Jacques Vincent-Carrefour (55)

Jacques Vincent-Carrefour (55)

Dossier : ExpressionsMagazine N°688 Octobre 2013
Par Maurice BERNARD (48)

Jacques prend la res­pon­sa­bi­li­té de l’informatique à Lan­nion avec deux objec­tifs : appor­ter des moyens de cal­cul scien­ti­fique aux cher­cheurs du centre, et trou­ver les meilleures solu­tions pour les fonc­tions de com­mande et de ges­tion infor­ma­ti­sées pour le pro­jet Pla­ton (Pro­to­type lan­nio­nais d’autocommutateur télé­pho­nique à orga­ni­sa­tion numérique). 

La voie d’avenir

Depuis 1960, Louis-Joseph Libois et André Pinet, res­pon­sables du CNET Lan­nion, savaient que la voie d’avenir, aus­si bien pour les télé­com­mu­ni­ca­tions que pour l’informatique, était celle du numé­rique binaire avec de la mémoire. 

Lors du col­loque du Tri­cen­te­naire de la mort de Pas­cal (1962), Jacques Vincent-Car­re­four et Jean-Bap­tiste Jacob assistent à des expo­sés théo­riques, mais aus­si plus pra­tiques sur le cal­cul élec­tro­nique. Ce qui frappe les deux ingé­nieurs est la pré­sen­ta­tion d’un ordi­na­teur Packard Bell, le PB 250, com­mer­cia­li­sé en 1961, un des der­niers à uti­li­ser des lignes à retard magné­tos­tric­tives comme élé­ment de mémoire. 

À leur retour, ils décident de faire d’une pierre deux coups : uti­li­ser les lignes magné­tos­tric­tives pour réa­li­ser les fonc­tions logiques de com­mande et le PB 250 pour le centre de trai­te­ment des infor­ma­tions de Pla­ton. La maquette fonc­tionne en 1965. 

Logiciels spécifiques

Il soude lui-même des com­po­sants sur des cartes 

La seconde étape est de réa­li­ser un deuxième exem­plaire du cal­cu­la­teur expé­ri­men­tal Ram­sès en vue de l’affecter au Centre de trai­te­ment de l’information (CTI) du réseau Pla­ton. Pres­sé d’en dis­po­ser, Jacques se met par­fois à sou­der lui-même des com­po­sants sur des cartes. 

La mise en œuvre de ces deux cal­cu­la­teurs néces­site le déve­lop­pe­ment de logi­ciels spé­ci­fiques. La mise au point d’une biblio­thèque de cal­cul scien­ti­fique et d’un com­pi­la­teur For­tran III est ain­si assu­rée. La ges­tion infor­ma­ti­sée de Pla­ton a per­mis, à par­tir de 1972, le déploie­ment d’un réseau télé­pho­nique entiè­re­ment numé­ri­sé, une pre­mière mondiale. 

Retour à Lannion

Le goût des maths
Jacques Vincent-Car­re­four était inté­res­sé par les mathé­ma­tiques au point d’emporter Les Élé­ments de mathé­ma­tiques de Bour­ba­ki pour ses longs voyages par le train entre la Bre­tagne et Paris. 

Affec­té en 1975 à la direc­tion des Affaires indus­trielles et inter­na­tio­nales de la direc­tion géné­rale des Télé­com­mu­ni­ca­tions, Jacques y est char­gé de l’orientation des recherches du CNET et du déve­lop­pe­ment indus­triel en com­mu­ta­tion élec­tro­nique et en informatique. 

Puis il retourne à Lan­nion en 1979 pour diri­ger le nou­veau centre Lan­nion A, en coor­di­na­tion avec Jean Jer­pha­gnon, nom­mé direc­teur du centre Lan­nion B, deux centres nou­vel­le­ment créés par le CNET. Leur mis­sion est d’assurer une relance de l’établissement. Il s’agit notam­ment de réor­ga­ni­ser les acti­vi­tés de recherche et de lan­cer de nou­veaux projets. 

Tous ceux qui ont tra­vaillé avec lui ont gar­dé le sou­ve­nir ému d’un patron de haute com­pé­tence, pas­sion­né et proche de ses collaborateurs. 

La bonne impulsion au bon moment

Jacques n’occupe cette fonc­tion que pen­dant deux ans, mais il a don­né la bonne impul­sion au bon moment. En 1981, il apporte un concours ines­ti­mable à la défi­ni­tion des pro­grammes de tout le CNET. En 1987, il est nom­mé Délé­gué inter­mi­nis­té­riel à la sécu­ri­té des sys­tèmes d’information.

Au début des années 2000, il est l’un des fon­da­teurs de la toute nou­velle Aca­dé­mie des technologies. 

Mais il avait aus­si un jar­din secret, la bota­nique, qui tien­dra une grande place dans la fin d’une exis­tence trop courte.

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