DVD Eugene Onegin au MET

Piotr Ilitch TCHAÏKOVSKI : Eugène Onéguine

Dossier : Arts,Lettres et SciencesMagazine N°721 Janvier 2017Par : le Metropolitan Opera de New York, Anna Netrebko, direction Valery GergievRédacteur : Marc DARMON (83)Editeur : Un DVD ou Blu-ray Deutsche Grammophon

Parmi les onze opé­ras de Tchaï­kovs­ki, Eugène One­guine est avec rai­son le plus célèbre. Comme pour les grands Ver­di ou les grands Puc­ci­ni, nous avons deux heures conti­nues de magni­fique musique. 

La repré­sen­ta­tion très clas­sique (cos­tumes, décors) et très bien réa­li­sée du Met, avec des artistes d’exception, est pro­ba­ble­ment la meilleure façon de décou­vrir ou d’apprécier cette œuvre. 

Sur la seconde par­tie du poème inté­gra­le­ment en vers de Pou­ch­kine, Tchaï­kovs­ki com­pose fidè­le­ment cin­quante ans plus tard une musique roman­tique, expres­sive, pre­nante, enivrante. L’atmosphère très tche­kho­vienne du pre­mier acte est rehaus­sée par une mise en scène qui fait bien res­sor­tir le temps long de la vie de la cam­pagne russe à cette époque. 

On se croit vrai­ment dans Les Trois Sœurs, La Ceri­saie ou l’Oncle Vania. Comme dans La Dame de pique, autre chef‑d’œuvre de Tchaï­kovs­ki, tou­jours d’après Pou­ch­kine, une chan­son en fran­çais vient mon­trer l’érudition des personnages. 

Et comme dans La Dame de pique, il y a une scène de duel, duel dont mour­ra Pou­ch­kine peu de temps après la com­po­si­tion de ces œuvres. 

La direc­tion de Ger­giev est mer­veilleuse. On est pris dès l’ouverture, dont le film montre par­fai­te­ment l’orchestre du Met dans la fosse et la façon très expres­sive de Ger­giev de le diriger. 

Mais la star de la soi­rée, c’est Anna Netreb­ko, dont on réa­lise pro­gres­si­ve­ment année après année l’artiste d’exception qu’elle est. Sa voix expres­sive et chaude, char­gée d’émotion, est excep­tion­nelle. Elle nous per­met d’assister, par exemple dans la scène de la lettre, à quinze minutes de pure musique sublime, en conti­nu. Comme Anna Netreb­ko enre­gistre beau­coup, elle lais­se­ra un legs dis­co­gra­phique et fil­mé très important. 

Eugène One­guine, le seul per­son­nage anti­pa­thique de l’opéra (il déses­père Tatia­na, rend jaloux puis tue son ami), « oisif, sans voca­tion, sans épouse, sans but », est inter­pré­té par Mariusz Kwie­cien, spé­cia­liste du rôle. Et men­tion spé­ciale à Alexei Tano­vits­ki, dans le rôle du prince Gré­mine, basse russe cari­ca­tu­rale, au timbre très carac­té­ris­tique par­fait dans son célèbre très bel air. 

Comme chaque fois au Met, une star habi­tuée de cette scène new-yor­kaise intro­duit l’œuvre, pour la télé­vi­sion et les dif­fu­sions simul­ta­nées au ciné­ma. Ce soir-là, c’est Debo­rah Voigt qui pré­sente l’œuvre, la dis­tri­bu­tion et la magni­fique production. 

Le Met à New York, Covent Gar­den à Londres sont habi­tués à ce type de pro­duc­tion, où le met­teur en scène se met au ser­vice de la musique, avec inven­ti­vi­té et recherche, mais aus­si fidé­li­té et res­pect. Nous n’y sommes mal­heu­reu­se­ment moins habi­tués à Paris, mais espé­rons que cela revien­dra (les spec­tacles au Palais Gar­nier de l’ère Lie­ber­mann ont fait réfé­rence dans le monde entier, mais c’était il y a près de qua­rante ans).

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