Les vins rouges des Côtes de Bourg

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°575 Mai 2002Rédacteur : Laurens DELPECH

Situé sur la rive droite de la Dor­dogne et de la Gironde, à 35 kilo­mètres au nord de Bor­deaux, le pays de Bourg-sur- Gironde pos­sède une voca­tion viti­cole très ancienne, puisque ce sont les Romains qui y plan­tèrent les pre­mières vignes. L’essor de la vigne fut très rapide, en rai­son de la situa­tion géo­gra­phique sur l’axe mari­time et flu­vial entre les pro­vinces mari­times, la Gaule nar­bon­naise et Rome.

Après les inva­sions nor­mandes et bar­bares, la région connut à nou­veau la pros­pé­ri­té avec le mariage d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plan­ta­ge­nêt. C’est alors par car­gai­sons entières que les vins s’exportaient à des­ti­na­tion de l’Angleterre. Depuis, le vignoble a pour­sui­vi son expan­sion de manière régu­lière, mais les vins des Côtes de Bourg sont main­te­nant sur­tout consom­més en France, où est ven­due 85 % de la production.

C’est en 1920 que les appel­la­tions “ Côtes de Bourg ”, “ Bourg ” ou “ Bour­geais ” ont été offi­ciel­le­ment créées, avant d’être homo­lo­guées en 1935 par l’Institut natio­nal des appel­la­tions d’origine.

Il y a un peu de vin blanc, mais l’immense majo­ri­té de la pro­duc­tion est consti­tuée de vins rouges d’un excellent rap­port qua­li­té – prix (moins de 10 euros), en rai­son d’un ensemble de ter­roirs homo­gènes de grande qua­li­té et d’un micro­cli­mat excep­tion­nel (il pleut moins dans les Côtes de Bourg que dans l’ensemble du Bor­de­lais). L’appellation étage en effet ses trois lignes de coteaux orien­tés sud-sud-ouest, paral­lè­le­ment aux bords de la Dor­dogne et de la Gironde.

Ces énormes masses d’eau, sou­mises aux effets des marées venues de l’Atlantique, tem­pèrent le cli­mat de façon spec­ta­cu­laire. On dit que dans cette région “ il ne gèle ni ne grêle ”. Le fait est qu’en 1991, quand les gelées d’avril ont com­pro­mis les récoltes dans la tota­li­té du Bor­de­lais, la récolte moyenne a été à Bor­deaux de 20 hec­to­litres par habi­tant, alors que dans les Côtes de Bourg, elle a été de 43 hec­to­litres par habitant.

Les Côtes de Bourg rouges se pré­sentent en géné­ral avec une robe d’un beau rouge pro­fond. Au nez, on dis­tingue sou­vent des notes de fruits rouges, de vanille et d’épices. Ils peuvent se boire assez tôt, mais vieillissent avec bon­heur et s’améliorent pen­dant cinq à dix ans après la mise en bou­teille, en fonc­tion de la qua­li­té du mil­lé­sime et du cru. Ils accom­pagnent très bien la char­cu­te­rie (jam­bons, pâtés en croûte…), les viandes rouges rôties ou grillées, les volailles et les plats du Sud-Ouest (aloses, magrets, confits…) ain­si que les plats à base de cham­pi­gnons. Ils conviennent aus­si par­fai­te­ment aux fro­mages à pâte cuite comme le can­tal, le saint-nec­taire ou le hol­lande étuvé.

Par­mi les pro­prié­tés qui ont le mieux réus­si les mil­lé­simes que l’on trouve aujourd’hui sur le mar­ché (1999 et 2000), on peut notam­ment citer :

Le Châ­teau La Tui­lière, une belle pro­prié­té de 20 hec­tares expo­sés plein sud. Com­po­sé à 60% de mer­lot, 35 % de caber­net sau­vi­gnon et 5 % de mal­bec, le vignoble pro­fite de cette expo­si­tion opti­male et de la proxi­mi­té de l’estuaire, qui régule les tem­pé­ra­tures. Il est pro­duit envi­ron 60 000 bou­teilles d’une cuvée tra­di­tion et 20 000 bou­teilles d’une cuvée de pres­tige, appe­lée “ Les Armoi­ries ”. Un très beau vin à la robe sombre et au nez fin et complexe.

Le Châ­teau Macay est un domaine de 42 hec­tares d’un seul tenant, avec 65 % de mer­lot, 15 % de caber­net franc, 10 % de caber­net sau­vi­gnon et 10 % de mal­bec. L’âge moyen des vignes est de trente-cinq ans. Le vin est suave, avec des arômes géné­reux (cas­sis, fruits rouges, notes de tor­ré­fac­tion), des tan­nins soyeux et une chair sédui­sante. La cuvée de pres­tige “ Ori­gi­nal Châ­teau Macay ” est un vin plein et struc­tu­ré, avec de savou­reux arômes de fruits noirs. La matière est riche. Belle finale.

Le Châ­teau Haut-Mous­seau pos­sède un vignoble de 33 hec­tares, com­plan­té de mer­lot (60 %) et de caber­net sau­vi­gnon (30 %). Vieilles vignes, ven­danges manuelles, vini­fi­ca­tion tra­di­tion­nelle, éle­vage sous bois, tout concourt à faire de la cuvée pres­tige de cette pro­prié­té un des meilleurs vins des Côtes de Bourg. La bouche est expres­sive et gour­mande. Un très beau vin.

Le Châ­teau Bru­le­se­caille est un des grands clas­siques de l’appellation. Ses vignes, qui s’étendent sur 28 hec­tares, ont un âge moyen de trente ans. Un vin très régu­lier, au boi­sé élé­gant, déjà agréable à consom­mer, mais qui peut se gar­der sans crainte.

Le Châ­teau Nodoz a un vignoble de 22 hec­tares sur un beau ter­roir de graves fil­trantes. Le vin est fait avec soin et éle­vé en bar­riques de chêne. Le nez est très élé­gant et la bouche agréable : on y retrouve la ron­deur du mer­lot et la struc­ture du caber­net. Un vin qui a du charme et du caractère.

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