Les professeurs David Devos et Caroline Moreau finalistes du Prix de l’Inventeur Européen 2024 de l’Office Européen des Brevets dans la catégorie « Recherche » pour l’avancée thérapeutique.

InBrain Pharma révolutionne le traitement de la maladie de Parkinson en stade avancé

Dossier : Vie des entreprises - HealthtechMagazine N°804 Avril 2025
Par Véronique FOUTEL

Véro­nique Fou­tel, CEO de InBrain Phar­ma, nous pré­sente cette Bio­Tech au stade cli­nique qui vient révo­lu­tion­ner le trai­te­ment de la mala­die de Par­kin­son avec sa thé­ra­pie assis­tée par dis­po­si­tif qui per­met d’administrer au niveau céré­bral de la dopa­mine en anaé­ro­bie (A‑dopamine). Expli­ca­tions sur ses contri­bu­tions au déve­lop­pe­ment de la Biotech.

InBrain Pharma, société biopharmaceutique spécialisée dans les maladies neurodégénératives. Pouvez-vous nous en dire plus sur son positionnement dans le monde de la santé ? 

En 2018, InBrain Phar­ma a été cofon­dée par le doc­teur Mat­thieu Fisi­chel­la et les pro­fes­seurs David Devos, un neu­ro­logue et phar­ma­co­logue, et Caro­line Moreau Devos, neu­ro­logue, pra­ti­ciens au CHU de Lille et affi­liés Inserm et Uni­ver­si­té de Lille dans le cadre d’un trans­fert tech­no­lo­gique basé sur les tra­vaux des deux hospitalo-universitaires.

Aujourd’hui, InBrain Phar­ma est une Bio­Tech en stade cli­nique. Notre pre­mier pro­gramme, la dopa­mine en anaé­ro­bie (A‑dopamine), est un médi­ca­ment-can­di­dat qui est admi­nis­tré par per­fu­sion intra­cé­ré­brale cir­ca­dienne conti­nue aux patients en stade avan­cé de la mala­die de Parkinson.

Vous avez pris la présidence d’InBrain Pharma il y a tout juste un an. Dans ce cadre, quelles sont les grandes lignes de votre feuille de route ? 

Doc­teur en phar­ma­cie, ancienne interne des Hôpi­taux de Paris, j’ai une expé­rience de plus de 30 ans dans le domaine de la valo­ri­sa­tion de l’innovation aus­si bien dans la sphère publique que pri­vée, au sein de grands groupes inno­vants, comme F. Hoff­mann-La Roche AG. Il y a un peu plus d’un an, j’ai rejoint InBrain Phar­ma à un moment char­nière de son déve­lop­pe­ment, l’obtention des résul­tats finaux de l’essai cli­nique de phase I/II com­men­cé en 2020. Ces résul­tats publiés dans la revue Nature Medi­cine ont per­mis de déter­mi­ner la dose thé­ra­peu­tique de dopa­mine à intro­duire dans le cer­veau pour avoir une réduc­tion de la symp­to­ma­to­lo­gie motrice et vali­der ain­si le concept de sup­plé­men­ta­tion per­son­na­li­sée de ce neu­ro­mé­dia­teur chez l’homme atteint de la mala­die de Parkinson.

Aujourd’hui, il s’agit donc de pas­ser en phase III de déve­lop­pe­ment cli­nique pour confir­mer la magni­tude de cet effet thérapeutique.

Dans cette conti­nui­té, mon prin­ci­pal chan­tier est d’industrialiser le pro­jet, c’est-à-dire de confir­mer la preuve cli­nique dans le cadre d’un essai inter­na­tio­nal mul­ti­cen­trique de phase III menant à l’enregistrement et au rem­bour­se­ment de notre médi­ca­ment, et d’assurer sa pro­duc­tion à plus grande échelle selon les stan­dards de qua­li­té de l’industrie

phar­ma­ceu­tique. À cet effet, nous sommes mobi­li­sés par une levée de fonds de 52 mil­lions pour péren­ni­ser le finan­ce­ment de ce chan­ge­ment d’échelle, et consti­tuer l’équipe et l’écosystème autour d’inBrain Pharma.

InBrain Pharma travaille donc sur la maladie de Parkinson. Dites-nous en plus. 

En 2000, le prix Nobel de Méde­cine a récom­pen­sé les tra­vaux éta­blis­sant, entre autres choses, le lien entre la mala­die de Par­kin­son et la dis­pa­ri­tion de la dopa­mine, un neu­ro­mé­dia­teur, par­ti­cu­liè­re­ment riche dans une zone du cer­veau contrô­lant la motri­ci­té auto­nome et un cer­tain nombre de fonc­tions exé­cu­tives et cog­ni­tives. L’appauvrissement de la zone en dopa­mine entraîne une motri­ci­té anor­male et une symp­to­ma­to­lo­gie non motrice.

Cepen­dant comme la dopa­mine a la carac­té­ris­tique de ne pas­ser ni la bar­rière diges­tive si ava­lée, ni la bar­rière héma­to-encé­pha­lique, si injec­tée à tra­vers la peau ou direc­te­ment dans la cir­cu­la­tion san­guine, elle n’arrive pas au niveau céré­bral. Ain­si, depuis près de 60 ans, pour trai­ter la mala­die de Par­kin­son, on uti­lise des médi­ca­ments à base du pré­cur­seur appe­lé lévo­do­pa. Aujourd’hui, on uti­lise aus­si des déri­vés syn­thé­tiques qui sont pres­crits à tous les patients qui com­mencent à souf­frir des troubles de la mala­die de Parkinson.

« InBrain Pharma offre une thérapie assistée par dispositif à base de dopamine, permettant de délivrer à proximité de la zone déficitaire le neuromédiateur par perfusion cérébrale continue circadienne en contournant la barrière hémato-encéphalique. »

Au stade léger de la mala­die, les patients reçoivent le médi­ca­ment per os, c’est-à-dire par voie orale. La lévo­do­pa, lors de son pas­sage au niveau céré­bral, est trans­for­mée en dopa­mine pour agir dans la voie dopa­mi­ner­gique qui s’appauvrit en dopa­mine. Si la lévo­do­pa par sa trans­for­ma­tion au niveau céré­bral règle les troubles de la motri­ci­té, elle induit néan­moins des mou­ve­ments anor­maux appe­lés dys­ki­né­sies. Quand l’administration per os de lévo­do­pa ou médi­ca­ments équi­va­lents (ago­nistes dopa­mi­ner­giques) ne suf­fit plus, deux options s’offrent aux patients, en dehors de celle consis­tant à les lais­ser sous un trai­te­ment oral inadap­té sou­vent à leur demande :

  • Soit pas­ser à des thé­ra­pies médi­ca­men­teuses assis­tées par dis­po­si­tif à base de lévo­do­pa ou de médi­ca­ments appa­ren­tés, per­met­tant une admi­nis­tra­tion conti­nue du médi­ca­ment soit par voie sous-cuta­née, soit par voie enté­rale, au prix d’une gas­tro­sto­mie entraî­nant des pro­blèmes de tolé­rance et entra­vant la qua­li­té de vie des patients.
  • Soit avoir recours à une thé­ra­pie assis­tée par dis­po­si­tif sans médi­ca­ment, telle que des élec­trodes pour sti­mu­ler élec­tri­que­ment les neurones.

Aujourd’hui, InBrain Phar­ma offre une troi­sième alter­na­tive : une thé­ra­pie assis­tée par dis­po­si­tif à base de dopa­mine, per­met­tant de déli­vrer à proxi­mi­té de la zone défi­ci­taire le neu­ro­mé­dia­teur par per­fu­sion céré­brale conti­nue cir­ca­dienne en contour­nant la bar­rière héma­to-encé­pha­lique. Ce contour­ne­ment a été ren­du pos­sible grâce à un fin cathé­ter pla­cé par un acte neu­ro­chi­rur­gi­cal relié à une pompe de dosage de pré­ci­sion implan­té au niveau abdo­mi­nal sous la peau du patient. Pla­cée dans le réser­voir de cette pompe, la dopa­mine est stable pen­dant 7 à 15 jours et est déli­vrée direc­te­ment au niveau céré­bral à une dose per­son­na­li­sée aux besoins du malade. Le rem­plis­sage du réser­voir de la pompe se fait à l’aide d’une seringue au tra­vers de la peau du malade.

Quelle est la valeur ajoutée de l’alternative innovante proposée par InBrain Pharma ?

Elle est double ! Tout d’abord, nous avons réus­si à sta­bi­li­ser la dopa­mine qui a la carac­té­ris­tique de s’oxyder natu­rel­le­ment. En paral­lèle, nous l’amenons sous cette forme sta­bi­li­sée, en anaé­ro­bie, au niveau céré­bral où elle est admi­nis­trée en « goutte à goutte » de manière très pré­cise au bon endroit et sans dispersion.

InBrain Phar­ma est ain­si un pion­nier du trai­te­ment des troubles neu­ro­lo­giques par l’administration en intra­cé­ré­bral de médi­ca­ment en adap­tant la poso­lo­gie à chaque patient. Aujourd’hui, InBrain Phar­ma contri­bue donc à inven­ter et à déve­lop­per la méde­cine de pré­ci­sion en neu­ro­lo­gie au XXIe siècle.

Les résul­tats de notre essai cli­nique ont, par ailleurs, mon­tré une réduc­tion abso­lu­ment remar­quable du temps de contrôle impar­fait de la symp­to­ma­to­lo­gie motrice des patients ce qui per­met à un stade avan­cé de la patho­lo­gie d’améliorer leur auto­no­mie, leur qua­li­té de vie, mais éga­le­ment celle de leur entourage.

“InBrain Pharma est un pionnier du traitement des troubles neurologiques par l’administration en intracérébral de médicament en adaptant la posologie à chaque patient.”

En paral­lèle, l’augmentation de la dose thé­ra­peu­tique de dopa­mine dans le cer­veau per­met de dimi­nuer la quan­ti­té de médi­ca­ments per os pres­crits en com­bi­nai­son. Contrai­re­ment à la lévo­do­pa, notre thé­ra­pie assis­tée par dis­po­si­tif à base de dopa­mine est très bien tolé­rée et n’induit pas de mou­ve­ments anor­maux. En plus, elle contri­bue à dimi­nuer consi­dé­ra­ble­ment la part du cock­tail de médi­ca­ments par voie orale à base de lévo­do­pa ou médi­ca­ment appa­ren­té pour­voyeurs de mou­ve­ments anor­maux dans le trai­te­ment (réduc­tion de près de 60 %).

Avec plus de 4 ans de recul, InBrain Phar­ma a mon­tré la fai­sa­bi­li­té de son approche, confir­mé sa capa­ci­té à doser un neu­ro­mé­dia­teur au niveau céré­bral, et vali­dé ce concept de per­fu­sion céré­brale conti­nue médi­ca­men­teuse dans une mala­die cérébrale.

Les professeurs David Devos et Caroline Moreau finalistes du Prix de l’Inventeur Européen 2024 de l’Office Européen des Brevets dans la catégorie « Recherche » pour l’avancée thérapeutique.
Les pro­fes­seurs David Devos et Caro­line Moreau fina­listes du Prix de l’Inventeur Euro­péen 2024 de l’Office Euro­péen des Bre­vets dans la caté­go­rie « Recherche » pour l’avancée thérapeutique.

Pour cette découverte, les professeurs Devos et Moreau ont été finalistes du Prix de l’Inventeur Européen 2024 de l’Office Européen des Brevets dans la catégorie « Recherche » pour l’avancée thérapeutique qu’elle représente dans la maladie de Parkinson. Dites-nous en plus. 

C’est une consé­cra­tion majeure pour nos deux scien­ti­fiques dont l’invention a été sélec­tion­née par­mi 558 dos­siers sour­cés dans le monde entier. Ce prix vient recon­naître la per­ti­nence de cette approche de rup­ture appe­lée à bou­le­ver­ser les dogmes actuels de prise en charge médi­ca­men­teuse de la mala­die de Par­kin­son. Enfin, le fait d’accéder à cette cour des grands inno­vants telle que défi­nie par l’Office Euro­péen des Bre­vets sou­ligne aus­si la soli­di­té de la pro­tec­tion de la pro­prié­té intel­lec­tuelle dont béné­fi­cient notre can­di­dat-médi­ca­ment et sa méthode d’administration ori­gi­nale. 

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