France et Allemagne, deux modèles différents

Dossier : L’entreprise dans la sociétéMagazine N°690 Décembre 2013
Par Stéphan GUINCHARD (94)

Les deux plus impor­tantes éco­no­mies d’Europe pré­sentent des dif­fé­rences signi­fi­ca­tives, que ce soit dans leur his­toire, leur per­for­mance actuelle ou leurs pers­pec­tives d’avenir. Elles ont, toutes deux, été tour à tour le « grand malade de l’Europe ».
Aujourd’hui, la per­for­mance éco­no­mique de l’Allemagne sus­cite beau­coup d’intérêt quant à son modèle : soit pour l’imiter, soit pour le critiquer.

La com­pa­rai­son n’a de sens que pour éclai­rer et mieux com­prendre. Il est vain de ten­ter de défi­nir le meilleur modèle. L’exemple de l’Allemagne nous offre ain­si plu­sieurs ensei­gne­ments à médi­ter sur la rela­tion au tra­vail et à l’entreprise, le dia­logue entre les par­te­naires sociaux, ain­si que la contri­bu­tion poten­tielle de l’entreprise à l’innovation, à la for­ma­tion et à l’avenir des jeunes.

Au-delà de l’histoire et des effets conjonc­tu­rels, les écarts de per­for­mances éco­no­miques entre les deux pays sont le résul­tat de choix de stra­té­gie éco­no­mique très dis­tincts, reflets d’une per­cep­tion très dif­fé­rente de l’économie et de la place de l’entreprise dans la société.

REPÈRES
L’Allemagne compte envi­ron 81 mil­lions d’habitants contre 66 mil­lions en France (ratio 0,8). En 2012, la France était en retard sur l’Allemagne en termes de PIB (ratio 0,7), de PIB par habi­tant (0,87), d’exportations (0,39), d’exportations par habi­tant (0,48).
La France pri­vi­lé­gie sa demande inté­rieure – la consom­ma­tion – et reste, rela­ti­ve­ment par­lant, peu tour­née vers l’exportation.
L’Allemagne a très clai­re­ment pré­ser­vé la com­pé­ti­ti­vi­té de ses pro­duc­teurs-expor­ta­teurs, pri­vi­lé­giant l’export à la demande inté­rieure, demande sous contrainte du fait de la modé­ra­tion sala­riale mise en place depuis l’entrée dans l’euro.

La capacité à exporter

L’entreprise alle­mande est per­çue comme source de crois­sance de par sa capa­ci­té à expor­ter (capa­ci­té à cap­ter la crois­sance à l’étranger) et donc comme source d’emploi. Tout doit être mis en œuvre pour lui faci­li­ter la tâche. En France, le consom­ma­teur est pri­vi­lé­gié, dans l’hypothèse qu’il va assu­rer par sa consom­ma­tion la bonne tenue de l’économie.

Un choix judicieux

En France, le consom­ma­teur est cen­sé assu­rer la bonne tenue de l’économie

Il n’y a pas de modèle domi­nant. Mais, au vu de la conjonc­ture des dix der­nières années, le choix alle­mand se révèle plus judi­cieux. Les pays émer­gents, et notam­ment la Chine, ont été le gise­ment prin­ci­pal de crois­sance dans le monde : la Chine est l’usine du monde ; mais qui équipe l’usine du monde ? L’Allemagne.

Alors que la France s’est détour­née de l’industrie depuis la fin des années 1990, avec le mythe de « l’industrie sans usines » puis de la « ter­tia­ri­sa­tion de l’économie », l’Allemagne est res­tée concen­trée sur son point fort : sa base indus­trielle. Effet d’aubaine, peut-être.

Tou­jours est-il que 80 % du com­merce inter­na­tio­nal repose sur des biens tan­gibles, et qu’une capa­ci­té manu­fac­tu­rière com­pé­ti­tive est la clé pour béné­fi­cier de ce commerce.

Foire ou salon

La capa­ci­té indus­trielle est aus­si cri­tique pour cap­ter la valeur ajou­tée créée. Elle est cru­ciale pour conver­tir des inno­va­tions en pro­duits mar­chands, et donc en réa­li­ser la valeur, ain­si que pour cap­ter la valeur ajou­tée dans une filière.

Emploi mal payé contre chômeur
Le taux de chô­mage est, gros­so modo, deux fois moins éle­vé en Alle­magne qu’en France. Cette situa­tion, qui éclaire les écarts de per­for­mance éco­no­mique, révèle une dif­fé­rence fon­da­men­tale : l’Allemagne a clai­re­ment choi­si l’option « un emploi mal payé plu­tôt qu’un chô­meur de plus ».
Cela révèle de pro­fondes dif­fé­rences quant à la place du tra­vail dans la socié­té et de la rela­tion au travail.

Exemple simple, la pro­duc­tion de sau­cisses, chaîne de valeur où l’élevage por­cin, fran­çais, est peu ren­table mais où la trans­for­ma­tion de la viande et la fabri­ca­tion de machines, alle­mandes, acca­parent l’essentiel de la valeur ajoutée.

Notons qu’en Alle­magne la chan­ce­lière inau­gure la Han­no­ver Messe (la Foire d’Hanovre, le plus grand salon mon­dial de l’industrie et des tech­no­lo­gies), tan­dis qu’en France, c’est le Salon de l’agriculture qui tient une place de choix dans le calen­drier présidentiel.

La proxi­mi­té de la pro­duc­tion et de la R & D est éga­le­ment cri­tique pour la com­pé­ti­ti­vi­té : la concep­tion des pro­duits doit inté­grer les contraintes spé­ci­fiques de la pro­duc­tion afin de réduire les coûts de pro­duc­tion et d’assemblage.

Les entreprises de taille intermédiaire

Il faut impé­ra­ti­ve­ment dis­tin­guer les dif­fé­rents types d’entreprises pour en éva­luer le rôle dans la société.

Il ne faut pas confondre inter­na­tio­na­li­sa­tion et délocalisation

En France, par « entre­prise », on entend prin­ci­pa­le­ment « grand groupe» ; par­fois, mais rare­ment, la petite PME, voire depuis peu, l’auto-entrepreneur. En pleine cohé­rence avec notre héri­tage d’un État cen­tra­li­sé fort, ancré dans l’histoire par la France du Roi-Soleil, nous n’avons d’yeux que pour quelques entre­prises du CAC 40, qui semblent faire à elles seules notre éco­no­mie : Air­bus, L’Oréal, Miche­lin, LVMH, Kering, etc.

Les cham­pions cachés
En Alle­magne, le fameux Mit­tel­stand repré­sente bien, et depuis fort long­temps, le cœur même du tis­su éco­no­mique. Les 12 000 entre­prises du Mit­tel­stand alle­mand génèrent 70% des expor­ta­tions du pays.
Les seuls 1307 « cham­pions cachés » alle­mands (dont le chiffre d’affaires est infé­rieur à 3 mil­liards d’euros) en repré­sentent 25% (voir La Jaune et la Rouge, n° 687, août-sep­tembre 2013, p. 50).

À l’opposé du spectre règne une cer­taine sym­pa­thie pour la PME de 50 per­sonnes, sous-trai­tant de l’un de ces gros don­neurs d’ordre.

Ce n’est qu’en 2008 que la France a décou­vert ses « entre­prises de taille inter­mé­diaire » (ETI) : entre 250 et 5 000 employés, entre 50 et 1 500 mil­lions d’euros de chiffre d’affaires. En effet, ces ETI n’existent offi­ciel­le­ment dans les registres de l’INSEE que depuis 2008. La France pos­sède quelques grands groupes de plus que l’Allemagne. Elle dis­pose éga­le­ment d’un fort esprit entre­pre­neu­rial (620 000 entre­prises créées en France – pour moi­tié créa­tions d’auto-entrepreneurs – contre 450 000 en Alle­magne, en 2010) mais la dif­fé­rence, signi­fi­ca­tive, se fait avec les « entre­prises de taille intermédiaire ».

La proximité du tissu économique

La fer­me­ture d’une PME n’émeut mal­heu­reu­se­ment pas l’opinion publique dans la même pro­por­tion que la fer­me­ture d’un site indus­triel d’un grand groupe. En Alle­magne, du fait de la struc­ture plus décen­tra­li­sée du pays, orga­ni­sé en Län­der, l’écosystème local est beau­coup plus proche de son tis­su éco­no­mique de PME et d’ETI. Enfin, les ETI montrent qu’il ne faut pas confondre inter­na­tio­na­li­sa­tion et délocalisation.

Les grands groupes tendent à ins­tal­ler des struc­tures locales à l’étranger pour pro­fi­ter de la crois­sance inter­na­tio­nale. Les struc­tures de plus petite taille tendent à expor­ter plus, à par­tir d’une base domes­tique qui n’est pas remise en cause par l’internationalisation de l’activité, et qui bien au contraire s’en trouve ren­for­cée (Porsche conti­nue à pro­duire en Alle­magne ; les ETI gardent jalou­se­ment leurs centres de R&D dans leur « ter­roir d’origine » pour n’ouvrir que des bureaux com­mer­ciaux ou de repré­sen­ta­tion dans les pays émergents).

Les grands groupes

Alors que les grands groupes pèsent autant dans les deux éco­no­mies, nous note­rons quelques dif­fé­rences dans l’impact qu’ils ont sur le tis­su éco­no­mique natio­nal. Les notions de soli­da­ri­té de filière et de pré­fé­rence natio­nale sont beau­coup plus pré­sentes en Allemagne.

Elles existent éga­le­ment en France, mais de façon plus inégale entre les sec­teurs d’activité : l’aéronautique en est un exemple posi­tif. En revanche, c’est beau­coup moins le cas dans l’automobile. Une ques­tion aus­si simple que celle des délais de paie­ment, ques­tion de tré­so­re­rie, devient vite une ques­tion de vie ou de mort pour une PME. Elle est sous-esti­mée, en France, par l’État et les grands groupes, têtes de filières.

Les partenaires sociaux

Un point frap­pant de dif­fé­rence de culture éco­no­mique entre les deux pays est la nature des rela­tions entre par­te­naires sociaux. L’Allemagne est bien connue pour la spé­ci­fi­ci­té de sa gou­ver­nance, Mit­bes­tim­mung (« coges­tion » ou « codé­ter­mi­na­tion »), carac­té­ri­sée par la recherche du consen­sus entre les par­ties pre­nantes de l’entreprise : les syn­di­cats, les employés sont repré­sen­tés dans les organes de déci­sion des grandes entre­prises et par­ti­cipent ain­si aux orien­ta­tions stra­té­giques et aux choix, même les plus difficiles.

L’Allemagne se concentre sur la créa­tion de la valeur avant d’aborder la ques­tion de son partage

En France, nous note­rons la nature trop sou­vent conflic­tuelle de ces rap­ports, dans une logique sur­an­née de « conflits de classes ».

L’Allemagne se concentre sur la créa­tion de valeur avant d’aborder la ques­tion de son par­tage, alors que la France peut par­fois abor­der la ques­tion du par­tage trop rapi­de­ment, sans s’assurer au préa­lable qu’il y a quelque chose à partager.

À ce titre, il est sur­pre­nant que la presse ait beau­coup plus lar­ge­ment cou­vert la dis­tri­bu­tion de primes spé­ciales par Volks­wa­gen à ses employés alle­mands ces der­nières années, que la contri­bu­tion de Nis­san aux primes spé­ciales des employés fran­çais de Renault.

La réticence à grandir

La France ne compte des ETI que depuis 2008. Cette incon­grui­té est révé­la­trice du manque de com­pré­hen­sion de la plu­part des Fran­çais vis-à-vis de ces entre­prises et de leurs diri­geants, sou­vent action­naires (70% des ETI sont des entre­prises de nature patrimoniale).

La contrainte des seuils
En France, à fran­chir les seuils, cer­tains fati­diques, de 50, puis 250 sala­riés, on ne risque que de s’attirer des contraintes sup­plé­men­taires. Alors que ces entre­prises res­tent encore très fra­giles, les exi­gences de la légis­la­tion se dur­cissent rapi­de­ment, drai­nant à des fins moins utiles leurs res­sources encore maigres.
De plus, le patron court le risque de perdre son image, somme toute bon­homme et posi­tive, de « patron de PME », pour celle, plus tein­tée de soup­çons, de « patron de grosse boîte ».

Ces entre­prises sont donc mal connues en France, et, quand leurs patrons sortent de l’ombre, c’est sou­vent pour béné­fi­cier de l’image de « patrons voyous », si en vogue de nos jours. Il est frap­pant de sen­tir la réti­cence qu’ont les patrons de PME à trop gran­dir, et même à trans­mettre leur entre­prise à leurs enfants.

En Alle­magne, ces ques­tions ne se posent pas : la crois­sance est le salut de la petite entreprise.

Et le suc­cès d’une géné­ra­tion diri­geante ne sau­ra se mesu­rer qu’à sa capa­ci­té à trans­mettre à la géné­ra­tion sui­vante une entre­prise de taille plus impor­tante et en meilleure san­té que celle qu’elle a reçue de la géné­ra­tion pré­cé­dente. Quant à prendre en charge l’entreprise fami­liale, cela relève pour ain­si dire du devoir pour la géné­ra­tion suivante.

Enfin, sou­li­gnons qu’en France tout l’écosystème (aides de l’État, acteurs finan­ciers, banques, mar­ché, etc.) est struc­tu­ré pour tra­vailler avec les grands groupes, d’une part et les PME d’autre part, mais qu’il reste glo­ba­le­ment inadap­té aux entre­prises qui réa­lisent entre 200 mil­lions et 1 mil­liard d’euros de chiffre d’affaires, notam­ment pour les ques­tions de financement.

Coopération, concurrence et domination

La dif­fé­rence entre l’approche consen­suelle alle­mande et les échanges plus conflic­tuels fran­çais éclaire deux rela­tions très dif­fé­rentes à l’autorité. Les socio­logues dis­tinguent trois logiques de rap­port à autrui : la logique de concur­rence, cou­rante aux États-Unis, la logique de coopé­ra­tion, domi­nante en Alle­magne et la logique de domi­na­tion, qui pré­vaut en France.

Atti­rer les apprentis
L’entreprise, notam­ment l’entreprise indus­trielle, offre de fabu­leuses pers­pec­tives à un grand nombre de pro­fils : autant aux plus appli­qués ou manuels, qu’à ceux des grandes écoles. L’Allemagne a su déve­lop­per une sym­biose per­for­mante entre cur­sus de for­ma­tion tech­nique et oppor­tu­ni­tés au sein des entre­prises, qui se font le pro­lon­ge­ment du sys­tème édu­ca­tif (sys­tème de for­ma­tion pro­fes­sion­nelle en alter­nance, die Lehre).
En France, à titre d’exemple, sou­li­gnons les dif­fi­cul­tés que PSA éprouve à atti­rer ses appren­tis en poste à Rennes ou Sochaux sur son site de Pois­sy, pour des ques­tions de loge­ment (les appren­tis, ne béné­fi­ciant pas du sta­tut d’étudiant, n’ont pas accès aux rési­dences universitaires).

Cela est confir­mé par la notion de « dis­tance hié­rar­chique ». La dis­tance hié­rar­chique est beau­coup plus impor­tante en France (68 sur un indice de 100) qu’aux États-Unis (40) ou qu’en Alle­magne (35). Ain­si, la figure d’un lea­der cha­ris­ma­tique, froid et dis­tant, est mieux tolé­rée en France, où ces traits sont éga­le­ment plus for­te­ment asso­ciés à la compétence.

Cet héri­tage se trouve néan­moins de plus en plus en conflit avec le besoin d’empathie et d’échanges néces­saires dans les rela­tions pro­fes­sion­nelles d’aujourd’hui. Nous retrou­vons ici une contra­dic­tion toute fran­çaise : fas­ci­na­tion et désa­mour simul­ta­nés vis-à-vis de la figure d’autorité, qui nuisent à la qua­li­té des rela­tions au sein de l’entreprise.

Le rôle des employés

Aujourd’hui, l’entreprise joue un rôle clé dans la socié­té moderne. Tout d’abord, par l’environnement de tra­vail qu’elle offre à ses employés, tant en termes de cadre de tra­vail que de pers­pec­tives d’évolution. La pro­duc­ti­vi­té horaire reste très impor­tante en France, supé­rieure de plus de 7% à celle de l’Allemagne.

Néan­moins, ces der­nières années, on a pu consta­ter, en France, une baisse de la confiance des sala­riés à l’égard de leur entre­prise. Le tur­no­ver, plus impor­tant en France, repré­sente une charge de recru­te­ment et de for­ma­tion sup­plé­men­taire pour l’entreprise, ain­si qu’un risque de pertes de savoir-faire et de compétences.

La place des jeunes

L’entreprise détient une place cri­tique dans les pers­pec­tives qu’une socié­té offre à ses jeunes. Aujourd’hui, la France, en dépit de son excellent sys­tème édu­ca­tif, souffre d’un chô­mage exces­sif par­mi les jeunes. Les diplômes obte­nus par « l’élite » des étu­diants sont de moins en moins une garan­tie contre le chômage.

Il est frap­pant de consta­ter la mécon­nais­sance totale par les étu­diants, même les mieux diplô­més, des PME et des ETI : leur péri­mètre de recherche d’emploi reste tou­jours limi­té aux grands groupes et à quelques fameuses start-ups.

Franchir les frontières

Dans l’économie mon­dia­li­sée, l’entreprise consti­tue une excel­lente oppor­tu­ni­té de s’ouvrir sur l’étranger. Pour des rai­sons his­to­riques, nous consta­tons que les entre­prises fran­çaises ont plus de mal à fran­chir les fron­tières que les entre­prises allemandes.

Force est de consta­ter que les Fran­çais ne maî­trisent pas aus­si bien la langue anglaise (la France se situe au 23e rang du clas­se­ment TOEIC alors que l’Allemagne est à la 4e place des pays euro­péens) et cela, en dépit d’un nombre d’heures de cours de langues étran­gères par semaine plus important.

Recherche fondamentale ou appliquée

Les entre­prises tirent l’innovation vers le haut, de par leur capa­ci­té à la com­mer­cia­li­ser et à géné­rer un retour sur l’investissement R&D. L’Allemagne consacre une part plus impor­tante de son PIB à la R&D : 3,5 % à com­pa­rer à une moyenne OCDE de 2,4% et un chiffre de 2,2% pour la France (chiffres 2009, OCDE).

La com­pa­rai­son des plus gros dépo­sants de bre­vets des deux pays révèle la pré­sence dans le « top 30 » de groupes uni­ver­si­taires en France et d’ETI en Allemagne.

Cela éclaire des dif­fé­rences clés : la pré­do­mi­nance d’une recherche plus fon­da­men­tale en France, par rap­port à une recherche plus appli­quée en Alle­magne ; une inno­va­tion plus en rup­ture en France, par rap­port à l’innovation conti­nue déployée par les entre­prises alle­mandes ; le rôle plus pro­non­cé de l’entreprise dans l’innovation du pays en Allemagne.

Faire découvrir les ETI

En France, les étu­diants ignorent les PME et les ETI

Les entre­prises tiennent aujourd’hui une place essen­tielle dans nos socié­tés, tant par leur rôle éco­no­mique, par les pers­pec­tives qu’elles offrent aux jeunes, que par leur rôle dans le déve­lop­pe­ment per­son­nel de leurs employés et par leur impact sur les inter­ac­tions entre dif­fé­rents groupes sociaux. Après la crise, tant crise éco­no­mique que de valeurs, tra­ver­sée depuis 2009, il paraît fon­da­men­tal de poser un regard juste sur l’entreprise et ses dif­fé­rents acteurs.

Les ETI, et tout par­ti­cu­liè­re­ment les plus per­for­mantes d’entre elles, pro­posent des pistes qui méritent atten­tion : elles démontrent les bien­faits d’un capi­ta­lisme pro­duc­tif, qui crée de la valeur de façon tan­gible par de l’innovation, de la pro­duc­tion et de la coopé­ra­tion ; elles mettent en avant une caté­go­rie de patrons-action­naires res­pon­sables, inté­grés dans leur envi­ron­ne­ment social et éco­no­mique – dont le prin­ci­pal sou­ci quo­ti­dien est d’assurer la péren­ni­té des emplois de leurs sala­riés ; elles montrent com­ment les employés peuvent trou­ver dans l’entreprise un lieu de tra­vail pro­pice au déve­lop­pe­ment per­son­nel, un tra­vail source de moti­va­tion et d’engagement, avec un meilleur ali­gne­ment entre objec­tifs du groupe et objec­tifs personnels.

Aus­si paraît-il impor­tant de décou­vrir ces entre­prises, de les faire connaître tant des pou­voirs publics, que des jeunes diplô­més, trop foca­li­sés sur les grands groupes, puis de recon­naître leurs contri­bu­tions à la crois­sance et donc à l’emploi et à la balance commerciale.

Commentaire

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Four­cy Etiennerépondre
6 janvier 2014 à 13 h 46 min

France et Alle­magne, deux modèles différents 

Mer­ci pour cet article très inté­res­sant qui prêche un convain­cu. Je serais moins nuan­cé quant à l’af­fir­ma­tion « l’Al­le­magne et la France sont tour à tour le grand malade de l’Eu­rope » : depuis Bis­marck l’Al­le­magne a tou­jours été pre­mière indus­triel­le­ment et s’est notam­ment tou­jours rele­vée des catas­trophes post guerre. L’Al­le­magne vainc faci­le­ment la France en 1871 face à des Fran­çais trop arro­gants et sûrs d’eux. C’est la nais­sance à la Gale­rie des glaces de Ver­sailles de l’Al­le­magne uni­fiée. Bis­marck déve­loppe l’in­dus­trie, les grands groupes et rejoint le niveau de la Grande Bre­tagne réfé­rence en la matière.

Elle arrive en 1914 en tant que grande puis­sance indus­trielle et avec un défi­cit bud­gé­taire moindre que la France (Déjà niveau d’ex­por­ta­tion impor­tant). L’es­tam­pille « made in Ger­ma­ny » impo­sée par la Grande Bre­tagne pour dis­cri­mi­ner les impor­ta­tion alle­mande s’est retour­née contre les Anglais, car les pro­duits étaient in fine de meilleurs qua­li­té. La guerre 14–18 aurait pû être gagnée par l’Al­le­magne. Jus­qu’à la moi­tié du conflit cette der­nière tenait 2 fronts Est et Ouest. Après la révo­lu­tion russe, et la concen­tra­tion des moyens sur un seul front, il a quand même fal­lu le grou­pe­ment des alliés pour en venir à bout … de jus­tesse. L’of­fen­sive de la Somme en avril 1918 par l’Al­le­magne a réus­si sur une grande dis­tance la per­cée tant atten­due, jus­qu’à Compiègne.

Après guerre on connait le rebond indus­triel de l’Al­le­magne sous le régime nazi, mais déjà amor­cé sous la répu­blique de Wei­mar. En 45 c’est l’an­née 0. Puis la moi­tié de l’Al­le­magne (RFA) devient 3ème puis­sance mon­diale à la fin des années 60 der­rière le Japon et les Etats-Unis. Vient ensuite la capa­ci­té à réunir les 2 Alle­magnes. Donc non, l’Al­le­magne a tou­jours été très orga­ni­sée et puis­sante indus­triel­le­ment avec la volon­té effec­ti­ve­ment tou­jours affir­mée de jugu­ler l’in­fla­tion (Sou­ve­nir de l’hy­per­in­fla­tion de 1923/1924 ancré dans les gènes), les défi­cits (ges­tion prag­ma­tique en bon père de famille), et de favo­ri­ser les expor­ta­tions (Evident pour gagner de l’argent au niveau d’un Etat). Je ne pense pas que la France aurait eu une telle capa­ci­té avec sa poli­tique trop col­ber­tiste et centralisée.

Il est éga­le­ment du res­sort des grandes écoles de pro­mou­voir les PME et ETI auprès des élèves. D’in­cul­quer l’es­prit d’en­tre­pre­na­riat. Il n’y a pas que les grands groupes qui offrent des car­rières inté­res­santes, loin de là. Il faut favo­ri­ser ce lien avec cette taille d’en­tre­prise. Les PME et ETI ont du mal à recru­ter des ingé­nieurs comme si ils leur était inac­ces­sibles (En dehors des cir­cuits ?). Favo­ri­ser l’al­ter­nance. L’in­dus­trie est la pre­mière source de valeur et de savoir faire, sur les­quelles peuvent ensuite se gref­fer des fonc­tions ter­tiaires : ser­vices, conseils. C’est la base pour créer de l’emploi. Le fait que les grands groupes tardent dans le paie­ment des PME, et mettent ain­si leur tré­so­re­rie en péril, est une honte et est une illus­tra­tion d’un pays décou­su, non soli­daire, pour qui la pré­fé­rence natio­nale n’est pas une priorité.

L’Al­le­magne a davan­tage le sens du tra­vail en équipe que la France, qui a un sys­tème d’é­du­ca­tion bien trop éli­tiste, favo­ri­sant le cha­cun pour soi, et lais­sant sur le côté un trop grand nombre d’é­lèves auprès de qui on ne valo­rise pas assez les métiers manuels de l’in­dus­trie. Cet article va dans la prise de conscience des uns et des autres, et sur­tout des décideurs,

Merci.

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