Courrier des lecteurs

Dossier : ExpressionsMagazine N°632 Février 2008

Vive le vent

Vive le vent

L’ar­ticle paru dans La Jaune et la Rouge de novembre sous le titre » Pro­duire de l’élec­tri­ci­té par le vent, ce n’est pas rai­son­nable » me paraît réduc­teur et inuti­le­ment tapa­geur. Com­ment ne pas s’in­ter­ro­ger sur les rai­sons qui poussent nombre de pays déve­lop­pés à pro­mou­voir l’éo­lien comme géné­ra­teur d’élec­tri­ci­té ? Com­ment ne pas s’in­ter­ro­ger sur les rai­sons qui poussent de grands groupes indus­triels à acqué­rir, pour les déve­lop­per, tout ou par­tie de PME inno­vantes spé­cia­li­sées dans la pro­mo­tion et l’ex­ploi­ta­tion de fermes éoliennes ? Il est pro­bable que le fait de connaître pour vingt ans ce que coû­te­ra l’éner­gie éolienne pro­duite, sans aucune dépen­dance au coût d’ap­pro­vi­sion­ne­ment de l’u­ra­nium, consti­tue en soi un solide avan­tage. Loin de moi l’ou­bli du carac­tère aléa­toire d’Éole, qui jus­ti­fia naguère l’a­ban­don de la marine à voiles au pro­fit de la vapeur. Mais, en res­ter là serait sous-esti­mer le poten­tiel éolien fran­çais. Et le fait que les gise­ments éoliens fran­çais sont décor­ré­lés. Selon les don­nées four­nies par Météo France, la puis­sance four­nie par le parc éolien actuel ne des­cend qu’un jour sur trente en des­sous de 10 % de la capa­ci­té ins­tal­lée. On ne connaît pas, en vingt ans, d’ab­sence de vent dans l’Hexa­gone. À 50 mètres au-des­sus de l’eau, on trouve, plus de deux mille heures par an, des vents de plus de 8 mètres par seconde, en Manche et mer du Nord comme dans le golfe du Lion. Pour pro­duire de l’élec­tri­ci­té, un bon vent comme d’ailleurs un beau soleil sont com­plé­men­taires d’autres sources d’élec­tri­ci­té comme l’u­ra­nium ou le pétrole.

Alain GRILL (51), de l’Académie de Marine

Économie forcée

Le récent dos­sier » Europe et éner­gie » me rap­pelle une expé­rience d’é­co­no­mie d’éner­gie vécue, il y a presque cin­quante ans. J’é­tais à l’é­poque ingé­nieur à l’ar­se­nal de Bizerte, gros consom­ma­teur d’oxy­gène et d’a­cé­ty­lène. Chaque jour cinq » camions » de bou­teilles venaient nous appro­vi­sion­ner. De sérieux dif­fé­rends avec la Tuni­sie ame­nèrent un blo­cus des livrai­sons pen­dant près de cinq mois. La solu­tion de secours, le ravi­taille­ment par avion, dut s’ac­com­pa­gner de sérieuses mesures d’é­co­no­mie de cette éner­gie deve­nue sou­dain rare et coû­teuse. Des consignes très strictes furent don­nées, en par­ti­cu­lier au niveau des pra­tiques cou­rantes d’u­ti­li­sa­tion des cha­lu­meaux. Très rapi­de­ment, on put se conten­ter de l’é­qui­valent d’un seul camion au lieu de cinq. Les pra­tiques d’é­co­no­mies per­du­rèrent un cer­tain temps après la fin du blo­cus, puis la consom­ma­tion revint pro­gres­si­ve­ment à son niveau ini­tial. Cet exemple montre que des marges signi­fi­ca­tives d’é­co­no­mie d’éner­gie peuvent donc être trou­vées si les cir­cons­tances l’im­posent et si l’en­ca­dre­ment est sen­si­bi­li­sé au pro­blème et fait obser­ver rigou­reu­se­ment ses consignes. Dès que la pres­sion dis­pa­raît, on retourne aux mau­vaises habitudes.

Henri ARNOUX (46)

Deux modèles pour réduire les émissions de CO2

Toute poli­tique éner­gé­tique et cli­ma­tique doit rete­nir comme cri­tère fon­da­men­tal la réduc­tion des gaz à effet de serre qu’elle est sus­cep­tible d’en­traî­ner. Il y a lieu de se concen­trer sur un seul objec­tif : la réduc­tion des émis­sions de CO2, les éco­no­mies d’éner­gie et le recours aux éner­gies renou­ve­lables n’é­tant encou­ra­gés ou déve­lop­pés que dans la mesure où ils concourent à l’ob­jec­tif prin­ci­pal. C’est dans le domaine du chauf­fage des loge­ments et bureaux que les actions sont les plus payantes et donc les plus urgentes : iso­ler, certes, mais aus­si décou­ra­ger l’u­sage du chauf­fage au fioul, au gaz et au char­bon, en allant jus­qu’à l’in­ter­dic­tion de l’u­sage de ce type de chauf­fage pour les construc­tions neuves ou les réno­va­tions lourdes. Dans le sec­teur des trans­ports, grâce à une élec­tri­ci­té pro­duite avec de faibles émis­sions de CO2, la France est remar­qua­ble­ment pla­cée pour réduire consi­dé­ra­ble­ment les émis­sions. Il s’a­git, tout d’a­bord, d’en­cou­ra­ger l’u­sage des trans­ports en com­mun élec­triques. Notre pays est un des rares où l’u­ti­li­sa­tion des véhi­cules hybrides rechar­geables, dans les­quels une frac­tion impor­tante de l’éner­gie est pro­duite par l’élec­tri­ci­té, ou de véhi­cules pure­ment élec­triques, condui­rait à une forte réduc­tion des émis­sions de CO2. En Europe, deux variantes de poli­tiques éner­gé­tiques sont déve­lop­pées. L’une, sui­vie depuis long­temps par le Dane­mark, à laquelle l’Al­le­magne et l’Es­pagne se sont ral­liées, repose sur le refus du nucléaire, le déve­lop­pe­ment de l’élec­tri­ci­té renou­ve­lable (plus par­ti­cu­liè­re­ment de l’éo­lien) et le main­tien d’un impor­tant recours à l’élec­tri­ci­té fos­sile. L’autre, sui­vie par la France, la Suisse et la Suède, repose sur un très faible recours à cette der­nière. Les rejets de CO2 dans les pre­miers pays sont de l’ordre de 10 tonnes par habi­tant. Ils sont de l’ordre de 6 tonnes pour les autres. Pour­quoi vou­loir impo­ser le pre­mier modèle au détri­ment du second ? Ne serait-il pas plus intel­li­gent d’or­ga­ni­ser une com­pé­ti­tion ver­tueuse entre eux, en fixant un délai à l’is­sue duquel on pour­rait éva­luer leur effi­ca­ci­té rela­tive. Au bout de ce délai, l’Eu­rope pour­rait choi­sir le modèle ayant don­né les résul­tats les meilleurs en ce qui concerne les émis­sions de CO2, puisque c’est bien de cela qu’il s’a­git. Notre pays a des atouts excep­tion­nels à faire valoir. Lais­sons l’ex­pé­ri­men­ta­tion trancher.

Hervé NIFENECKER (55)

Poster un commentaire