Échelle des doses d’irradiation

L’effet des faibles doses

Dossier : Le dossier nucléaireMagazine N°569 Novembre 2001
Par Maurice TUBIANA

Pour des doses de l’ordre de 500 mSv1 en irra­dia­tion aiguë ou chro­nique on a consta­té, chez l’a­ni­mal comme chez l’homme, une aug­men­ta­tion de la fré­quence des leu­cé­mies et de quelques autres can­cers et un risque de mal­for­ma­tion quand l’embryon a été irra­dié pen­dant la ges­ta­tion, etc. Aucun effet nui­sible n’a été détec­té chez l’a­dulte pour des doses infé­rieures à 200 mSv et chez l’en­fant pour des doses infé­rieures à 100 mSv, ni aucune mal­for­ma­tion pour des doses infé­rieures à 200 mSv.

On appelle faibles doses, les doses infé­rieures à 100 mSv, et très faibles doses, celles de quelques mSv ou moins, c’est-à-dire de l’ordre de gran­deur de l’ir­ra­dia­tion natu­relle à laquelle est sou­mis tout être vivant depuis l’o­ri­gine de la vie sur Terre, soit quatre mil­liards d’an­nées, période pen­dant laquelle la radio­ac­ti­vi­té natu­relle a dimi­nué d’en­vi­ron un fac­teur 4.

En France, l’ir­ra­dia­tion natu­relle annuelle varie selon les régions de 1,5 à 6 mSv et, dans le monde, elle varie de 1,5 mSv à 30 mSv, voire même dans cer­taines régions d’I­ran 200 mSv/an. En regard, les doses déli­vrées au cours des exa­mens médi­caux vont de 0,1 mSv à 20 mSv ; les doses dues à la pro­duc­tion de l’éner­gie nucléaire sont pour les tra­vailleurs en moyenne d’en­vi­ron 2 mSv/an (moins de 1 % d’entre eux reçoivent, en un an, une dose égale ou supé­rieure à 20 mSv) et pour le public plus de cent fois plus petites, envi­ron 0,015 mSv/an (en y incluant l’ex­trac­tion et le trai­te­ment de l’u­ra­nium, le fonc­tion­ne­ment des réac­teurs, les rejets et les déchets).

C’est la valeur qui a été esti­mée dans le Coten­tin au voi­si­nage immé­diat de La Hague, et elle n’est qu’ex­cep­tion­nel­le­ment et fai­ble­ment dépas­sée dans quelques autres zones très limi­tées de la France. La direc­tive de 1996 de l’U­nion euro­péenne fixe une limite annuelle de dose égale pour les tra­vailleurs à 100 mSv/5 ans, soit en moyenne 20 mSv/an et de 1 mSv/an pour le public (tableau 1).

La vie d’une cel­lule, ses réac­tions après une modi­fi­ca­tion du milieu sont régies par des ins­truc­tions codées dans les molé­cules d’ADN (acide désoxy­ri­bo­nu­cléique) qui forment le génome de chaque cel­lule. Ce génome ren­ferme envi­ron 50 000 gènes et est iden­tique dans toutes les cel­lules d’un orga­nisme humain ; mais à chaque ins­tant dans une cel­lule, seul un petit nombre de gènes sont en acti­vi­té, les autres pou­vant l’être quand ils en reçoivent l’ordre.

Dans un tis­su adulte, quand une cel­lule meurt, l’ordre est don­né à une autre cel­lule de se divi­ser de façon à main­te­nir constant le nombre de cel­lules. Ce méca­nisme de régu­la­tion est per­tur­bé dans les cel­lules can­cé­reuses qui se divisent sans en avoir reçu l’ordre.

La trans­for­ma­tion d’une cel­lule nor­male en cel­lule néo­pla­sique est due au dys­fonc­tion­ne­ment d’une dizaine de gènes par­mi les quelques cen­taines qui inter­viennent dans la régu­la­tion de la divi­sion cel­lu­laire. Une tumeur can­cé­reuse est consti­tuée par les des­cen­dants de cette cel­lule trans­for­mée (c’est pour­quoi on dit d’un can­cer qu’il est mono­clo­nal). Les molé­cules d’ADN sont consti­tuées par deux fibres, ou brins, enrou­lés l’un autour de l’autre et qui sont com­plé­men­taires. L’ordre des bases sur ces brins consti­tue le code qui déter­mine la consti­tu­tion de la pro­téine dont la syn­thèse est régie par ce gène. Le rem­pla­ce­ment d’une base pour une autre change donc cette consti­tu­tion et peut alté­rer la fonc­tion de cette pro­téine et donc celle de la cellule.

Le dys­fonc­tion­ne­ment d’un gène est géné­ra­le­ment dû à une muta­tion, c’est-à-dire à une modi­fi­ca­tion irré­ver­sible et trans­mis­sible aux cel­lules filles, de la molé­cule d’ADN qui porte ce gène. Les molé­cules d’ADN sont longues (4 cm) et étroites (2 nm), elles sont donc très fra­giles ; les lésions de l’ADN sont fré­quentes et une pro­por­tion consi­dé­rable du génome (le quart envi­ron) est consa­crée à la détec­tion et la répa­ra­tion des lésions, c’est-à-dire au main­tien de l’in­té­gri­té du génome.

Les rayon­ne­ments ioni­sants ne délivrent que des éner­gies très faibles aux cel­lules irra­diées, mais cette éner­gie est concen­trée le long des tra­jec­toires des par­ti­cules et peut donc léser les molé­cules d’ADN soit en ioni­sant l’un des atomes de cette molé­cule (dans un tiers des cas) soit dans deux tiers des cas en pro­vo­quant la for­ma­tion au voi­si­nage de la molé­cule d’ADN de radi­caux libres, agents d’oxy­da­tion puissants.

Le méta­bo­lisme nor­mal d’une cel­lule pro­voque éga­le­ment la for­ma­tion de radi­caux libres. Ceux-ci causent, chaque jour, dans chaque cel­lule, envi­ron 17 000 lésions dont 10 000 cas­sures de l’un des deux brins d’une molé­cule d’ADN et 8 cas­sures des deux brins. En com­pa­rai­son, une dose de 1 gray pro­voque, dans chaque cel­lule, 1 000 rup­tures de l’un des brins et 40 rup­tures des deux brins mais concen­trées dans l’es­pace et le temps. Les cas­sures d’un seul brin sont faci­le­ment répa­rées car la cel­lule prend comme modèle le brin intact. La répa­ra­tion des cas­sures des deux brins est beau­coup plus dif­fi­cile puisque les deux brins sont lésés.

Tableau 1 — Échelle des doses d’irradiation​

Les effets cancérigènes des faibles doses : la relation linéaire sans seuil

L’ab­sence d’ef­fet détec­table, après les faibles doses, ne per­met pas d’ex­clure l’exis­tence d’un risque can­cé­ri­gène trop petit pour être mis en évi­dence par les études sta­tis­tiques. Par pru­dence, et tout en sou­li­gnant qu’il ne s’a­gis­sait que d’une hypo­thèse com­mode, la Com­mis­sion inter­na­tio­nale de pro­tec­tion contre les radia­tions (CIPR) avait pro­po­sé, au début des années 1960, d’es­ti­mer ces risques par une extra­po­la­tion linéaire à par­tir des effets obser­vés entre 0,5 et 3 Sv.

La rela­tion linéaire a, en outre, l’a­van­tage de sim­pli­fier l’en­re­gis­tre­ment des don­nées puis­qu’elle per­met l’ad­di­tion au cours de la vie des diverses irra­dia­tions pro­fes­sion­nelles. Elle fut donc bien accueillie par ceux qui gèrent la radio­pro­tec­tion, d’au­tant qu’elle sur­es­time les risques, ce qui consti­tue un autre avan­tage de ce point de vue.

Quinze ans plus tard, la décou­verte des onco­gènes et de la trans­for­ma­tion d’un gène nor­mal (pro­to-onco­gène) en onco­gène par une simple muta­tion parut don­ner un fon­de­ment scien­ti­fique à cette hypo­thèse qui devint alors un dogme, sur­tout dans cer­tains milieux de la radio­pro­tec­tion n’ayant que peu de for­ma­tion en biologie.

En réa­li­té une extra­po­la­tion d’un fac­teur 10 est accep­table scien­ti­fi­que­ment en bio­lo­gie, mais elle est très dis­cu­table sur un fac­teur 100 et n’a aucun sens sur un fac­teur 1 000 ou 10 000 car dans un orga­nisme vivant toute action sus­cite une réac­tion, ce qui change les condi­tions. Dès le milieu des années 1980, des radio­bio­lo­gistes s’in­ter­ro­gèrent donc sur la vali­di­té scien­ti­fique de cette extrapolation.

Son uti­li­sa­tion pour cal­cu­ler le risque de faibles doses sus­ci­ta des réti­cences qui s’ac­cen­tuèrent quand, après l’ac­ci­dent de Tcher­no­byl, on cal­cu­la avec une pré­ci­sion absurde, le nombre de can­cers que les retom­bées radio­ac­tives cau­se­raient en Europe. L’A­ca­dé­mie des sciences puis l’A­me­ri­can Health Phy­sics Asso­cia­tion dénon­cèrent, dans des rap­ports, cette uti­li­sa­tion abu­sive. Tout le débat sur les effets éven­tuels des faibles doses se foca­li­sa ain­si sur cette ques­tion. Il nous faut donc expli­ci­ter et dis­cu­ter les trois hypo­thèses sur les­quelles elle est fondée :

1) Toute lésion du génome a une pro­ba­bi­li­té égale de pro­vo­quer une alté­ra­tion irré­ver­sible et trans­mis­sible du génome (une muta­tion), donc d’i­ni­tier une trans­for­ma­tion néo­pla­sique de la cel­lule, qu’elle soit iso­lée ou asso­ciée à d’autres lésions dans la même cel­lule et les cel­lules voisines.

2) Cer­taines lésions com­plexes de l’ADN pro­vo­quées par des rayon­ne­ments ioni­sants ne sont pas répa­rables sans erreur. Toute tra­ver­sée du noyau d’une cel­lule par une par­ti­cule ioni­sante a donc une pro­ba­bi­li­té non nulle de pro­vo­quer une mutation.

3) Le can­cer est dû à la som­ma­tion de plu­sieurs muta­tions. Celles cau­sées par les radia­tions s’as­so­cient à celles d’autres ori­gines et il existe une pro­por­tion­na­li­té directe entre le nombre de muta­tions et la fré­quence des cancers.

Exa­mi­nons ces trois hypothèses.

Influence sur l’évolution d’une lésion de l’ADN de la présence d’autres lésions dans la même cellule ou les cellules voisines

Sché­ma­ti­que­ment une lésion de l’ADN peut :

  • entraî­ner la mort de la cel­lule ou l’in­ca­pa­ci­té de division,
  • être répa­rée sans erreur,
  • être répa­rée avec erreur ou ne pas être répa­rée, il en résulte donc une mutation.


Dans les deux pre­miers cas, le risque can­cé­ri­gène est nul puisque la lésion n’existe plus. La mort d’une cel­lule n’a pas de consé­quence si le nombre de cel­lules tuées est petit puisque les méca­nismes d’ho­méo­sta­sie tis­su­laire pro­voquent la divi­sion d’autres cel­lules afin de rem­pla­cer la cel­lule man­quante. Dans le troi­sième, il existe une lésion trans­mis­sible aux cel­lules filles. L’hy­po­thèse de la rela­tion linéaire sans seuil implique néces­sai­re­ment que l’ef­fi­ca­ci­té d’une irra­dia­tion (nombre de lésions par uni­té de dose), et le risque de muta­tion, ne varient pas avec la dose et le débit de dose (dose par uni­té de temps). Ce n’est mani­fes­te­ment pas le cas et la CIPR a été obli­gée d’in­tro­duire un coef­fi­cient de réduc­tion aux faibles doses et débits de dose égal à 2, valeur dis­cu­table (les don­nées expé­ri­men­tales montrent des réduc­tions allant de 2 à 10).

Il est, aujourd’­hui, cer­tain qu’a­près une irra­dia­tion la mort des cel­lules et les muta­tions sont dues aux lésions des deux brins.

Trois méca­nismes de répa­ra­tion de ces lésions ont été iden­ti­fiés. Dans le pre­mier, la cel­lule va cher­cher un modèle sur l’autre molé­cule d’ADN homo­logue (dans une cel­lule nor­male chaque molé­cule d’ADN est en deux exem­plaires dont l’un pro­vient du père et l’autre de la mère). Des erreurs peuvent sur­ve­nir mais sont rela­ti­ve­ment rares. Les deux autres méca­nismes de répa­ra­tion sont beau­coup plus sujets à erreur. Il paraît vrai­sem­blable (il y a beau­coup d’ar­gu­ments dans ce sens, mais ceci n’est pas for­mel­le­ment démon­tré) que le méca­nisme de répa­ra­tion le plus fiable est le pre­mier mis en œuvre, les moins sûrs étant acti­vés quand les lésions sont plus nom­breuses. Ceci s’ac­cor­de­rait avec l’ob­ser­va­tion selon laquelle la fré­quence des répa­ra­tions fau­tives croît avec la dose.

De plus on a mon­tré au cours de ces der­nières années que des doses rela­ti­ve­ment faibles (de 10 à 200 mGy) suf­fisent à pro­vo­quer des modi­fi­ca­tions de la signa­li­sa­tion intra et inter­cel­lu­laire. Don­nons-en quelques exemples :

  • sti­mu­la­tion de la détoxi­fi­ca­tion des radi­caux for­més sous l’ac­tion des rayon­ne­ments ionisants ;
  • arrêt tem­po­raire de la pro­gres­sion des cel­lules dans le cycle cel­lu­laire, ce qui favo­rise la répa­ra­tion de l’ADN car celle-ci est plus effi­cace dans les cel­lules au repos ;
  • acti­va­tion de nom­breux gènes impli­qués dans les méca­nismes de répa­ra­tion de l’ADN. On observe de tels effets pour des doses aus­si petites que 10 mGy (rap­pe­lons qu’une cas­sure des deux brins requiert une éner­gie de 25 mSv, donc pour une dose moyenne de 10 mSv la pro­por­tion de cel­lules avec une cas­sure double est petite).


Il est donc vrai­sem­blable que les pre­mières doses de rayon­ne­ment modi­fient la pro­por­tion de cas­sures des deux brins répa­rées par les trois méca­nismes exis­tants, donc la pro­por­tion de lésions évo­luant soit vers une répa­ra­tion non fau­tive soit vers une muta­tion. De plus, on a consta­té une dimi­nu­tion de l’ef­fi­ca­ci­té des sys­tèmes de répa­ra­tion quand le nombre de lésions est trop élevé.

Relation entre la dose et la mortalité cellulaire

La varia­tion de la capa­ci­té de répa­ra­tion des lésions en fonc­tion de la dose a été mise en évi­dence par l’é­tude du taux de mortalité.

Lors d’une irra­dia­tion conti­nue à débit de dose éle­vé (1 Gy/min), on dis­tingue trois domaines de radiosensibilité :

  • entre 0 et 0,3 Gy, il existe une hyper­sen­si­bi­li­té : le taux de mor­ta­li­té par uni­té de dose est rela­ti­ve­ment très éle­vé mais il décroît avec la dose ;
  • à par­tir de 0,3 Gy, la radio­sen­si­bi­li­té est beau­coup plus faible, mais elle aug­mente pro­gres­si­ve­ment jus­qu’à 5 Gy (ce qui cor­res­pond à l’é­pau­le­ment de la courbe) ;
  • au-delà de 5 Gy, la radio­sen­si­bi­li­té est constante, la courbe devient exponentielle.


On a inter­pré­té ain­si ces résultats :

  • pour les doses infé­rieures à 0,3 Gy, la plu­part des cel­lules dont l’ADN a été lésé meurent ; cepen­dant quand la dose aug­mente la capa­ci­té de répa­ra­tion des lésions s’ac­croît à cause de l’ac­ti­va­tion de méca­nismes de réparation ;
  • entre 0,3 et 5 Gy, la capa­ci­té de répa­ra­tion est d’a­bord maxi­male, puis elle dimi­nue pro­gres­si­ve­ment, comme s’il y avait épui­se­ment, ou satu­ra­tion, de la capa­ci­té de réparation ;
  • après envi­ron 5 Gy, cette capa­ci­té est faible et ne varie plus. L’ad­mi­nis-tra­tion d’in­hi­bi­teurs de la syn­thèse des pro­téines (donc des enzymes) réduit ces varia­tions et aug­mente la radiosensibilité.


Si l’ir­ra­dia­tion est inter­rom­pue, la capa­ci­té de répa­ra­tion aug­mente rapi­de­ment et rede­vient maxi­male après une inter­rup­tion d’en­vi­ron huit heures. Ces résul­tats montrent l’im­por­tance des varia­tions de capa­ci­té de répa­ra­tion des lésions doubles brins en fonc­tion de l’ac­ti­va­tion ou de la satu­ra­tion des sys­tèmes enzymatiques.

Dans les lignées cel­lu­laires qui sont inca­pables de répa­rer les lésions des deux brins du fait d’un défaut géné­tique, la courbe est d’emblée expo­nen­tielle : la radio­sen­si­bi­li­té est constante et est grande.

Lors d’ir­ra­dia­tion à faible débit (quelques mGy/minute ou moins) la courbe est expo­nen­tielle, ce qui signi­fie que la capa­ci­té de répa­ra­tion est constante. Si les cel­lules, au lieu d’être irra­diées iso­lées les unes des autres, sont irra­diées en amas (sphé­roïdes) donc liées entre elles, comme dans un tis­su, par des canaux de jonc­tion qui per­mettent la cir­cu­la­tion des petites molé­cules d’une cel­lule à l’autre, la radio­sen­si­bi­li­té est nota­ble­ment dimi­nuée. Les cel­lules avoi­si­nantes par­ti­cipent donc au sys­tème de réparation.

Les cel­lules enga­gées dans un cycle de divi­sion cel­lu­laire réparent moins bien les lésions de l’ADN que les cel­lules au repos mito­tique. Un des pre­miers effets de l’ir­ra­dia­tion d’une cel­lule saine est d’in­ter­rompre sa pro­gres­sion dans le cycle cel­lu­laire de façon à don­ner à la cel­lule le temps de répa­rer ses lésions avant la divi­sion cel­lu­laire, moment où elles sont trans­mises aux cel­lules filles.

Les méca­nismes d’a­dap­ta­tion démontrent éga­le­ment la capa­ci­té de réac­tion après une irra­dia­tion. On a consta­té, depuis une ving­taine d’an­nées, qu’une pre­mière irra­dia­tion à faible dose (quelques dizaines de mGy) réduit consi­dé­ra­ble­ment la mor­ta­li­té des cel­lules, ou de l’or­ga­nisme, lors d’une irra­dia­tion à dose beau­coup plus forte (quelques Gy) déli­vrée quelques heures, ou jours plus tard. Cette pro­tec­tion semble s’ex­pli­quer par la sti­mu­la­tion tem­po­raire de méca­nismes de répa­ra­tion. Elle semble pro­té­ger éga­le­ment contre l’in­duc­tion de muta­tions pou­vant évo­luer vers une trans­for­ma­tion cancéreuse.

Mécanismes de sauvegarde du génome et relation entre la dose et la probabilité de mutation

À côté de la répa­ra­tion des molé­cules d’ADN, la mort cel­lu­laire consti­tue un autre sys­tème de pro­tec­tion de l’or­ga­nisme. À faible dose, l’hy­per­sen­si­bi­li­té cel­lu­laire a pour résul­tat l’é­li­mi­na­tion de la plu­part des cel­lules lésées. À doses plus éle­vées, l’a­pop­tose, ou mort pro­gram­mée, joue le même rôle. Il semble que l’ef­fi­ca­ci­té de ces sys­tèmes dimi­nue avec la dose.

Il existe plu­sieurs méca­nismes de mort cellulaire :

  • par anoxie ou effet toxique ;
  • par sénes­cence au terme de l’exis­tence nor­male de ce type de cel­lules (par exemple un jour pour le gra­nu­lo­cyte, quatre mois pour les glo­bules rouges) ;
  • enfin, la mort pro­gram­mée ou apop­tose. Celle-ci joue un rôle impor­tant au cours de l’embryogenèse : par exemple les doigts se forment à la suite de la mort des cel­lules situées dans les espaces inter­di­gi­taux. L’a­pop­tose éli­mine les cel­lules dont l’ADN n’a pas été répa­ré de façon satis­fai­sante. Elle joue un rôle capi­tal dans la pro­tec­tion de l’or­ga­nisme contre les agents géno­toxiques. En effet, lais­ser sub­sis­ter une cel­lule dont l’ADN a été lésé mais qui est néan­moins capable de se divi­ser peut être à l’o­ri­gine de plu­sieurs mala­dies mor­telles (can­cers, mala­dies auto-immunes, etc.).


Pour beau­coup d’au­teurs, pour des doses de l’ordre de gran­deur de l’ir­ra­dia­tion natu­relle, c’est-à-dire quand les deux méca­nismes de répa­ra­tion et d’a­pop­tose ne sont pas satu­rés ou désor­ga­ni­sés par de nom­breuses lésions, l’as­so­cia­tion du sys­tème de répa­ra­tion de l’ADN et de l’a­pop­tose suf­fit à éli­mi­ner la qua­si-tota­li­té des lésions pou­vant être à l’o­ri­gine d’une muta­tion. Signa­lons que, par ailleurs, l’al­té­ra­tion de l’a­pop­tose qui per­met, au fil des géné­ra­tions cel­lu­laires, l’ac­cu­mu­la­tion de muta­tions dans le génome d’une lignée cel­lu­laire joue un rôle capi­tal en cancérogenèse.

La rela­tion entre la dose et la pro­ba­bi­li­té de muta­tion est moins bien connue que celle concer­nant la mor­ta­li­té, tech­ni­que­ment plus facile à étu­dier dans le domaine des faibles doses. Néan­moins, quelques faits ont été établis :

  • rela­tion entre la dose et l’al­té­ra­tion de la mor­pho­lo­gie des chro­mo­somes (nombre de chro­mo­somes dicen­triques) : pas d’a­no­ma­lie pour des doses < 20 mGy, rela­tion linéaire entre 0,5 Gy et 5 Gy ;
  • en ce qui concerne la for­ma­tion de cel­lules avec micro­noyaux, pas d’aug­men­ta­tion de leur fré­quence au-des­sous de 0,2 Gy et rela­tion linéaire entre 0,2 et 2 Gy ;
  • pour les trans­for­ma­tions néo­pla­siques in vitro, on n’ob­serve rien pour des doses infé­rieures à 100 mGy et pour les muta­tions soma­tiques rien au-des­sous de 200 mGy. (Rap­pe­lons qu’une dose de 1 mGy cor­res­pond, en moyenne, à la tra­ver­sée du noyau cel­lu­laire par un élec­tron avec pour consé­quence une lésion simple brin.)


Ain­si, tant ce qui concerne la mor­ta­li­té cel­lu­laire que les muta­tions, les faits dif­fèrent des pré­dic­tions de la rela­tion linéaire sans seuil :

  • l’in­fluence de la dose et du débit de dose est très grande, elle a pour résul­tat des chan­ge­ments impor­tants de radio­sen­si­bi­li­té (mor­ta­li­té) qui sont la consé­quence des varia­tions de capa­ci­té de répa­ra­tion des lésions de l’ADN, notam­ment des lésions doubles brins ;
  • le stress géno­toxique déclenche la sti­mu­la­tion de méca­nismes de répa­ra­tion après des doses supé­rieures à une dizaine de mGy et l’exis­tence de phé­no­mènes d’a­dap­ta­tion confirme que de faibles doses peuvent acti­ver des méca­nismes de répa­ra­tion qui sont nor­ma­le­ment au repos ;
  • pour cer­tains effets, tels que la pro­ba­bi­li­té de muta­tion, il semble exis­ter un seuil pra­tique dû à la conjonc­tion d’une répa­ra­tion sans erreur et d’une apop­tose éli­mi­nant les lésions résiduelles ;
  • l’aug­men­ta­tion de la dose et sur­tout du débit de dose entraîne un débor­de­ment des capa­ci­tés de ces sys­tèmes d’où l’aug­men­ta­tion consi­dé­rable de la radio­sen­si­bi­li­té (jugée sur le taux de mor­ta­li­té), des répa­ra­tions fau­tives et des aber­ra­tions chro­mo­so­miques (exis­tence d’un seuil pratique ?).


Bien qu’il reste beau­coup de pro­grès à faire, il appa­raît déjà cer­tain que le pre­mier pos­tu­lat sur lequel est fon­dée la rela­tion linéaire sans seuil est contre­dit par les don­nées expérimentales.

Existe-t-il des lésions de l’ADN si graves qu’elles sont irréparables sans erreur et donnent naissance à des lignées mutantes ?

Les par­ti­cules α et les neu­trons sont les par­ti­cules qui, par uni­té de lon­gueur de tra­jec­toire, trans­fèrent au milieu le plus d’éner­gie, créent le plus de dom­mage, celles qui au cours de la tra­ver­sée des molé­cules d’ADN déter­minent les lésions les plus com­plexes, c’est pour­quoi leur effi­ca­ci­té bio­lo­gique rela­tive est si élevée.

Or les radio­élé­ments natu­rels (radium, tho­rium) sont des émet­teurs a, qui ont été uti­li­sés depuis le début du XXe siècle. On dis­pose donc d’un long recul pour éva­luer leur effet can­cé­ri­gène. Quelques cohortes sont par­ti­cu­liè­re­ment intéressantes.

a) Les peintres en cadran lumi­neux : les quelques mil­liers d’ou­vriers et ouvrières conta­mi­nés ont été minu­tieu­se­ment sui­vis. On a obser­vé, chez eux, une cin­quan­taine d’os­téo­sar­comes des os de la face et la rela­tion dose-effet montre l’exis­tence d’un seuil pra­tique : aucun can­cer n’a été obser­vé pour des doses infé­rieures à 5 Gy alors que la fré­quence de ces can­cers aug­mente rapi­de­ment ensuite ; cette irra­dia­tion est donc, à dose éle­vée, très car­ci­no­gène. Cette courbe est com­pa­tible avec une rela­tion qua­dra­tique, mais incom­pa­tible avec une rela­tion linéaire. Les don­nées expé­ri­men­tales (Raabe) montrent que, selon l’es­pèce ani­male et le radio­élé­ment uti­li­sé, le seuil pra­tique d’in­duc­tion des tumeurs varie, mais il est tou­jours supé­rieur à 1 Gy. Rap­pe­lons que la dose absor­bée lors de la tra­ver­sée d’une cel­lule par un α est d’en­vi­ron 370 mSv. Quand la dose et le débit de dose sont faibles, les cel­lules irra­diées sont donc envi­ron­nées de cel­lules intactes.

b) Les sujets ayant reçu du tho­ro­trast (un com­po­sé à base de tho­rium) comme agent de contraste en radio­lo­gie vas­cu­laire : des enquêtes effec­tuées en Alle­magne, au Dane­mark et au Por­tu­gal ont révé­lé chez eux un pour­cen­tage éle­vé de can­cers du foie mais aucun effet n’a été déce­lé pour des doses infé­rieures à quelques Gy (plu­sieurs dizaines de Sv si l’on tient compte du fac­teur qua­li­té égal à 20).

c) Les mineurs des mines d’u­ra­nium res­pirent un air riche en radon et, depuis le XVIIIe siècle, on a consta­té chez eux une forte aug­men­ta­tion de la fré­quence des can­cers du pou­mon. On a long­temps cru qu’il exis­tait, dans ce cas, une rela­tion linéaire sans seuil entre les quan­ti­tés de radon inha­lées et la fré­quence de ces can­cers. Cette conclu­sion est remise en ques­tion car il existe dans l’air des mines d’autres agents can­cé­ri­gènes (en par­ti­cu­lier l’ar­se­nic2, et des pous­sières radio­ac­tives. De plus ces sujets reçoivent une irra­dia­tion impor­tante due au rayon­ne­ment gam­ma. Ces fac­teurs pour­raient expli­quer pour­quoi la fré­quence des can­cers, à quan­ti­té égale de radon inha­lé, varie consi­dé­ra­ble­ment d’une mine à l’autre et pour­quoi on n’a pas détec­té une aug­men­ta­tion de la fré­quence des can­cers du pou­mon chez les habi­tants des régions où l’air est riche en radon.

Les expé­riences ont, par ailleurs, mon­tré l’in­fluence impor­tante du débit de dose sur l’ef­fet can­cé­ri­gène. À quan­ti­té égale de radon inha­lé (25 WLM3, les rats pré­sentent des can­cers pul­mo­naires si la dose est admi­nis­trée en cinq mois alors qu’au­cun effet n’est détec­té si elle est admi­nis­trée en dix-huit mois. Les cal­culs effec­tués sug­gèrent que les cel­lules dont le noyau a été tra­ver­sé par une seule par­ti­cule α ne se can­cé­risent pas et que la cumu­la­ti­vi­té des effets dépend de l’in­ter­valle de temps entre les tra­ver­sées. Il y a deux expli­ca­tions pos­sibles à cette absence d’ef­fet can­cé­ri­gène pour les faibles doses et débits de dose :

  • les lésions pro­vo­quées par les faibles doses sont répa­rées ou la cel­lule éli­mi­née. Une récente expé­rience effec­tuée avec des micro­fais­ceaux de par­ti­cules a sur des cel­lules en culture confirme l’ab­sence de trans­for­ma­tion néo­pla­sique après la tra­ver­sée par une seule par­ti­cule, alors qu’il en existe après plu­sieurs par­ti­cules comme si, alors, la capa­ci­té des méca­nismes de pro­tec­tion avait été outrepassée ;
  • l’é­vo­lu­tion d’une cel­lule mutée vers un can­cer est contrô­lée si les cel­lules adja­centes sont intactes. Dans ce cas la divi­sion cel­lu­laire peut être inhi­bée, or la mul­ti­pli­ca­tion cel­lu­laire joue un rôle essen­tiel dans le pro­ces­sus can­cé­ri­gène. La plus grande can­cé­ro­gé­ni­ci­té des irra­dia­tions par neu­trons est en faveur de cette hypo­thèse car dans ce cas, toutes les cel­lules du tis­su sont lésées simultanément.


Les deux hypo­thèses ne s’ex­cluent d’ailleurs pas. Ce que les irra­dia­tions par par­ti­cules α ont démon­tré est que des lésions iso­lées dans une seule cel­lule d’un tis­su n’ont qu’un faible risque d’é­vo­luer vers un can­cer, contrai­re­ment au pos­tu­lat de la rela­tion linéaire sans seuil. À très faibles doses de pho­tons (quelques mGy), la cel­lule tou­chée est éga­le­ment entou­rée de cel­lules saines.

Processus cancérigène : relation entre le nombre des cellules initiées et celui des cancers

Quel que soit le nombre d’al­té­ra­tions du génome res­pon­sable de la trans­for­ma­tion d’une cel­lule saine en une cel­lule néo­pla­sique (cer­taines muta­tions pou­vant être dues à l’ir­ra­dia­tion et d’autres à des causes » natu­relles »), la rela­tion linéaire sans seuil pos­tule une pro­por­tion­na­li­té entre le nombre de cel­lules » ini­tiées » et le nombre de can­cers, autre­ment dit chaque cel­lule ini­tiée, quelles qu’aient été les causes de cette ini­tia­tion, a la même pro­ba­bi­li­té de don­ner nais­sance à un cancer.

Ce rai­son­ne­ment paraît si logique qu’il a été long à être remis en ques­tion. On ne l’a fait que quand on a mon­tré que la nais­sance d’un can­cer ne pou­vait pas être due à la som­ma­tion, par hasard, des 8 à 10 alté­ra­tions dis­tinctes des gènes dont l’at­teinte est à l’o­ri­gine du can­cer. Si tel était le cas, en effet la pro­ba­bi­li­té de can­cé­ri­sa­tion serait tel­le­ment faible qu’il n’y aurait, dans le monde, qu’un ou deux can­cers par géné­ra­tion. Inver­se­ment, la muta­tion de l’un des gènes res­pon­sables est un phé­no­mène fré­quent, qui touche un grand nombre de cellules.

Pour expli­quer l’at­teinte de plu­sieurs gènes spé­ci­fiques, il faut pos­tu­ler un très grand nombre de divi­sions de la cel­lule ini­tiée et un accrois­se­ment consi­dé­rable de la pro­ba­bi­li­té de muta­tion de ces cel­lules lors de chaque divi­sion : donc une insta­bi­li­té géné­tique asso­ciée à une ampli­fi­ca­tion clo­nale. L’ins­ta­bi­li­té géné­tique peut être due à l’at­teinte des méca­nismes de main­tien de l’in­té­gri­té du génome cel­lu­laire (répa­ra­tion de l’ADN, apop­tose, etc.) ou à l’aug­men­ta­tion du taux d’a­gents d’oxydation.

Pour expli­quer l’am­pli­fi­ca­tion clo­nale, pre­nons l’exemple des can­cers de la peau sous l’in­fluence des rayons ultra­vio­lets du soleil. Une pro­por­tion éle­vée des cel­lules de la couche basale de l’é­pi­derme pré­sente des lésions dans leur génome, en par­ti­cu­lier du gène p53 qui joue un rôle cru­cial dans l’a­pop­tose. Le nombre de cel­lules ini­tiées dont le méca­nisme d’a­pop­tose a été lésé est donc grand. Lors de chaque nou­velle expo­si­tion solaire, de nom­breuses cel­lules subissent une nou­velle alté­ra­tion de leur génome.

Dans les lignées cel­lu­laires nor­males, où l’a­pop­tose fonc­tionne cor­rec­te­ment, les cel­lules dont la lésion n’a pas été répa­rée sont éli­mi­nées. Dans celles où l’a­pop­tose est défi­ciente, ces cel­lules sur­vivent. Les cel­lules ini­tiées dont l’a­pop­tose fonc­tionne mal ont donc un avan­tage sélec­tif par rap­port aux cel­lules nor­males puisque ce sont elles qui se mul­ti­plient pour rem­pla­cer les cel­lules tuées ; c’est le phé­no­mène d’am­pli­fi­ca­tion clo­nale. De fait après chaque été, on voit appa­raître sur la peau expo­sée des lésions (dys­ké­ra­toses) pré­néo­pla­siques dont la qua­si-tota­li­té dis­pa­raî­tra spon­ta­né­ment pen­dant l’hiver.

En effet, entre en jeu, alors, un autre méca­nisme de pro­tec­tion puis­sant : la sénes­cence. Les cel­lules de mam­mi­fères n’ont qu’une capa­ci­té de divi­sion limi­tée, elles ne peuvent se divi­ser qu’en­vi­ron 60 fois, parce qu’à chaque divi­sion les extré­mi­tés des chro­mo­somes (télo­mères) se rac­cour­cissent et quand celles-ci ont dis­pa­ru, les cel­lules ne peuvent plus se divi­ser et meurent. Ce méca­nisme éli­mine auto­ma­ti­que­ment les cel­lules vieillies dans les­quelles un grand nombre de lésions ont pu s’ac­cu­mu­ler. Ce méca­nisme de sau­ve­garde dis­pa­raît quand existe un autre défaut » l’immortalisation « .

Dans celle-ci, en rai­son de la réac­ti­va­tion d’un gène qui ne fonc­tionne nor­ma­le­ment que pen­dant l’embryogenèse, le télo­mère ne se rac­cour­cit plus à chaque divi­sion, la cel­lule est deve­nue immor­telle. Quand une cel­lule ini­tiée dont l’a­pop­tose ne fonc­tionne plus devient en outre immor­telle, il a été ain­si créé une lignée de cel­lules dont la can­cé­ri­sa­tion devient pos­sible car de nou­velles lésions peuvent s’y accu­mu­ler, par exemple la perte des gènes inhi­bi­teurs de la pro­li­fé­ra­tion cel­lu­laire (tel le gène Rb) qui sont des gènes réces­sifs, c’est-à-dire dont il faut détruire (ou muter) les deux exem­plaires pré­sents dans la cel­lule pour entraî­ner une perte de la fonc­tion. Ain­si peut sur­ve­nir, chez quelques sujets et après des délais qui se chiffrent géné­ra­le­ment en plu­sieurs décen­nies, l’ap­pa­ri­tion de cel­lules plei­ne­ment cancéreuses.

Ce rap­pel explique que le fac­teur limi­ta­tif de la can­cé­ro­ge­nèse n’est pas l’é­vé­ne­ment ini­tial mais l’en­semble des évé­ne­ments ulté­rieurs que l’on regroupe sous le terme de pro­mo­tion, étape pen­dant laquelle les phé­no­mènes prin­ci­paux sont la pro­li­fé­ra­tion cel­lu­laire et l’al­té­ra­tion des liai­sons entre les cel­lules (désor­ga­ni­sa­tion tis­su­laire), puisque nor­ma­le­ment le deve­nir de chaque cel­lule est contrô­lé par les signaux venus des cel­lules voi­sines. De fait, les prin­ci­paux fac­teurs can­cé­ri­gènes révé­lés par l’é­pi­dé­mio­lo­gie sont non des agents muta­gènes mais des fac­teurs de pro­mo­tion comme l’al­cool, l’ir­ri­ta­tion, l’in­flam­ma­tion ou la suralimentation.

Pre­nons l’exemple du tabac qui est, avec le soleil, le fac­teur can­cé­ri­gène le plus étu­dié puis­qu’il est à l’o­ri­gine de 30 % des can­cers chez l’homme. La rela­tion dose-effet est E = k D2 t4,5 où » E » est le taux de can­cer en excès, » k » une constante, » D » le nombre de ciga­rettes fumées par jour et » t » la durée (en années) du taba­gisme. On voit le poids essen­tiel de la durée du taba­gisme (phase de pro­mo­tion). La rela­tion avec la dose n’est pas linéaire mais qua­dra­tique. Le rôle de la pro­mo­tion est sou­li­gné par l’é­vo­lu­tion de la fré­quence des can­cers après arrêt du taba­gisme : celle-ci dimi­nue rapi­de­ment et après vingt ans est reve­nue à une valeur à peine légè­re­ment supé­rieure à la normale.

Ain­si si l’on a fumé 20 ciga­rettes par jour de 17 à 37 ans, l’in­ha­la­tion, pen­dant toute cette période, de quan­ti­tés mas­sives de can­cé­ri­gènes ne laisse (si l’on a eu la chance de ne pas avoir eu de can­cer aupa­ra­vant) que des séquelles minimes : la pro­mo­tion appa­raît vingt fois plus impor­tante que l’i­ni­tia­tion, contrai­re­ment au pos­tu­lat de la rela­tion linéaire sans seuil. Or l’ir­ra­dia­tion chro­nique est un fac­teur de pro­mo­tion. Le fac­teur limi­ta­tif est non le nombre de cel­lules ini­tiées mais la promotion.

Ain­si, aucun des trois pos­tu­lats impli­qués par la rela­tion linéaire sans seuil n’est en accord avec nos connais­sances actuelles. On conçoit qu’on ait pu les pro­po­ser en 1960. Ils ne sont plus accep­tables aujourd’­hui. Il nous faut donc exa­mi­ner les don­nées expé­ri­men­tales et épi­dé­mio­lo­giques d’un œil cri­tique à la lumière des connais­sances actuelles.

Données expérimentales

Depuis un demi-siècle, un grand nombre d’ex­pé­riences ont été effec­tuées pour mesu­rer l’ef­fet can­cé­ri­gène des divers types de radia­tions. Depuis qu’on a pris conscience du rôle cri­tique de la rela­tion dose-effet pour l’é­va­lua­tion des risques des faibles doses, un effort a été effec­tué par deux groupes pour ras­sem­bler et ana­ly­ser l’en­semble des don­nées disponibles.

Tanoo­ka vient de publier les résul­tats d’une ana­lyse de plu­sieurs dizaines de publi­ca­tions. Il en res­sort l’ab­sence d’aug­men­ta­tion de la fré­quence des can­cers chez l’a­ni­mal pour des doses infé­rieures à 100 mSv et à dose égale une influence très forte du débit de dose.

P. Duport, à Otta­wa, a entre­pris, depuis trois ans, une tache tita­nesque : une méta-ana­lyse de l’en­semble des expé­riences ani­males ayant étu­dié la radio­car­ci­no­gé­nèse, soit plus d’une cen­taine de tra­vaux au cours des­quels 85 000 ani­maux ont été irra­diés, et sur les­quels 60 000 can­cers ont été obser­vés, com­pa­rés à 15 000 témoins. Les résul­tats pré­li­mi­naires confirment l’ab­sence d’aug­men­ta­tion de la fré­quence des can­cers pour des doses infé­rieures à quelques cen­taines de mGy de rayon X ou gamma.

Bien que l’on ne dis­pose pas encore de l’en­semble des résul­tats, il semble déjà que ces résul­tats concor­dants ne sont pas com­pa­tibles avec la rela­tion linéaire sans seuil. Ils militent en faveur de l’exis­tence d’un seuil pra­tique dont le niveau se situe­rait aux envi­rons de 100 à 500 mGy en fonc­tion du débit de dose, de la nature des par­ti­cules et du tis­su irradié.

Données épidémiologiques

De nom­breuses don­nées ont été acquises au cours de ces der­nières décen­nies. Le prin­ci­pal argu­ment en faveur de l’exis­tence d’une rela­tion linéaire sans seuil pro­ve­nait de l’a­na­lyse de la fré­quence des can­cers chez les sur­vi­vants d’Hi­ro­shi­ma et Naga­sa­ki ; celle-ci appa­rais­sait com­pa­tible avec une rela­tion linéaire entre 200 mSv et 3 Sv.

Tableau 2
​Effets can­cé­ri­gènes des rayon­ne­ments ionisants
Mor­ta­li­té (par an) en France entre
• Irra­dia­tion natu­relle : dose 2,5 mSv par an
Réduc­tion conce­vable (mai­son à haute teneur en radon)
0 et 6 000
0 et 600
• Irra­dia­tion médi­cale : dose moyenne 1 mSv par an Réduc­tion conce­vable (meilleures tech­niques, meilleurs appareillages) 5 et 2 500

3 et 800

• Éner­gie nucléaire (irra­dia­tion pro­fes­sion­nelle + publique + déchets) : dose au public 0,010 mSv par an
Réduc­tion concevable ?
0 et 25
 
0 et 5
Les limites supé­rieures de risque sont cal­cu­lées à par­tir des coef­fi­cients de risque de l’ICRP et de la rela­tion linéaire sans seuil. Ce sont celles qui sont indi­quées dans beau­coup d’articles et de manuels qui les pré­sentent comme une cer­ti­tude. Les limites infé­rieures du risque sont cal­cu­lées en sup­po­sant que les doses infé­rieures à 10 mSv/an ne sont pas can­cé­ri­gènes ; ain­si elles s’accordent mieux avec les connais­sances actuelles, or elles ne sont jamais mentionnées.
Ce tableau montre aus­si le gain impor­tant qui pour­rait résul­ter d’une meilleure radio­pro­tec­tion des malades et la faible amé­lio­ra­tion de la san­té publique qui serait obte­nue en rédui­sant l’irradiation due à l’énergie nucléaire puisque les risques, éven­tuels, sont déjà très faibles.

Cepen­dant, depuis cinq ans, on a mon­tré que la fré­quence des leu­cé­mies dans cette popu­la­tion ne sui­vait pas une rela­tion linéaire mais plu­tôt cur­vi­li­néaire (qua­dra­tique) avec un seuil pra­tique à 200 mSv. En ce qui concerne les tumeurs solides, ce n’est que depuis 1998 que l’on a remis en ques­tion l’exis­tence d’une rela­tion linéaire. En effet, on s’est alors aper­çu que la sous-esti­ma­tion des doses dues aux neu­trons, qui était connue depuis une décen­nie, pou­vait avoir pour consé­quence une sur­es­ti­ma­tion de l’ef­fet des faibles doses de pho­tons. Il appa­raît donc vrai­sem­blable que pour les tumeurs solides aus­si la courbe pour­rait être curvilinéaire.

En ce qui concerne les dizaines d’autres études, la plu­part d’entre elles ont, à faible dose, une pré­ci­sion si médiocre qu’elles ne per­mettent ni d’ex­clure ni d’af­fir­mer l’exis­tence d’un seuil. Quelques enquêtes, cepen­dant, ont atteint une puis­sance sta­tis­tique suf­fi­sante pour exclure une rela­tion linéaire sans seuil, notam­ment, comme nous l’a­vons vu, chez les sujets expo­sés à des radio­élé­ments natu­rels (radium, tho­rium). Mais il s’a­gis­sait d’é­met­teurs α et on pou­vait dis­cu­ter de la vali­di­té de ces résul­tats pour les photons.

Pour ceux-ci, les cal­culs sta­tis­tiques montrent qu’il fal­lait consti­tuer des cohortes de plu­sieurs cen­taines de mil­liers de sujets pour obte­nir des don­nées robustes. Le pro­blème parais­sait donc sans espoir, mais tout a chan­gé récem­ment. D’a­bord, la créa­tion de cohortes aus­si vastes est main­te­nant deve­nue pos­sible. La pre­mière étude au Centre inter­na­tio­nal de recherche sur le can­cer por­tait sur 100 000 tra­vailleurs du nucléaire. L’in­ci­dence des can­cers y était infé­rieure à celle obser­vée dans la popu­la­tion mais l’in­ter­valle de confiance était si large qu’on ne pou­vait pas exclure une rela­tion linéaire sans seuil. On a élar­gi l’é­tude pour englo­ber 500 000 sujets et les résul­tats seront pro­chai­ne­ment disponibles.

D’autres études por­tant sur 100 000 malades irra­diés montrent la fai­sa­bi­li­té de telles enquêtes, or en France seule on irra­die envi­ron 100 000 malades par an. Ces don­nées sont de plus en plus exploi­tées et cer­taines d’entre elles, par exemple la fré­quence des leu­cé­mies après admi­nis­tra­tion d’iode radio­ac­tif, per­mettent d’af­fir­mer que les résul­tats obte­nus ne sont pas com­pa­tibles avec la rela­tion linéaire sans seuil.

Tableau 3​— Com­pa­rai­son des risques pour la san­té entre sys­tèmes énergétiques
Cette com­pa­rai­son est basée sur les coûts-dom­mages par tonne de pol­luant éva­lués par le pro­jet ExternE de la Com­mis­sion euro­péenne : gra­phique four­ni par A. Rabl (France). Pour le nucléaire, le risque est cal­cu­lé, à par­tir de la rela­tion linéaire sans seuil, en tenant compte des effets can­cé­ri­gènes et géné­tiques pro­vo­qués par l’irradiation subie par les tra­vailleurs pro­fes­sion­nels et par l’ensemble de la popu­la­tion (soit pen­dant cent ans, soit pen­dant trois mille ans). Ce type d’estimation sur­es­time nota­ble­ment les risques dus à l’irradiation à faible dose et donne une grande marge de sécu­ri­té. À l’opposé, ce type de cal­cul n’est pas uti­li­sé pour les agents chi­miques géno­toxiques et can­cé­ri­gènes pro­duits par les autres agents.

Mais le plus grand espoir pour éva­luer l’ef­fet des faibles doses réside dans la com­pa­rai­son de l’in­ci­dence de cer­tains can­cers (en par­ti­cu­lier les leu­cé­mies) dans les diverses régions du globe en fonc­tion du niveau de l’ir­ra­dia­tion natu­relle. Celui-ci atteint ou dépasse 15 mSv/an voire 30 mSv/an dans cer­taines régions très peu­plées, par exemple dans le sud de l’Inde, au Bré­sil et en Chine.

Ces études sont déli­cates à effec­tuer mais les pre­miers résul­tats, très encou­ra­geants, ne montrent aucune varia­tion dans la fré­quence des can­cers en fonc­tion de la dose d’ir­ra­dia­tion natu­relle. On peut déjà en conclure qu’il est illé­gi­time d’u­ti­li­ser la rela­tion linéaire sans seuil pour éva­luer les risques d’ir­ra­dia­tion à dose de quelques mSv/an et a for­tio­ri les doses d’une dizaine de micro­sie­verts par an qui sont celles que reçoit la popu­la­tion fran­çaise du fait du fonc­tion­ne­ment des cen­trales nucléaires.

Dans ces gammes de doses, l’u­ti­li­sa­tion de la rela­tion linéaire sans seuil n’a aucune vali­di­té scien­ti­fique et l’es­ti­ma­tion des risques fon­dée sur de tels cal­culs doit être pros­crite. Il peut être utile pour ras­su­rer la popu­la­tion de mon­trer que ces cal­culs pes­si­mistes sug­gèrent des risques très faibles, mais il faut alors indi­quer que les risques réels peuvent être très infé­rieurs et voire nuls (tableau 2). On ne l’a pas assez fait, par exemple à pro­pos des risques de can­cer de la thy­roïde pro­vo­qués en France par les retom­bées de Tchernobyl.

Les cal­culs com­pa­rant les risques asso­ciés à la pro­duc­tion d’éner­gie selon la filière uti­li­sée indiquent que même avec ces cal­culs péna­li­sants les risques pro­ve­nant de la filière nucléaire sont, en fonc­tion­ne­ment nor­mal, très infé­rieurs à ceux cal­cu­lés, sans recours aux hypo­thèses de la rela­tion linéaire sans seuil, pour le char­bon, le pétrole et le gaz (tableau 3). Pour le nucléaire, on inclut par­fois les effets géné­tiques dans ces cal­culs, ceci ne serait admis­sible que si l’on intro­dui­sait ces mêmes risques géné­tiques pour les autres filières qui pro­duisent éga­le­ment des géno­toxiques aus­si dan­ge­reux que les radio­élé­ments, or ceci n’est pas fait. Rap­pe­lons que les enquêtes effec­tuées chez l’homme (notam­ment chez les des­cen­dants des sur­vi­vants d’Hi­ro­shi­ma et Naga­sa­ki soit envi­ron 80 000 sujets ou sur ceux des malades irra­diés à dose beau­coup plus éle­vée) n’ont déce­lé aucun effet génétique.

Il existe à pro­pos des rayon­ne­ments ioni­sants des craintes latentes qui n’ont pas de fon­de­ment scien­ti­fique mais qui néan­moins entraînent une sur­es­ti­ma­tion déli­bé­rée des risques pour accroître la marge de sécu­ri­té. Cette approche faite pour ras­su­rer a para­doxa­le­ment aug­men­té l’in­quié­tude. Je pren­drai deux exemples des consé­quences néfastes de ces craintes irra­tion­nelles. L’ir­ra­dia­tion consti­tue une méthode très effi­cace pour sté­ri­li­ser cer­tains ali­ments sans en chan­ger leur goût ; ils n’ont bien enten­du aucun effet nocif comme en attestent les docu­ments de l’OMS ou de la Com­mu­nau­té euro­péenne. Pour le poivre et les autres épices qui pré­sentent des risques sani­taires (conta­mi­na­tion bac­té­rienne) impor­tants quand ils ne sont pas sté­ri­li­sés, l’ir­ra­dia­tion était jus­qu’à une date récente uti­li­sée. Un règle­ment a ren­du obli­ga­toire la men­tion » sté­ri­li­sée par ionisation « .

De peur d’un rejet du public, les fabri­cants y ont alors renon­cé et uti­lisent des pro­cé­dés moins effi­caces. Autre exemple, l’eau de mer est rela­ti­ve­ment riche en ura­nium, à tel point qu’on envi­sage d’u­ti­li­ser les océans comme une source qua­si inépui­sable pour la pro­duc­tion d’éner­gie nucléaire. Or on envi­sage d’in­ter­dire tout rejet radio­ac­tif en mer alors que ceux-ci n’aug­men­te­raient que de façon insi­gni­fiante la radio­ac­ti­vi­té des océans qui est de plus de 1022 Bq.

Conclusion

Les rayon­ne­ments ioni­sants à doses supé­rieures à quelques cen­taines de mil­li­sie­verts pro­voquent une aug­men­ta­tion de la fré­quence des can­cers et à doses supé­rieures à quelques sie­verts des lésions tis­su­laires qui peuvent être très inva­li­dantes, voire mor­telles. Mais aucun effet nocif n’a été déce­lé chez l’a­ni­mal ou l’homme pour des doses infé­rieures à une cen­taine de mSv en irra­dia­tion aiguë et à 500 mSv en irra­dia­tion à faible débit ou encore à une dizaine de mil­li­sie­verts par an en irra­dia­tion chro­nique pen­dant toute la durée de la vie.

Cette absence d’ef­fet semble due au nombre et à la puis­sance des méca­nismes de répa­ra­tion et de sau­ve­garde du génome. La vie s’est déve­lop­pée dans un bain de rayons ioni­sants et d’ul­tra­vio­lets ; très tôt sont appa­rus au cours de l’é­vo­lu­tion (déjà sur les bac­té­ries et les algues) des sys­tèmes capables de main­te­nir l’in­té­gri­té du génome lors d’une irra­dia­tion à faible débit de dose, sys­tèmes qui sont débor­dés quand le débit de dose est éle­vé (inter­valle de temps court entre les agressions).

Aucun effet géné­tique n’a jamais été obser­vé chez l’homme (ni chez les 80 000 des­cen­dants des sur­vi­vants d’Hi­ro­shi­ma et Naga­sa­ki ni chez les des­cen­dants des sujets irra­diés pour des rai­sons médi­cales). Faute de don­nées, on a cal­cu­lé les risques géné­tiques chez l’homme à par­tir de ceux obser­vés chez la sou­ris sans tenir compte des méca­nismes de pro­tec­tion plus puis­sants qui existent chez l’homme (éli­mi­na­tion pré­coce des embryons anor­maux). Par pru­dence, on sur­es­time déli­bé­ré­ment les risques de can­cer et les effets génétiques.

Les règles de radio­pro­tec­tion actuelles ont été cal­cu­lées pour offrir des marges de sécu­ri­té impor­tantes et rendent très sûre l’u­ti­li­sa­tion indus­trielle ou médi­cale des rayon­ne­ments ioni­sants (à condi­tion, bien enten­du, qu’elles soient res­pec­tées). La Com­mis­sion inter­na­tio­nale de pro­tec­tion contre les rayon­ne­ments envi­sage actuel­le­ment de les modi­fier pour tenir compte de l’a­van­cée des connaissances.

Le concept de dose col­lec­tive va être, pro­ba­ble­ment, revu car l’i­dée que toutes les irra­dia­tions, même les plus faibles, peuvent être addi­tion­nées pour cal­cu­ler un risque glo­bal n’est plus admis­sible puis­qu’il est de plus en plus évident que les doses de l’ordre de gran­deur de l’ir­ra­dia­tion natu­relle (quelques mSv/an) ne pré­sentent aucun risque. De même, la notion de dose limite indi­vi­duelle fixée à 1 mSv/an, soit à un niveau net­te­ment infé­rieur à la varia­tion de dose d’ir­ra­dia­tion natu­relle d’une région à l’autre de la France, sera sans doute, à terme, aban­don­née au pro­fit d’un autre concept : contrô­ler les émis­sions de radia­tions à la source.

Il est dif­fi­cile de pré­voir plus avant ce que seront les nou­velles règles mais tous les spé­cia­listes estiment que le pro­grès des connais­sances radio­bio­lo­giques et la non-vali­di­té de la rela­tion linéaire sans seuil pour des doses infé­rieures à l’ir­ra­dia­tion natu­relle imposent un chan­ge­ment pro­fond de doc­trine. Il ne faut pas que les contraintes légi­times impo­sées par la radio­pro­tec­tion pro­voquent la peur de toute irra­dia­tion, car ceci pour­rait avoir des consé­quences fâcheuses pour la pra­tique médi­cale (crainte des exa­mens radio­lo­giques) comme pour la pro­duc­tion d’éner­gie. Pour la radio­ac­ti­vi­té comme pour tous les agents chi­miques ou phy­siques (rayons UV du soleil) » c’est, comme le disait Claude Ber­nard, la dose qui fait le poison « .

Biblio­gra­phie

1 – Uni­ted Nations Scien­ti­fic Com­mit­tee on the Effects of Ato­mic Radia­tion (UNSCEAR). Report to the géné­ral assem­bly New York 2000, vol. 1 : 566 pages, vol. 2 : 654 pages.
2 – Aca­dé­mie des sciences – Pro­blèmes liés aux effets des faibles doses de radia­tions ioni­santes – Rap­port n° 34 – Tech­nique et Docu­men­ta­tion, 1995, 121 p.
3 – Aca­dé­mie des sciences – Col­loque : Risques can­cé­ro­gènes dus aux rayon­ne­ments ioni­sants – Comptes ren­dus Aca­dé­mie des sciences, Série III, 1999, vol. 322, 81–256.
4 – Galle P., Pau­lin R. – Bio­phy­sique – 1 – Radio­bio­lo­gie – Radio­pa­tho­lo­gie (Col­lec­tion Abré­gés), Mas­son 2000, 3e édi­tion, 253 p.
5 – Tanoo­ka H. Thre­shold dose-reponse in radia­tion car­ci­no­ge­ne­sis an approach from chro­nic irra­dia­tion and a review of non-tumour doses. Int. J. Radiat. Biol. 2001, 77, 541–551.
6 – Tubia­na M. – Les effets can­cé­ro­gènes des faibles doses de radia­tions. Cancer/Radiothérapie 1999, 3, 203–214.
7 – Tubia­na M. – Radia­tion risks in pers­pec­tive : radia­tion indu­ced can­cer among can­cer risks. Radiat. Envi­ron. Bio­phys. 2000, 39, 3 – 16.
8 – Masse R. – Expo­si­tion à faibles doses et effets bio­lo­giques des rayon­ne­ments ioni­sants. Comptes ren­dus Aca­dé­mie des sciences 2000, 323, 633–640.
9 – Tubia­na M., Lal­le­meand J. Radio­bio­lo­gie – Radio­pro­tec­tion. Que sais-je ? 2002.

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1. La dose d’ir­ra­dia­tion se mesure en gray (Gy). Un maté­riau reçoit une dose de 1 Gy quand l’éner­gie trans­fé­rée par les rayon­ne­ments à la matière est de 1 joule par kg ; ce qui cor­res­pond approxi­ma­ti­ve­ment à 2.1017 ioni­sa­tions par kg, donc 2.105 ioni­sa­tions dans une cel­lule (masse 10-9 g).
Pour tenir compte des varia­tions d’ef­fi­ca­ci­té bio­lo­gique en fonc­tion de la nature des rayon­ne­ments, on a intro­duit une autre uni­té le sie­vert (Sv) qui exprime la quan­ti­té de dom­mage bio­lo­gique ou dose équi­va­lente. La dose en Sv est égale à la dose en Gy mul­ti­pliée par un fac­teur de qua­li­té qui tient compte de l’ef­fi­ca­ci­té bio­lo­gique rela­tive. Pour les rayons a par exemple Q = 20. Pour les rayons X ou g : Q = 1 dans ce cas la dose en Gy est égale à la dose en Sv.
On uti­lise aus­si le sie­vert pour une autre gran­deur, la dose effi­cace qui qui prend en compte la quan­ti­té et la nature des tis­sus irra­diés (ce n’est pas la même chose de don­ner 1 Gy à un orteil ou à l’en­semble de l’organisme).
2. voir rap­port UNSCEAR 1994
3. WLM : Wor­king level month, c’est une uni­té pra­tique uti­li­sée dans les mines.

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