Paul Avenas (38) 1918–2000

Dossier : ExpressionsMagazine N°570 Décembre 2001

Né en Avi­gnon alors que se ter­mi­nait la Grande Guerre, Paul Ave­nas a bai­gné dès l’en­fance dans le monde che­mi­not, éle­vé aux abords du dépôt des machines à vapeur sur les­quelles son père était mécanicien.

Brillant élève, il rejoin­dra la taupe du lycée de Mar­seille qui le condui­ra à l’X juste avant le déclen­che­ment des hos­ti­li­tés de la Deuxième Guerre mon­diale. Après une sco­la­ri­té en par­tie trans­fé­rée sur Lyon, c’est en offi­cier » sapeur télé­gra­phiste » qu’il ser­vi­ra pen­dant cette période de conflit, avant de rejoindre le corps des Ponts et Chaussées.

Les tra­vaux de recons­truc­tion battent alors leur plein, ses pre­mières fonc­tions au Ser­vice cen­tral d’é­tudes tech­niques du minis­tère des Tra­vaux publics le plongent dès sa sor­tie de l’é­cole des Ponts dans les études de répa­ra­tion ou de recons­truc­tion de nom­breux ouvrages d’art.

Ces quelques années consa­crées à de grands ouvrages auront mar­qué le début de sa car­rière pro­fes­sion­nelle et l’on peut y voir les pré­mices de son acti­vi­té de bâtis­seur qu’il pour­sui­vra jus­qu’à sa retraite.

Le che­min de fer avait beau­coup souf­fert des com­bats, et c’est tout natu­rel­le­ment sur le réseau PLM de son enfance, deve­nu entre-temps un sec­teur du réseau SNCF, que Paul Ave­nas pren­dra ses pre­mières fonc­tions à la SNCF en 1949.

Paul AVENAS (38) À Cler­mont-Fer­rand d’a­bord, à Lyon ensuite, il se consa­cre­ra à la recons­truc­tion, puis à la moder­ni­sa­tion de ce réseau essen­tiel au redres­se­ment du pays.

Cette période des années cin­quante lui aura per­mis de mar­quer de son empreinte de très nom­breux chan­tiers avec en point d’orgue la moder­ni­sa­tion et l’élec­tri­fi­ca­tion de la ligne Paris-Lyon dont il assu­me­ra direc­te­ment la res­pon­sa­bi­li­té. Nom­breux dans son entou­rage l’au­ront enten­du pui­ser dans les chan­tiers de cette époque ses réfé­rences per­son­nelles, tant ils lui auront per­mis d’y maî­tri­ser les tech­niques très diverses qui font la com­plexi­té du che­min de fer.

Ses connais­sances ency­clo­pé­diques de la voie fer­rée feront de lui quelques années plus tard un chef du Ser­vice voie et bâti­ment du réseau Sud-Est aus­si com­pé­tent dans le domaine des ouvrages d’art, chers à son début de car­rière, que dans ceux des cou­rants forts et de la signa­li­sa­tion fer­ro­viaire, sans oublier les télé­com­mu­ni­ca­tions où il y retrou­ve­ra l’u­sage de la fameuse équa­tion des télé­gra­phistes qu’il avait décou­verte pen­dant son ser­vice militaire.

S’é­loi­gnant quelque peu des métiers de la voie, il élar­git son champ d’ac­tion à ceux de l’ex­ploi­ta­tion en pre­nant en 1970 les fonc­tions de chef du Ser­vice de l’ex­ploi­ta­tion du réseau Sud-Est. Mais c’est en 1972, au moment où la SNCF modi­fie son orga­ni­sa­tion en régio­na­li­sant ses struc­tures, qu’il pren­dra en main le pro­jet qu’il allait devoir mener jus­qu’à son terme en 1984 : la construc­tion de la pre­mière ligne à grande vitesse entre Paris et Lyon.

Qui, mieux que Paul Ave­nas, aurait alors pu prendre en charge ce pro­jet novateur ?

Ses connais­sances uni­ver­selles des tech­niques fer­ro­viaires, son bon sens » pay­san » pour faire le tri entre l’u­tile et le super­flu, son goût pour la chose juri­dique, fon­da­men­tale pour la réa­li­sa­tion d’un ouvrage public de 400 kilo­mètres, enfin son sens du dia­logue et du contact, qui fai­sait mer­veille aus­si bien devant le dépu­té-maire d’une grande ville que face aux éle­veurs du Cha­ro­lais, ont trou­vé pen­dant ces dix années maintes occa­sions de s’exprimer.

Pour avoir vécu toute cette période à ses côtés, je me dois aus­si de témoi­gner des qua­li­tés humaines qui accom­pa­gnaient son action en toutes circonstances.

Pour sa famille en pre­mier lieu pour laquelle il a tou­jours été un père atten­tif ; pour l’é­quipe de che­mi­nots qui l’en­tou­rait ensuite : une seconde famille dont il connais­sait bien tous les membres, tou­jours à l’é­coute des sou­cis de cha­cun ; pour son action quo­ti­dienne enfin, où les pro­blèmes humains n’é­taient jamais relé­gués au second plan.

Fort de ses atouts per­son­nels et de la confiance qu’il a su créer dans son équipe, il condui­ra ce grand pro­jet avec une maî­trise recon­nue de la qua­li­té tech­nique de l’ou­vrage, des délais et des coûts. Sans ce suc­cès à la fois tech­nique et com­mer­cial de cette pre­mière ligne à grande vitesse, nous n’au­rions sans doute pas connu un tel déve­lop­pe­ment du réseau TGV en France, et même en Europe. Le Che­min de Fer lui doit beaucoup.

Paul Ave­nas nous a quit­tés en octobre 2000.

Il lais­se­ra à tous les siens, ain­si qu’à tous ceux qui ont été proches de lui dans sa vie pro­fes­sion­nelle, le sou­ve­nir d’un grand ingé­nieur, d’un huma­niste, d’un ami.

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