Mécanisme de fermeture de porte de type papillon conçue en impression 3D

Concevoir pour la fabrication additive

Dossier : La fabrication additiveMagazine N°756 Juin 2020
Par Daniel PYZAK

Con­cevoir pour la fab­ri­ca­tion addi­tive : un mythe, une réal­ité ? Non, une néces­sité et une vraie oppor­tu­nité : mais que c’est bon de vivre dans cette ère de renais­sance de l’industrie ! Lais­sez-vous guider !

Le plus gros avan­tage de la fab­ri­ca­tion addi­tive, c’est qu’elle ouvre en grand le champ des formes pos­si­bles à fab­ri­quer (pour un coût raisonnable) : des pièces creuses, des pièces opti­misées « topo­logiquement » aux formes très organiques, des mod­èles bio­mimé­tiques, des assem­blages fonc­tion­nels sans aucun mon­tage, des treil­lis con­sti­tués de microstruc­tures (lat­tices) ; en bref la con­cep­tion n’a plus de lim­ite… ou presque. Car les procédés de fab­ri­ca­tion addi­tive (et il y en plusieurs, sept à ce jour tels que clas­si­fiés par l’ISO – la fusion sur lit de poudre et le dépôt de fil ou d’énergie étant les prin­ci­paux procédés pour le métal) imposent cer­taines con­traintes aux con­cep­teurs, con­traintes liées aux dif­férents procédés de fab­ri­ca­tion. Un exem­ple ? Le plus sim­ple : une machine à fusion laser sur lit de poudre est lim­itée par les dimen­sions de la cham­bre de fab­ri­ca­tion ; à ce jour le max­i­mum est aux alen­tours de 500 mm x 500 mm x 500 mm. On ne pour­ra pas (à ce jour) fab­ri­quer de pièces plus grandes (en un seul bout), lim­ite évi­dente mais lim­ite quand même. Cer­taines con­traintes sont par­fois iden­tiques pour chaque procédé, mais elles peu­vent aus­si être très dif­férentes (et on ne par­le pas de machines qui com­bin­eraient plusieurs procédés…). Pour la suite de cet arti­cle, on va se lim­iter à la tech­nolo­gie de fusion sur lit de poudre, qui reste le procédé le plus util­isé dans l’industrie à ce jour pour pro­duire des pièces métalliques.


REPÈRES

La fab­ri­ca­tion addi­tive ou impres­sion 3D est bien plus qu’une évo­lu­tion des moyens de fab­ri­ca­tion, c’est une vraie révo­lu­tion : si on sait imprimer en 3D depuis le milieu des années 80 avec des matéri­aux polymères (et depuis lors cette tech­nolo­gie s’est défini­tive­ment imposée comme pre­mier choix quand il s’agit de fab­ri­quer des pro­to­types physiques), ce n’est cepen­dant que très récem­ment (trois à qua­tre ans, pas plus) que l’on sait fab­ri­quer des pièces en métal (alu­mini­um, aci­er, titane, alliages…), aux cotes, de manière fiable et répétable (avec une pièce qui tient en service).


La contrainte du support

Pour les machines de fab­ri­ca­tion addi­tive par fusion laser sur lit de poudre, la con­trainte prin­ci­pale est liée aux sup­ports (il y en a d’autres, comme les dimen­sions max­i­males – décrites précédem­ment, mais aus­si des con­traintes sur les épais­seurs min­i­males, sur le rap­port hauteur/largeur de nervure ou de bossage…) : dans ce procédé le laser fait fon­dre la poudre métallique, couche par couche (qui ensuite se solid­i­fie en se refroidis­sant) ; le sup­port (sorte d’étai qui est imprimé en même temps que la pièce – avec la même poudre) sert essen­tielle­ment à fix­er la pièce sur son plateau de fab­ri­ca­tion, à min­imiser les effets de rétrac­ta­tion quand le métal en fusion se solid­i­fie et à sup­port­er les zones de la pièce en porte-à-faux, mais il sert aus­si à dis­siper la chaleur (à l’instar d’une mas­selotte en fonderie qui évit­era les points chauds dans la pièce – donc poten­tielle­ment à risque avec le procédé de fonderie).

Non seule­ment le sup­port con­somme de la poudre et aug­mente le temps de fab­ri­ca­tion, mais aus­si son parachève­ment sur ce type de pièce compte pour la moitié du coût de fab­ri­ca­tion (l’enlèvement des sup­ports se fait à la pince, à la scie, en découpe fil par élec­troéro­sion ou par usi­nage). Il faudrait donc : for­mer les con­cep­teurs aux con­traintes liées au procédé de fab­ri­ca­tion (bonne nou­velle, cela com­mence à se met­tre en place chez cer­tains indus­triels via des guides en ligne) ; met­tre dans le logi­ciel de CAO des règles méti­er qui pour­raient aider le con­cep­teur ou au moins véri­fi­er la con­cep­tion a pos­te­ri­ori (cela arrive aus­si) ; le cas idéal est celui qui main­tenant est décrit, que la min­imi­sa­tion des sup­ports soit une con­trainte d’optimisation de la forme.

Il faut max­imiser la raideur de la pièce et min­imiser sa masse tout en évi­tant les zones à sup­port­er au max­i­mum (voire les élim­in­er). Cela est aujourd’hui pos­si­ble : le con­cep­teur, pour un matéri­au don­né, part d’une zone allouée de l’espace (con­trainte par son envi­ron­nement – les pièces voisines), de cas de charge, de con­di­tions lim­ites, et, sachant que la pièce sera imprimée en 3D, définit la direc­tion d’impression et l’angle lim­ite pour le « sup­port­age ». Et le sys­tème pro­pose une forme auto­sup­port­ée au maximum !

“Le support compte
pour la moitié du coût de fabrication.”

Pièce avec structure lattices.

Anticiper au stade du design

Comme on a pu le voir, la fab­ri­ca­tion addi­tive ouvre vrai­ment de nou­velles per­spec­tives pour la con­cep­tion de pro­duits et per­met de fab­ri­quer (presque) les formes les plus com­plex­es. Mais les dif­férents procédés de fab­ri­ca­tion addi­tive ont tous des con­traintes qu’il faut pren­dre en compte, si pos­si­ble au plus tôt au stade de la con­cep­tion pour opti­miser le coût de la fab­ri­ca­tion (voire même pour garan­tir la « fab­ri­ca­bil­ité »). Des solu­tions exis­tent ou sont en train de se met­tre en place, le chemin reste long mais il est promet­teur. Or il y a encore d’autres méth­odes : par exem­ple, con­cevoir la pièce avec ses sup­ports et con­serv­er ces sup­ports ; ils aug­mentent la raideur de la pièce, en plus d’assurer la fabricabilité !

Enfin, n’oublions pas de men­tion­ner un phénomène très impor­tant en fab­ri­ca­tion addi­tive métal : les défor­ma­tions. De la même manière qu’on con­naît bien les effets de retour élas­tique en emboutis­sage, les con­traintes résidu­elles accu­mulées pen­dant la fab­ri­ca­tion en 3D, dues aux forts gra­di­ents ther­miques, génèrent tou­jours des défor­ma­tions ; elles peu­vent être très impor­tantes. La bonne nou­velle c’est qu’on peut les prédire (cal­cul aux élé­ments finis) et même les com­penser si aucun paramé­trage du proces­sus ne per­met de les min­imiser de manière accept­able. Là encore, des solu­tions exis­tent et ont fait leurs preuves.

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