Livre : DORMEZ TRANQUILLES JUSQU’EN 2100 par Jean-Marc Jancovici (81)

Dormez tranquilles jusqu’en 2100

Dossier : Arts,Lettres et SciencesMagazine N°715 Mai 2016Par : Jean-Marc JANCOVICI (81)Rédacteur : François Xavier MARTIN (63)Editeur : Odile Jacob – 2015 – 15, rue Soufflot, 75005

Jean-Marc appelle au « retour de la com­pé­tence tech­nique dans les débats de société » et déplore que des respon­s­ables poli­tiques pren­nent des déci­sions influ­encées par les médias

En 200 pages d’un texte dense, bour­ré de chiffres puisés aux meilleures sources, Jean-Marc Jan­covi­ci démys­ti­fie bon nom­bre de ques­tions rel­a­tives aux choix énergé­tiques et à leurs con­séquences sur l’environnement, sur notre mode de vie et sur notre santé.

Dès le pre­mier chapitre, il appelle au « retour de la com­pé­tence tech­nique dans les débats de société » et déplore que des respon­s­ables poli­tiques avant tout soucieux de leur réélec­tion pren­nent finale­ment dans ces domaines des déci­sions forte­ment influ­encées par des médias « caisse de réso­nance des rous­pé­teurs de tout poil ».

Jean-Marc Jan­covi­ci rap­pelle quelques vérités salutaires :

  • Rien n’est plus urgent que de réduire le plus rapi­de­ment pos­si­ble l’utilisation du char­bon (et tout par­ti­c­ulière­ment du lig­nite) gros émet­teur de gaz à effet de serre qui con­tin­ue de tuer chaque année des mil­liers de mineurs et d’habitants de la planète vic­times de la pol­lu­tion générée par sa combustion.
     
  • Penser que les chou­c­hous des médias (donc des poli­tiques) que sont le solaire et l’éolien per­me­t­tront à eux seuls de met­tre fin rapi­de­ment au règne cat­a­strophique du char­bon est une chimère en rai­son du rythme d’investissements qui serait nécessaire.
    Dès que la part de ces tech­nolo­gies dans la pro­duc­tion d’électricité devient sig­ni­fica­tive, il faut en effet tenir compte du coût des sys­tèmes de stock­age mas­sif d’énergie néces­saires pour pal­li­er leur car­ac­tère intermittent.

Jean-Marc Jan­covi­ci souligne égale­ment com­bi­en les chiffres avancés par cer­tains peu­vent être trompeurs :

  • Les chiffres globaux d’énergies renou­ve­lables inclu­ent, sou­vent sans le dire explicite­ment, l’électricité hydraulique, totale­ment dépen­dante de la con­fig­u­ra­tion des cours d’eau sur lesquels ont été instal­lés des bar­rages bien avant que quiconque se préoc­cupe du réchauf­fe­ment climatique.
    La Suède est sou­vent citée comme un pays cham­pi­on des éner­gies renou­ve­lables, mais on oublie générale­ment d’indiquer que c’est en grande par­tie parce que près de la moitié de son impor­tante pro­duc­tion d’électricité est d’origine hydraulique ;
    de plus, on ajoute rarement que ses faibles rejets de CO2 vien­nent égale­ment du fait que cha­cun de ses habi­tants dis­pose d’à peu près autant d’électricité nucléaire qu’un Français.
     
  • En l’absence d’une capac­ité de stock­age d’énergie sig­ni­fica­tive, les chiffres élevés d’électricité éoli­enne et solaire affichés par le Dane­mark et l’Allemagne ne peu­vent être général­isés rapi­de­ment à toute l’Europe car ils cor­re­spon­dent à une pro­duc­tion inter­mit­tente dont une bonne par­tie doit être exportée à cer­taines heures (et à bas prix) vers des pays voisins qui n’ont pas suivi la même politique.
    Le chiffre, véri­ta­ble­ment sig­ni­fi­catif, n’est pas la part de ces éner­gies dans la pro­duc­tion de ces pays, mais la part, très inférieure et jamais citée, dans leur con­som­ma­tion d’énergie.

Au-delà de mesures con­sen­suelles d’économie d’énergie dans la pro­duc­tion, le trans­port, les ser­vices, l’habitat, Jean-Marc Jan­covi­ci se fait l’avocat du nucléaire en mon­trant, sta­tis­tiques à l’appui, que ses nui­sances, même dans le cas de sin­istres extrêmes, résul­tent d’erreurs humaines (Tch­er­nobyl) ou de cat­a­stro­phes naturelles (Fukushi­ma).

Ces sin­istres ont fait beau­coup moins de vic­times que l’utilisation du char­bon. Bien évidem­ment, ce point de vue ne recueillera pas l’assentiment des opposants irré­ductibles à cette technologie.

On peut aus­si penser que l’utilisation du nucléaire ne peut guère être envis­agée que dans les pays ayant la capac­ité sci­en­tifique et tech­nologique néces­saire, et que sa général­i­sa­tion à l’ensemble des nations de la planète est peu vraisemblable.

Commentaire

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Andreï Klochkorépondre
9 mai 2016 à 11 h 37 min

Con­cer­nant le stock­age d’én­ergie
Bon­jour,

il s’ag­it là d’un livre que je ne man­querai pas de trou­ver dans les temps à venir !

Cepen­dant, je souhaitais men­tion­ner que con­cer­nant la via­bil­ité économique du stock­age mas­sif d’én­ergie, la ques­tion — et le chal­lenge — selon moi, restent ouverts. Avec l’air com­primé isotherme, il y a la pos­si­bil­ité de faire pro­pre, sûr et peu cher — suff­isam­ment peu cher pour que ce soit viable dans l’é­conomie énergé­tique actuelle et future. 

Surtout lorsqu’une tech­no inno­vante réduit d’un ordre de grandeur la com­plex­ité mécanique, et donc, réduit d’au­tant les pannes, pour met­tre cette tech­no au même niveau de fia­bil­ité qu’une pile chim­ique, mais en gar­dant les 30 ans de durée de vie. Et 70% d’ef­fi­cac­ité AC-AC.

Tout ceci n’est pas encore prou­vé, mais la voie est claire­ment là. Des star­tups issues de l’X se bat­tent pour cette idée, obti­en­nent des fonds pour cette idée, et s’ar­que-boutent dans un seul but — ren­dre cette idée réelle. Ain­si, je ne peux pas encore affirmer dans les faits ce qui sera le moins cher, tous coûts inclus, s’ils sont déployés mas­sive­ment au niveau mon­di­al — le nucléaire, ou les éner­gies renou­ve­lables. Ce que je peux dire, c’est que nous tra­vail­lons d’ar­rache-pied à ren­dre le stock­age mas­sif d’én­ergie viable, et que les résul­tats atten­dus arrivent bel et bien, l’un après l’autre. 

Nous sommes encore en phase de R&D mais les obsta­cles saut­ent devant nous à la bonne vitesse. RDV en 2017 puis fin 2018 pour les pre­miers résul­tats puis le pre­mier produit !

Andreï Klochko (07), prési­dent d’Airthium

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