TÉMOIGNAGES

Dossier : Polytechnique et Mines au fémininMagazine N°637 Septembre 2008Par : François Varloot (84) et Michel Davancens (67) ancien directeur exécutif chez France Télécom

Réussir ensemble

» Tu as inté­gré mon fils, c’est bien mais sur­tout n’é­pouse pas une X‑ette ! » Gérer deux car­rières char­gées n’est effec­ti­ve­ment pas de tout repos.

Ain­si, la » pari­té » du couple, loin de les sup­pri­mer, symé­trise et nous ren­voie en miroir un cer­tain nombre de pré­ju­gés machistes du milieu pro­fes­sion­nel. Avec deux emplois pre­nants et quatre enfants, vos col­lègues doutent de votre dis­po­ni­bi­li­té (on ne vous pro­pose pas la mis­sion à l’é­tran­ger) et de votre loyau­té (on ne vous confie pas cer­tains dos­sier si votre moi­tié tra­vaille pour la concur­rence) mais sou­haitent cepen­dant connaître les confi­dences obte­nues sur l’o­reiller. Vous êtes sup­po­sé mau­vais parents (les enfants ne vous voyant jamais) et mau­vais mana­gers (car vous n’a­vez guère de temps pour l’en­tre­prise). On vous ima­gine jaloux de la réus­site de l’autre et donc déloyal à vos supé­rieurs de l’autre sexe. Mais sur­tout, vous n’a­vez pas besoin de pro­mo­tion rapide ni de retrou­ver vite un emploi (puisque votre conjoint a un bon salaire).

Dans ce contexte, » réus­sir » ensemble, per­son­nel­le­ment et pro­fes­sion­nel­le­ment, en pas­sant avec joie et sans regret les » dif­fi­ciles » choix de car­rière, est tout un sub­til jeu d’é­change, de sup­port mutuel et de ges­tion des prio­ri­tés et pro­jets à long terme. Il ne suf­fit pas en effet de mon­trer de l’in­té­rêt pour le busi­ness de l’autre (en évi­tant cepen­dant de com­pa­rer les salaires ou d’être trop inqui­si­teur), il faut se pré­pa­rer ensemble aux effets per­son­nels des contraintes et oppor­tu­ni­tés pro­fes­sion­nelles latentes (dis­po­ni­bi­li­té aux tâches ména­gères et à l’é­du­ca­tion des enfants, vacances, ges­tion du tra­vail à domi­cile, etc.) et savoir gérer les aides externes tout en se gar­dant un peu de temps à deux.

Une petite entre­prise en quelque sorte dont on retire inver­se­ment une leçon pour le monde pro­fes­sion­nel : une équipe mixte équi­li­brée en pou­voir, res­pon­sa­bi­li­té et recon­nais­sance est tou­jours net­te­ment plus effi­cace, plus anti­ci­pa­tive et moins sou­mise au stress de l’impondérable.

François Varloot (84)

Pragmatiques et susceptibles

Les hommes veulent avoir rai­son, les femmes pré­fèrent être effi­caces. Les pre­miers, volon­tiers dog­ma­tiques, s’en­gagent dans les débats d’i­dées, oubliant par­fois qu’il faut abou­tir à un résul­tat. Les secondes, pour qui le temps est pré­cieux, car leur vie ne s’ar­rête pas hors du bureau, prônent l’é­co­no­mie de moyens et veulent abou­tir rapi­de­ment. Elles sont prag­ma­tiques, mais aus­si sus­cep­tibles et très sou­cieuses de leur image.

Hommes et femmes sont donc com­plé­men­taires dans l’en­tre­prise, comme ils le sont dans la vie. Il serait sou­hai­table que leurs res­pon­sa­bi­li­tés soient équi­li­brées. L’é­qui­libre dépend évi­dem­ment du type d’en­tre­prise et doit reflé­ter le pro­fil de la clien­tèle. Chez France Télé­com, par exemple, il ne serait pas anor­mal que la pro­por­tion par­mi les cadres supé­rieurs soit à peu près iden­tique, alors que les femmes ne repré­sentent que 30 %. A contra­rio, dans d’autres sec­teurs, comme l’é­du­ca­tion ou la san­té, la pro­por­tion de femmes est anor­ma­le­ment éle­vée, ce qui n’est pas bon non plus.

Les femmes doivent-elles pour autant créer des » groupes » spécifiques ?

J’ai connu à France Télé­com le groupe fémi­nin infor­mel, dit groupe des » esper­luettes « . Très sym­pa­thique, plein d’hu­mour, il abor­dait de bons sujets, sans côté reven­di­ca­tif, ni militant.

Le risque est celui d’un hyper­éli­tisme (X et Mines, c’est un peu étri­qué). Mais, elles ont rai­son de vou­loir trai­ter des pro­blèmes qui leur sont par­ti­cu­liers, ou même qui inté­ressent tout le monde. Par exemple, pour trai­ter les horaires dans l’en­tre­prise, elles savent de quoi il est ques­tion, bien mieux que les ins­pec­teurs du travail.

Michel Davancens (67),
ancien directeur exécutif chez France Télécom

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