Les dirigeantes de demain

Dossier : Le quarantième anniversaire des polytechniciennesMagazine N°677 Septembre 2012
Par Anne-Béatrice BRÉCHEMIER (92)
Extraits d’une pré­sen­ta­tion réa­li­sée par Anne-Béa­trice Bré­che­mier (92) à la récente AG de l’AX.

Extraits d’une pré­sen­ta­tion réa­li­sée par Anne-Béa­trice Bré­che­mier (92) à la récente AG de l’AX.

L’étude « Quels diri­geants, quelles diri­geantes pour demain ? » ques­tionne les diplô­més de dix grandes écoles (Cen­trale Paris, l’Ena, l’ESCP Europe, l’Essec, HEC, l’INSEAD, Mines Paris­Tech, l’X, Ponts Paris­Tech et Scien­ces­po Paris), des diri­geants et des entre­pre­neurs sur trois points clés : les enjeux les plus impor­tants pour les diri­geants de demain ; leur vision de l’accès au pou­voir et de son exer­cice, les qua­li­tés qu’il fau­dra pos­sé­der demain pour répondre aux défis ; leurs pro­po­si­tions d’actions concrètes.

REPÈRES
GEF, « Grandes Écoles au fémi­nin », qui regroupe les asso­cia­tions de diplô­més de dix grandes écoles fran­çaises, s’est don­né pour voca­tion depuis sa créa­tion d’être un obser­va­toire de l’évolution des par­cours des diplô­més de ses écoles, un acteur qui fait bou­ger les lignes sur le front de la moder­ni­sa­tion des entre­prises et des admi­nis­tra­tions ; et enfin un réseau de réflexion, de témoi­gnages et de par­tage des « meilleures pratiques ».

Nouveaux enjeux

Les nou­veaux enjeux de la socié­té civile reposent sur plu­sieurs para­doxes. En pre­mier lieu, la mon­tée de l’autonomie mais la baisse des prises de risques : si 65% des diplô­més se sentent prêts à entre­prendre, ils ne sont plus que 16% à accep­ter de prendre des risques impor­tants pour arri­ver à leurs fins, hommes et femmes confon­dus. Effet de la crise, réa­lisme des jeunes géné­ra­tions ? En même temps, la dic­ta­ture de l’immédiat s’accompagne d’une demande crois­sante de sens, valeur sou­vent consi­dé­rée comme fémi­nine : notre socié­té actuelle aurait besoin d’un but com­mun auquel il vau­drait la peine de se consacrer.

Les diri­geantes expriment la dif­fi­cul­té de gérer les contra­dic­tions entre objec­tifs et moyens

Cepen­dant, les diplô­més iden­ti­fient deux défis majeurs : le pilo­tage du chan­ge­ment per­ma­nent et la ges­tion des contra­dic­tions. La néces­si­té de réin­ven­ter en per­ma­nence son busi­ness model est citée en pre­mier lieu par les hommes comme par les femmes. Les femmes diri­geantes expriment davan­tage la dif­fi­cul­té de gérer les contra­dic­tions entre objec­tifs et moyens et celles de plus de 35 ans sont plus sen­sibles à la dif­fi­cul­té géné­rée par des orga­ni­sa­tions complexes.

L’ambition, mais pas à n’importe quel prix

Satis­faites de leur par­cours, les femmes diplô­mées le sont autant que les hommes. 74% d’entre elles pensent pou­voir accé­der à des res­pon­sa­bi­li­tés supé­rieures, et 40% sont prêtes à quit­ter leur entre­prise pour pro­gres­ser dans leur car­rière. Deux freins existent cepen­dant : main­te­nir un bon équi­libre entre acti­vi­té pro­fes­sion­nelle et vie pri­vée (70 % des réponses), et devoir mettre en oeuvre des déci­sions que l’on n’approuve pas nécessairement.

Faire confiance ?

Les diplô­més font plu­tôt confiance au diri­geant de leur entre­prise (68 %). En revanche, les femmes de plus de 35 ans accordent moins leur confiance (61 %).

D’une manière géné­rale, hommes et femmes doutent de sa capa­ci­té à gérer le long terme et à inno­ver. Qua­li­té qui, au contraire, est atten­due comme impor­tante chez le diri­geant de demain. Et, comme l’ensemble des Fran­çais, les diplô­més sont cri­tiques envers cer­tains modes d’exercice du pou­voir : on reproche aux diri­geants d’avoir per­du le sens du réel, de trop se coop­ter entre eux, de per­pé­tuer un sys­tème « toxique » où pré­do­mine la connivence.

Regards et attentes

Le diri­geant de demain est le reflet inver­sé du diri­geant actuel

Les réseaux sont un fac­teur clé de l’accession au pou­voir. Les femmes en sont encore plus conscientes, ou plus per­sua­dées que les hommes (80 % vs 73 % des hommes). Elles sont plus lucides sur la néces­si­té de faire des com­pro­mis avec la vie pri­vée (41% vs 32%). Dans les faits, le pro­fil moyen du mana­ger est mar­qué : le res­pon­sable hié­rar­chique est dans 81% des cas un homme, dont 53 % sortent eux-mêmes d’une grande école fran­çaise. L’exercice du pou­voir est un sujet sen­sible : entre­te­nir un réseau rela­tion­nel est cité à 54 % comme la pre­mière qua­li­té pour éva­luer la per­for­mance d’un diri­geant. En revanche, la créa­ti­vi­té est la der­nière des qua­li­tés réel­le­ment prises en compte (3 %). Sur­prise, les qua­li­tés atten­dues pour exer­cer le pou­voir sont plu­tôt celles-ci : pré­ser­ver l’intérêt à long terme de l’entreprise, savoir moti­ver, être vision­naire (61 %).

Le diri­geant idéal est le reflet inver­sé du diri­geant actuel. Ses qua­li­tés atten­dues : savoir pilo­ter à long terme, savoir moti­ver et mana­ger ses col­la­bo­ra­teurs. Ses « qua­li­tés » réelles, ou leur per­cep­tion : entre­te­nir un effi­cace réseau rela­tion­nel, mais aus­si savoir séduire, savoir manoeu­vrer, gérer l’ambiguïté. Et même savoir être dur pour atteindre ses objec­tifs (44 %).

Accélérer la mixité

Por­trait du diri­geant idéal
Il est muni de qua­li­tés plu­rielles, à l’image de Shi­va avec ses mul­tiples bras :
1. savoir pré­ser­ver le long terme ;
2. savoir moti­ver, mana­ger ses collaborateurs ;
3. être visionnaire ;
4. savoir tran­cher, prendre des décisions ;
5. avoir un com­por­te­ment exem­plaire en interne comme en externe ;
6. savoir bien s’entourer ;
7. savoir créer les condi­tions de l’innovation ;
8. avoir le sens du busi­ness, la capa­ci­té à sai­sir des opportunités ;
9. savoir pilo­ter des chan­ge­ments majeurs ;
10. connaître les pro­duits, le terrain.

Dans la plu­part des entre­prises, on prend pro­gres­si­ve­ment conscience de l’importance d’accélérer la mixi­té aux postes clés : les femmes y sont très favo­rables pour les postes de top mana­ge­ment (88 % contre 62% des hommes), tan­dis que les jeunes hommes se montrent plus cir­cons­pects : la guerre des places au som­met est à prendre en compte.

Cepen­dant, les hommes, sur­tout de moins de 35 ans, sou­haitent comme les femmes des orga­ni­sa­tions favo­rables à la paren­ta­li­té. En défi­ni­tive, les diplô­més sou­haitent un chan­ge­ment pro­fond dans le mode d’exercice du pou­voir : des modes d’accession au pou­voir (par les réseaux) ont conduit à un clo­nage des diri­geants per­çu comme nui­sible. Sur ce sujet, les hommes et les femmes ont la même lec­ture des enjeux et des évo­lu­tions néces­saires. Avec plus de valeurs éthiques et humaines, diri­geants et diri­geantes de demain devront mobi­li­ser des qua­li­tés mul­tiples et nou­velles. Davan­tage de mixi­té aux postes de diri­geants fera chan­ger les entre­prises dans le bon sens.

PRENDRE DES RESPONSABILITÉS HOMMES FEMMES
Être satis­fait de son parcours 89% 89%
Pense pou­voir accé­der à des res­pon­sa­bi­li­tés supérieures 68% 74%
Est prêt à quit­ter son entre­prise pour progresser 84% 40%
TRAVAIL ET VIE PRIVÉE HOMMES FEMMES
Je plains ceux pour qui le tra­vail est le centre de vie 70% 73%
Ma vie pri­vée passe avant tout 86% 69%
CONFIANCE ENVERS LE DIRIGEANT* OUI PLUTÔT OUI
Accordent leur confiance 50% 18%
Pensent qu’il sait expli­quer ses décisions 45% 17%
Pensent qu’il favo­rise l’innovation 34% 13%
Pensent que les diri­geants se cooptent entre eux 46% 37%
LES QUALITÉS DU DIRIGEANT* RECONNUES ATTENDUES
Savoir pilo­ter à long terme 6% 61%
Savoir moti­ver ses collaborateurs 15% 51%
Savoir tran­cher 25% 45%
Sai­sir des opportunités 39% 27%
Savoir séduire 41% 4%
* Avis des femmes de moins de 35 ans.
ACCÉLÉRER LA MIXITÉ HOMMES FEMMES
Prio­ri­té n° 1 pour les postes de top mana­ge­ment 62% 88%
Ne chan­ge­ra rien aux qua­li­tés et défauts des managers - 44%
MOYENS D’ACCÉDER AU POUVOIR HOMMES FEMMES
Effi­ca­ci­té du réseau 73% 80%
Le hasard ou la chance 34% 28%

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