En ce temps-là, les saint-simoniens… en marche vers la terre d’Utopie, arrivèrent dans une ville appelée Lyon

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°621 Janvier 2007Par : Michel Démarcq (41)Rédacteur : Gilles OLIVON (68), président d’honneur des polytechniciens lyonnais

Lyon, sous la monar­chie de Juillet : l’auteur fait revivre à sa manière, dans une fresque bigar­rée et pleine d’humour, la confron­ta­tion entre ces idéa­listes vision­naires qu’étaient les saint-simo­niens et la popu­la­tion locale, qu’ils tentent d’évangéliser, mais chez laquelle ils se heurtent sou­vent au gros bon sens et à la malice des petites gens, et, chez d’autres, à la méfiance ou à l’hostilité. La forme dia­lo­guée, ori­gi­nale et très vivante, entre théâtre et feuille­ton, convient à mer­veille à cette habile recons­ti­tu­tion his­to­rique, qui, sans y paraître, est aus­si une dis­cus­sion phi­lo­so­phique sur les méandres et les rêves de l’action sociale dans la socié­té industrielle.

Ce mou­ve­ment était né sous la Res­tau­ra­tion, des rêves du comte de Saint-Simon (un éloi­gné cou­sin du duc du même nom), qui annon­çaient la mon­tée de l’humanité vers son accom­plis­se­ment moral et phy­sique, par la liber­té, le tra­vail, la science, l’industrie, le déve­lop­pe­ment des com­mu­ni­ca­tions. Ses dis­ciples, dont beau­coup issus de la classe aisée (par­mi eux, de nom­breux poly­tech­ni­ciens), sous la conduite du « Père » Enfan­tin (X 1813), deman­daient l’instruction gra­tuite et obli­ga­toire, l’abolition de la peine de mort et de la pri­son pour dettes, le cré­dit bon mar­ché, la sup­pres­sion de l’héritage, l’impôt pro­gres­sif, la libé­ra­tion de la femme, l’association uni­ver­selle des peuples…

En 1832, tra­cas­sés par la Police et la Jus­tice, pri­vés de leur chef, inter­né à Sainte-Péla­gie, nombre de saint-simo­niens pari­siens vinrent en groupe cher­cher refuge à Lyon, cette ville indus­trieuse qui s’était signa­lée, un an plus tôt, par la célèbre Révolte des canuts. Ils y trou­vèrent appui auprès d’un ami de Pros­per Enfan­tin, Arlès-Dufour, un riche com­mis­sion­naire en soie­ries. Plus tard, ran­gés mais tou­jours actifs, les saint-simo­niens furent à Lyon – comme ailleurs, dans toute la France – les ini­tia­teurs de réa­li­sa­tions fécondes, notam­ment dans les domaines de l’enseignement pro­fes­sion­nel, de la banque et des transports.

Outre Enfan­tin, plu­sieurs X saint-simo­niens sont mis en scène ; d’autres sont cités ou évo­qués. Revivent éga­le­ment des per­son­nages ayant mar­qué l’histoire de Lyon : le maire Pru­nelle, le dépu­té Ful­chi­ron (X 1795), le pré­fet Gas­pa­rin, Oza­nam, l’ingénieur Dumont (X 1836)…

L’intérêt de Michel Démarcq pour ce sujet remonte à la célé­bra­tion à Lyon du bicen­te­naire de notre École. Il eut une contri­bu­tion déter­mi­nante à la rédac­tion de l’ouvrage anni­ver­saire L’École poly­tech­nique et Lyon puis eut l’idée d’organiser en 1996 (bicen­te­naire de la nais­sance d’Enfantin), à la Biblio­thèque muni­ci­pale de Lyon, une table ronde publique sur le thème « Les saint-simo­niens à Lyon », ren­contre qui connut un beau succès.

De la même façon, le pré­sent ouvrage plai­ra aux ama­teurs d’Histoire ou de Phi­lo­so­phie, et à ceux curieux de Lyon ou de nos grands Anciens.

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