Charles Kœchlin (X1887), Portraits musicaux (1909−1949)
Le présent recueil d’articles et de conférences (dont radiodiffusées) de Charles Kœchlin (1867−1950), X1887, musicien, compositeur, pédagogue, critique, musicographe, grand intellectuel, humaniste, s’inscrit dans la suite de deux volumes publiés en 2006 et 2009 avec l’ambition de fournir au public éclairé un florilège substantiel des nombreux écrits du plus célèbre des compositeurs polytechniciens avec Pierre Schaeffer (X1929).
Il en résulte un volume de près de 400 grandes pages, doté de très utiles notes de bas de page et de listes de variantes significatives, et éclairé par une savante et forte introduction. Ce remarquable travail éditorial a choisi pour sa part de se centrer sur le sujet des musiciens français, collègues plus ou moins proches de l’auteur des articles, sur lesquels il apporte son témoignage, ses analyses musicologiques, sa défense contre les critiques malveillantes, ignorantes ou snobinardes – dont il a lui-même souffert. Je suis toujours impressionné et admiratif devant une telle entreprise intellectuelle, qui suppose un investissement colossal, une culture exceptionnelle et pour tout dire un amour de son sujet.
Charles Kœchlin a beaucoup composé dans de nombreux genres musicaux, il a été une grande figure du monde musical français, mais il est à présent peu joué et pas beaucoup enregistré ; il mériterait un retour d’intérêt, et pas seulement que son nom « dise quelque chose » à l’honnête homme… Il apparaît en tout cas dans ces textes comme doué d’une extraordinaire ouverture d’esprit, s’intéressant positivement à des compositeurs éloignés de son esthétique (comme Satie, Stravinski ou Schoenberg), ayant une connaissance quasi encyclopédique de la musique de son temps (alors que le disque n’existait pas vraiment), soutenant ses jeunes collègues dans leur diversité, sans exclusive. Et tout cela avec en général une pondération que tous ne savaient pas conserver dans les querelles de clocher…
Certes il a des mots un peu datés sur les musiciens germaniques, bien que par ailleurs pas « nationaliste » – Alsacien, c’était un patriote ! Je noterai l’importance étonnante qu’il donnait au groupe des Cinq, surtout à Moussorgski, dans l’influence sur les Français. La présente recension tombe bien dans le numéro consacré aux X et la musique ! et elle amène à se reporter à l’article de Cécile Leblanc consacré à Kœchlin dans notre numéro 785 de mai 2023, sur Proust et les X, avec sa bibliographie attachée.