Les décideurs publics français face au défi méditerranéen

Dossier : L’administrationMagazine N°682 Février 2013
Par Antoine-Tristan MOCILNIKAR (86)

Des enjeux politiques, économiques et sociaux

Les pays du pour­tour de la Médi­ter­ra­née et l’Union euro­péenne ras­semblent près de 800 mil­lions de per­sonnes et 33% du PIB mondial.

Peu d’eau douce
L’eau douce (sources natu­relles, pluies…) est rare : envi­ron 3 500m3 par habi­tant pour la moyenne des pays de la rive nord et moins que 1 000m3 par habi­tant pour la rive sud et est (en dehors de la Tur­quie) contre une moyenne mon­diale de 6 800m3 par habi­tant. Les pays médi­ter­ra­néens dis­posent seule­ment de 1% des res­sources en eau douce du globe.

Les enjeux de cette région sont non seule­ment de nature poli­tique, mais les ques­tions éco­no­miques et sociales sont éga­le­ment cri­tiques. L’écart de PIB varie de 1 à 10 entre le nord de la Médi­ter­ra­née et le Sud. Cet écart consi­dé­rable de niveau de vie entre les deux rives sus­cite des flux de popu­la­tions et des attentes.

Alors que les États-Unis réa­lisent 20% de leurs inves­tis­se­ments en Amé­rique latine et que le Japon le fait à hau­teur de 25 % dans sa péri­phé­rie directe, l’Europe ne mobi­lise que 2% de ses inves­tis­se­ments dans son Sud. Les rela­tions éco­no­miques régio­nales de la zone sont limitées.

Cer­tains voient là une rai­son de perte de com­pé­ti­ti­vi­té de la zone et un fac­teur d’accentuation des ten­sions sociales et des dyna­miques de migration.

REPÈRES
Le bas­sin médi­ter­ra­néen regrou­pait 460 mil­lions d’habitants en 2009, et devrait en comp­ter 520 mil­lions à l’horizon 2025, dont 350 mil­lions dans les pays du Sud et de l’Est. Mal­gré la baisse du taux de fécon­di­té enre­gis­trée dans la plu­part des pays, le ralen­tis­se­ment de la crois­sance démo­gra­phique ne se fera sen­tir plei­ne­ment qu’après 2030 voire 2040. Ain­si la part des 25–64 ans devrait pas­ser de 38 % en 2000 à plus de 50 % en 2030. Il fau­dra créer 40 mil­lions d’emplois dans les quinze pro­chaines années pour main­te­nir le taux de chô­mage au taux actuel. Il fau­dra éga­le­ment construire puisque l’on attend 80 mil­lions d’urbains en plus dans les vingt années qui viennent.

Richesse environnementale et culturelle

Par ailleurs, la Médi­ter­ra­née repré­sente dans ses pay­sages et tra­di­tions façon­nés par l’homme depuis des mil­lé­naires une iden­ti­té cultu­relle unique en son genre.

L’écart de PIB varie de 1 à 10 entre le nord de la Médi­ter­ra­née et le Sud

Elle dis­pose d’un des envi­ron­ne­ments les plus riches au monde avec 10 % des espèces connues de végé­taux supé­rieurs, 18% des espèces ani­males macro­sco­piques et 7% des espèces marines, alors qu’elle ne repré­sente que 1 % de la sur­face des mers et océans. 60 % des espèces végé­tales sont uniques à la Médi­ter­ra­née et 30 % de la faune est endémique.

Elle est donc attrac­tive et plus de 30 % du tou­risme inter­na­tio­nal s’y concentre, ce qui per­met de géné­rer pour 200 mil­liards de dol­lars de recettes. Croisent par ses eaux 30 % du fret mari­time et 25 % du tra­fic des hydro­car­bures. La pêche y est intense. 63% des espèces de pois­sons et 60% des mam­mi­fères marins en Médi­ter­ra­née sont menacés.

Le tiers de la popu­la­tion médi­ter­ra­néenne se masse dans les régions côtières.

Premières coopérations

En Médi­ter­ra­née, à l’issue de la Deuxième Guerre mon­diale et après la déco­lo­ni­sa­tion, c’est dans le domaine tech­nique qu’une pre­mière impul­sion s’est créée pour construire des rela­tions mul­ti­la­té­rales. La Com­mis­sion géné­rale des pêches pour la Médi­ter­ra­née (CGPM) a été créée en 1949 avec comme objec­tifs le déve­lop­pe­ment, la conser­va­tion et la ges­tion des res­sources marines vivantes, ain­si que la pro­mo­tion de pro­jets coopé­ra­tifs de formation.

À l’initiative conjointe de l’OCDE et du Conseil de l’Europe, le Centre inter­na­tio­nal de hautes études agro­no­miques médi­ter­ra­néennes a été créé par un accord entre les gou­ver­ne­ments en 1962 et com­porte actuel­le­ment treize rive­rains de la Médi­ter­ra­née. Il a pour mis­sion de « don­ner un ensei­gne­ment com­plé­men­taire tant éco­no­mique que tech­nique et de déve­lop­per l’esprit de coopé­ra­tion inter­na­tio­nale par­mi les cadres de l’agriculture des pays méditerranéens ».

Déve­lop­pe­ment durable
En 1976, 16 pays médi­ter­ra­néens et la Com­mu­nau­té euro­péenne ont adop­té la Conven­tion pour la pro­tec­tion de la mer Médi­ter­ra­née contre la pol­lu­tion (la Conven­tion de Bar­ce­lone) qui est rebap­ti­sée, en 1995, Conven­tion pour la pro­tec­tion du milieu marin et du lit­to­ral de la Méditerranée.
Ce plan, qui fut une pre­mière, engage les signa­taires à pro­té­ger l’environnement marin et côtier de la Médi­ter­ra­née tout en encou­ra­geant des plans régio­naux et natio­naux visant le déve­lop­pe­ment durable.
Un long sommeil
Mis en appli­ca­tion en 1990, le Dia­logue 5+5 a d’abord som­bré dans un long som­meil, à cause notam­ment de la crise algé­rienne et de l’embargo onu­sien impo­sé à la Libye entre 1992 et 1999 suite à l’affaire Lockerbie.
En 2001, le pro­ces­sus redé­marre et voit un pre­mier som­met de chefs d’État et de gou­ver­ne­ment se tenir en 2003 à Tunis.
En octobre 2012, le 2e Som­met des chefs d’État et de gou­ver­ne­ment consti­tue une relance impor­tante de la dyna­mique poli­tique en Médi­ter­ra­née suite aux Prin­temps arabes.

Plus de 12 nouvelles institutions

Plus récem­ment, une nou­velle série d’institutions tech­niques a vu le jour :

Pro­té­ger l’environnement marin et côtier et favo­ri­ser le déve­lop­pe­ment durable

Réseau médi­ter­ra­néen des orga­nismes de bas­sin, Centre régio­nal pour les éner­gies renou­ve­lables et l’efficacité éner­gé­tique basé au Caire, Asso­cia­tion des régu­la­teurs médi­ter­ra­néens de l’énergie, Asso­cia­tion médi­ter­ra­néenne des agences natio­nales de maî­trise de l’énergie, Obser­va­toire médi­ter­ra­néen de l’énergie, Asso­cia­tion des ges­tion­naires des réseaux élec­triques médi­ter­ra­néens, Centre de Mar­seille pour l’intégration en Médi­ter­ra­née, Centre de coor­di­na­tion pour la lutte anti­drogue en Médi­ter­ra­née à Tou­lon, Centre régio­nal d’alerte aux tsu­na­mis en Atlan­tique nord-est et Médi­ter­ra­née occi­den­tale, Réseau des aires marines pro­té­gées, Asso­cia­tion des parcs natu­rels et des aires pro­té­gées en Médi­ter­ra­née ain­si que l’Agence des villes et ter­ri­toires durables méditerranéens.

Premières instances de dialogue politique

Démar­rant dans les années 1970, des ini­tia­tives plus poli­tiques ont vu le jour. À l’initiative fran­çaise, en 1973, peu après la guerre israé­lo-arabe et l’embargo pétro­lier, est lan­cé le Dia­logue euro-arabe entre l’Union euro­péenne et la Ligue arabe qui a eu de la sub­stance essen­tiel­le­ment jusqu’en 1979 puis dans la décen­nie 1990.

Le Secré­ta­riat de la Ligue arabe et la Com­mis­sion euro­péenne ont mul­ti­plié les efforts afin de relan­cer le dia­logue. Malte a relan­cé l’idée et a accueilli une Confé­rence pays arabes-Union euro­péenne, en février 2008.

Dialogue 5+5

Déman­tè­le­ment des tarifs douaniers
Des accords d’association ont été signés entre l’Union euro­péenne et cha­cun des autres membres. Dans le domaine éco­no­mique, ils sup­priment les bar­rières doua­nières de l’Union euro­péenne sur les pro­duits manu­fac­tu­rés expor­tés par ses voi­sins médi­ter­ra­néens et ils pré­voient le déman­tè­le­ment pro­gres­sif (sur douze ans) des tarifs doua­niers appli­qués aux pro­duits manu­fac­tu­rés de l’Union dans ces pays.
Pour ce qui est des rela­tions Sud-Sud, l’accord d’Agadir de 2004 pose les bases d’une zone de libre-échange réunis­sant le Maroc, la Tuni­sie, l’Égypte et la Jor­da­nie. La Tur­quie a éga­le­ment signé des accords de libre-échange avec le Maroc, la Tuni­sie et l’autorité palestinienne

Espace de dia­logue poli­tique infor­mel entre les pays de la Médi­ter­ra­née occi­den­tale, le Dia­logue 5 + 5 ou Forum 5 + 5 a été créé sur une idée pro­po­sée par le pré­sident Fran­çois Mit­ter­rand, en 1983. Le pro­jet a pris corps suite à la créa­tion de l’Unité du Magh­reb arabe en 1989. Ce Forum regroupe la Mau­ri­ta­nie, le Maroc, l’Algérie, la Tuni­sie et la Libye, d’un côté, et le Por­tu­gal, l’Espagne, la France, l’Italie et Malte, de l’autre.

Le cadre ins­ti­tu­tion­nel s’élargit aux par­le­men­taires, aux ministres de l’Intérieur, de la Défense, des Trans­ports, de l’Environnement et du Tou­risme. Des pro­jets se déve­loppent dans tous ces domaines avec comme infra­struc­ture emblé­ma­tique le bou­clage auto­rou­tier d’Agadir à Tunis, déci­dé en 2012 et en cours de construc­tion. Le domaine du trans­port est par­ti­cu­liè­re­ment dyna­mique avec la mise en place du Centre d’études des trans­ports pour la Médi­ter­ra­née occidentale.

Le 2e Som­met des chefs d’État et de gou­ver­ne­ment acte l’articulation du Dia­logue 5 + 5 avec l’Union pour la Médi­ter­ra­née et iden­ti­fie comme nou­veaux domaines de dia­logue et de coopé­ra­tion les domaines prio­ri­taires tels que l’emploi, l’investissement, le com­merce, l’agriculture et l’énergie.

L’ambition euro-méditerranéenne

Plus éten­du, le Pro­ces­sus euro-médi­ter­ra­néen a été créé en 1995 à Bar­ce­lone, sous impul­sion fran­çaise, avec l’Union euro­péenne (UE) et dix autres États rive­rains de la mer Médi­ter­ra­née (Algé­rie, Auto­ri­té pales­ti­nienne, Égypte, Israël, Jor­da­nie, Liban, Maroc, Syrie, Tuni­sie et Tur­quie). Son but est de conci­lier le besoin de sécu­ri­té de l’Europe et les besoins de déve­lop­pe­ment des pays du sud et de l’est de la Médi­ter­ra­née. Le Pro­ces­sus plu­tôt ambi­tieux s’est don­né pour objec­tif de fon­der un espace de sta­bi­li­té et de paix res­pec­tueux des droits de l’homme (volet poli­tique), de déve­lop­per les échanges cultu­rels pour favo­ri­ser le dia­logue et la com­pré­hen­sion mutuelle (volet cultu­rel), et de pro­mou­voir les rela­tions éco­no­miques et finan­cières, au tra­vers notam­ment de la mise en place d’une zone de libreé­change (volet économique).

Orga­ni­ser des acti­vi­tés cultu­relles et pro­mou­voir les échanges

D’autres pro­grès ont été ren­dus pos­sibles. Dans le domaine finan­cier, des ins­tru­ments impor­tants ont été mis en place, comme le pro­gramme MEDA par lequel l’Union euro­péenne apporte une aide finan­cière et tech­nique à ses par­te­naires médi­ter­ra­néens pour favo­ri­ser les pro­jets de déve­lop­pe­ment éco­no­mique et social. L’Union euro­péenne a sou­te­nu le Pro­ces­sus de Bar­ce­lone à hau­teur de 9 mil­liards d’euros entre 1995 et 2006. En 2007, MEDA a été rem­pla­cé par l’Instrument euro­péen de voi­si­nage et de partenariat.

Par ailleurs, une Faci­li­té euro-médi­ter­ra­néenne d’investissement et de par­te­na­riat (FEMIP) a été créée en 2002. Finan­cée par la Banque euro­péenne d’investissement et l’Union euro­péenne, la FEMIP vise à déve­lop­per l’activité éco­no­mique du sec­teur pri­vé et à faci­li­ter l’accès des PME au finan­ce­ment au tra­vers de prêts et de subventions.

Dans les domaines cultu­rel et édu­ca­tif, une ins­ti­tu­tion est créée. La Fon­da­tion euro-médi­ter­ra­néenne Anna Lindh pour le dia­logue entre les cultures a été inau­gu­rée en juin 2004 à Alexan­drie. Elle encou­rage le dia­logue cultu­rel entre le nord et le sud de la Médi­ter­ra­née, orga­nise des acti­vi­tés cultu­relles et pro­meut les échanges, la coopé­ra­tion et la mobi­li­té des personnes.

De nouvelles ambitions

L’Union pour la Médi­ter­ra­née, sur une idée fran­çaise et une ini­tia­tive fran­co-égyp­tienne, est fon­dée en 2008 par 43 pays et l’Union euro­péenne. La Ligue arabe est invi­tée aux réunions de l’Union. L’Union s’appuie sur l’acquis du Pro­ces­sus de Bar­ce­lone, l’englobant tota­le­ment, et per­met ain­si de rehaus­ser les ambi­tions méditerranéennes.

Des réa­li­sa­tions concrètes
Par­mi les opé­ra­tions ini­tiées, on peut citer l’usine de des­sa­le­ment d’eau pour la bande de Gaza, 51 pro­jets concer­nant la dépol­lu­tion avec un finan­ce­ment sécu­ri­sé à hau­teur de 4,2 Md€, la cen­trale ther­mo­so­laire de 150 MW de Ouar­za­zate, le pre­mier tron­çon de LGV (Ligne grande vitesse) entre Rabat et Tan­ger, le hub fer­ro­viaire moyen-orien­tal en Jor­da­nie, le finan­ce­ment de 10 à 15 quar­tiers durables pour un mon­tant de 1 mil­liard d’euros et qui concer­ne­ra 100 000 à 200 000 habi­tants ; le cap­tage de résur­gences d’eau douce en mer (avec des pro­jets pilotes à l’étude en Espagne, au Liban, au Maroc et une uni­té opé­ra­tion­nelle en Grèce).

La dyna­mique poli­tique se déve­loppe certes moins qu’espérée mais des ins­tances repré­sen­ta­tives agissent au sein de l’Union pour la Médi­ter­ra­née comme l’Assemblée par­le­men­taire de l’Union pour la Médi­ter­ra­née (APUPM), l’Assemblée régio­nale et locale euro-médi­ter­ra­néenne (ARLEM), l’Assemblée des conseils éco­no­miques et sociaux et ins­ti­tu­tions simi­laires de l’Union pour la Médi­ter­ra­née et le Forum de la socié­té civile euro-méditerranéenne.

D’un autre côté, le volet pro­jets a pris une dimen­sion impor­tante. 273 pro­jets ont été rete­nus dans le cadre des réunions inter­na­tio­nales offi­cielles orga­ni­sées pour un besoin d’investissement total de 41 Md€.

La Com­mis­sion euro­péenne mobi­lise 80,5 M€ d’assistance tech­nique pour ces pro­jets et dyna­miques et au total 214 mil­lions d’euros sur la période 2007–2013 lorsque l’on y ajoute les pro­jets de coopé­ra­tions concer­nant les col­lec­ti­vi­tés locales. 84 pro­jets sont très avan­cés dans cette liste de 273 pro­jets (51 dans la dépol­lu­tion, 25 dans le domaine des éner­gies renou­ve­lables et 8 dans les trans­ports) pour un inves­tis­se­ment de 7,5 Md€. 207 pro­jets sup­plé­men­taires ont été identifiés.

Le pari de la démocratie

Une Médi­ter­ra­née des projets
La France déve­loppe, avec l’engagement de l’Union euro­péenne, une Médi­ter­ra­née des pro­jets. Elle affiche clai­re­ment la prio­ri­té « pro­jet » de l’Union pour la Médi­ter­ra­née, en cohé­rence avec la Poli­tique euro­péenne de voi­si­nage et son secré­ta­riat pen­sé et recon­nu comme un incu­ba­teur de pro­jets de déve­lop­pe­ment pari­taire et par­te­na­rial. Le Par­te­na­riat de Deau­ville peut nous per­mettre d’accompagner au mieux le déve­lop­pe­ment des pays en tran­si­tion politique.
La France accorde une atten­tion toute par­ti­cu­lière à la coopé­ra­tion avec les pays du Magh­reb. Fina­le­ment, la façade mari­time a voca­tion à déve­lop­per un lien très direct avec nos par­te­naires médi­ter­ra­néens. Mar­seille Métro­pole en consti­tue un symbole.

Suite aux Prin­temps arabes a été mis en place, spé­ci­fi­que­ment, le « Par­te­na­riat de Deau­ville », lan­cé le 27 mai 2011 dans le cadre de la pré­si­dence fran­çaise du G8. Il est des­ti­né à mobi­li­ser le plus lar­ge­ment pos­sible la com­mu­nau­té inter­na­tio­nale en ras­sem­blant les pays du G8, cer­tains pays tiers contri­bu­teurs (Tur­quie, Ara­bie Saou­dite, Émi­rats arabes unis, Qatar, Koweït), ins­ti­tu­tions finan­cières inter­na­tio­nales et orga­ni­sa­tions régio­nales au pro­fit des « pays enga­gés dans des pro­ces­sus de tran­si­tion ou de réforme cré­dibles » (Tuni­sie, Égypte, Libye, Maroc et Jordanie).

L’Union pour la Médi­ter­ra­née est par­tie pre­nante du Par­te­na­riat de Deau­ville. Les sec­teurs prio­ri­taires sont le déve­lop­pe­ment du sec­teur pri­vé, le déve­lop­pe­ment des PME, la créa­tion d’emplois ain­si que le déve­lop­pe­ment de pro­jets d’infrastructures.

Dans ce contexte nou­veau que connaît la Médi­ter­ra­née, la France regarde avec confiance les chan­ge­ments dans le monde arabe car elle est convain­cue qu’il est tou­jours pré­fé­rable de faire le pari de la démo­cra­tie. Il y a des lignes qui bougent et des dic­ta­teurs qui tombent. Il y a la vita­li­té des peuples, leur aspi­ra­tion démo­cra­tique, les exi­gences d’une bonne gou­ver­nance et la capa­ci­té d’innovation que trouvent tou­jours les êtres humains.

La France regarde avec confiance les chan­ge­ments dans le monde arabe, mais avec lucidité

En cela, le monde évo­lue dans un sens qui est celui du pro­grès. Avec confiance, mais avec luci­di­té, car nous n’ignorons pas les défis du pré­sent, du proche ave­nir et du long terme. Il n’est pas en notre pou­voir de trans­for­mer méca­ni­que­ment les révo­lu­tions en suc­cès et nous n’avons pas à nous ingé­rer dans la vie poli­tique d’États sou­ve­rains. C’est tout l’enjeu des Prin­temps arabes, dès lors que les for­ma­tions poli­tiques qui se réclament de l’islam s’engagent à garan­tir les liber­tés, notam­ment celles des femmes, à res­pec­ter l’alternance, à pro­té­ger les mino­ri­tés, qu’elles soient cultu­relles ou religieuses.

Il leur appar­tient, à ces pays qui font œuvre de tran­si­tion, d’en faire la démons­tra­tion et à nous d’encourager le mou­ve­ment, sans défiance, mais avec vigilance.

Commentaire

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Alain CHAUDRON (70)répondre
22 mars 2013 à 5 h 53 min

Les forêts méditerranéennes :

En plein accord avec Antoine-Tris­tan MOCILNIKAR, Alain CHAUDRON (70) pro­pose le com­plé­ment sui­vant sur le sujet sujet.

Les forêts méditerranéennes :

Un siècle de coopé­ra­tion au ser­vice du déve­lop­pe­ment durable des territoires


Mocil­ni­kar nous rap­pelle les richesses envi­ron­ne­men­tale et cultu­relle de la Médi­ter­ra­née et ses pay­sages façon­nés par l’homme depuis des mil­lé­naires. Les forêts y tiennent une place toute par­ti­cu­lière : qu’il me soit donc per­mis d’apporter quelques com­plé­ments sur ce point.


Com­po­sante impor­tante des ter­ri­toires, les forêts et autres espaces boi­sés médi­ter­ra­néens couvrent 75 mil­lions d’hectares. Outre leur simple pré­sence phy­sique, sou­vent évo­quée pour ce qui est d’un décor appré­cié, ils contri­buent de façon signi­fi­ca­tive au déve­lop­pe­ment rural, à la réduc­tion de la pau­vre­té et à la sécu­ri­té ali­men­taire des popu­la­tions riveraines.


Ils sont à la fois source de bois, de liège, d’énergie, de nour­ri­ture, de reve­nus et de mul­tiples autres biens et ser­vices envi­ron­ne­men­taux : pré­ser­va­tion de la diver­si­té de la flore et de la faune, conser­va­tion des eaux et des sols, four­ni­ture d’espaces récréa­tifs, poten­tiel non négli­geable de sto­ckage de car­bone. Sans eux, de nom­breux autres sec­teurs éco­no­miques de la région (agri­cul­ture et ali­men­ta­tion, conser­va­tion des eaux et des sols, four­ni­ture d’eau potable, tou­risme, éner­gie) seraient en péril.


Du fait de la grande diver­si­té des bio­cli­mats locaux, des alti­tudes et des sols, ain­si que d’une his­toire com­plexe et mou­ve­men­tée (his­toire du cli­mat au qua­ter­naire, puis his­toire du déve­lop­pe­ment pas­to­ral et agraire depuis dix mil­lé­naires), ils sont d’une diver­si­té bio­lo­gique et pay­sa­gère consi­dé­rable. La Médi­ter­ra­née est consi­dé­rée comme un des prin­ci­paux « hot-spots » de la bio­di­ver­si­té mondiale.


J’écris ces quelques lignes à quelques jours de la troi­sième semaine fores­tière médi­ter­ra­néenne, qui aura lieu à Tlem­cen en Algé­rie du 16 au 21 mars pro­chains. A cette occa­sion devraient être adoptés :

l’état des forêts médi­ter­ra­néennes en 2013 ;

un cadre stra­té­gique sur les forêts méditerranéennes ;

une décla­ra­tion ministérielle.


Lors de la deuxième semaine fores­tière médi­ter­ra­néenne, en avril 2011 à Avi­gnon, nous avions célé­bré les cent ans du lan­ce­ment de la pre­mière coopé­ra­tion fores­tière médi­ter­ra­néenne. En effet, lors du congrès inter­na­tio­nal d’agriculture à Madrid en mai 1911, Robert HICKEL écri­vait : « Il faut créer l’unité de la sylve médi­ter­ra­néenne, créer un lien entre fores­tiers médi­ter­ra­néens, à quelque nation qu’ils appar­tiennent. Ce lien, j’estime qu’il pour­rait se trou­ver dans une Asso­cia­tion inter­na­tio­nale des tech­ni­ciens des divers pays inté­res­sés et dans la créa­tion d’un organe périodique ».


Cette idée n’a pu se concré­ti­ser qu’après la pre­mière guerre mon­diale, en 1922, avec la créa­tion de la « ligue fores­tière médi­ter­ra­néenne » ou « sil­va medi­ter­ra­nea ». Elle a été active et a publié des bul­le­tins jusqu’en 1935 (télé­char­geables sur le site de la FAO).


Par la suite, peu après la seconde guerre mon­diale, l’Or­ga­ni­sa­tion pour l’a­li­men­ta­tion et l’a­gri­cul­ture (FAO) a été créée à Qué­bec le 16 octobre 1945. Des com­mis­sions régio­nales fores­tières et une ins­tance spé­cia­li­sée sur les ques­tions fores­tières médi­ter­ra­néennes ont été rapi­de­ment mises en place. Cette der­nière a tenu sa pre­mière réunion à Rome en décembre 1948.


Depuis lors, le Comi­té des ques­tions fores­tières médi­ter­ra­néennes Sil­va medi­ter­ra­nea s’est régu­liè­re­ment réuni. Il a tenu sa 21e ses­sion en février 2012 à Anta­lya. C’est le seul forum inter­gou­ver­ne­men­tal (avec les forces et fai­blesses de ce type de struc­ture) spé­cia­li­sé dans le domaine de la fores­te­rie et de la ges­tion des espaces natu­rels dans le bas­sin méditerranéen.


Pour ce qui concerne la socié­té civile, Alexandre SEIGUE (31) a fon­dé, avec d’autres, l’Association Forêt Médi­ter­ra­néenne en 1978. Cette asso­cia­tion, tou­jours très active, publie une revue épo­nyme de qua­li­té. Plus de 1 400 articles sont dis­po­nibles en libre accès sur son site internet.

En 1996 a été créée l’Association Inter­na­tio­nale Forêts Médi­ter­ra­néennes (AIFM), elle aus­si très active au nord, au sud et à l’est de la Médi­ter­ra­née. L’AIFM anime un réseau d’or­ga­nismes et de per­sonnes inté­res­sées, fort de 3 000 contacts dans 25 pays, faci­li­tant les échanges d’expériences et la capi­ta­li­sa­tion des connais­sances acquises dans le bas­sin méditerranéen.


Enfin, un Par­te­na­riat de Col­la­bo­ra­tion sur les Forêts Médi­ter­ra­néennes (PCFM), qui regroupe une ving­taine d’institutions (orga­ni­sa­tions inter­gou­ver­ne­men­tales, agences de coopé­ra­tion, ins­ti­tuts de recherche, orga­ni­sa­tions non gou­ver­ne­men­tales) du pour­tour médi­ter­ra­néen sou­cieuses de coor­don­ner leurs actions, a été ins­ti­tué en 2010 pour répondre aux nou­veaux enjeux, notam­ment le chan­ge­ment cli­ma­tique : adap­ter les forêts ; atté­nuer les émis­sions de gaz à effet de serre dans le domaine de l’utilisation des terres. Les coopé­ra­tions alle­mande (GIZ) et fran­çaise (AFD/FFEM) lui apportent un appui précieux.


Ain­si, comme le montre ce qui pré­cède, la coopé­ra­tion fores­tière médi­ter­ra­néenne est cer­tai­ne­ment par­mi les plus anciennes : de l’ordre du siècle. Elle est diverse et implique toute une série d’acteurs des ins­ti­tu­tions publiques et de la socié­té civile. Elle est active et a su s’adapter aux enjeux pré­sents et futurs.


En effet, les chan­ge­ments glo­baux qui affectent aujourd’hui le pour­tour de la Médi­ter­ra­née (évo­lu­tions des socié­tés et des modes de vie, ain­si que les chan­ge­ments cli­ma­tiques) hypo­thèquent for­te­ment l’avenir des espaces boi­sés (perte de diver­si­té bio­lo­gique, aug­men­ta­tion des risques de feux de forêts, dégra­da­tion des bas­sins ver­sants et accen­tua­tion des pro­ces­sus de déser­ti­fi­ca­tion) et, par consé­quent, peuvent remettre en cause la four­ni­ture durable de ces mul­tiples biens et ser­vices aux populations.


C’est donc bien un défi majeur, auquel nous devons col­lec­ti­ve­ment faire face !

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