Étymologie :
À propos de la musique

Le nom de la musique remonte à celui des Muses de la mythologie grecque qui, selon la légende la plus répandue, étaient les neuf filles de Zeus et de Mnémosyne, déesse de la Mémoire (du grec mnêmê), elle-même fille du Ciel (Ouranos) et de la Terre (Gaïa). La musique n’était pourtant l’attribut que d’une seule des Muses, mais toutes avaient un rapport étroit avec la musique.
Les attributs des neuf Muses et la musique
Les Muses présidaient à divers domaines des arts et de la connaissance. Elles dansaient et jouaient de la lyre pour les dieux de l’Olympe. Clio (du grec klein « célébrer ») chantait l’histoire, Thalie (du grec thallein « être heureux ») encourageait la comédie et Melpomène (du grec melpein « chanter ») présidait à la tragédie, Terpsichore (du grec terpein « réjouir » et khoros « danse ») dansait sur la musique, Érato (du grec eran « aimer ») chantait la poésie lyrique inspirée par Éros, Polymnie (du grec polu- « multiple » et humnos « hymne ») inspirait les poètes, Calliope (du grec kalli- « belle » et ops « voix ») chantait la poésie épique, et la musique elle-même était la vocation de la joueuse de flûte Euterpe (du grec eu- « bien » et terpein « réjouir »).
Quant à Uranie (du nom de son grand-père maternel), c’était la Muse de l’astronomie, sœur de la musique selon les pythagoriciens. Ceux-ci justifiaient par exemple les sept notes de musique par une correspondance avec les sept astres errants (planêtes). À ce propos, la musique faisait partie des mathématiques chez les Anciens, avec l’arithmétique, la géométrie et l’astronomie, et c’était encore le cas pour l’Académie française jusqu’à la 5e édition de son dictionnaire en 1798 (cf. ÉtymologiX de fév. 2023).
Le nom des Muses vient, par le latin Musae, du grec Mousa, au pluriel Mousai « les Muses », d’où dérive l’adjectif mousikos, au premier sens « relatif aux Muses », puis « musicien » en référence à l’importance de la musique pour les Muses. Ce dernier sens l’a emporté, d’où le nom de la musique en grec, mousikê (resté en grec moderne), en latin, musica, puis en français, musique et l’équivalent dans les langues d’Europe.
Les Muses, le musée et la mosaïque
Du grec Mousa dérive aussi mouseion, désignant d’abord un lieu de résidence des Muses et de là une académie où s’exercent les activités culturelles, un peu comme dans l’Académie de Platon ou le Lycée d’Aristote à Athènes. La première de ces académies fut celle d’Alexandrie, comprenant la célèbre bibliothèque, créée sous le règne de Ptolémée Ier. Du grec mouseion (grec moderne, mouseio) vient en latin museum, emprunté tel quel dans les langues germaniques ou adapté dans les autres langues. Ainsi en français, musée ne s’est imposé par rapport à museum qu’à la fin du xviiie siècle, sauf dans les sciences naturelles où l’on conserve le nom muséum.
Le grec mouseion désignait aussi toute réalisation artistique, telle qu’un chant poétique, ou encore, en grec byzantin, l’une de ces réalisations typiques de l’art byzantin, une mosaïque, nommée en latin musivum et en bas latin musaicum, emprunté en italien musaico, puis mosaico sans doute sous l’influence de mosaico « mosaïque, relatif à Moïse, Mosè en italien ». L’italien est emprunté par la plupart des langues d’Europe : mosaïque en français, mosaic en anglais… et même môsaiko en grec moderne, où cependant on emploie un autre mot, psêphidôto, du grec psêphis « petite pierre », s’il s’agit de mosaïque antique.
Épilogue
Au musée de Tarragone, une magnifique mosaïque représente Euterpe, la Muse de la musique. C’est cohérent.

En couverture : Minerve parmi les Muses, Hendrick van Balen et Lucas van Uden, 1620, huile sur bois, Musée du Palais du roi Jan III, Varsovie.