L’AFRIQUE EN NOIR ET BLANC

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°657 Septembre 2010Par : Jean Brugidou (43)Rédacteur : Gérard de Ligny (43) Africain épisodiqueEditeur : Paris – Éditions Thélès - 2010 - 11, rue Martel, 75010 Paris. Tél. : 01.40.20.09.10.

Couverture du livre : L'Afrique en noir et blancEnfin un nar­ra­teur qui nous dévoile toutes ses sources ! Certes ça lui est facile puisqu’il n’a qu’une seule source : son jour­nal de bord pen­dant qua­torze ans de vie pro­fes­sion­nelle de 1956 à 1970… Et ce jour­nal est celui d’un « char­gé de mis­sion », non d’un tou­riste, ni d’un pro­phète sélec­tion­nant ses aven­tures pour enflam­mer ses dis­ciples. Sa langue est aus­si fluide que celle d’André Gide, mais au lieu de men­tir il dit la vérité.

Ce livre est-il conven­tion­nel et l’époque est-elle trop ancienne pour éclai­rer le juge­ment du lec­teur sur l’Afrique d’aujourd’hui ? Non, c’est plein de vie, beau­coup plus que les dic­tion­naires his­to­riques, et c’est d’actualité en 2010 car l’Afrique d’aujourd’hui s’y retrouve, la vio­lence en moins.

Jean Bru­gi­dou a été envoyé en Afrique noire à 34 ans pour une double mis­sion : d’une part ins­tal­ler une orga­ni­sa­tion finan­cière trans­pa­rente dans la cen­taine de comp­toirs import-export d’Unilever (10e entre­prise du monde), d’autre part pré­pa­rer dans le même réseau les adap­ta­tions néces­saires aux chan­ge­ments poli­tiques qui s’annoncent.

Sur le pre­mier point, il fit des décou­vertes : les employés fran­çais, à l’aise dans leurs tra­di­tions, ne vou­laient pas chan­ger de méthodes alors que les jeunes Noirs, dotés d’un cer­ti­fi­cat d’études pri­maires, adhé­raient aux nou­veau­tés qu’on venait de leur apprendre.

Sur le deuxième point : la plu­part des diri­geants colo­niaux, sym­pa­thiques et dyna­miques, ne s’inquiétaient pas de leur ave­nir. Ils sont sur­pris d’être mis sous la tutelle d’Africains débu­tants, alors qu’ils auraient dû pré­pa­rer une col­la­bo­ra­tion sans bles­sures d’amour-propre avec leurs « futurs dirigeants ».

Pour pro­gres­ser sur les deux axes, Jean Bru­gi­dou dut se mettre au contact avec les hommes de la brousse et se plon­ger dans la brousse elle-même. Les récits de ses voyages sont, pour les lec­teurs, incon­for­tables (« Va-t-il s’en sor­tir ? »), mais aus­si très ins­truc­tifs (« Com­ment vivre dans de tels pays ? »). Le lec­teur, un peu effa­ré, est en même temps enthou­sias­mé par la beau­té des pay­sages et l’étrangeté des habitants.

Car dans toutes ces aven­tures, le plus impor­tant était pour Jean Bru­gi­dou l’immersion dans le milieu afri­cain à tous ses étages. Ain­si a‑t-il connu l’Afrique « en noir et blanc » comme il l’appelle, sans un gramme de pré­ju­gés, et ses lec­teurs en profitent.

Poster un commentaire