Les jeunes polytechniciens sont lucides et déterminés

Dossier : Réchauffement climatiqueMagazine N°709 Novembre 2015
Par Jean-Marie SIÉFERT (79)

Le pre­mier ensei­gne­ment du son­dage est que les jeunes ont une conscience mar­quée de l’ampleur du pro­blème. Réchauf­fe­ment cli­ma­tique et épui­se­ment des res­sources natu­relles sont les deux pro­blèmes mon­diaux les plus cités, alors que, si on se limite à la France, l’emploi, l’éducation, la recherche et les défi­cits passent au pre­mier plan.

REPÈRES

Le questionnaire soumis aux jeunes X s’inspire de ceux réalisés par l’Ademe. Il y a eu 673 réponses, soit un taux de réponse d’environ 25 %. Évidemment, on peut supposer que ceux qui ont répondu sont les plus motivés, et donc qu’il y a un léger biais.
Près de 10 % de réponses étaient accompagnées de commentaires libres, ce qui montre la diversité des opinions et approches et surtout une belle santé de l’esprit critique chez les sondés.

Une préoccupation majeure

Pour 64 % des jeunes X, les désordres cli­ma­tiques sont impu­tables à l’effet de serre.

“ Les jeunes ont une conscience marquée de l’ampleur du problème ”

50 % pensent qu’il fau­dra modi­fier de manière impor­tante nos modes de vie pour empê­cher l’augmentation de l’effet de serre, 30 % que c’est aux États de régle­men­ter, au niveau mon­dial, et de prendre les mesures pour empê­cher l’augmentation de l’effet de serre, 13 % que le pro­grès tech­nique per­met­tra de trou­ver des solu­tions pour empê­cher l’augmentation de l’effet de serre, et 7 % que le pro­grès tech­nique nous per­met­tra de nous adap­ter à l’augmentation de l’effet de serre.

Si le réchauf­fe­ment cli­ma­tique conti­nue, pour 59 % il y aura des modi­fi­ca­tions de cli­mat mais on s’y adap­te­ra sans trop de mal, pour 32 % les condi­tions de vie devien­dront extrê­me­ment pénibles à cause des dérè­gle­ments climatiques.

Et 83 % pensent que notre pays sera obli­gé de prendre des mesures impor­tantes dans les décen­nies à venir pour s’adapter aux nou­velles condi­tions climatiques.

Quelle est la ques­tion qui te paraît la plus impor­tante en France, aujourd’hui ?
(deux réponses)

Des mesures largement approuvées et d’autres plus discutées

Le deuxième ensei­gne­ment concerne les mesures à prendre pour lut­ter contre le réchauf­fe­ment. Il leur était deman­dé de noter de 1 (pas sou­hai­table du tout) à 5 (très sou­hai­table) diverses solu­tions proposées.

Les solu­tions les plus plé­bis­ci­tées sont le déve­lop­pe­ment des éner­gies renou­ve­lables (note moyenne 4,5), les comp­teurs indi­vi­duels de consom­ma­tion (note 4,1), l’exclusion des 4 x 4 des villes (3,8), la taxa­tion car­bone per­met­tant de limi­ter les émis­sions et finan­cer la plan­ta­tion d’arbres pour com­pen­ser les émis­sions, sur­tout pour les entre­prises (3,4), un péage pour les véhi­cules entrant dans les grandes villes en fonc­tion du nombre de pas­sa­gers (3,4), et la taxa­tion des pro­prié­taires ne réa­li­sant pas des tra­vaux d’isolation ther­mique des loge­ments (3,3).

En revanche, des mesures limi­tant l’usage de l’avion (taxer le trans­port aérien pour favo­ri­ser le trans­port en train, 2,9) ou la vitesse des véhi­cules (vitesse sur les auto­routes infé­rieure à 110 km/h, 2,8 ; vitesse bri­dée dès la sor­tie d’usine, 2,7) sont plus controversées.

Questionnaire posé aux élèves de l'Ecole polytechnique
Quelle est la ques­tion qui te paraît la plus impor­tante dans le monde, aujourd’hui ?
(deux réponses)

Des engagements individuels forts

Le troi­sième ensei­gne­ment est que nos jeunes cama­rades sont prêts à s’engager indi­vi­duel­le­ment, au moins un peu (96 %). Nous leur avons deman­dé d’indiquer, pour toute une série d’actions, s’ils la pra­tiquent déjà (note de 4), s’ils pour­raient faci­le­ment le faire (3), si ce serait dif­fi­cile (2), ou si cela leur serait impos­sible (1). La moyenne pon­dé­rée, pour chaque action (note de 1 à 4), est un bon indi­ca­teur de leur niveau d’engagement pour cette action.

Voi­ci les résul­tats : trier les déchets (3,9), uti­li­ser les trans­ports en com­mun plu­tôt que la voi­ture (3,7), éteindre les appa­reils qui res­tent en veille (3,4), uti­li­ser une conduite souple et éco­nome (3,4), veiller à ache­ter des légumes de sai­son (3,3), se dépla­cer en vélo plu­tôt qu’en voi­ture (3,3), bais­ser la tem­pé­ra­ture de son loge­ment de 2 ou 3 degrés en hiver (3,2), faire du covoi­tu­rage (3,1), limi­ter la consom­ma­tion de viande (2,9), choi­sir des pro­duits avec moins d’emballages et qui viennent de moins loin (2,8), uti­li­ser des appa­reils ména­gers dépen­sant moins d’énergie (2,8), ache­ter une voi­ture consom­mant moins de car­bu­rant ou une voi­ture élec­trique (2,7), limi­ter ses trans­ports en avion (2,6), faire des tra­vaux d’isolation de son loge­ment (2,3), acqué­rir une chau­dière plus per­for­mante (2,2, mais beau­coup ont signa­lé qu’ils n’étaient pas encore concer­nés, y com­pris pour l’achat d’une voi­ture ou d’un logement).

Et 73 % de nos jeunes cama­rades sont (au moins un peu) moti­vés pour tra­vailler dans un domaine per­met­tant de lut­ter acti­ve­ment contre le réchauf­fe­ment climatique.

Mieux se préparer

“ Ils font plus confiance à la société civile pour faire avancer les choses ”

Pour finir, ils ne pensent pas (près de 50 % pas du tout) que leur pas­sage à l’École les ait bien pré­pa­rés et sen­si­bi­li­sés au chan­ge­ment cli­ma­tique, et ils font plus confiance à la socié­té civile pour faire avan­cer les choses qu’au monde poli­tique et ins­ti­tu­tion­nel et aux médias.

Un bel esprit participatif et critique

Ce son­dage a géné­ré huit pages de com­men­taires libres (avis, pro­po­si­tions, réac­tions dans tous les sens), cer­tains sou­li­gnant en par­ti­cu­lier – à juste titre – les limites de l’exercice.

Par­mi les nom­breuses pro­po­si­tions qui ne fai­saient pas par­tie des ques­tions du son­dage, je retien­drai celle d’instaurer dans les pro­grammes sco­laires l’éducation au res­pect de l’environnement, ou encore l’instauration d’un prix du car­bone à l’échelle euro­péenne, l’interdiction des auto­cars dans Paris, et je ter­mi­ne­rai par l’aspiration à une socié­té sobre, soli­daire, et créa­trice d’emplois, et l’appel à une grande rigueur pour la col­lecte, l’examen et l’interprétation des faits et données.

Remer­cie­ments cha­leu­reux à Claire GASSIAT (08) et Emma­nuel SIÉFERT (11) qui m’ont aidé pour la réa­li­sa­tion du ques­tion­naire et sa mise en ligne.

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