FRÉDÉRIC CHOPIN : Les deux concerto pour piano

Dossier : Arts, Lettres et SciencesMagazine N°672 Février 2012Par : Evgeny Kissin, Nikolaï DemidenkoRédacteur : Marc Darmon (83)

L’année Cho­pin (2010) a été l’occasion d’un nombre impor­tant de célé­bra­tions. Les plus grands pia­nistes (Baren­boïm, Nel­son Freire, etc.) ont par­cou­ru le monde avec des pro­grammes « tout-Cho­pin ». Et cette soi­rée à Var­so­vie, pour célé­brer le 200e anni­ver­saire de la nais­sance du com­po­si­teur, a dû être un des temps forts de cette année : deux des plus grands pia­nistes actuels jouant lors de la même soi­rée les deux concer­tos du com­po­si­teur accom­pa­gnés par l’Orchestre phil­har­mo­nique de Var­so­vie diri­gé par son chef Anto­ni Wit.

Coffret DVD : CHOPI, The Piano ConcertosEn deux cents ans, les Érard et Pleyel du XIXe siècle ont été rem­pla­cés par des Stein­way. Mais ici l’orchestre est de taille réduite, n’écrase pas le pia­no. Le Phil­har­mo­nique de Var­so­vie joue par­fai­te­ment son rôle, il accom­pagne plus qu’il ne « concerte » avec le pia­no, ce qui est bien dans l’esprit de l’écriture de Cho­pin. Tou­te­fois il est par­fai­te­ment fin et élé­gant dans les pas­sages sym­pho­niques (intro­duc­tion du Pre­mier Concer­to par exemple), diri­gé par Wit, grand spé­cia­liste de ces œuvres, dont nous voyons la ges­tuelle com­plexe et riche. Tout cela dans le Concert Hall de Var­so­vie qui est une très belle salle, avec des orgues magnifiques.

Dans le Second Concer­to, en fait écrit en pre­mier, nous voyons en soliste le fan­tas­tique Evge­ny Kis­sin, dont beau­coup connaissent l’enregistrement qu’il réa­li­sa de cette œuvre à l’âge de treize ans (en 1984, quelques années avant d’être « révé­lé » par Kara­jan). Kis­sin joue en per­ma­nence à la fois sur les nuances et sur le ruba­to, cette sub­tile liber­té prise sur le rythme. Magni­fique de bout en bout, ce concer­to contient un deuxième mou­ve­ment qui est une vraie décla­ra­tion d’amour (l’œuvre est dédiée suc­ces­si­ve­ment à deux des amours de Cho­pin, de son époque polo­naise). Dans ce second mou­ve­ment, sous les doigts de Kis­sin, se crée une ten­sion énorme, avec une sec­tion cen­trale pro­pre­ment hypnotique.

Dans le Pre­mier Concer­to, le soliste est cette fois-ci Niko­laï Demi­den­ko, for­mi­dable pia­niste russe éga­le­ment, au jeu très clair, lisible, magni­fique, lumi­neux. Chaque soliste, après son inter­pré­ta­tion du concer­to, nous offre deux bis (une valse, l’Étude révo­lu­tion­naire, une mazur­ka…). On se rap­pelle alors le mer­veilleux inter­prète de réci­tal qu’est Kissin.

En blu-ray, ce concert est magni­fique : le son de l’orchestre comme celui du pia­no sont superbes, équi­va­lents à celui d’un concert, et l’image est par­faite. Un énorme plaisir.

C’est un très bel hom­mage pour l’année Cho­pin. On regrette que 2010, qui a aus­si été l’année Schu­mann, n’ait pas vu fleu­rir des ini­tia­tives de ce niveau pour Robert Schumann.

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