Nanomatériaux pour la conversion et le stockage de l’énergie

Dossier : Les nanosciencesMagazine N°702 Février 2015
Par Pere ROCA I CABARROCAS

De plus en plus, les nano­ma­té­riaux appa­raissent comme le point de conver­gence entre la micro­élec­tro­nique et l’électronique grande surface.

“ La conversion et le stockage de l’énergie constituent un défi majeur ”

En effet, tan­dis que l’industrie micro­élec­tro­nique n’a ces­sé de réduire les dimen­sions des tran­sis­tors dans les cir­cuits inté­grés, l’interface entre le micro­pro­ces­seur et les uti­li­sa­teurs a évo­lué de façon tout aus­si spec­ta­cu­laire avec le pas­sage du tube catho­dique (qui s’en sou­vient encore ?) vers les écrans plats à matrice active et les tablettes tactiles.

Leur fonc­tion­ne­ment repose sur des tran­sis­tors pro­duits sur des grandes sur­faces (~ 1 m2) par des pro­cé­dés plas­ma à basse tem­pé­ra­ture. Ain­si, l’approche top-down de la micro­élec­tro­nique a trou­vé un allié inéga­lé dans l’électronique grande sur­face bot­tom-up.

REPÈRES

Le Laboratoire de physique des interfaces et des couches minces (LPICM), créé en 1986, a une double tutelle, l’École polytechnique et le CNRS. Aujourd’hui, le LPICM est associé principalement à l’Institut des sciences de l’ingénierie et des systèmes du CNRS (INSIS), tout en ayant des partenariats avec les instituts de physique et chimie.
Le LPICM est devenu un laboratoire multidisciplinaire où la recherche fondamentale dans les domaines de la science des matériaux, la chimie, l’électronique et l’optique trouve des applications pour la génération et le stockage d’énergie photovoltaïque, des capteurs basés sur des objets nanométriques et des dispositifs d’électronique grande surface utilisant des matériaux organiques et inorganiques.
Le LPICM a aussi développé des techniques de caractérisation optique nouvelles pour la microélectronique, les diagnostics biomédicaux ou l’étude d’objets de taille nanométrique.

Le défi majeur

Les maté­riaux et dis­po­si­tifs pro­duits trouvent leur appli­ca­tion dans la micro, la nano et l’optoélectronique.

Les nano­ma­té­riaux sont obte­nus à par­tir de molé­cules de gaz qu’on dis­so­cie dans un réac­teur plas­ma (PECVD) à envi­ron 200 °C.

Par­mi ces appli­ca­tions, la conver­sion et le sto­ckage de l’énergie consti­tuent un défi majeur. En effet, bien que nous bai­gnions dans un monde d’énergie (élec­trique, chi­mique, ther­mique, méca­nique, pho­to­nique, etc.), sa maî­trise reste problématique.

Il s’agit de trou­ver des moyens effi­caces et peu coû­teux pour récu­pé­rer et sto­cker ces éner­gies. La conver­sion de l’énergie envi­ron­nante peut se faire grâce à des dis­po­si­tifs basés sur des nano­fils. Ain­si, de nom­breuses études portent sur l’utilisation de nano­fils (Si, Ge, ZnO, etc.) pour la pié­zo­élec­tri­ci­té ou pour la thermoélectricité.

Des nanofils aux cellules solaires

Photopile souple
Pho­to­pile souple.

La conver­sion directe de l’énergie solaire en élec­tri­ci­té peut aus­si se faire de façon avan­ta­geuse grâce à des cel­lules solaires à base de nano­fils de sili­cium, un domaine dans lequel le LPICM excelle.

En effet, depuis quelques années, nous déve­lop­pons une approche ori­gi­nale bre­ve­tée de pro­duc­tion de cel­lules solaires à jonc­tion radiale dans un réac­teur plas­ma en une seule étape sous vide.

Comme on peut le voir sur l’image ci-des­sus, il ne s’agit pas d’un réseau ordon­né. En effet la méthode de fabri­ca­tion à bas coût ne per­met pas pour l’instant l’obtention d’un réseau ordon­né, ce qui, en pas­sant, n’est pas indis­pen­sable pour l’application visée. L’enjeu est de trans­fé­rer cette approche vers des modules et des grandes sur­faces en visant zéro défaut électrique.

“ Produire des térawatts avec des dispositifs nanométriques ”

C’est toute la dif­fi­cul­té des nanos : on veut pro­duire des téra­watts avec des dis­po­si­tifs nano­mé­triques, dont cha­cun a une puis­sance de l’ordre du nano­watt. Les pro­cé­dés plas­ma per­mettent de rele­ver ce défi. Ain­si, les cel­lules pré­sen­tées comptent une cen­taine de mil­lions de jonc­tions radiales par cen­ti­mètre car­ré connec­tées en parallèle.

La démons­tra­tion du bon fonc­tion­ne­ment de ces dis­po­si­tifs à l’échelle du labo­ra­toire nous per­met d’imaginer leur trans­fert indus­triel, en cours de réa­li­sa­tion dans le cadre du pro­jet ANR Solarium.

Formation de nanofils de silicium
Sché­ma du pro­cé­dé de for­ma­tion de nano­fils de sili­cium et de jonc­tions radiales. À droite, image au micro­scope élec­tro­nique à balayage (MEB) de la forêt de cel­lules solaires ain­si obtenue.

Des photopiles souples

La tech­no­lo­gie des couches minces peut aus­si être mise à pro­fit pour le sto­ckage de l’énergie élec­trique. Pour ce faire, nous déve­lop­pons au LPICM des bat­te­ries Li-ion dans les­quelles on uti­lise encore des nano­fils de sili­cium comme élec­trode néga­tive ou alors des nano­tubes de car­bone enro­bés de nano­par­ti­cules de silicium.

L’intérêt de cette approche est de com­bi­ner le module de conver­sion (pho­to­pile) et de sto­ckage sur le même sub­strat, de façon à favo­ri­ser la pro­duc­tion et le sto­ckage de l’énergie.

Qui plus est, les tech­niques déve­lop­pées, fon­dées sur des pro­cé­dés à basse tem­pé­ra­ture, nous per­mettent d’envisager la réa­li­sa­tion de modules flexibles, tels que le mini­mo­dule en photo.

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