Blue-RAY Opéra Macbeth de Verdi

Giuseppe VERDI : Macbeth

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°735 Mai 2018Par : le Metropolitan Opera de New York, direction Fabio Luisi, Soprano Anna Netrebko, basse René Pape Rédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : Un DVD ou Blu-ray Deutsche Grammophon

Les soi­rées du Met sont tou­jours de très bonne qua­li­té, natu­rel­le­ment. Et on y trouve régu­liè­re­ment des grandes stars, et, même si cela peut paraître trop confor­miste à cer­tains, des décors somp­tueux et des mises en scènes inté­res­santes et fidèles à l’œuvre, contrai­re­ment à Paris trop souvent. 

Mais cette soi­rée au Metro­po­li­tan Ope­ra de New York est vrai­ment excep­tion­nelle, comme si plu­sieurs bonnes fées s’étaient pen­chées dessus. 

Mac­beth (1847) est le plus réus­si des seize opé­ras de Ver­di qui ont pré­cé­dé Rigo­let­to (1851), cette période qu’il appe­lait ses années de galère. 

Le drame sha­kes­pea­rien abso­lu lui a ins­pi­ré une musique riche, variée, dra­ma­tique, colo­rée, inven­tive, magnifique. 

Pour sa pre­mière de ses trois adap­ta­tions de Sha­kes­peare (son pro­jet du Roi Lear ne ver­ra jamais le jour), il s’est atta­ché à tra­vailler musi­ca­le­ment la per­son­na­li­té de tous les prin­ci­paux per­son­nages, Mac­beth et sa Lady bien sûr, mais aus­si Ban­quo, Mac­duff, Mal­colm, et le groupe des sorcières. 

Et tout le Ver­di de la matu­ri­té est là, avec son style, ses tour­nures recon­nais­sables, sa science du chant et le dra­ma­tisme de la musique qui trans­forme lit­té­ra­le­ment l’héritage de Bel­li­ni et Donizetti. 

On recon­naît même l’esquisse du Lacry­mo­sa du Requiem, de trente ans pos­té­rieur, dans le chœur qui pleure avec Mac­Duff ses enfants assassinés. 

La reine de la soi­rée est la sopra­no russe Anna Netreb­ko, tou­jours for­mi­dable mais, ce soir-là, étour­dis­sante. Avec une voix expres­sive, agile mais en même temps chaude, émou­vante et envoû­tante, elle fait de Lady Mac­beth le per­son­nage dont on sou­haite qu’il revienne le plus sou­vent alors qu’il est le plus odieux. 

À force de dire régu­liè­re­ment du bien de Netreb­ko, je vais être accu­sé de sub­jec­ti­vi­té. Alors je per­siste et signe, je pré­dis qu’on par­le­ra dans cin­quante ans de Netreb­ko comme on parle aujourd’hui de Cal­las, et que les ama­teurs et connais­seurs se com­men­te­ront ses enre­gis­tre­ments et ses repré­sen­ta­tions fil­mées avec la même passion. 

Voyez son air où elle lit la lettre de la pré­dic­tion des sor­cières et où elle décide avec ambi­tion de pro­vo­quer le régi­cide, et osez sou­te­nir que vous résis­tez à l’élan qu’elle sus­cite d’aller assas­si­ner le roi d’Écosse ! Et quand elle demande la tête de Ban­quo lors de son troi­sième air, incroyable. On est à la fois amou­reux et effrayé par cette Lady, comme l’est Macbeth. 

Ses par­te­naires sont éga­le­ment par­faits, dont le très beau ténor Cal­le­ja en Mac­duff, le rôle qui l’a lan­cé, et René Pape en Ban­quo, qu’il chante depuis plus de vingt-cinq ans, dis­tri­bu­tion luxueuse d’avoir une basse de cette classe pour un rôle qui meurt au bout d’une heure et seule­ment deux airs. 

Et les chœurs du Met sont très mar­quants, très sol­li­ci­tés car ils repré­sentent les sor­cières, les assas­sins de Ban­quo, les sol­dats puis les cour­ti­sans du roi, le peuple qui pleure les méfaits de Mac­beth et les troupes de Macduff. 

Ce spec­tacle est aus­si le suc­cès incon­tes­table du chef d’orchestre Fabio Lui­si, nou­veau chef du Met après avoir suc­cé­dé au grand James Levine qui a dû, empê­ché par la mala­die, aban­don­ner son fau­teuil après qua­rante ans à la tête du Met et plus de 2 500 représentations. 

Mise en scène, on l’a dit, inté­res­sante et fidèle, même si elle est trans­po­sée dans le temps et l’espace. Le met­teur en scène n’a par exemple pas résis­té, comme nous sommes à New York, à repré­sen­ter les sor­cières comme des ména­gères pos­sé­dées, rap­pe­lant les sor­cières de Salem. Très bien fil­mé et enre­gis­tré, c’est un de mes plus beaux DVD d’opéra.

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