Le passif est un actif

Dossier : Gestion d'actifMagazine N°634 Avril 2008
Par Guillaume ARNAUD (X94)

Ces dettes ont connu leur heure de gloire dans les années 80, avec les fameux junk bonds, élé­gam­ment tra­duits en fran­çais par obli­ga­tions pour­ries, qui res­te­ront à jamais liées au nom de Michael Mil­ken qui déve­lop­pe­ra le mar­ché avec un suc­cès incroyable avant de connaître la déchéance et la pri­son. Le désa­mour fran­çais pour cette classe d’ac­tifs prend aus­si sa source dans l’af­faire » Exe­cu­tive Life » qui mine­ra le capi­ta­lisme fran­çais pen­dant plus de dix ans, jusque dans les années 2000. En effet, si le prin­ci­pal grief rete­nu contre le Cré­dit Lyon­nais était d’a­voir contrô­lé une socié­té d’as­su­rances aux États-Unis, ce qui était inter­dit par la loi amé­ri­caine, la rai­son prin­ci­pale de l’a­chat de cette com­pa­gnie d’as­su­rances était son por­te­feuille d’o­bli­ga­tion, qui s’est révé­lé être une mine d’or pour son acquéreur. 

La mau­vaise image liée à des scan­dales finan­ciers est injustifiée. 

Cette mau­vaise image liée à des scan­dales finan­ciers est bien sou­vent injus­ti­fiée, elle se retrouve pour­tant dans des textes régis­sant la ges­tion d’ac­tif en France. Par exemple, l’en­semble des socié­tés sou­mises au règle­ment Arco. Agirc, notam­ment l’en­semble des caisses de retraite en France, n’ont pas le droit d’a­che­ter en direct des obli­ga­tions dites non invest­ment grade, c’est-à-dire ne béné­fi­ciant pas d’une nota­tion supé­rieure ou égale à BBB. Cela crée une situa­tion para­doxale : un ins­ti­tu­tion­nel peut ache­ter l’ac­tion d’une socié­té non invest­ment grade, mais pas sa dette, d’un risque pour­tant moindre par construc­tion puisque la dette est tou­jours rem­bour­sée en prio­ri­té par rap­port au capital. 

Un terrain de jeu privilégié

De nom­breux fac­teurs entrent en jeu dans l’é­va­lua­tion d’une obli­ga­tion et en font un pro­duit plus com­plexe qu’une action : durée de vie finie ; sen­si­bi­li­té à l’é­vo­lu­tion des taux ; risque de défaut ; options qui sou­vent s’y rat­tachent (call, put, conver­sion..i) ; asy­mé­trie de la dis­tri­bu­tion de son ren­de­ment espé­ré (une forte pro­ba­bi­li­té du rem­bour­se­ment du pro­duit, ver­sus une faible pro­ba­bi­li­té de défaut qui en revanche peut entraî­ner une perte pour l’investisseur). 

Un instrument indispensable

La dette a de tout temps été le nerf de la guerre (au sens propre comme au sens figu­ré). Elle est indis­pen­sable au bon fonc­tion­ne­ment de l’é­co­no­mie et au déve­lop­pe­ment du tis­su indus­triel et com­mer­cial. La crise du cré­dit que l’on connaît actuel­le­ment ne va pas tar­der à nous le démon­trer. Arrê­tons-nous un ins­tant sur l’un de ces types de dette : la mez­za­nine. La dette mez­za­nine est un rouage indis­pen­sable au bon fonc­tion­ne­ment des LBO et un moteur de crois­sance pour les PME. Elle s’in­ter­cale entre le capi­tal et la dette ban­caire, d’où sa qua­li­fi­ca­tion de mez­za­nine, et four­nit à l’en­tre­prise un com­plé­ment de res­sources à long terme indis­pen­sable à son déve­lop­pe­ment. Comme tout bon pro­duit, elle est à consom­mer avec modé­ra­tion. Un levier exces­sif entraî­ne­ra auto­ma­ti­que­ment des frais finan­ciers éle­vés et fra­gi­li­se­ra l’entreprise. 

Un moteur

La dette est l’un des moteurs fon­da­men­taux de l’é­co­no­mie de mar­ché, il suf­fit de voir quels mon­tants les banques cen­trales sont prêtes à allouer à l’é­co­no­mie pour évi­ter le tant redou­té cre­dit crunch. Une ana­lyse en pro­fon­deur de cette classe d’ac­tifs montre qu’elle a su et qu’elle sau­ra encore repré­sen­ter pour des ges­tion­naires d’ac­tifs avi­sés un juste milieu entre la par­fois trop grande vola­ti­li­té du mar­ché action et les ren­de­ments trop faibles du mar­ché obli­ga­taire sans risque.

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