ambi­tieux, en pleine levée de fonds.

Scopeo est encore peu connue du grand public. Comment est née cette entreprise ?

Nous avons fon­dé Sco­peo en 2020, avec l’idée ini­tiale de créer une agence de déve­lop­pe­ment de pro­jets inté­grants de l’intelligence arti­fi­cielle. Rapi­de­ment, on a com­pris qu’il nous man­quait des outils adap­tés. Nous avons alors com­men­cé à déve­lop­per notre propre solution.

“Démocratiser l’IA dans toutes les entreprises, et pas seulement dans l’univers de la tech.”

Ce pro­ces­sus nous a ame­nés, presque natu­rel­le­ment, à pivo­ter vers un stu­dio d’IA sur mesure. C’est ain­si qu’est né AI Tai­lor, notre pla­te­forme mai­son. Notre ambi­tion est claire : démo­cra­ti­ser l’IA dans toutes les entre­prises, et pas seule­ment dans l’univers de la tech.

Pourquoi ce positionnement très « sur mesure » ?

Parce que l’IA n’est per­for­mante que lorsqu’elle s’adapte aux réa­li­tés du ter­rain. Chaque entre­prise a ses propres contraintes, ses propres for­mats de docu­ments, ses propres pro­ces­sus. Un outil géné­rique atteint vite ses limites. Nous sommes convain­cus que c’est en façon­nant des solu­tions clés en main, ajus­tées à chaque besoin, qu’on obtient des résul­tats tan­gibles. C’est ce qui jus­ti­fie l’approche « tailleur » de notre studio.

Concrètement, à quoi sert AI Tailor ?

C’est une pla­te­forme qui per­met de créer des intel­li­gences arti­fi­cielles sur mesure, basées sur les grands modèles de lan­gage. Les cas d’usage sont très variés : ges­tion d’e‑mails, géné­ra­tion de conte­nu, pros­pec­tion com­mer­ciale, veille régle­men­taire ou encore aide à la déci­sion. Pour résu­mer, AI Tai­lor sert à extraire et syn­thé­ti­ser des infor­ma­tions enfouies dans des masses de don­nées, sou­vent trop com­plexes ou trop volu­mi­neuses pour être exploi­tées manuel­le­ment. Comme je le dis sou­vent : « C’est un ChatGPT, cus­to­mi­sé aux besoins et aux don­nées d’un client. »

Vous parlez de « compagnons IA ». Qu’entendez-vous par là ?

Le terme « assis­tant » est trop vague. Un « com­pa­gnon IA », c’est une IA spé­cia­li­sée, conçue pour rem­plir une fonc­tion bien pré­cise, comme un com­pa­gnon « Sup­port Client » ou « Sup­port RH ». Cette approche faci­lite l’appropriation de l’outil, la ges­tion des accès aux don­nées, et sur­tout, elle rend les choses concrètes et fami­lières. Le concept de « Com­pa­nion » sim­pli­fie la com­pré­hen­sion de ses fonc­tions et de ces droits.

À quelles entreprises s’adresse votre solution ?

Nous tra­vaillons prin­ci­pa­le­ment avec des PME et des ETI, en par­ti­cu­lier dans l’industrie, la presse, la construc­tion, la ges­tion de pro­jets ou les direc­tions de SI. Les grands groupes sont sou­vent déjà équi­pés en interne. Nous vou­lons appor­ter l’IA là où elle est le plus utile et où elle peut vrai­ment chan­ger la donne. Il y a un vrai besoin dans les struc­tures non tech­no­lo­giques. Là, l’IA peut auto­ma­ti­ser des tâches, faire cir­cu­ler l’information, et créer un vrai gain de pro­duc­ti­vi­té et de l’efficience.

Comment s’intègre votre solution dans les systèmes existants ?

Notre phi­lo­so­phie, c’est la sim­pli­ci­té d’intégration. L’IA doit s’intégrer sans effort dans les « work­flows » exis­tants, pas les per­tur­ber. Elle vient pré­rem­plir un mail, résu­mer un docu­ment, ali­men­ter un tableau de bord… sans chan­ger les habi­tudes. Nous connec­tons la pla­te­forme à des outils comme Gmail, Sha­re­Point, Google Drive, et on adapte l’IA à chaque contexte métier. Nous pou­vons aus­si déclen­cher des actions auto­ma­ti­que­ment : par exemple, lorsqu’un docu­ment est dépo­sé, l’IA peut l’analyser et ren­sei­gner auto­ma­ti­que­ment une base de données.

Est-ce que l’implémentation prend du temps ?

Non, au contraire. C’est très rapide. Une IA peut être opé­ra­tion­nelle en quelques clics. Vous connec­tez vos don­nées via l’onglet Data Source, vous défi­nis­sez les étapes du trai­te­ment via notre stu­dio, vous sau­ve­gar­dez… et hop c’est en ligne. Nous dis­po­sons aus­si d’outils d’observabilités qui per­mettent de suivre pas à pas le fonc­tion­ne­ment de l’IA en toute trans­pa­rence, de com­prendre ce qui fonc­tionne ou pas, et d’ajuster au fur et à mesure.

Quelle est votre approche de l’accompagnement ?

Nous accom­pa­gnons nos clients de bout en bout. L’IA, seule, ne suf­fit pas. Il faut une vraie col­la­bo­ra­tion avec l’expertise métier du client. Nous tra­vaillons en ité­ra­tion, en ajus­tant pro­gres­si­ve­ment la solu­tion. L’idée est de mettre en ser­vice rapi­de­ment et de tes­ter, cor­ri­ger, et faire évo­luer le « Com­pa­nion IA » jusqu’à ce qu’il devienne un vrai outil métier per­for­mant aux besoins du client.

Comment les salariés réagissent-ils à cette transformation ?

Les réac­tions sont très diverses. Il y a autant d’enthousiasme débor­dant que de scep­ti­cisme abso­lu. Cer­tains voient l’IA comme une baguette magique, d’autres n’y croient pas du tout. L’IA n’est pas un frein en soi, tant qu’on reste dans une logique de test et de preuve par l’usage. Une fois que les uti­li­sa­teurs voient qu’ils gagnent du temps, ils cherchent d’autres cas d’usages pour opti­mi­ser leur travail.

Quel est votre modèle économique ?

Nous pro­po­sons un abon­ne­ment men­suel à par­tir de 150 € par com­pa­gnon IA, pour une petite équipe. Pour des usages plus larges, la tari­fi­ca­tion s’ajuste. Nous pro­po­sons éga­le­ment des for­faits d’accompagnement sur mesure : desi­gn du com­pa­gnon, inté­gra­tion, for­ma­tion… Le tout est sou­vent fac­tu­ré autour de 4500 € par projet.

Scopeo est-elle en croissance ?

Oui, nous sommes en phase de levée de fonds. Jusqu’ici, nous nous sommes auto­fi­nan­cés, mais il est temps d’accélérer. L’objectif est de ren­for­cer l’équipe, notam­ment avec des déve­lop­peurs web et des pro­fils pro­duits, et de déployer com­mer­cia­le­ment la pla­te­forme. Nous visons quelques cen­taines de mil­liers d’euros auprès de busi­ness angels pour fina­li­ser notre go-to-market.

Le marché est-il déjà saturé ?

Il y a du monde, c’est sûr. C’est un océan rouge : beau­coup de pois­sons, mais aus­si beau­coup de requins. Mais il y a encore de nom­breux cré­neaux à explo­rer. Nous obser­vons notam­ment un fort inté­rêt du sec­teur indus­triel, de la presse ou de la ges­tion de pro­jet. À terme, nous pour­rions nous spé­cia­li­ser dans cer­tains de ces domaines, tout en gar­dant une pla­te­forme capable de répondre à des besoins variés.

Quels conseils donneriez-vous à une entreprise qui veut se lancer dans l’IA ?

Ne cher­chez pas à tout anti­ci­per. Per­sonne ne peut rédi­ger un cahier des charges par­fait dans ce domaine. Il faut accep­ter l’incertitude, tes­ter, mani­pu­ler, ajus­ter. L’important, c’est de faire le pre­mier pas. L’IA n’est pas magique, mais bien uti­li­sée, elle peut vrai­ment trans­for­mer le quotidien.

Un dernier mot pour les lecteurs de La Jaune et La Rouge ?

Si vous êtes inté­res­sé par l’IA et que vous avez envie de rejoindre une aven­ture entre­pre­neu­riale, on recrute ! Nous avons besoin de pro­fils tech­niques, mais aus­si de gens curieux, capables de faire le lien entre tech­no­lo­gie et usages. Et bien sûr, les poly­tech­ni­ciens sont les bienvenus ! 

https://scopeo.ai/

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