Blue Ray I Due Foscari de Verdi

Giuseppe VERDI : I Due Foscari

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°733 Mars 2018Par : l'orchestre de l’opéra royal de Covent Garden Direction, Antonio Pappano - Ténor, Placido DomingoRédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : Un Blu-ray Opus Arte

Cela fai­sait longtemps que Placido Domin­go n’avait pas inter­prété un per­son­nage en étant trop jeune pour le rôle. 

Après avoir été l’un des ténors les plus impor­tants (prob­a­ble­ment le plus impor­tant, avec Luciano Pavarot­ti) des trente dernières années du XXe siè­cle, Domin­go a entamé une sec­onde car­rière, dou­blant désor­mais son immense réper­toire de ténor (150 rôles) des grands rôles de baryton. 

Lui qui a été un des plus grands Otel­lo, Mario, José, et tant d’autres, à 77 ans, il inter­prète désor­mais, depuis 2009, Simon Boc­cane­gra, Nabuc­co, Gian­ni Schic­chi, Ger­mont, Mac­beth, et ici le doge Francesco Fos­cari à la fin de son règne et de sa vie (89 ans). 

On sait que des vingt-six opéras de Ver­di, on con­sid­ère générale­ment trois caté­gories. D’abord trois opéras extrême­ment con­nus, à juste titre, ceux qu’on appelle la trilo­gie pop­u­laire (La Travi­a­ta, Rigo­let­to, Le Trou­vère, 1851–1853). Ces trois opéras sont par­mi les opéras les plus représen­tés au monde (avec Car­men, La Flûte enchan­tée, Tosca, La Bohème…).

La sec­onde caté­gorie sont les opéras de la matu­rité, postérieurs à la trilo­gie pop­u­laire, tous remar­quables et sou­vent insuff­isam­ment con­nus, comme Simon Boc­cane­gra, Don Car­los, La Force du des­tin, Un Bal masqué, des chefs‑d’œuvre.

La troisième caté­gorie sont les opéras de jeunesse (1839–1850), ceux de la péri­ode que Ver­di appelait ses « années de galère », tous rarement joués et très rarement enreg­istrés à deux excep­tions nota­bles, Nabuc­co et Mac­beth.

Très peu con­nu, qua­si­ment jamais représen­té, I Due Fos­cari est pour­tant du niveau de Nabuc­co et Mac­beth. Tout Ver­di est là, des airs mag­nifiques avec des accom­pa­g­ne­ments instru­men­taux effi­caces ou des orches­tra­tions diaphanes inven­tives et imagées (solo de harpe, de vio­lon­celle…), des effets dra­ma­tiques phénomé­naux inces­sants à l’orchestre, et un chœur d’introduction qui me hante depuis plus de quar­ante ans, lorsque j’avais enreg­istré à la radio une rare représentation. 

Ver­di y expéri­mente même une tech­nique qu’il ne réu­tilis­era pas vrai­ment, la pro­jec­tion d’un thème par per­son­nage, véri­ta­ble leit­mo­tiv mais sans trans­for­ma­tion, les thèmes attachés aux deux Fos­cari, le père et le fils, étant absol­u­ment mer­veilleux et font jail­lir les larmes chaque fois qu’on les entend. 

Le drame, d’après Byron, est sim­ple et ter­ri­ble : le doge de Venise Francesco Fos­cari, qui a déjà per­du ses trois autres fils, est obligé de con­damn­er à l’exil et la mort son dernier fils Jacopo pour un crime dont il le croit inno­cent (il l’est effectivement). 

Sous l’influence du puis­sant Con­seil des Dix, il est sourd aux sup­pliques de son fils et de sa belle-fille, et prononce le ver­dict qui le con­damne lui-même à une douleur mortelle. « Toi qui as, les yeux secs, con­damné ton fils » lui reproche l’épouse de ce dernier. 

La réal­i­sa­tion est par­faite. Cette soirée à Covent Gar­den a dû sa pop­u­lar­ité à la présence de Domin­go, mais le ténor Francesco Meli et la sopra­no Maria Agres­ta ne déméri­tent absol­u­ment pas. 

Et le génie de la soirée est le chef Anto­nio Pap­pano, qui tire de son orchestre, superbe­ment enreg­istré, un son riche, chaud, dynamique, vivant, l’orchestre d’opéra idéal. 

Après ténor, puis bary­ton, Domin­go entame cette année en par­al­lèle une troisième car­rière, de chef d’orchestre, avec Tosca en févri­er à Lon­dres, et Roméo et Juli­ette en mai au Met. 

Exceptionnel ! 

Une petite minute de I due Foscari - Plácido Domingo at Teatro alla Scala

Et même l’intégrale en 3 heures 30

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