Système de parking automatique Valeo.

Équipementiers et constructeurs : un partenariat en mutation

Dossier : L'automobileMagazine N°717 Septembre 2016
Par Akilles LOUDIÈRE (01)

Les équi­pe­men­tiers conti­nuent d’ac­cen­tuer leur rôle dans la concep­tion des véhi­cules. En mutua­li­sant entre construc­teurs l’expertise sur des com­po­sants pré­cis, ils ont créé des centres de com­pé­tences uniques et opé­rent sur un mar­ché mon­dial. Ils vont aug­men­ter leur part du finan­ce­ment du déve­lop­pe­ment de nou­veaux véhi­cules, ce qui pour­rait accé­lé­rer leur conso­li­da­tion en un nombre res­treint d’acteurs globaux. 

Les équi­pe­men­tiers jouent un rôle pré­pon­dé­rant dans l’industrie auto­mo­bile. Selon l’Association euro­péenne des équi­pe­men­tiers auto­mo­biles, ils apportent en moyenne 78 % de la valeur ajou­tée en pro­duc­tion et même 100 % pour cer­tains véhi­cules, comme la Peu­geot RCZ ou la BMW X3, qui sont entiè­re­ment conçus ou assem­blés par des équipementiers. 

REPÈRES

L’externalisation de la conception et de la production automobile constitue un facteur majeur de compétitivité de la chaîne d’approvisionnement logistique (supply chain). En mutualisant entre constructeurs l’expertise sur des composants précis, les équipementiers ont créé des centres de compétences uniques. En France, plusieurs équipementiers mondiaux se sont ainsi développés :
  • Michelin (pneumatiques et navigation, 8e équipementier mondial selon les chiffres de 2014),
  • Faurecia (sièges, contrôle des émissions et intérieurs, 9e),
  • Valeo (systèmes thermiques et de propulsion, aide à la conduite et visibilité, 16e),
  • Plastic Omnium (pièces de carrosserie et systèmes à carburant, 45e), etc.

UN ÉCART DE PERFORMANCE

“ L’investissement en
R & D est porté de façon croissante par les équipementiers ”

En décembre 2014, le cabi­net de conseil Roland Ber­ger a consta­té, pour la pre­mière fois, un écart de per­for­mance entre les construc­teurs et leurs équipementiers. 

Cet écart est consta­té a for­tio­ri en com­pa­rant les per­for­mances des prin­ci­paux équi­pe­men­tiers fran­çais (Miche­lin, Fau­re­cia, Valeo et Plas­tic Omnium) aux construc­teurs fran­çais (Renault, sans la par­tie Nis­san de l’Alliance, et le groupe PSA Les Constructeurs). 

UNE ÉVOLUTION DES RÔLES

Cet écart de per­for­mance n’est pas le résul­tat d’une baisse de l’intensité concur­ren­tielle mais plu­tôt la tra­duc­tion d’une évo­lu­tion du rôle des équi­pe­men­tiers et de la nature du par­te­na­riat avec les constructeurs. 


Sys­tème de par­king auto­ma­tique déve­lop­pé par Valeo.

En par­ti­cu­lier, l’achat des com­po­sants est désor­mais réa­li­sé au niveau de pla­te­formes mon­diales afin de béné­fi­cier plei­ne­ment des éco­no­mies d’échelle. Par exemple, Fau­re­cia four­nit une arma­ture de sièges unique à l’Alliance Renault- Nis­san par­tout dans le monde pour tous les véhi­cules des seg­ments C et D. 

Cette mon­dia­li­sa­tion des achats a accé­lé­ré la glo­ba­li­sa­tion des équi­pe­men­tiers et a ren­for­cé leur compétitivité. 

L’investissement en recherche et déve­lop­pe­ment est por­té de façon crois­sante par les équi­pe­men­tiers. Les dépenses de R & D des équi­pe­men­tiers ont aug­men­té de plus de 30 % pour la période 2011–2015, pas­sant de 2,1 à 2,8 mil­liards d’euros, tan­dis que celles des construc­teurs bais­saient de 6 %, de 4,2 à 3,9 mil­liards d’euros, d’après les publi­ca­tions finan­cières conso­li­dées des prin­ci­paux équi­pe­men­tiers et construc­teurs français. 

Les construc­teurs ont trans­fé­ré des acti­vi­tés entières de R & D, comme le déve­lop­pe­ment et la vali­da­tion aux équi­pe­men­tiers, ren­for­çant ain­si leur expertise. 

C’est par exemple Valeo qui a déve­lop­pé le sys­tème de start-stop pour la grande série ou encore le par­king automatique. 

RÉPONDRE AUX BESOINS DES CONSOMMATEURS

Les équi­pe­men­tiers fran­çais ont désor­mais une par­tie signi­fi­ca­tive de leur acti­vi­té dans les zones à plus forte crois­sance, la Chine et les pays de la zone ASEAN, ain­si qu’avec les construc­teurs locaux comme Chang’an, Dong­feng ou Great Wall. 

Le niveau de crois­sance de ces mar­chés les rend struc­tu­rel­le­ment plus ren­tables car la pré­oc­cu­pa­tion prin­ci­pale est, à ce stade, davan­tage de répondre aux nou­veaux besoins des consom­ma­teurs que d’optimiser les coûts à outrance. 

Sièges de l’Audi A8 fournis par Faurecia.
Sièges de l’Audi A8 four­nis par Fau­re­cia. SOURCE : HTTP://WWW.AUDI.DE/

UN PORTEFEUILLE DIVERSIFIÉ POUR LES ÉQUIPEMENTIERS

Les équipementiers français ont diversifié leurs portefeuilles de clients et ont ainsi réduit leur niveau de risque, plus spécifiquement leur sensibilité à une marque ou à un modèle particulier.
À titre illustratif, les constructeurs français ne représentent plus que 15 % du chiffre d’affaires de Valeo. Les constructeurs allemands représentent 40 % des ventes du groupe Faurecia.
L’intérieur d’une Audi sur trois est équipé par Faurecia.

QUATRE TENDANCES POUR L’AVENIR

Dans les années à venir, quatre ten­dances vont pro­fon­dé­ment trans­for­mer le secteur. 

La par­ti­ci­pa­tion des équi­pe­men­tiers au finan­ce­ment du déve­lop­pe­ment de nou­veaux véhi­cules va conti­nuer à croître : ce sché­ma de par­tage des risques pour­rait conduire, à terme, à un rééqui­li­brage majeur de la rela­tion entre construc­teurs et équipementiers. 

“ Optimiser la performance et la capacité des équipementiers à gérer la complexité ”

En effet, ces nou­velles exi­gences de finan­ce­ment pour­raient accé­lé­rer la conso­li­da­tion des équi­pe­men­tiers en un nombre res­treint d’acteurs globaux. 

Équi­pe­men­tiers et construc­teurs vont de plus en plus recou­rir à la coïn­no­va­tion, qui per­met aux construc­teurs de réduire les risques rela­tifs à l’investissement dans l’innovation tout en béné­fi­ciant, a mini­ma sur une base tem­po­raire, d’avantages concurrentiels. 

L’utilisation d’outils numé­riques se déve­loppe en pro­duc­tion, en déve­lop­pe­ment et dans la sup­ply chain, ce qui va per­mettre d’optimiser la per­for­mance et d’augmenter la capa­ci­té des équi­pe­men­tiers à gérer la complexité. 

Le numé­rique va en outre avoir un effet majeur sur la défi­ni­tion des com­po­sants auto­mo­biles et sur la répar­ti­tion de la chaîne de valeur. 

Enfin, l’essor des construc­teurs chi­nois devrait se tra­duire à la fois par l’émergence d’équipementiers chi­nois, exer­çant une nou­velle pres­sion concur­ren­tielle, et par la trans­for­ma­tion des méthodes et outils de tra­vail des équi­pe­men­tiers pour s’adapter à ces nou­veaux constructeurs.

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