Portrait de Bazaine (1803).

Guerre et paix : les X en Russie de 1810 à 1830

Dossier : ExpressionsMagazine N°723 Mars 2017
Par Christian MARBACH (56)

C’est l’his­toire des nom­breux X pré­sents en Rus­sie à cette époque, d’un coté pour la guerre qui s’est ter­mi­née par le désastre de la Béré­zi­na, de l’autre pour la paix, appe­lés dans le cadre de coopé­ra­tion tech­nique pour moder­ni­ser le pays et for­mer leurs col­la­bo­ra­teurs russes. Vers 1830, ces der­niers veulent prendre les affaires en main et c’est le retour des mis­sion­naires qui finirent par obte­nir en France la place qu’ils méritent. 

La période évo­quée ici va de 1810 à 1830, deux dates cor­res­pon­dant approxi­ma­ti­ve­ment à l’arrivée en Rus­sie des pre­miers poly­tech­ni­ciens prê­tés par la France à ce pays dans le cadre d’accords de coopé­ra­tion signés à Til­sit, et au retour de la plu­part des X arri­vés en 1810 comme Bazaine, puis vers 1820, comme Lamé dans le cadre d’autres accords. 

Mais la période en ques­tion recouvre aus­si les mois de la cam­pagne et de la retraite de Rus­sie, qui ont impo­sé aux « mis­sion­naires » de 1810 un périple peu com­mun et sur­tout entraî­né la mort de mil­liers de sol­dats et d’officiers, dont une cen­taine de polytechniciens. 

TROIS PÉRIODES

En 1810, quatre jeunes X arrivent à Saint-Péters­bourg : Bazaine, Fabre, Potier et Des­trem, sélec­tion­nés et volon­taires pour des mis­sions d’enseignement et de coopé­ra­tion rela­tifs aux tra­vaux publics et aux communications. 

« La retraite de Russie a entraîné la mort de milliers de soldats et d’officiers, dont une centaine de polytechniciens »

Mais en 1812, la Grande Armée enva­hit la Rus­sie, arrive à Mos­cou, en repart et sa retraite devient vite tra­gique. Dans les batailles de cette cam­pagne, des X ont com­bat­tu, beau­coup sont morts, ou ont été bles­sés, cer­tains ont été faits pri­son­niers, d’autres ont dis­pa­ru dans le cata­clysme du retour. 


Por­trait de Bazaine (1803). © COLLECTIONS ÉCOLE POLYTECHNIQUE-PALAISEAU

J’évoquerai ici, très rapi­de­ment, Fab­vier, Demay, Lan­glois, Pon­ce­let, Gleizes et Cro­zet. Quant à nos jeunes coopé­rants, empê­chés de quit­ter le pays, ils seront emme­nés jusqu’à Irkoutsk et pla­cés en rési­dence très surveillée. 

Après le congrès de Vienne, la Rus­sie sou­haite de nou­veau béné­fi­cier de la qua­li­té de cette main‑d’œuvre excep­tion­nelle. Bazaine, qui veut res­ter en Rus­sie comme ses trois confrères, est sol­li­ci­té pour faire venir des X peu dési­reux de tra­vailler en France sous la Restauration. 

C’est ain­si qu’arrivent notam­ment les grands phy­si­ciens Lamé et Cla­pey­ron, mais aus­si d’autres. Le déve­lop­pe­ment éco­no­mique de Saint-Péters­bourg attire éga­le­ment des non-fonc­tion­naires, comme Enfan­tin : des groupes poly­tech­ni­ciens réflé­chissent dans la capi­tale russe sur la doc­trine saint-simonienne. 

Vers 1830 com­mence le reflux. La France rede­vient plus attrayante après la révo­lu­tion de 1830, les auto­ri­tés russes sont plus crain­tives devant des repré­sen­tants d’un pays bien agi­té, des cadres russes for­més par les pro­fes­seurs venus d’ailleurs sont prêts à les rem­pla­cer aux postes de responsabilité… 

QU’EST UN POLYTECHNICIEN EN 1810, 1820, 1830 ?

Les « jeunes savants » dont nous sui­vrons le par­cours en terre russe ont entre 23 et 35 ans, et ce sera en 1820 l’âge de Lamé, Cla­pey­ron, Rau­court ou Enfan­tin qui les rejoin­dront alors. Les offi­ciers poly­tech­ni­ciens du champ de bataille ne sont pas plus âgés. 

En 1812, les offi­ciers X n’ont pas encore atteint des grades vrai­ment éle­vés (Demay, qui meurt à la bataille de la Mos­ko­wa, est l’un des plus gra­dés, colo­nel à trente-cinq ans) : c’est que les postes supé­rieurs sont occu­pés par les anciens des guerres de la Révolution. 

Cette remarque ne signi­fie pas que le rôle des X n’ait pas été impor­tant. Ils font presque tous par­tie des « armes savantes », artille­rie et génie, et si l’empereur a pas­sé l’éponge sur bien des incar­tades de leur sco­la­ri­té, c’est qu’il avait un réel besoin d’officiers capables de maî­tri­ser, mal­gré la mitraille, les cal­culs de loca­li­sa­tion, les équa­tions de tir, la construc­tion rapide de ponts. 

Mais la situa­tion faite par le pou­voir russe aux X venus à son ser­vice était encore bien plus excep­tion­nelle. On leur offrait, avec les salaires cor­res­pon­dants, des postes de res­pon­sa­bi­li­té. Ils appor­taient un excep­tion­nel bagage scien­ti­fique alors ensei­gné à l’X par les meilleurs pro­fes­seurs d’Europe.

Le tsar le savait, comme le sau­ront les res­pon­sables amé­ri­cains recru­tant après 1815 par­mi les X écar­tés pour des rai­sons poli­tiques à la Restauration. 

EN CAMPAGNE

En juin 1812, Napo­léon lance sa « Grande Armée » à la conquête de la Rus­sie. La cam­pagne se résume à un aller-retour. Les restes de la « Grande Armée » sortent de Rus­sie le 14 décembre. Pen­dant ces six mois que les sur­vi­vants n’oublieront jamais, une cen­taine de jeunes poly­tech­ni­ciens vont dis­pa­raître. Arrê­tons-nous sur quelques poly­tech­ni­ciens qui ont combattu. 

Timbres grecs en hommage à Nicolas Fabvier (1802)
Charles Nico­las Fab­vier (1802) devien­dra un des héros de l’insurrection grecque contre les occu­pants turcs.

7 sep­tembre 1812. Charles Nico­las Fab­vier (1802) vient de rejoindre la Grande Armée à bride abat­tue pour par­ti­ci­per à la bataille annon­cée, celle qui doit ouvrir la route de Mos­cou en bous­cu­lant les troupes de Kou­tou­zov, celle aus­si qui doit lui appor­ter la gloire. 

Car Fab­vier, artilleur aus­si expert en balis­tique qu’intrépide dans le com­bat au corps à corps, recherche la gloire depuis son entrée à Poly­tech­nique. Il se pré­sente à Napo­léon le 6 sep­tembre, est prié de don­ner à l’empereur des infor­ma­tions sur l’Espagne.

Il par­ti­cipe le 7, lors de la bataille de la Mos­ko­wa, à l’assaut d’une redoute lorsqu’une balle lui fra­casse un pied. Il refuse l’amputation, sera nom­mé chef d’escadron, soi­gné à Mos­cou, éva­cué vers Smo­lensk puis en France. 

Que devien­dra Fabvier ?
Un des héros de l’insurrection grecque contre les occu­pants turcs, aux côtés de Kolo­ko­tro­nis, Ypsi­lan­tis, ou de la Bou­bou­li­na. Puis un pair de France. 

7 sep­tembre 1812. Fran­çois Demay (1796) est déjà colo­nel quand il par­ti­cipe à cette bataille de la Mos­ko­wa. Il est char­gé de pla­cer les pièces de ses artilleurs au plus près des forces enne­mies pour pré­pa­rer une attaque quand il tombe, trou­vant « une mort glorieuse ». 

8 sep­tembre. Cro­zet (1805), pon­ton­nier chez les artilleurs de la Garde impé­riale a été fait pri­son­nier à la bataille de la Mos­ko­wa. Plus chan­ceux que d’autres, il fut pris et héber­gé par un offi­cier aris­to­crate russe qui en fit le pré­cep­teur de ses enfants. Il apprit la langue russe, écri­vit un livre de grammaire. 

Que devien­dra Crozet ?
À son retour en France en 1815, il sait qu’il n’a plus d’avenir en France et décide de par­tir aux États-Unis où il ensei­gne­ra la géo­mé­trie des­crip­tive, fon­de­ra le VMI, le Vir­gi­nia Mili­ta­ry Ins­ti­tute, tra­vaille­ra en excellent offi­cier du génie, par exemple en Loui­siane pour redes­si­ner les « levées » du Mis­sis­sip­pi ou dans les Appa­laches pour y construire une des pre­mières voies fer­rées pas­sant sous des tun­nels suc­ces­sifs sous les Blue Ridges. 

L’incendie de Moscou, panorama de Jean-Charles Langlois (1806) .
L’incendie de Mos­cou est l’un des pano­ra­mas les plus sai­sis­sants de Jean-Charles Lan­glois (1806) .

Il ver­ra ses élèves mis en situa­tion de se com­battre lors de la guerre de Séces­sion et décé­de­ra en 1864. 

14 sep­tembre 1812. Jean Charles Lan­glois (1806) est tout jeune et plein de fougue, il sera colo­nel à Water­loo. Mais les hasards des affec­ta­tions le retiennent en Espagne quand ses cama­rades assistent à Mos­cou au spec­tacle extra­or­di­naire de l’incendie de cette ville. 

Comme il l’aurait contem­plé avec un œil d’artiste ! Car ce très cou­ra­geux com­bat­tant, qui par­cou­rut presque toute l’Europe, sait regar­der, et de 1815 à 1870 fera le tour des champs de bataille, de l’Égypte à la Cri­mée, pour les peindre et photographier. 

« Langlois deviendra riche et célèbre
grâce à ses “panoramas” »

Que devien­dra Langlois ?
Chas­sé de l’armée en 1815, il se recon­ver­tit en effet dans la pein­ture, et devien­dra riche et célèbre grâce à ses « pano­ra­mas », grands tableaux cylin­driques que le spec­ta­teur venait admi­rer en se pla­çant à l’intérieur de la struc­ture. L’incendie de Mos­cou sera un de ses pano­ra­mas les plus saisissants. 

18 novembre 1812. Jean-Vic­tor Pon­ce­let (1807) est offi­cier du génie quand il ral­lie la Grande Armée à par­tir de son affec­ta­tion à l’embouchure de l’Escaut.

Portrait du général Poncelet (1807) par Ary Scheffer
Por­trait du géné­ral Pon­ce­let (1807) par Ary Schef­fer. © COLLECTIONS ÉCOLE POLYTECHNIQUE

Il n’arrive en Rus­sie qu’en août et y par­ti­cipe sur­tout à divers tra­vaux de for­ti­fi­ca­tion ; c’est seule­ment lors du repli de l’armée, après le pas­sage de l’empereur à Smo­lensk, qu’il est confron­té à une sévère bataille le 18 novembre. 

Il appar­tient en effet au modeste bataillon de sapeurs qui est char­gé de cou­vrir la retraite de Ney, tom­bé dans une embus­cade au moment de tra­ver­ser le Dnie­pr, et qui n’arrive à s’échapper avec 1 200 res­ca­pés que grâce à son arrière-garde : Pon­ce­let et ses sapeurs chargent les artilleurs russes à la baïon­nette avant d’être iso­lés et faits prisonniers. 

Que devien­dra Poncelet ?
Un grand géo­mètre et méca­ni­cien, un pro­fes­seur, un direc­teur de l’École en 1848, un aca­dé­mi­cien des sciences, une « auto­ri­té » tou­jours prête à appor­ter son expé­rience et sa « gloire » à des com­mis­sions ou des comi­tés, bref un incon­tour­nable du pan­théon des mathé­ma­ti­ciens du XIXe siècle. 

Début décembre 1812. Joseph Gleizes (1798), offi­cier du génie, est épui­sé après la tra­ver­sée de la Béré­zi­na, il y a jeté toutes ses forces pour per­mettre la retraite de ce qui reste de l’armée napoléonienne. 

Gra­ve­ment malade, il reste à Vil­nius, y est soi­gné ; repé­ré par les auto­ri­tés russes, après avoir peut-être pris contact avec Bazaine qu’il connais­sait, il est « invi­té » à rejoindre Saint-Péters­bourg en 1813 pour y ensei­gner les mathé­ma­tiques jusqu’à la fin de la guerre. 

Que devien­dra Gleizes ?
Offi­cier avec un avan­ce­ment peu écla­tant, puis homme poli­tique, maire de Lave­la­net (Ariège).

Gour­gaud (1799) a fait par­tie très tôt de l’entourage rap­pro­ché de Napo­léon. Il est près de lui au Krem­lin et le sauve lors de l’explosion de cer­tains bâti­ments, il tra­verse la Béré­zi­na à la nage pour aider à la mise en place des ponts, et autres aven­tures qu’il écri­ra en détail. 

Que devien­dra Gourgaud ?
Il sera à Water­loo, il sera à Sainte-Hélène où il écrit sous la dic­tée de l’empereur. Et il revien­dra en 1840 à Sainte-Hélène pour rame­ner à Paris le corps de son Napo­léon adoré ! 

EN MISSION

C’est en 1810 que Bazaine (1803), Fabre (1801), Potier (1805) et Des­trem (1803) ont été envoyés en Rus­sie dans le cadre d’une mis­sion de coopé­ra­tion tech­nique. Nous sommes, après Til­sit et pour quelques mois encore, en pleine lune de miel entre les deux empereurs. 

« On les appelle pour utiliser leurs connaissances et les transférer à des collaborateurs russes »

Napo­léon Ier a accep­té de répondre posi­ti­ve­ment à la demande d’Alexandre Ier et d’aider le tsar à moder­ni­ser son pays. En fait, les quatre mis­sion­naires seront bien vite appe­lés à diverses tâches qu’ils maî­trisent avec allant et talent, l’enseignement, mais aus­si les tra­vaux pra­tiques avec des pro­jets de routes, de ponts, de bâtiments. 

On les appelle, et on les appel­le­ra sur­tout après 1815 pour uti­li­ser leurs connais­sances en matière de tra­vaux publics et génie et les trans­fé­rer à des col­la­bo­ra­teurs russes. 

RÉSIDENCE SURVEILLÉE

Quand Napo­léon enva­hit la Rus­sie, l’ambassadeur de France sug­gère à nos quatre X en mis­sion de faire leurs valises mais ils n’en ont pas le temps, les auto­ri­tés russes refusent leur départ et les éloignent vers l’Est. C’est que ces coopé­rants fidèles sont à la fois sous les ordres du tsar et des repré­sen­tants de l’ennemi français. 

« Des honneurs, pour les plus anciens. Des fonctions importantes, pour les autres »

Leur périple aurait pu ins­pi­rer l’auteur de Michel Stro­goff : pre­mière étape Jaro­slav, puis Poché­kho­nié, et enfin, en août 1812, et jusqu’en février 1815, Irkoutsk en pleine Sibé­rie méridionale. 

Plus tard, ils ont racon­té cet « empri­son­ne­ment » dans une mai­son très sur­veillée, sans visites ni sor­ties. Heu­reu­se­ment, ils pou­vaient, eux aus­si, tra­vailler les mathématiques ! 

Quand ils reviennent à Saint-Péters­bourg, peut-être sai­sis par quelque syn­drome de Stock­holm, ils décident tous de res­ter au ser­vice du tsar qui leur pré­sente des excuses et sur­tout des pers­pec­tives pro­fes­sion­nelles, des res­pon­sa­bi­li­tés, des appoin­te­ments éle­vés, des condi­tions de vie exceptionnelles… 

Ils s’installent, et bien­tôt seront rejoints par d’autres Fran­çais et notam­ment d’autres X (comme Lamé, Cla­pey­ron, Rau­court) sou­vent recru­tés par l’intermédiaire de Bazaine qui « fai­sait son mar­ché » à Paris par­mi ses jeunes cama­rades… et il n’a pas fait de mau­vais choix ! Et quand d’autres Fran­çais viennent les rejoindre par d’autres voies, il s’agit par­fois d’individus excep­tion­nels comme Pros­per Enfan­tin (1813) venu repré­sen­ter une banque fran­çaise de 1821 à 1823. 

UNE COLONIE FRANÇAISE TRÈS ACTIVE

La colo­nie fran­çaise de la capi­tale russe est alors assez nom­breuse pour contri­buer à son ani­ma­tion par ses qua­li­tés, ses habi­tudes de ren­contres et de dis­cus­sions, sou­vent la nou­veau­té de ses échanges. 

Le Théâtre Alexandrinski conçu par Bazaine
Bazaine a conçu les construc­tions des plan­chers du Palais d’hiver, du Théâtre Alexan­drins­ki (ci-des­sus), 91128 Palai­seau Cedex de la cathé­drale de la Sainte-Tri­ni­té, du Sénat. © DENO / FOTOLIA.COM

Les bio­graphes de ces per­son­nages sau­ront mon­trer que leur ami­tié les a conduits à des rap­pro­che­ments fami­liaux comme à de fortes com­mu­nau­tés de pen­sée. Les his­to­riens du saint- simo­nisme racon­te­ront com­ment ces expa­triés ont ain­si déve­lop­pé leurs cer­ti­tudes sur l’importance du pro­grès scien­ti­fique, de l’enseignement, des réseaux de com­mu­ni­ca­tion ; ils s’en sou­vien­dront en France. 

Et que de tra­vaux pra­tiques ! Des livres de tech­no­lo­gie, évi­dem­ment mais aus­si pour Bazaine par exemple beau­coup de ponts dans la capi­tale et dans ses fau­bourgs, aus­si bien des petits ponts de fer, à la fois élé­gants et légers, pour les Jar­dins des rési­dences impé­riales, que des ouvrages majeurs de génie civil. 

C’est aus­si Bazaine qui a conçu les construc­tions des plan­chers du Palais d’hiver, du Théâtre Alexan­drins­ki, de la cathé­drale de la Sainte-Tri­ni­té, du Sénat. 

Il diri­gea par ailleurs les tra­vaux de construc­tion du canal Obvod­ni, sur la Neva, sur le canal Lado­ga, ain­si que les construc­tions hydrau­liques de l’usine Okh­tins­ki. C’est aus­si lui qui éla­bo­ra le pre­mier pro­jet de pro­tec­tion de Saint-Péters­bourg contre les inondations. 

RETOUR EN FRANCE

Que sont-ils devenus ?
Tous les mis­sion­naires, ceux de la pre­mière four­née (1810) comme de la seconde (1820) ren­tre­ront en France vers 1830. On peut trou­ver à ce retour des rai­sons per­son­nelles, de san­té ou de famille. On sait aus­si que les col­la­bo­ra­teurs russes, alors bien for­més, étaient impa­tients d’avoir plus de res­pon­sa­bi­li­tés et capables de les exercer. 

Général FABRENous ter­mi­ne­rons cette pro­me­nade en Rus­sie avec Fabre qui obtint de l’empereur Nico­las en 1833 sa mise en congé et revint en France. Fabre avait ache­vé l’École de la colo­nie mili­taire de la région de Sara­tov, sur la Vol­ga ; il en repro­dui­sit les plans dans l’édification de sa demeure, à Tour­rettes, son pays natal, où il mou­rut le 4 août 1844, à l’âge de soixante-deux ans. 

Et des conseillers du tsar s’inquiétaient de la mau­vaise influence pos­sible de ces Fran­çais, au moment où la France de 1830 bou­geait pour obte­nir plus de liber­tés. Et c’est aus­si le désir de retrou­ver cette ambiance qui a joué pour pous­ser au retour nos camarades. 

Après quelques ater­moie­ments, on leur fit en France la place qu’ils méri­taient. Des hon­neurs, pour les plus anciens. Des fonc­tions impor­tantes, pour les autres : Lamé ou Cla­pey­ron confir­me­ront en France et à l’X, qu’ils sont deve­nus des savants et des pro­fes­seurs excep­tion­nels mais aus­si des acteurs de la vie éco­no­mique, par exemple comme ins­pi­ra­teurs du déve­lop­pe­ment des che­mins de fer. 

LES ARCHIVES DU GÉNÉRAL FABRE

Fabre était reve­nu de Rus­sie avec des écrits, un jour­nal, des mémoires. En 2015, une de ses des­cen­dantes a fait à la biblio­thèque de l’École le don ines­ti­mable d’une malle de plans, envi­ron 150 plans de bâti­ments, cartes, pro­jets de voies de com­mu­ni­ca­tion. Ces docu­ments dont l’X ter­mine la numé­ri­sa­tion et la des­crip­tion pré­cise (cer­tains n’ont pas de légende, ni en fran­çais, ni en cyril­lique) don­ne­ront lieu à une pré­sen­ta­tion que la Sabix prépare.
 

Chris­tian Mar­bach a publié en 2015 Por­traits de poly­tech­ni­ciens, un ouvrage édi­té par la Sabix.
Secré­ta­riat de la Sabix Biblio­thèque de l’École poly­tech­nique, 91128 Palai­seau Cedex 

Poster un commentaire