L’ambassade de France en Israël.

Le rôle de l’ambassade de France en Israël

Dossier : Israël : Les X et la Start-up NationMagazine N°728 Octobre 2017
Par Florent DELLA VALLE (05)

L’ambassade de France à Tel-Aviv ne se contente pas d’ai­der dans son rôle éco­no­mique les entre­prises fran­çaises à déve­lop­per leur acti­vi­té com­mer­ciale. Elle doit aus­si s’intéresser à l’innovation israé­lienne pour tis­ser des par­te­na­riats tech­no­lo­giques et donc recher­cher les domaines où les savoir-faire sont les plus complémentaires. 

La carac­té­ris­tique la plus saillante d’Israël est incon­tes­ta­ble­ment sa spé­cia­li­sa­tion dans les high-tech, qui la fait recon­naître aujourd’hui comme l’un des pôles majeurs d’innovation à l’échelle mondiale. 

“ 5 700 entreprises françaises exportent en Israël ”

Mais cet aspect écla­tant ne doit pas faire oublier qu’Israël est éga­le­ment un mar­ché pour nos entre­prises. Le pays pos­sède aujourd’hui un PIB com­pa­rable à celui du Dane­mark mais sa crois­sance est beau­coup plus forte (4 % en 2016). 

Aujourd’hui, 5 700 entre­prises exportent 1,35 mil­liard d’euros de biens vers Israël, ce qui place la France dans le top 10 des four­nis­seurs d’Israël. L’évolution est rela­ti­ve­ment stable, ce qui n’est pas for­cé­ment un résul­tat satis­fai­sant au vu de la crois­sance du marché ! 

REPÈRES

Le contexte géopolitique régional d’Israël est si délicat que les questions qui s’y rapportent échappent assez rapidement au champ d’initiative de l’ambassade.
Une des conséquences est que les autres dimensions de la diplomatie (économie et commerce, culture, sciences, défense, etc.), plutôt que d’être étouffées par le sujet israélo-palestinien, prennent une place importante dans les actions des équipes du poste.

CINQ VOIES DE SOUTIEN AUX EXPORTATIONS FRANÇAISES


L’ambassade de France en Israël. © PHOTO AMBASSADE

L’ambassade agit donc à plu­sieurs niveaux pour sou­te­nir les expor­ta­tions fran­çaises. Elle fait la pro­mo­tion du mar­ché israé­lien en France avec le sou­ci de lever les appré­hen­sions des entre­prises fran­çaises. La répu­ta­tion d’un pays com­pli­qué, d’un mar­ché peu ouvert et trop étroit a cer­tai­ne­ment inhi­bé une par­tie des expor­ta­teurs poten­tiels jusqu’à ces der­nières années. 

Elle pro­meut les pro­duits ou ser­vices fran­çais en Israël : la semaine de la gas­tro­no­mie en Israël est un exemple. Elle accom­pagne des entre­prises : Busi­ness France pos­sède une équipe de 9 per­sonnes sur place qui aident chaque année 200 entre­prises à nouer des contacts d’affaires en Israël. 

Elle tra­vaille à la levée des bar­rières de mar­ché, en lien avec la délé­ga­tion de l’Union euro­péenne. Enfin, elle sou­tient l’offre fran­çaise dans le cadre des grands contrats. 

DES SOURCES D’INSPIRATION ET DE DÉVELOPPEMENT

La spé­ci­fi­ci­té du poste en Israël vient de l’innovation israé­lienne, à la fois source d’inspiration (autant pour son fonc­tion­ne­ment que pour sa dimen­sion cultu­relle) et source d’opportunités pour nos entreprises. 

En effet, la com­pé­ti­ti­vi­té de l’offre fran­çaise à l’international ne peut repo­ser entiè­re­ment sur l’innovation pro­duite au sein de nos fron­tières ; être pré­sent là où l’innovation se fait est indis­pen­sable et Israël est l’un de ces lieux. 

C’est pour­quoi l’équipe de l’ambassade est rela­ti­ve­ment plus étof­fée que dans un pays équi­valent en popu­la­tion ou en PIB. Ain­si, le ser­vice éco­no­mique coor­donne l’action d’un « expert tech­nique inter­na­tio­nal » d’Expertise France, d’un repré­sen­tant de Bpi­france, d’un VI (volon­taire inter­na­tio­nal) de l’INPI et s’appuie éga­le­ment au besoin sur les réfé­rents sec­to­riels de Busi­ness France et sur l’attaché de coor­di­na­tion scien­ti­fique et universitaire. 

Cette dimen­sion n’est pas non plus étran­gère à la créa­tion, il y a cinq ans, du poste que j’occupe ni au choix de mon pré­dé­ces­seur (Lio­nel Corre, 2000). 

UN APPUI FORT AUX ENTREPRISES

La démarche de se rap­pro­cher de l’innovation israé­lienne appar­tient aux entre­prises et elles sont de plus en plus nom­breuses à par­ti­ci­per à des évé­ne­ments tels que le DLD Inno­va­tion Fes­ti­val de Tel-Aviv en septembre. 

DE BELLES OPPORTUNITÉS

En matière de grands contrats, les principales opportunités se situent dans le domaine des transports en commun, appelés à se développer fortement dans les prochaines décennies tant Israël est en retard dans ce domaine. Beaucoup de groupes français sont déjà présents dans ce secteur (Alstom, SNCF, Thales, Systra, Egis, etc.).

L’ambassade a néan­moins un rôle (pro)actif à jouer, tant pour inté­res­ser conti­nû­ment les entre­prises fran­çaises à l’innovation israé­lienne que pour les aider à tis­ser des par­te­na­riats tech­no­lo­giques. Par­mi les outils mobi­li­sables à cette fin, il existe depuis 1992 un accord bila­té­ral de sou­tien aux pro­jets de R & D, le FIRAD, ain­si qu’un pro­gramme d’échange de start-up bap­ti­sé French Tech tour. 

Notre équipe a pour mis­sion de cer­ner avec le plus de pré­ci­sions pos­sible les domaines où l’innovation israé­lienne est réel­le­ment en pointe et où la com­plé­men­ta­ri­té avec les savoir-faire fran­çais est la plus grande. 

C’est en effet sur ceux-là qu’il convient de concen­trer notre effort en matière de par­te­na­riats. La mobi­li­té intel­li­gente est un exemple et ce n’est pas par hasard si Renault, par exemple, a ouvert récem­ment un labo­ra­toire d’innovation à Tel-Aviv. 

FRENCH TECH HUB

Enfin, Tel-Aviv se devait de faire par­tie des lieux où se sont consti­tués, sous la ban­nière de la French Tech et grâce au tra­vail de mon pré­dé­ces­seur, les réseaux d’innovateurs fran­çais dési­gnés comme French Tech Hub. 

“ Cerner les domaines où l’innovation israélienne est réellement en pointe ”

Et c’était d’autant plus per­ti­nent en Israël que les réseaux humains sont la clef de la den­si­té et du dyna­misme de l’écosystème local. Ce réseau doit être un pont entre les deux pays, tant pour atti­rer les entre­pre­neurs israé­liens en France que pour faci­li­ter l’atterrissage d’entrepreneurs fran­çais dans la Sili­con Wadi. 

Il démul­ti­plie ain­si la por­tée des outils publics que l’ambassade met en œuvre (par­te­na­riats, pro­mo­tion de l’attractivité, etc.) dans un domaine où la coopé­ra­tion ins­ti­tu­tion­nelle n’est pas tou­jours le levier le plus efficace. 

UNE TERRE DE CONTRASTES

La mis­sion la plus fon­da­men­tale mais aus­si la plus dis­crète de l’équipe éco­no­mique est d’informer la France de la situa­tion éco­no­mique et finan­cière israé­lienne. Israël offre à l’analyse un cas très inté­res­sant : c’est un pays de l’OCDE (depuis 2010) dont les carac­té­ris­tiques sont sou­vent éloi­gnées de la norme, soit posi­ti­ve­ment (crois­sance, taux de chô­mage, inno­va­tion), soit néga­ti­ve­ment (inéga­li­tés, pro­duc­ti­vi­té, ouverture). 

Réunion du conseil économique de l’ambassade de France en Israël
Réunion du conseil éco­no­mique de l’ambassade (février 2017).

Il y a d’un côté la Start-up Nation et de l’autre des sec­teurs tra­di­tion­nels peu moder­ni­sés. Cette dua­li­té se reflète éga­le­ment dans la socié­té, rela­ti­ve­ment stra­ti­fiée, où les classes aisées cos­mo­po­lites et par­fai­te­ment anglo­phones côtoient des classes plus modestes (com­mer­çants, arti­sans, employés, etc.) com­pa­rables à celles d’autres pays de la région. 

UN MODÈLE MENACÉ À TERME

Mal­gré les nom­breux défis aux­quels le pays fait face, la période qu’il tra­verse du point de vue éco­no­mique est par­ti­cu­liè­re­ment pros­père. Or les don­nées socio-éco­no­miques montrent que le modèle actuel n’est pas durable. 

La prin­ci­pale rai­son est démo­gra­phique : les popu­la­tions juives ortho­doxes et arabes d’Israël, moins for­mées et par­ti­ci­pant peu au mar­ché du tra­vail, pour­raient repré­sen­ter plus de la moi­tié de la popu­la­tion d’ici qua­rante ans. 

Si les déci­deurs sont bien conscients de cette dif­fi­cul­té, les mesures de long terme pour y remé­dier ne sont pas prises. Il s’agit avant tout d’un sujet social et éco­no­mique, mais dont les réper­cus­sions sont évi­dem­ment bien plus larges.

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