Valérie Barthès (1982)

Dossier : Femmes de polytechniqueMagazine N°Valérie Barthès (1982) Par Sylvie HATTEMER-LEFÈVRE

Elle aurait pu être asso­cié-gérant d’une banque d’affaires, ou direc­teur finan­cier d’une grande entre­prise. Après treize ans dans la finance, dont dix à la banque Lazard et trois chez sa concur­rente Roth­schild, cette finan­cière s’est trou­vé une troi­sième voie pour le moins aty­pique, à la croi­sée de l’humain et de la tech­nique, en deve­nant… chas­seuse de têtes. Depuis plus de dix ans qu’elle le pra­tique, ce métier la pas­sionne et la comble puisqu’elle a un job qui lui per­met de « res­ter elle-même ». C’est-à-dire de tra­vailler en occu­pant une posi­tion au car­re­four de l’homme et de l’entreprise, sur la matière qu’elle estime être la res­source la plus rare qui soit, « les talents, et la nature humaine ». Après avoir fait ses classes chez Hei­drick & Struggles, puis au sein des cabi­nets Whi­te­head Mann, Jouve & Asso­ciés et jusqu’il y a peu Rus­sell Rey­nolds, Valé­rie Bar­thès est deve­nue asso­ciée du cabi­net amé­ri­cain CTPartners.

Dans la finance

« J’ai tou­jours été une tech­ni­co-com­mer­ciale », se défi­nit cette femme dont le père, poly­tech­ni­cien comme elle, a long­temps diri­gé la branche audit d’Arthur Ander­sen – « bien avant l’affaire Enron », pré­cise-t-elle – et la mère, dan­seuse étoile, fut par­te­naire du célèbre cho­ré­graphe Mau­rice Béjart. Pous­sée par son père à faire Poly­tech­nique, « parce que cela va t’ouvrir toutes les portes sans en fer­mer aucune », cette curieuse de nature appré­cie autant « la diver­si­té des ensei­gne­ments que des profs qui dans leurs domaines étaient des poin­tures incroyables, que ce soit en sciences, en lit­té­ra­ture ou en archi­tec­ture ». Après sa sor­tie de Poly­tech­nique, et mal­gré son pas­sage à l’École natio­nale des ponts et chaus­sées, cette brillante élève en géné­ral, et en maths en par­ti­cu­lier, ne se sent pas vrai­ment une voca­tion de bâtisseuse.

Elle opte donc pour la finance, à une époque où les acti­vi­tés des mar­chés de capi­taux prennent leur essor, et où les banques recrutent à tour de bras des têtes bien faites, pour créer et déve­lop­per de nou­veaux ins­tru­ments finan­ciers. Elle débute chez Lazard, ou elle par­tage le bureau de Georges Ral­li et de Patrick Sayer, deux grandes poin­tures de cette banque.

En sep­tembre 1987, ayant la pos­si­bi­li­té de finir son diplôme d’ingénieur des Ponts à Yale, elle par­tage son temps entre cours d’économie et de finance, et New York où elle tra­vaille pour Lazard sur les mar­chés des capi­taux. Mau­vais timing : le krach bour­sier d’octobre 1987 la met au chô­mage tech­nique. Du coup, elle devient la petite main des asso­ciés et en pro­fite pour s’initier aux autres métiers de l’ingénierie finan­cière. De retour à Paris, Valé­rie Bar­thès rejoint l’équipe de finan­ce­ments struc­tu­rés puis par­ti­cipe à la créa­tion, par Édouard Stern, de Cré­dit Agri­cole Lazard Finan­cial Pro­ducts, avant de rejoindre la banque Rothschild.

Un métier de passion

À ce moment s’impose un choix dif­fi­cile, car sa tra­jec­toire pro­fes­sion­nelle l’amène à deve­nir une asso­ciée de la banque d’affaires. À ce titre, elle devrait se foca­li­ser sur le com­mer­cial, et délé­guer tout l’aspect tech­nique de ses mis­sions : « Ce qui me plai­sait, c’était jus­te­ment l’aspect “Lego” du job, trou­ver une solu­tion, mon­ter des usines à gaz, gérer l’aspect trans­ver­sal du dos­sier en jon­glant avec les aspects juri­diques et fis­caux, explique-t-elle. Je trou­vais ça beau­coup plus ludique que de devoir me retrou­ver à par­ler des grands pro­blèmes éco­no­miques à des clients poten­tiels pour décro­cher un man­dat. » Elle songe alors à pas­ser côté entre­prise, à un poste ouvert à la trans­ver­sa­li­té, comme la direc­tion finan­cière d’un groupe. Et c’est en fai­sant cette démarche auprès de Diane Séga­len, chas­seuse de têtes chez Hei­drick, que celle-ci lui pro­pose de rejoindre l’équipe : « En une semaine, j’ai vu tous les asso­ciés, soit une dizaine de per­sonnes qui toutes m’ont par­lé avec pas­sion de leur métier, et avec chaque fois des visions dif­fé­rentes. Alors je me suis auto­ri­sé le droit de tes­ter ce métier, et je ne l’ai jamais regretté. »

Poster un commentaire