La gestion d’actifs jouera un rôle essentiel dans l’épargne-retraite

Dossier : Gestion d'actifsMagazine N°630 Décembre 2007
Par Olivier GARNIER (X78)

REPÈRES
Pres­ta­tions défi­nies et coti­sa­tions définies

Un plan de retraite est dit à « pres­ta­tions défi­nies » lorsque l’employeur s’engage sur le niveau des pres­ta­tions, selon des termes défi­nis par contrat, géné­ra­le­ment en fonc­tion du salaire et de la durée d’emploi du salarié.

REPÈRES
Pres­ta­tions défi­nies et coti­sa­tions définies

Un plan de retraite est dit à « pres­ta­tions défi­nies » lorsque l’employeur s’engage sur le niveau des pres­ta­tions, selon des termes défi­nis par contrat, géné­ra­le­ment en fonc­tion du salaire et de la durée d’emploi du salarié.
Il est dit à « coti­sa­tions défi­nies » lorsque l’employeur s’engage sur le mon­tant des coti­sa­tions à ver­ser : les pres­ta­tions ne sont alors pas garan­ties, et dépendent de la ren­ta­bi­li­té obte­nue en pla­çant ces coti­sa­tions sur les mar­chés financiers.

Les risques liés à la retraite ont long­temps été assu­més par la soli­da­ri­té inter­gé­né­ra­tion­nelle dans le cadre des régimes publics par répar­ti­tion, et par les employeurs dans le cadre de fonds de pen­sion à « pres­ta­tions défi­nies ». On assiste aujourd’­hui à un trans­fert par­tiel ou total de ces risques sur les ménages dans le cadre de dis­po­si­tifs d’é­pargne-retraite, indi­vi­duels ou col­lec­tifs à « coti­sa­tions définies ».

Trois risques pour les ménages

L’é­pargne-retraite à coti­sa­tions défi­nies reporte sur les ménages trois types de risques : le risque déci­sion­nel, puisque c’est au sala­rié qu’in­combe alors la res­pon­sa­bi­li­té de choi­sir à la fois le mon­tant à épar­gner pour sa retraite et l’al­lo­ca­tion de cette épargne entre les dif­fé­rentes classes d’ac­tifs ; le risque de mar­ché, puisque à coti­sa­tions d’é­pargne don­nées le capi­tal dis­po­nible au moment de la retraite est com­plè­te­ment dépen­dant de l’é­vo­lu­tion des mar­chés finan­ciers durant la phase d’ac­cu­mu­la­tion ; le risque de lon­gé­vi­té, puisque celui-ci n’est plus mutua­li­sé ni assu­mé par l’employeur.

Dans ce contexte, le prin­ci­pal enjeu pour l’in­dus­trie de la ges­tion d’ac­tifs dans les années qui viennent sera de pro­po­ser aux ménages, aus­si bien à titre indi­vi­duel que dans le cadre de leur entre­prise, des ser­vices et des solu­tions répon­dant à leurs nou­veaux besoins en matière de retraite.

Information et conseil

Les employeurs sont de plus en plus réti­cents à jouer un rôle d’assureur et à assu­mer les risques liés à la retraite

Les ménages sont peu et mal pré­pa­rés à assu­mer l’en­tière res­pon­sa­bi­li­té de leurs déci­sions d’in­ves­tis­se­ment. La plu­part appré­hendent mal les risques pesant sur leur niveau de vie futur ; d’où une ten­dance à sous-esti­mer leurs besoins d’é­pargne-retraite, et sur­tout à com­men­cer trop tar­di­ve­ment à épar­gner. L’a­mé­lio­ra­tion de l’in­for­ma­tion des sala­riés sur leurs droits futurs sera, de ce point de vue, tout à fait utile et contri­bue­ra à une prise de conscience.

Les déci­sions d’al­lo­ca­tion d’ac­tifs sont extrê­me­ment com­plexes, ce qui engendre sou­vent des biais sim­pli­fi­ca­teurs et une ten­dance à inves­tir prin­ci­pa­le­ment dans ce qu’ils connaissent le mieux, c’est-à-dire les titres émis par leur propre employeur ou par les entre­prises de leur pays. Un tel com­por­te­ment les prive de l’un des grands avan­tages offerts par l’é­pargne-retraite : la pos­si­bi­li­té, via les mar­chés finan­ciers, de diver­si­fier leurs risques vers d’autres entre­prises, d’autres sec­teurs d’ac­ti­vi­té et d’autres cycles éco­no­miques ou démo­gra­phiques à l’étranger.

La cor­rec­tion de ces biais passe par des efforts accrus des auto­ri­tés publiques, des régu­la­teurs et des employeurs en matière d’é­du­ca­tion finan­cière et de normes pru­den­tielles. Tou­te­fois, il serait contre-pro­duc­tif d’en­ca­drer à l’ex­cès les choix des ménages, car cela les pri­ve­rait des nou­veaux degrés de liber­té offerts par l’é­pargne-retraite en com­plé­ment des régimes par répar­ti­tion1.

Piloter l’allocation d’actifs à long terme

L’un des prin­ci­paux attraits de l’é­pargne-retraite est de pou­voir faire béné­fi­cier les ménages du sup­plé­ment de ren­de­ment offert par les actions sur longue période. Les don­nées amé­ri­caines sur plus d’un siècle (1900−2006) montrent que le ren­de­ment réel moyen des actions s’est éta­bli à plus de 6 % par an pour les actions, contre 2 % pour les obli­ga­tions et 1 % pour un pla­ce­ment moné­taire. Cette hié­rar­chie se retrouve avec plus ou moins d’am­pleur dans tous les pays et sur toutes les périodes suf­fi­sam­ment longues. De même, le ren­de­ment des actions appa­raît net­te­ment supé­rieur au rythme de crois­sance à long terme de l’é­co­no­mie réelle (de l’ordre de 2 % à 3 %), qui, de façon sim­pli­fi­ca­trice, peut être assi­mi­lé au ren­de­ment actua­riel d’un régime de retraite par répartition.

De tels écarts ont des consé­quences tout à fait signi­fi­ca­tives : 1 000 euros immo­bi­li­sés pen­dant trente ans deviennent 5 700 euros (en euros d’au­jourd’­hui) s’ils sont inves­tis au taux réel de 6 %, à com­pa­rer à 1 800 euros s’ils sont inves­tis au taux de 2 %.

L’al­lo­ca­tion d’ac­tifs doit tenir compte du fait que le sala­rié-épar­gnant ne détient pas seule­ment un patri­moine finan­cier, mais aus­si un « capi­tal humain ». Ce der­nier peut être assi­mi­lé à la valeur actua­li­sée des salaires futurs, et décroît donc à mesure que l’âge de la retraite approche. Si les reve­nus sala­riaux sont fai­ble­ment ris­qués et peu cor­ré­lés aux actions, le sala­rié devra inves­tir davan­tage dans l’ac­tif le plus ris­qué (les actions) lors­qu’il est jeune (et donc gros déten­teur de l’ac­tif peu ris­qué qu’est son capi­tal humain), et réduire cette expo­si­tion au pro­fit des obli­ga­tions à mesure que son capi­tal humain diminuera.

Utiliser l’épargne accumulée

EN SAVOIR PLUS
Le risque des actions tend à dimi­nuer à mesure que l’horizon d’investissement s’allonge, contrai­re­ment à celui des obli­ga­tions. Les études empi­riques sur longue période montrent que le ren­de­ment réel des actions évo­lue, non pas selon une marche aléa­toire, mais tend à reve­nir vers sa valeur moyenne sur le long terme : en d’autres termes, lorsque les ren­de­ments pas­sés ont été infé­rieurs à la moyenne, cela aug­mente la pro­ba­bi­li­té que les ren­de­ments futurs seront supé­rieurs à cette moyenne (et réciproquement).

L’al­lon­ge­ment de l’es­pé­rance de vie des retrai­tés, com­bi­né au déve­lop­pe­ment de l’é­pargne-retraite à coti­sa­tions défi­nies, sou­lève des pro­blèmes nou­veaux en matière de ges­tion du risque de lon­gé­vi­té, puisque celui-ci n’est plus mutua­li­sé ni cou­vert par l’employeur. Le cas le plus cou­rant est notam­ment celui de la France, où l’é­pargne-retraite à coti­sa­tions défi­nies consti­tue un pilier com­plé­men­taire (sou­vent facul­ta­tif) aux régimes de base obli­ga­toires par répartition.

C’est dans ce cas qu’il existe sans doute le plus grand besoin de solu­tions nou­velles et inno­vantes. La sor­tie en rente, qu’elle soit obli­ga­toire ou option­nelle, n’est pro­ba­ble­ment pas opti­male lorsque les régimes de base four­nissent un reve­nu mini­mum garan­ti durant toute la durée de la retraite, et c’est encore plus vrai si le ménage consi­dé­ré est aus­si pro­prié­taire de son loge­ment (et béné­fi­cie ain­si d’une sorte de rente implicite).

Conser­ver sous forme de capi­tal l’é­pargne-retraite accu­mu­lée et l’u­ti­li­ser au moins pour par­tie (au-delà de retraits pro­gram­més régu­liers des­ti­nés à finan­cer un sup­plé­ment récur­rent de reve­nus) comme un fonds de réserve peut avoir plu­sieurs avan­tages. Du fait que la durée de la phase de retraite est de plus en plus longue et atteint sou­vent une ving­taine d’an­nées, cela per­met de conti­nuer à béné­fi­cier du sup­plé­ment de ren­de­ment qu’offrent les mar­chés finan­ciers sur le long terme. Une telle réserve peut être uti­li­sée si néces­saire pour faire face à des dépenses non récur­rentes ou impré­vues, comme celles liées à la san­té ou à la dépendance.

Offrir des solutions pendant la retraite elle-même

Le prin­ci­pal défi qu’au­ra à rele­ver notre indus­trie à l’ho­ri­zon 2015–2020 sera donc d’of­frir aux ménages des solu­tions de ges­tion d’ac­tifs non plus seule­ment pen­dant la phase d’ac­cu­mu­la­tion de l’é­pargne-retraite, mais aus­si pen­dant la retraite elle-même.

1. Une solu­tion pour gui­der les choix sans trop les contraindre consiste à mettre en place des options par défaut : sauf déci­sion contraire du sala­rié, celui-ci est auto­ma­ti­que­ment enrô­lé dans un plan d’é­pargne-retraite avec des ver­se­ments pério­diques pré­dé­fi­nis et un pilo­tage auto­ma­tique de son allo­ca­tion d’ac­tifs au cours du temps.

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