« L’IA sur mesure est une révolution silencieuse pour les entreprises non tech »

Fondateur de Scopeo, Marc Sanselme (X12) s’est donné une mission : rendre l’intelligence artificielle accessible aux PME, ETI et structures industrielles, loin de l’univers des start-up technos. Avec sa plateforme AI Tailor, il propose des « Companions IA » entièrement personnalisables, capables de s’intégrer aux processus métier existants sans les bouleverser. Rencontre avec un entrepreneur lucide et ambitieux, en pleine levée de fonds.
Scopeo est encore peu connue du grand public. Comment est née cette entreprise ?
Nous avons fondé Scopeo en 2020, avec l’idée initiale de créer une agence de développement de projets intégrants de l’intelligence artificielle. Rapidement, on a compris qu’il nous manquait des outils adaptés. Nous avons alors commencé à développer notre propre solution.
“Démocratiser l’IA dans toutes les entreprises, et pas seulement dans l’univers de la tech.”
Ce processus nous a amenés, presque naturellement, à pivoter vers un studio d’IA sur mesure. C’est ainsi qu’est né AI Tailor, notre plateforme maison. Notre ambition est claire : démocratiser l’IA dans toutes les entreprises, et pas seulement dans l’univers de la tech.
Pourquoi ce positionnement très « sur mesure » ?
Parce que l’IA n’est performante que lorsqu’elle s’adapte aux réalités du terrain. Chaque entreprise a ses propres contraintes, ses propres formats de documents, ses propres processus. Un outil générique atteint vite ses limites. Nous sommes convaincus que c’est en façonnant des solutions clés en main, ajustées à chaque besoin, qu’on obtient des résultats tangibles. C’est ce qui justifie l’approche « tailleur » de notre studio.
Concrètement, à quoi sert AI Tailor ?
C’est une plateforme qui permet de créer des intelligences artificielles sur mesure, basées sur les grands modèles de langage. Les cas d’usage sont très variés : gestion d’e‑mails, génération de contenu, prospection commerciale, veille réglementaire ou encore aide à la décision. Pour résumer, AI Tailor sert à extraire et synthétiser des informations enfouies dans des masses de données, souvent trop complexes ou trop volumineuses pour être exploitées manuellement. Comme je le dis souvent : « C’est un ChatGPT, customisé aux besoins et aux données d’un client. »
Vous parlez de « compagnons IA ». Qu’entendez-vous par là ?
Le terme « assistant » est trop vague. Un « compagnon IA », c’est une IA spécialisée, conçue pour remplir une fonction bien précise, comme un compagnon « Support Client » ou « Support RH ». Cette approche facilite l’appropriation de l’outil, la gestion des accès aux données, et surtout, elle rend les choses concrètes et familières. Le concept de « Companion » simplifie la compréhension de ses fonctions et de ces droits.
À quelles entreprises s’adresse votre solution ?
Nous travaillons principalement avec des PME et des ETI, en particulier dans l’industrie, la presse, la construction, la gestion de projets ou les directions de SI. Les grands groupes sont souvent déjà équipés en interne. Nous voulons apporter l’IA là où elle est le plus utile et où elle peut vraiment changer la donne. Il y a un vrai besoin dans les structures non technologiques. Là, l’IA peut automatiser des tâches, faire circuler l’information, et créer un vrai gain de productivité et de l’efficience.
Comment s’intègre votre solution dans les systèmes existants ?
Notre philosophie, c’est la simplicité d’intégration. L’IA doit s’intégrer sans effort dans les « workflows » existants, pas les perturber. Elle vient préremplir un mail, résumer un document, alimenter un tableau de bord… sans changer les habitudes. Nous connectons la plateforme à des outils comme Gmail, SharePoint, Google Drive, et on adapte l’IA à chaque contexte métier. Nous pouvons aussi déclencher des actions automatiquement : par exemple, lorsqu’un document est déposé, l’IA peut l’analyser et renseigner automatiquement une base de données.
Est-ce que l’implémentation prend du temps ?
Non, au contraire. C’est très rapide. Une IA peut être opérationnelle en quelques clics. Vous connectez vos données via l’onglet Data Source, vous définissez les étapes du traitement via notre studio, vous sauvegardez… et hop c’est en ligne. Nous disposons aussi d’outils d’observabilités qui permettent de suivre pas à pas le fonctionnement de l’IA en toute transparence, de comprendre ce qui fonctionne ou pas, et d’ajuster au fur et à mesure.
Quelle est votre approche de l’accompagnement ?
Nous accompagnons nos clients de bout en bout. L’IA, seule, ne suffit pas. Il faut une vraie collaboration avec l’expertise métier du client. Nous travaillons en itération, en ajustant progressivement la solution. L’idée est de mettre en service rapidement et de tester, corriger, et faire évoluer le « Companion IA » jusqu’à ce qu’il devienne un vrai outil métier performant aux besoins du client.
Comment les salariés réagissent-ils à cette transformation ?
Les réactions sont très diverses. Il y a autant d’enthousiasme débordant que de scepticisme absolu. Certains voient l’IA comme une baguette magique, d’autres n’y croient pas du tout. L’IA n’est pas un frein en soi, tant qu’on reste dans une logique de test et de preuve par l’usage. Une fois que les utilisateurs voient qu’ils gagnent du temps, ils cherchent d’autres cas d’usages pour optimiser leur travail.
Quel est votre modèle économique ?
Nous proposons un abonnement mensuel à partir de 150 € par compagnon IA, pour une petite équipe. Pour des usages plus larges, la tarification s’ajuste. Nous proposons également des forfaits d’accompagnement sur mesure : design du compagnon, intégration, formation… Le tout est souvent facturé autour de 4500 € par projet.
Scopeo est-elle en croissance ?
Oui, nous sommes en phase de levée de fonds. Jusqu’ici, nous nous sommes autofinancés, mais il est temps d’accélérer. L’objectif est de renforcer l’équipe, notamment avec des développeurs web et des profils produits, et de déployer commercialement la plateforme. Nous visons quelques centaines de milliers d’euros auprès de business angels pour finaliser notre go-to-market.
Le marché est-il déjà saturé ?
Il y a du monde, c’est sûr. C’est un océan rouge : beaucoup de poissons, mais aussi beaucoup de requins. Mais il y a encore de nombreux créneaux à explorer. Nous observons notamment un fort intérêt du secteur industriel, de la presse ou de la gestion de projet. À terme, nous pourrions nous spécialiser dans certains de ces domaines, tout en gardant une plateforme capable de répondre à des besoins variés.
Quels conseils donneriez-vous à une entreprise qui veut se lancer dans l’IA ?
Ne cherchez pas à tout anticiper. Personne ne peut rédiger un cahier des charges parfait dans ce domaine. Il faut accepter l’incertitude, tester, manipuler, ajuster. L’important, c’est de faire le premier pas. L’IA n’est pas magique, mais bien utilisée, elle peut vraiment transformer le quotidien.
Un dernier mot pour les lecteurs de La Jaune et La Rouge ?
Si vous êtes intéressé par l’IA et que vous avez envie de rejoindre une aventure entrepreneuriale, on recrute ! Nous avons besoin de profils techniques, mais aussi de gens curieux, capables de faire le lien entre technologie et usages. Et bien sûr, les polytechniciens sont les bienvenus !