Depixus : Une technologie de rupture pour la recherche biomédicale

Depixus : Une technologie de rupture pour la recherche biomédicale

Dossier : Vie des entreprises - HealthtechMagazine N°804 Avril 2025
Par Gordon HAMILTON
Par Thibault VIEILLE (D14)

Avec MAGNA One, sa tech­no­lo­gie inno­vante, Depixus s’impose comme un acteur majeur de la recherche bio­mé­di­cale. En offrant une pré­ci­sion inédite dans l’analyse des inter­ac­tions molé­cu­laires, MAGNA One offre un outil capable d’améliorer notre com­pré­hen­sion de la bio­lo­gie, de contri­buer au déve­lop­pe­ment de nou­veaux médi­ca­ments et, à terme, per­met­tra de repous­ser les fron­tières de la méde­cine per­son­na­li­sée. Entre­tien avec Gor­don Hamil­ton, CEO et cofon­da­teur et Thi­bault Vieille (D14), VP of Engi­nee­ring.

Après presque une décennie d’investissement, votre première grande innovation a été lancée en 2024. Quelles ont été les étapes clés de ce développement ?

Gor­don Hamil­ton : Depixus est née des tra­vaux de recherche sur l’ADN et les enzymes, mon­dia­le­ment recon­nus, du labo­ra­toire de Phy­sique Sta­tis­tique de l’École nor­male supé­rieure (ENS). Avant de trou­ver son indé­pen­dance en dehors de l’ENS, notre petite équipe ini­tiale s’est for­te­ment inves­tie dans le ren­for­ce­ment et l’exploitation de sa pro­prié­té indus­trielle ain­si que dans le déve­lop­pe­ment d’une stra­té­gie com­mer­ciale solide et convain­cante. En 2016, nous avons levé nos pre­miers fonds pour sou­te­nir le déve­lop­pe­ment de nos pre­miers pro­to­types d’instruments et géné­rer des don­nées pré­li­mi­naires dans des appli­ca­tions à forte croissance. 

Plus récem­ment, nous avons obte­nu des finan­ce­ments com­plé­men­taires pour accé­lé­rer le déve­lop­pe­ment de notre pre­mier ins­tru­ment à usage com­mer­cial « MAGNA One ». Au cours de cette période, nous avons tra­vaillé en étroite col­la­bo­ra­tion avec des cher­cheurs uni­ver­si­taires et le sec­teur bio­phar­ma­ceu­tique afin de trou­ver la meilleure adé­qua­tion pos­sible entre le pro­duit et le mar­ché. Fin 2024, nous avons atteint l’étape impor­tante du lan­ce­ment du pro­duit MAGNA One, dont l’objectif prin­ci­pal est d’aider les cher­cheurs à déve­lop­per de nou­veaux médicaments.

Pouvez-vous expliquer en termes simples ce qu’est la Spectroscopie de Force Magnétique et pourquoi c’est une avancée importante ?

Thi­bault Vieille : C’est une tech­nique qui per­met d’étudier les inter­ac­tions bio­mo­lé­cu­laires en appli­quant une force à des molé­cules via une bille micro­mé­trique magné­tique, et en obser­vant la réac­tion de cha­cune de ces molé­cules en temps réel. Contrai­re­ment aux méthodes tra­di­tion­nelles qui ana­lysent des signaux glo­baux à par­tir d’un échan­tillon, notre tech­no­lo­gie suit donc indi­vi­duel­le­ment chaque molé­cule et ses chan­ge­ments struc­tu­rels. En outre, il est pos­sible de mesu­rer les échanges d’énergie impli­qués dans ces chan­ge­ments struc­tu­rels. En recherche bio­mé­di­cale, cette capa­ci­té peut révo­lu­tion­ner l’étude des inter­ac­tions entre pro­téines, ARN, ADN et des inter­ac­tions impli­quées dans la per­tur­ba­tion de méca­nismes molé­cu­laires sous-jacents a des maladies.

“Depixus révo­lu­tionne la recherche bio­mé­di­cale avec une pré­ci­sion inéga­lée dans l’analyse des inter­ac­tions molé­cu­laires grâce à MAGNA One.”

Comment votre technologie aide-t-elle à mieux comprendre certaines maladies et à développer de nouveaux médicaments ?

Gor­don Hamil­ton : L’un des prin­ci­paux défis de la recherche bio­mé­di­cale est de com­prendre pré­ci­sé­ment com­ment les molé­cules inter­agissent dans les pro­ces­sus bio­lo­giques. Nos outils per­mettent d’analyser ces inter­ac­tions à l’échelle indi­vi­duelle et en temps réel, ce qui offre une vision plus fine des méca­nismes qui sous-tendent cer­taines mala­dies. Par exemple, en étu­diant com­ment une pro­téine se lie à son récep­teur dans le cas d’une mala­die neu­ro­dé­gé­né­ra­tive, nous pou­vons iden­ti­fier, carac­té­ri­ser, voire révé­ler des ano­ma­lies et conce­voir des molé­cules capables de cor­ri­ger ces dys­fonc­tion­ne­ments. Notre tech­no­lo­gie apporte ain­si une meilleure com­pré­hen­sion des méca­nismes molé­cu­laires des patho­lo­gies, ce qui accé­lère la décou­verte de nou­veaux médi­ca­ments et amé­liore leur ciblage.

Votre technologie permet d’observer des milliers de molécules en parallèle. Pourquoi est-ce un atout majeur pour la découverte de médicaments ?

Thi­bault Vieille : Le déve­lop­pe­ment de nou­veaux médi­ca­ments can­di­dats passe par une étape de cri­blage à haut débit sui­vie d’une sélec­tion fine des molé­cules les plus pro­met­teuses, en simu­lant le méca­nisme molé­cu­laire impli­qué dans la mala­die à l’aide de tech­no­lo­gies de bio­phy­sique et des approches phé­no­ty­piques. Contrai­re­ment aux tech­no­lo­gies clas­siques qui four­nissent une mesure moyenne sur un échan­tillon glo­bal, notre approche ana­lyse chaque inter­ac­tion molé­cu­laire de manière indé­pen­dante et simul­ta­née. Cela per­met de détec­ter des phé­no­mènes rares, des sous-popu­la­tions de molé­cules ayant des com­por­te­ments dif­fé­rents, et opti­mise la sélec­tion des meilleures molé­cules, rédui­sant ain­si les risques d’échec dans les phases ulté­rieures du déve­lop­pe­ment pharmaceutique.

Travaillez-vous déjà avec des laboratoires ou des entreprises pharmaceutiques ?

Gor­don Hamil­ton : Oui, nous avons des col­la­bo­ra­tions avec des ins­ti­tuts de recherche aca­dé­mique et des entre­prises phar­ma­ceu­tiques. Notre tech­no­lo­gie sus­cite un grand inté­rêt, car elle apporte des réponses à des défis scien­ti­fiques jusqu’ici non réso­lus. Nous avons déjà mené des études avec plu­sieurs par­te­naires pour affi­ner l’identification de molé­cules can­di­dates et amé­lio­rer la com­pré­hen­sion de cer­tains méca­nismes biologiques.

Avez-vous des projets de levée de fonds pour accélérer votre développement ?

Gor­don Hamil­ton : Abso­lu­ment. Après une phase de finan­ce­ment en 2020–2021 sup­por­tant le déve­lop­pe­ment de notre pre­mière géné­ra­tion de pro­duit, nous avons récem­ment lan­cé une levée de fonds de série B. Notre objec­tif est d’accélérer la com­mer­cia­li­sa­tion de notre tech­no­lo­gie et de pour­suivre le déve­lop­pe­ment d’applications futures. Nous cher­chons des inves­tis­seurs capables de sou­te­nir cette phase cru­ciale et de nous accom­pa­gner vers une expan­sion internationale.

Comment voyez-vous l’avenir de Depixus et de votre technologie ? 

Thi­bault Vieille : Notre ambi­tion est de faire de Depixus un acteur clé dans la recherche bio­mé­di­cale. À court terme, nous allons conti­nuer d’améliorer notre tech­no­lo­gie et d’élargir notre base de clients. À moyen et long terme, nous vou­drons relan­cer le déve­lop­pe­ment de nou­velles appli­ca­tions, que nous avons lar­ge­ment explo­ré et déris­qué au cours de nos années de recherche. Un des domaines où la tech­no­lo­gie de spec­tro­sco­pie de force magné­tique pour­rait être d’un grand inté­rêt est la méde­cine per­son­na­li­sée, où notre capa­ci­té à ana­ly­ser des inter­ac­tions molé­cu­laires rares pour­rait se révé­ler très utile.

Votre technologie pourrait-elle un jour permettre des avancées dans d’autres domaines que celui de la santé ? 

Gor­don Hamil­ton : D’un point de vue plus « tech­no­lo­gique » (par oppo­si­tion au point de vue « pro­duit »), il faut bien com­prendre que la spec­tro­sco­pie de force magné­tique est avant tout une tech­no­lo­gie de spec­tro­sco­pie, et qu’on pour­rait en réa­li­té déve­lop­per un grand nombre de pro­to­coles pour ins­tal­ler et ana­ly­ser des molé­cules de type très dif­fé­rents. Nous pen­sons qu’une meilleure com­pré­hen­sion de la manière dont les molé­cules indi­vi­duelles inter­agissent peut avoir des appli­ca­tions qui vont bien au-delà du domaine bio­mé­di­cal. Nous pou­vons ima­gi­ner, par exemple, que MAGNA pour­rait être uti­li­sé à l’avenir pour carac­té­ri­ser la façon dont les molé­cules inter­agissent avec les revê­te­ments de sur­face spé­cia­li­sés néces­saires à de nom­breuses tech­no­lo­gies, ou pour le déve­lop­pe­ment d’enzymes amé­lio­rées impli­quées dans les pro­ces­sus industriels. 


Qu’est-ce que la Spectroscopie de Force Magnétique ?

La Spec­tro­sco­pie de Force Magné­tique est une tech­no­lo­gie qui per­met d’observer en temps réel com­ment des molé­cules bio­lo­giques inter­agissent sous l’effet d’une force magné­tique. Contrai­re­ment aux tech­niques clas­siques qui mesurent un signal glo­bal, elle suit indi­vi­duel­le­ment chaque molé­cule et en ana­lyse les com­por­te­ments dyna­miques. Cette approche offre une vision plus fine et détaillée des méca­nismes moléculaires.

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