Les évolutions et les dérives du rapport environnement

Dossier : Entreprise et environnementMagazine N°587 Septembre 2003Par : Franca MORRONI, présidente de l’OCCES (Observatoire de la Certification et de la Communication environnementale et sociale) et directeur de projet auprès de Core Ratings

Les évolutions du rapport environnement

L’i­ni­tia­tive de la rédac­tion des rap­ports envi­ron­ne­ment a débu­té, durant les années quatre-vingt-dix, dans des indus­tries rela­ti­ve­ment pol­luantes (sec­teurs de la chi­mie et de la pétrochimie).

Le rap­port envi­ron­ne­ment, qui est né comme ins­tru­ment de com­mu­ni­ca­tion de groupe, met en exergue l’en­ga­ge­ment envi­ron­ne­men­tal de l’en­tre­prise et se concré­tise le plus sou­vent en une simple décla­ra­tion de prin­cipe, rare­ment tra­duite en objec­tifs spé­ci­fiques et véri­fiables dans le temps.

Dans les der­nières années, cette démarche s’est géné­ra­li­sée à d’autres sec­teurs d’ac­ti­vi­té engen­drant moins d’im­pacts sur l’en­vi­ron­ne­ment (grande dis­tri­bu­tion, tou­risme, etc.) et on a assis­té à un chan­ge­ment du conte­nu de ce docu­ment, qui n’est plus seule­ment fait de décla­ra­tions de prin­cipe pro­ve­nant du haut et dif­fu­sées vers le bas, mais, par un pro­ces­sus inverse, il se construit main­te­nant avec les résul­tats qui pro­viennent de la base et qui donnent sub­stance aux enga­ge­ments pris par le groupe. L’ac­crois­se­ment du nombre de ces docu­ments révèle en même temps leur insuf­fi­sance, car ils sont sou­vent incom­plets et incom­pré­hen­sibles pour le public, et ne per­mettent pas de com­pa­rer l’ac­ti­vi­té de la même entre­prise sur plu­sieurs années ou avec les entre­prises du même sec­teur d’activité.

Leurs limites sont d’au­tant plus tan­gibles lorsque l’on se trouve face à des docu­ments de mar­ke­ting, des­ti­nés à redo­rer l’i­mage de l’en­tre­prise, man­quant d’ob­jec­ti­vi­té, pré­sen­tant exclu­si­ve­ment des infor­ma­tions posi­tives et occul­tant les problèmes.

La dif­fi­cul­té pour cer­taines entre­prises de rédi­ger ces docu­ments, pou­vant por­ter atteinte à la confi­den­tia­li­té de leurs acti­vi­tés, et contrai­gnants du fait de l’o­bli­ga­tion d’a­mé­lio­rer leurs per­for­mances envi­ron­ne­men­tales, est alors évidente.

Actuel­le­ment une autre modi­fi­ca­tion plus impor­tante semble s’o­pé­rer, avec le rap­port envi­ron­ne­ment qui change de forme. À l’en­vi­ron­ne­ment, on ajoute la par­tie sociale et éco­no­mique, afin d’é­la­bo­rer un nou­veau docu­ment : le rap­port déve­lop­pe­ment durable.

Les différents outils disponibles

Aujourd’­hui, trois types de docu­ments sont publiés, cha­cun répon­dant à des exi­gences et à des attentes différentes

1) des rap­ports volon­taires (envi­ron­ne­ment ou déve­lop­pe­ment durable), au tra­vers des­quels l’en­tre­prise désire infor­mer le public, mais qui sont sou­vent uti­li­sés comme de purs ins­tru­ments de mar­ke­ting. Les cri­tères rete­nus concer­nant le conte­nu sont encore limités,
2) des docu­ments obli­ga­toires : décla­ra­tion envi­ron­ne­men­tale pour EMAS1 ou le bilan social. Les cri­tères sont pré­ci­sés et déve­lop­pés à l’é­chelle nationale,
3) des docu­ments obli­ga­toires impo­sés par la loi natio­nale ou régio­nale. Les cri­tères sont encore peu nombreux.

D’ailleurs, nous dis­po­sons en com­plé­ment des docu­ments de com­mu­ni­ca­tion qui ont une approche site, de docu­ments de com­mu­ni­ca­tion qui ont une approche pro­duit, tels que les décla­ra­tions envi­ron­ne­men­tales de type III (éco­pro­fil).

Une analyse des initiatives en cours et des indicateurs de suivi disponibles

Sou­vent, l’hé­té­ro­gé­néi­té des infor­ma­tions four­nies et des domaines cou­verts ne per­met pas d’ap­pré­cier les pro­grès réa­li­sés ni de les com­pa­rer avec les autres entreprises.

Les docu­ments obligatoires
Depuis 1998, aux Pays-Bas, une nou­velle loi a ins­tau­ré l’o­bli­ga­tion de publier un rap­port annuel envi­ron­ne­men­tal des­ti­né à la fois aux auto­ri­tés et au grand public. D’autres pays imposent uni­que­ment un rap­port des­ti­né à l’ad­mi­nis­tra­tion : le Dane­mark, pour les socié­tés cotées en Bourse qui pré­sentent un risque envi­ron­ne­men­tal et enfin la Nor­vège, pour toutes les entre­prises, quelles que soient leur taille et leur acti­vi­té. En France, la loi sur les Nou­velles régu­la­tions éco­no­miques fixe (art.116) l’o­bli­ga­tion pour les socié­tés fran­çaises cotées de rendre compte dans leur rap­port annuel de leur ges­tion sociale et envi­ron­ne­men­tale au tra­vers de leur acti­vi­té. Cette loi vise à favo­ri­ser l’in­té­gra­tion de l’en­vi­ron­ne­ment dans la stra­té­gie des entre­prises et à encou­ra­ger les action­naires, par leurs votes et leurs vœux au sein des assem­blées géné­rales et, plus géné­ra­le­ment, par les pres­sions qu’ils sont sus­cep­tibles d’exer­cer sur les direc­tions des entre­prises, à peser sur l’o­rien­ta­tion « socia­le­ment res­pon­sable » des inves­tis­se­ments de l’entreprise.

Il en a résul­té un scep­ti­cisme crois­sant envers ces ins­tru­ments de la part des « par­ties pre­nantes » (on désigne ain­si les publics poten­tiel­le­ment inté­res­sés par des infor­ma­tions en pro­ve­nance de l’en­tre­prise : clients, rive­rains, admi­nis­tra­tion, asso­cia­tions diverses, etc.), qui réclament une régle­men­ta­tion ou une standardisation.

Sur le plan inter­na­tio­nal, toute une série de lignes direc­trices a été éla­bo­rée depuis le début des années 1990 afin d’ai­der les entre­prises à rédi­ger leurs rap­ports envi­ron­ne­ment ou déve­lop­pe­ment durable.

The Public Envi­ron­men­tal Repor­ting Ini­tia­tive (PERI) en Amé­rique du Nord est l’un des plus inté­res­sants, avec, tou­jours pour le conti­nent amé­ri­cain, celui de Coa­li­tion for Envi­ron­men­tal­ly Res­pon­sible Eco­no­mies ( CERES ).

The World Indus­try Coun­cil for the Envi­ron­ment ( WICE , aujourd’­hui WBCSD) a éga­le­ment publié un guide pour le rap­port envi­ron­ne­ment en 1994.

Tous ces tra­vaux se résument aujourd’­hui dans deux ini­tia­tives, très inté­res­santes, qui tentent de nor­ma­li­ser ces instruments :

– le Gui­de­lines Repor­ting Ini­tia­tive (GRI),
– le tra­vail de l’I­SO pour éla­bo­rer la norme ISO 14 063, sur la com­mu­ni­ca­tion environnementale.

Le GRI

Le CERES, en s’ins­cri­vant dans la ten­dance actuelle d’é­la­bo­rer un repor­ting durable, a lan­cé en 1997 un pro­jet pour l’é­la­bo­ra­tion des lignes direc­trices pour un « repor­ting durable » inté­grant envi­ron­ne­ment, éthique et éco­no­mie : le Glo­bal Repor­ting Ini­tia­tive (GRI). Les lignes direc­trices du GRI sont consti­tuées de neuf parties :

1) l’en­ga­ge­ment de la direction,
2) le pro­fil de l’entreprise,
3) le résu­mé et les indi­ca­teurs clés. Les indi­ca­teurs de per­for­mance sont soit géné­raux (des­ti­nés à toutes les orga­ni­sa­tions), soit spé­ci­fiques (liés seule­ment à certaines),
4) la vision et la stratégie,
5) la poli­tique, l’or­ga­ni­sa­tion et le Sys­tème de mana­ge­ment envi­ron­ne­men­tal (SME),
6) la per­for­mance environnementale,
7) la per­for­mance économique,
8) la per­for­mance sociale,
9) la per­for­mance intégrée.

De nom­breuses orga­ni­sa­tions ont adhé­ré au pro­jet, telles que : WBCSD, New Eco­no­mic Foun­da­tion (NEF), Coun­cil on Eco­no­mic Prio­ri­ties (CEP), le Pro­gramme pour l’En­vi­ron­ne­ment des Nations unies (UNEP-IE) et Asso­cia­tion of Char­te­red Cer­ti­fied Accoun­tants (ACCA), et aujourd’­hui presque 200 entre­prises affirment suivre les lignes direc­trices du GRI.

Le projet de norme ISO 14 063

Cette norme rela­tive à la com­mu­ni­ca­tion envi­ron­ne­men­tale est éla­bo­rée par le Comi­té tech­nique ISO/TC207 Mana­ge­ment envi­ron­ne­men­tal, groupe de tra­vail 4 sur la Com­mu­ni­ca­tion envi­ron­ne­men­tale. La norme sera publiée en sep­tembre 2004. Un groupe de tra­vail fran­çais sur « la com­mu­ni­ca­tion envi­ron­ne­men­tale » a par ailleurs été créé au sein d’Af­nor. L’ob­jec­tif de la norme est d’é­la­bo­rer des lignes direc­trices sur les prin­cipes, la méthode, le pro­ces­sus et les exemples liés à la com­mu­ni­ca­tion envi­ron­ne­men­tale de l’organisation.

La norme sera appli­cable à toutes les orga­ni­sa­tions, indé­pen­dam­ment de leur taille, type, loca­li­sa­tion ou com­plexi­té, qu’elles aient mis en place ou non un SME. Elle suit la méthode « Plan-Do-Check-Act » (PDCA).

Par ailleurs, les entre­prises éprouvent régu­liè­re­ment des dif­fi­cul­tés pour pou­voir com­pa­rer leurs per­for­mances envi­ron­ne­men­tales ou sociales à des valeurs de réfé­rence (telles que les seuils impo­sés par la régle­men­ta­tion, l’é­vo­lu­tion des résul­tats au cours du temps, les sta­tis­tiques sec­to­rielles, etc.) car tout n’est pas régle­men­té et il existe peu de don­nées sectorielles.

Actuel­le­ment plu­sieurs orga­nismes ont des tra­vaux en cours sur les indi­ca­teurs de per­for­mance envi­ron­ne­men­tale dans le but de les har­mo­ni­ser : The Ame­ri­can Ins­ti­tute of Che­mi­cals Engi­neers, The World Resources Ins­ti­tutes, The World Busi­ness Coun­cil for Sus­tai­nable Deve­lop­ment (WBCSD) et le minis­tère bri­tan­nique de l’En­vi­ron­ne­ment, des Trans­ports et des Régions (DETR) qui a éla­bo­ré « Gui­de­lines for Com­pa­ny repor­ting on Green­house Gas Emissions ».

Ces lignes direc­trices contiennent des indi­ca­tions sur la façon de cal­cu­ler les émis­sions de gaz à effet de serre et les équi­va­lents CO2 à par­tir de trois sources : l’éner­gie consom­mée dans les locaux, les émis­sions dues aux moyens de trans­port et les émis­sions liées aux pro­cé­dés industriels.

Plu­sieurs types d’in­di­ca­teurs sont uti­li­sés au sein des docu­ments publiés.

  • Les indi­ca­teurs de management
    Les indi­ca­teurs les plus fré­quem­ment pré­sen­tés concernent les coûts envi­ron­ne­men­taux annuels, le nombre de plaintes reçues et le nombre de non-conformités.
  • Les indi­ca­teurs absolus
    L’u­ti­li­sa­tion de ce type d’in­di­ca­teurs au sein des docu­ments est très diverse : cer­taines entre­prises pré­sentent une série d’in­for­ma­tions très vaste, d’autres four­nissent beau­coup moins d’informations.
  • Les indi­ca­teurs de performance
    Les indi­ca­teurs rela­tifs rap­por­tés à un niveau d’ac­ti­vi­té (repré­sen­té par la pro­duc­tion, le nombre de tra­vailleurs ou le nombre d’heures de tra­vail) sont les plus fré­quents. Les plus uti­li­sés sont ceux rap­por­tés à l’u­ni­té de production.

Comment décider quel type de document de communication élaborer ?

Afin de déci­der de la forme à don­ner à sa com­mu­ni­ca­tion, l’en­tre­prise doit d’a­bord se poser le pro­blème de savoir à qui elle est destinée.

Tableau 1 Les publics ciblés et leurs attentes du point de vue envi­ron­ne­men­tal, social et économique
Les publics ciblés Les attentes
Les actionnaires – Les risques finan­ciers et les économies
 réalisables
– Les inves­tis­se­ments environnementaux
– Le mécénat
– La valeur de l’action
– La certification
– La sen­si­bi­li­sa­tion des sous-trai­tants, des
 fournisseurs
– La confron­ta­tion entre divers sites ou avec
 d’autres entre­prises du même sec­teur d’activité
Le per­son­nel et les syndicats – Le res­pect de l’environnement local
– La sécu­ri­té interne et externe : les accidents
– Les salaires et l’équité sociale
– Le degré d’im­pli­ca­tion du per­son­nel et la
 formation
– La sen­si­bi­li­sa­tion des sous-trai­tants, des
 fournisseurs
Les fournisseurs ‑La poli­tique de l’entreprise en matière
 envi­ron­ne­men­tale et sociale
– Le SME (Sys­tème de management
 envi­ron­ne­men­tal) et la sensibilisation
– La cer­ti­fi­ca­tion de système
Les clients,
les consommateurs
– Les risques envi­ron­ne­men­taux et sani­taires dus
 à l’ac­ti­vi­té et aux produits
– L’im­pact du cycle de vie du produit
– Le res­pect de la régle­men­ta­tion, litiges,
 amendes
– Le res­pect du droit du travail
– Les demandes d’in­for­ma­tion et les plaintes
– La cer­ti­fi­ca­tion de produit
– Le prix et l’offre de nou­veaux produits
Les auto­ri­tés (locales, régio­nales, nationales…) – Les risques et les impacts envi­ron­ne­men­taux et
 sani­taires dus à l’ac­ti­vi­té et aux produits
– La situa­tion régle­men­taire et les contrôles
– Les investissements
– Les taxes, redevances
– Les coûts externes dus à la pollution
– La com­mu­ni­ca­tion externe
– La certification
Les banques, les assureurs,
les investisseurs
– Les pro­blèmes légaux et les amendes
– Les investissements
– La sécu­ri­té interne et externe : les risques de
 pollution
– Les éco­no­mies réa­li­sables et les risques
 financiers
– La valeur de l’action
– La certification
Les rive­rains et les ONG – Les risques et les impacts envi­ron­ne­men­taux et
 sani­taires dus à l’ac­ti­vi­té et aux produits
– La méthode d’a­gré­ga­tion des informations
– La confron­ta­tion entre divers sites ou avec
 d’autres entre­prises du même sec­teur d’activité
– La situa­tion réglementaire
– Le res­pect des droits de l’homme et des traités
 internationaux
– Les actions déve­lop­pées pour mini­mi­ser l’impact
 sur l’environnement et la com­pa­rai­son des
 résul­tats dans le temps
– La trans­pa­rence et le dialogue
Les médias – Les risques et les impacts envi­ron­ne­men­taux et
 sani­taires dus à l’ac­ti­vi­té et aux produits
– Les enga­ge­ments pris
– Les pro­blèmes légaux
– Le rap­port avec la col­lec­ti­vi­té et les institutions

La dif­fi­cul­té de répondre à toutes les attentes est légi­time et les entre­prises devraient plu­tôt s’o­rien­ter vers un rap­port à « tiroirs », qui puisse être uti­li­sé, selon les requêtes, dans la même logique que la décla­ra­tion envi­ron­ne­men­tale dans le nou­veau règle­ment EMAS II.

Selon l’an­nexe III du nou­veau règle­ment EMAS :

« Les orga­ni­sa­tions peuvent sou­hai­ter tou­cher dif­fé­rents types de publics ou de par­ties inté­res­sées à tra­vers la com­mu­ni­ca­tion des infor­ma­tions géné­rées par leur sys­tème de mana­ge­ment envi­ron­ne­men­tal, et ne sélec­tion­ner à cet effet qu’une par­tie des infor­ma­tions de la décla­ra­tion envi­ron­ne­men­tale. Les infor­ma­tions envi­ron­ne­men­tales publiées par une orga­ni­sa­tion peuvent com­por­ter le logo EMAS à condi­tion d’a­voir été vali­dées par un véri­fi­ca­teur envi­ron­ne­men­tal comme étant :

1) pré­cises et non trompeuses ;
2) dûment étayées et vérifiables ;
3) per­ti­nentes et uti­li­sées dans un contexte approprié ;
4) repré­sen­ta­tives des résul­tats glo­baux de l’or­ga­ni­sa­tion en matière d’environnement ;
5) non sus­cep­tibles d’une inter­pré­ta­tion erronée ;
6) signi­fi­ca­tives par rap­port à l’im­pact envi­ron­ne­men­tal global ;
7) et à condi­tion qu’elles contiennent une réfé­rence à la der­nière décla­ra­tion envi­ron­ne­men­tale de l’or­ga­ni­sa­tion dont elles sont extraites
. »

La grille (voir tableau 1) pré­sente un essai d’in­di­vi­dua­li­sa­tion des dif­fé­rents publics ciblés par chaque cri­tère des lignes direc­trices. Il faut indi­vi­dua­li­ser quelques cibles, chaque cible étant inté­res­sée par des ques­tions dif­fé­rentes. Nous avons indi­vi­dua­li­sé huit cibles : les action­naires, le per­son­nel, les four­nis­seurs, les clients et consom­ma­teurs, les auto­ri­tés, les banques, les assu­reurs et inves­tis­seurs, les rive­rains et ONG, les médias, en essayant de mettre en évi­dence les attentes propres à chaque cible.

Le contenu du rapport développement durable

Si on décide d’é­la­bo­rer un rap­port déve­lop­pe­ment durable, son conte­nu devrait prendre en compte au moins les par­ties sui­vantes (voir tableau 2) :

  • les élé­ments essen­tiels concer­nant l’entreprise,
  • les impacts envi­ron­ne­men­taux et sociaux dus à l’activité,
  • la mesure des impacts et les indi­ca­teurs de performance :
    – en matière environnementale,
    – en matière sociale,
  • la poli­tique et la stratégie,
  • l’organisation,
  • la communication,
  • la certification.

Comment répondre aux questions les plus urgentes ?

Nous essaye­rons de répondre en par­ti­cu­lier aux ques­tions concer­nant le péri­mètre, la vali­da­tion du rap­port, la méthode de col­lecte et d’a­gré­ga­tion des infor­ma­tions et la mesure des impacts et les indi­ca­teurs de performance.

Le périmètre

En matière
environnementale

Tableau 2 Le conte­nu du rap­port déve­lop­pe­ment durable (résu­mé)
Thé­ma­tiques Cri­tères
Les élé­ments essen­tiels concer­nant l’entreprise
– Le titre et le sommaire
– Le périmètre
– Le cœur de l’activité
– Les publics ciblés
– Les don­nées finan­cières de base
– La durée
– L’ac­cès à l’information
– La vali­da­tion du rapport
Les impacts envi­ron­ne­men­taux et sociaux dus à l’activité
– La pré­sen­ta­tion des impacts
– La méthode d’agrégation
– La confrontation
– La situa­tion réglementaire
La mesure des impacts et les indi­ca­teurs de performance
En matière
environnementale
– La consom­ma­tion d’eau, éner­gé­tique et de
 matières premières
– Les rejets atmo­sphé­riques et aquifères
– Le sol et le sous-sol
– La quan­ti­té de déchets produits
– Les impacts à forte perception
– Les transports
– La sécurité
– Les contrôles
– L’impact du produit
En matière
sociale
– Struc­ture des effectifs
– Poli­tique d’emploi
– Employabilité/Gestion des compétences/Gestion
 des carrières
– Condi­tions de travail
– Dia­logue social
– Rémunération
– Cohé­sion sociale
– Communauté
La poli­tique et la stratégie
– L’engagement
– Les objec­tifs fixés et les délais
L’organisation
– Orga­ni­gramme et responsabilités
La com­mu­ni­ca­tion
– La com­mu­ni­ca­tion interne et externe
– Les par­ties pre­nantes individualisées
La cer­ti­fi­ca­tion
– La cer­ti­fi­ca­tion de sys­tèmes : ISO 9 000,
 ISO 14 001, SA 8 000, OHSAS 18 001, etc.
– La cer­ti­fi­ca­tion de produit

Il faut défi­nir le péri­mètre géo­gra­phique du rap­port, afin de bien com­prendre quelles sont les acti­vi­tés de l’en­tre­prise inté­grées dans le rap­port et celles qui en ont été exclues. L’en­jeu est fon­da­men­tal, si on pense aux pro­blèmes envi­ron­ne­men­taux des filières ou des sous-trai­tants, qui, sou­vent, ne sont pas pris en compte.

Pour les entre­prises pos­sé­dant plu­sieurs sites, nous envi­sa­geons plu­sieurs solutions :

1) rédac­tion d’un rap­port cou­vrant l’en­semble des sites,
2) plu­sieurs rap­ports selon la zone d’ac­ti­vi­té : Europe, Amé­riques, etc., (exemple : le rap­port d’Elf Ato­chem qui « affirme que le rap­port concerne pour l’es­sen­tiel les sites euro­péens et ne prend pas en compte la filiale amé­ri­caine, qui publie son rapport »),
3) une fiche pour chaque site, pour mieux mettre en évi­dence l’im­pact local. Une simple fiche d’une page pour­rait être inté­grée au rap­port groupe (exemple : le rap­port de Renault).

Au niveau du site, évi­dem­ment, il est néces­saire de se don­ner d’autres moyens : décla­ra­tion envi­ron­ne­men­tale, pla­quette de pré­sen­ta­tion, com­mis­sion de concertation.

La validation du rapport

La vali­da­tion du rap­port est uti­li­sée sur­tout par les entre­prises anglo-saxonnes. Elle désigne le pro­ces­sus de véri­fi­ca­tion des infor­ma­tions conte­nues dans un rap­port envi­ron­ne­ment par un tiers indé­pen­dant. L’o­pi­nion expri­mée per­met­tra de contrô­ler la cré­di­bi­li­té de la démarche adop­tée par l’en­tre­prise, la cohé­rence de son dis­cours avec ses actions, les méthodes de cal­cul uti­li­sées et les résul­tats publiés.

La mis­sion ne se situe cepen­dant pas encore dans un cadre normalisé.

La dif­fi­cul­té de ce type de vali­da­tion, qui est lais­sée à la dis­cré­tion de chaque entre­prise, concerne le péri­mètre de la vali­da­tion : cer­taines demandent la véri­fi­ca­tion des pro­cé­dures et des pra­tiques de col­lecte et de cal­cul rela­tives aux don­nées d’é­mis­sion envi­ron­ne­men­tales, d’autres des objec­tifs ou l’en­ga­ge­ment de l’or­ga­ni­sa­tion, d’autres encore des per­for­mances envi­ron­ne­men­tales, etc.

La méthode de collecte et d’agrégation des informations

Le pro­blème est de savoir com­ment sont cal­cu­lés cer­tains indi­ca­teurs four­nis, et com­ment sont col­lec­tées les infor­ma­tions et les don­nées : quelle est la méthode uti­li­sée ? Cette ques­tion concerne sur­tout les groupes ayant plu­sieurs sites, avec les incer­ti­tudes inhé­rentes aux mesures effectuées.

Les indi­ca­teurs d’im­pact et de per­for­mance sont un élé­ment fon­da­men­tal de syn­thèse, ayant l’ob­jec­tif de rendre les don­nées envi­ron­ne­men­tales com­pré­hen­sibles à un large public et com­pa­rables dans le temps.

La mesure des impacts et les indicateurs de performance

Avec l’ac­crois­se­ment de la demande d’in­for­ma­tions de la part des par­ties pre­nantes, l’en­tre­prise ne peut plus se limi­ter à l’é­non­cia­tion de prin­cipes ou de chartes en matière envi­ron­ne­men­tale, mais elle doit com­mu­ni­quer avec une pré­ci­sion et une objec­ti­vi­té crois­santes, en uti­li­sant des mesures et des indi­ca­teurs de per­for­mance crédibles.

À cette fin, sur cha­cun des cri­tères rete­nus dans les lignes direc­trices, il convien­dra de choi­sir une uni­té de mesure exploi­table (m3, l, t, dB, etc.) conforme au Sys­tème SI, afin de pré­sen­ter chaque année les mêmes ren­sei­gne­ments et per­mettre d’en obser­ver l’évolution.

L’exi­gence de mesure des per­for­mances envi­ron­ne­men­tales a engen­dré un inté­rêt impor­tant et a per­mis la réa­li­sa­tion de nom­breuses études de la part des ins­ti­tu­tions, centres de recherche, asso­cia­tions d’en­tre­prises, dont aujourd’­hui le point de réfé­rence est l’I­SO 14 031.

Les dérives possibles

Dans la phase actuelle, alors qu’au­cune uni­for­mi­sa­tion du conte­nu des rap­ports n’existe encore, les dérives pos­sibles sont nom­breuses et les lois éma­nées (comme la loi NRE en France), mal­gré leur conte­nu inno­vant, peuvent s’a­vé­rer dan­ge­reuses si elles ne sont pas sui­vies par un contrôle de leur mise en œuvre et de leur efficacité.

Selon la loi NRE, les presque mille entre­prises cotées en France devront inté­grer des infor­ma­tions envi­ron­ne­men­tales et sociales dans leur rap­port annuel. Que signi­fie cela exac­te­ment ? Quelles sont les dérives possibles ?

De fait, cer­taines entre­prises vont s’exé­cu­ter, mais avec des don­nées minimes, et sans jamais réa­li­ser un rap­port envi­ron­ne­ment ou déve­lop­pe­ment durable. L’en­ga­ge­ment volon­taire pour­rait alors être effa­cé par la contrainte légis­la­tive, alors que les deux ins­tru­ments devraient être com­plé­men­taires l’un de l’autre. Seul un contrôle de la part d’un orga­nisme indé­pen­dant pour­rait faire avan­cer les choses et cor­ri­ger la pre­mière année d’ap­pli­ca­tion de cette loi.

Même pro­blème pour les lignes direc­trices du GRI ou d’autre type : l’en­tre­prise qui dit les suivre ne sera jamais démen­tie, du fait qu’au­cun organe n’a été mis en place pour véri­fier ses dires.

L’im­por­tance de la com­mu­ni­ca­tion est désor­mais évi­dente, et seul un tra­vail com­mun de la part de toutes les par­ties inté­res­sées pour­rait faire pro­gres­ser les choses. Un tra­vail lié à la stan­dar­di­sa­tion des lignes direc­trices par sec­teurs d’ac­ti­vi­tés peut être la solu­tion. Le but pour l’en­tre­prise est, en pre­mier, de com­mu­ni­quer sur son acti­vi­té et sur le tra­vail réa­li­sé et à réa­li­ser afin d’être le plus trans­pa­rente pos­sible. En second, de pou­voir per­mettre aux par­ties inté­res­sées de com­pa­rer ses efforts et leurs impacts à ceux des autres entre­prises du même sec­teur d’activité.

Seule l’ob­ten­tion de ce der­nier objec­tif per­met­tra en effet de dis­tin­guer les bons élèves des mau­vais, et de pou­voir vrai­ment indi­vi­dua­li­ser les vraies entre­prises socia­le­ment responsables.

Biblio­gra­phie

► Mor­ro­ni Fran­ca. Pour l’é­la­bo­ra­tion d’un rap­port inté­grant envi­ron­ne­ment et éco­no­mie. Recom­man­da­tions à par­tir de l’a­na­lyse de 122 cas pra­tiques, Ademe – Les Amis de la Terre – Gaz de France – LVMH – Ciments Cal­cia – l’Ordre des experts-comp­tables – Éco­pass, avril 2001, 133 p.
► Mor­ro­ni Fran­ca. Éva­lua­tion des gains envi­ron­ne­men­taux liés à la cer­ti­fi­ca­tion envi­ron­ne­men­tale (EMAS et ISO 14 001) de sites de pro­duc­tion en France et en Ita­lie – Com­mis­sion euro­péenne – Les Amis de la Terre – Entre­prises pour l’En­vi­ron­ne­ment, juin 2000, 134 p.

Fran­ca Mor­ro­ni est éga­le­ment repré­sen­tante de la France à l’I­SO pour l’é­la­bo­ra­tion de la norme ISO 14 063 sur la com­mu­ni­ca­tion envi­ron­ne­men­tale, et membre du comi­té EMAS en France.
 
L’Observatoire de la Cer­ti­fi­ca­tion et de la Com­mu­ni­ca­tion envi­ron­ne­men­tale et sociale : www.occes.asso.fr

1. EMAS : Eco-Mana­ge­ment and Audit Scheme.

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