Blueray : intégrale de la musique de chambre de Brahms

Johannes BRAHMS : intégrale de la musique de chambre

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°730 Décembre 2017Par : Daniel Barenboim, Itzhak Perlman, Maxim Vengerov, Zoltán Kocsis, Isaac Stern, Yo-Yo Ma, András Schiff, Elena Bashkirova…Rédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : Un Blu-ray Euroarts 2064014

L’ensemble de la musique de chambre de Brahms, en un seul disque Blu-ray ! Voi­ci réunis très effi­ca­ce­ment plus de quinze heures de musique magni­fique, par des artistes le plus sou­vent de réfé­rence, fil­mées pour la télé­vi­sion alle­mande dans les années quatre-vingt-dix. 

La musique de chambre est une part très impor­tante de l’œuvre de Brahms. Ce musi­cien roman­tique est une des per­son­na­li­tés musi­cales les plus fortes du XIXe siècle, son œuvre a deux carac­té­ris­tiques originales. 

La pre­mière est que son style n’a presque pas évo­lué durant sa longue car­rière. Déjà très affir­mé dès ses pre­mières œuvres, son style n’a pas été influen­cé par les évo­lu­tions impor­tantes de la musique de la seconde par­tie du XIXe, le wag­né­risme (comme Bru­ck­ner et Mah­ler), ou l’impressionnisme (Debus­sy…).

La seconde carac­té­ris­tique est qu’il a com­po­sé un nombre limi­té d’œuvres de chaque type. Alors que par­mi ses qua­si-contem­po­rains, Men­dels­sohn, Bru­ck­ner, Mah­ler ont com­po­sé un nombre impor­tant de sym­pho­nies, alors que Schu­mann, Liszt, Cho­pin ont com­po­sé de nom­breux cycles pour pia­no, Wag­ner et Ver­di de nom­breux opé­ras, Brahms, lui, s’est chaque fois conten­té de tou­jours trois ou moins (à part quatre sym­pho­nies), comme s’il n’était jamais convain­cu de la forme qui lui conve­nait le mieux. 

Ces deux carac­té­ris­tiques se retrouvent dans sa musique de chambre, un style très homo­gène, à tra­vers trois sonates pour pia­no et vio­lon, deux sonates pour pia­no et cla­ri­nette, deux sonates pour pia­no et vio­lon­celle, trois trios pour pia­no et cordes, deux trios pour pia­no et vent, trois qua­tuors à cordes, trois qua­tuors avec pia­no, deux quin­tettes à cordes, un quin­tette avec cla­ri­nette et un autre avec pia­no, deux sextuors. 

Aucune fai­blesse, uni­que­ment des chefs‑d’œuvre ! Ce n’est pas faire injure à Mozart ou à Bee­tho­ven que de recon­naître qu’il n’y a pas dans leur musique de chambre la même constance d’inspiration qu’il y a chez Brahms. 

On a par­lé déjà ici en 2010 de l’excellente inter­pré­ta­tion des trios avec pia­no emme­née par Ele­na Bash­ki­ro­va (Madame Baren­boim à la ville) et un Maxim Ven­ge­rov éton­nant de concen­tra­tion. On disait que ces films nous per­met­taient de retrou­ver comme au concert la com­pli­ci­té des trois musi­ciens, la fusion de leur timbre, la concen­tra­tion et l’émotion des artistes. 

Mais com­ment ne pas mettre au même fir­ma­ment le duo Baren­boim- Perl­man dans les sonates pour vio­lon, enre­gis­trées en public à Chi­ca­go. Et les cla­ri­nettes chan­tantes et envoû­tantes (et magni­fi­que­ment enre­gis­trées) de Wen­zel Fuchs dans les sonates et trio et de Karl Leis­ter dans le quin­tette, qui se sont suc­cé­dé comme cla­ri­nette solo de l’Orchestre phil­har­mo­nique de Berlin. 

Nous devons men­tion­ner éga­le­ment les deux Sex­tuors, inter­pré­tés par le Sex­tuor de Vienne emme­né par le grand cham­briste qu’est Erich Höbarth. Les œuvres de musique de chambre fai­sant inter­ve­nir plus de cinq musi­ciens sont rares. 

Les chefs‑d’œuvre dans cette caté­go­rie sont natu­rel­le­ment le Sep­tuor de Bee­tho­ven, les Octuors de Schu­bert et Men­dels­sohn, et ces deux Sex­tuors de Brahms. 

Natu­rel­le­ment suivre les six voix en paral­lèle (deux vio­lons, deux altos, deux vio­lon­celles) est un défi au disque. Au concert en revanche, et en image grâce à ce Blu-ray, c’est désor­mais possible. 

On pénètre alors dans la com­plexi­té et la richesse de cette musique, on res­sent l’impact de cet ensemble de solistes qui se mettent au ser­vice du col­lec­tif, et l’on com­prend par­fai­te­ment ce que « musique de chambre » signifie. 

Vous l’avez com­pris, aucun temps mort, aucune baisse d’inspiration, ni du com­po­si­teur, ni des inter­prètes le long de ces quinze heures de musique de chambre. 

Un disque auquel je reviens régulièrement.

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